Mais qu'est-ce que je fais ici... ?

L'Arrancar poussa un long soupir, blasé, levant les yeux au ciel. La question restait en suspend, et la réponse n'avait pas l'air de vouloir tomber de là-haut. Il avait beau se torturer l'esprit, il ne trouvait pas d’explication tenant la route, il était là, point final. Ses pas l'y avaient conduit, sans qu'il s'en rende réellement compte, alors qu'il cherchait un endroit un peu plus original au sein du palais, afin de découvrir autre chose que de longs couloirs ennuyeux. Au bout de l'un de ces derniers, justement, il était tombé sur ce lieu, cet endroit unique à Las Noches et lui étant jusqu'ici inconnu. Vaste, étrangement animé par un attroupement de ses semblables, tous des Arrancars, il semblait avoir été emménagé dans un but bien précis, le combat et les paris que cela engendrait.

Les humains nommaient cela un club de combat, une arène. Seulement ici, il ne s'agissait pas seulement de mettre son poing à la figure de l'autre, ce n'était pas le genre de cette race. Plus que de simples combats, c'était de véritables combats à mort durant lesquels les combattants cherchaient à contenter le public, la foule venue en masse se divertir. Plus il y avait de sang, plus l'acte était barbare, sauvage, et plus les spectateurs adoraient cela, le manifestant par de vives acclamations. Le Soejima s'avança de quelques pas, se rapprochant ainsi de l'arène au centre du terrain. Creusée à même le sol, les gradins situés en hauteur offraient une vue indéniable sur la cage de fer à l'intérieur de laquelle les combattants s'étripaient, offrant un spectacle ne déplaisant à aucun.

Ici, la loi du plus fort régnait en maître plus que nulle part ailleurs au Hueco Mundo. Ici, il n'y avait plus de numéros tatoués décidant de qui dirige l'autre, seule la puissance brute était acceptée comme unique moyen d'expression. En temps normal, Gesshin aurait immédiatement fait demi-tour en constatant de quoi il s'agissait, en temps normal... Car il ne pouvait plus le nier désormais, depuis qu'il servait sous les ordres de la Quinta, il se sentait changer. S'abandonner à ses plus bas instincts, comme tout Arrancar le ferait. Et il détestait cela. Pour le moment certes, il ne s'agissait que de colère grandissante. Pas de violence ni de geste irréfléchi, pas d'acte bestial, uniquement de la haine, rongeant petit à petit son âme. Chose qu'il n'arrivait pas à expliquer. Pourquoi lui ?

Sa rage le consumait et il n'avait aucune foute idée de ce qui l'avait déclenchée. En lien avec la Cinquième Lame oui, mais quoi ? Déteignait-elle sur lui ? Il devait trouver réponses à ses interrogations et chercher par tous les moyens à apaiser sa colère. Aussi, alors qu'il se rapprochait toujours un peu plus près de la cage, et cela inconsciemment, l'idée lui traversa l'esprit en observant l'un des opposants réduire en bouillie le crâne de l'autre. Le sang du perdant envahissant le sol de l'arène sous les hurlements déments de la foule en transe. Et s'il se proposait ? S'il était le prochain à s'enfermer dans cette prison de fer ? En y réfléchissant bien, il n'imaginait pas meilleur moyen pour se calmer que de se faire casser la gueule à l'intérieur de cette chose, sous les regards de tous.

Je suis le prochain. Face à n'importe qui. J'écraserai quiconque osera rentrer dans cette cage avec moi.

Haussant suffisamment le ton pour être entendu de tous, il marcha jusqu'aux abords de l'arène tout en s'échauffant le haut du corps avec précaution. Plusieurs regards amusés se posèrent sur lui, il le savait, il n'avait clairement pas le profil du gars usant fréquemment de ses poings. Qu'importe, il était là pour une expérience, rien de plus. Le voilà dedans. La porte se referme derrière son, ou plutôt ses adversaires. Il semblerait que cette fois, le combat serait une sorte de bataille royale. Dix sanguinaires dans un espace suffisamment grand pour les contenir, mais tout juste assez étroit pour s'assurer que ce soit un joyeux bordel tout de même. Tous se toisent, font dans la provocation. Lui ne bronche pas, gardant son calme et un air impassible. Tout autour d'eux, des hurlements, encouragements, insultes.

Les paris ont l'ait d'être gros pour susciter un tel intérêt. Des Arrancars complètement cinglés s'accrochent au grillage et le secoue violemment, probablement pour nous intimider nous, les combattants. C'est franchement raté, un arraché est rarement impressionné. Même lui, qui n'est pas à sa place, se sent bien. Il y a comme un petit quelque chose en lui qui gronde, qui appel à la violence. C'est cette sensation étrange qu'il est venu confirmer en s'enfermant dans cet enfer... L'départ est finalement lancé, l'appel à la boucherie est lancé. Et pour lui, c'est un poing massif qui le cueille à la tempe. Lourd impact. Son corps bascule en arrière, sa visions se trouble, contact avec le sol, oreille qui siffle, foule qui réagit, tout cela commence bien...

L'image est floue, instable. On croirait être pris en pleine tempête, le décor dans son ensemble n'ayant de cesse de virer d'un côté à l'autre de l'écran. Il lui faut une quinzaine de secondes pour retrouver une visibilité convenable. Son ouïe, agressée par un sifflement perçant semble également s'apaiser, au même instant où le Soejima est pris d'une toux. Un seul coup lui avait été envoyé, un seul. Seulement la force employée dans la frappe avait de quoi rivaliser avec la charge d'un bélier. Pour autant, cela ne suffirait pas à terrasser le rouquin, qui après s'être mesuré à sa maîtresse, ne craignait pas de ramasser quelques beignes dans la tronche. Endure et rend les coups, lui disait-elle. Si tu n'endures pas la douleur, alors tu ne survivras pas à la prochaine bataille. A ton prochain combat.

Il entend une voix qui lui dit de se relever. Connard, ajoute cette personne. La vulgarité, un allié de poids pour cette race violente et irrespectueuse. D'ordinaire, elle n’atteint pas notre homme. Il ne relève pas. Habituellement. Aujourd'hui, comme les jours avant depuis maintenant une bonne semaine, son humeur est tout autre. Et se faire cracher au visage, bien que verbalement, il ne supporte pas. C'est plus fort que lui, cela le ronge de l'intérieur, la rage. Sa haine le pousse à se remettre sur ses jambes et faire face à l'adversaire, plantant des yeux pleins de haine dans les siens, dédaigneux. Le sourire amusé qui lui fend le visage déclenche le courroux de la fraccion qui voit son poing droit se serrer et claquer la mâchoire de l'insolent sans qu'il ne s'en rende compte. Le geste s'est fait automatiquement.

Les phalanges s'écrasent sur le faciès du combattant qui, trop sûr de lui, n'a pas vu le coup venir. Et certainement qu'il ne s'attendait pas non plus à ramasser autant par un type aussi gringalet. Imitant Gesshin il y a peu, c'est à son tour de s'étaler de toute sa masse à terre, la langue pendante, à moitié inconscient. Il ne restait plus qu'à l'achever. Sans arme, ni utiliser de cero, l'exercice apparaissait comme compliqué. Comment le mettre à mort sans donner dans le sanglant ? La réponse ne fut jamais donnée, un élément perturbateur tirant notre protagoniste de sa réflexion. L'un des assoiffés de sang enfermé dans la cage avec lui venait tout simplement de traverser l’arène sans toucher le sol, pour exploser l'une des grilles et terminer son envolée en dehors du terrain. Impressionnant.

Les regards se posèrent sur une seule et même tête, celle d'un gars à l'apparence pas plus vieux que lui. Plus petit, moins lourd, rien d'extravagant. Pourtant, le corps à l'extérieur des limites parlait pour lui-même, il n'avait rien d'un vulgaire faiblard tombé là au mauvais moment. Le serviteur de la Quinta croisa son regard juste avant que l'intégralité des gladiateurs des temps modernes ne se liguent contre lui. Visiblement, les raclures s'entendaient parfaitement bien quand il s'agissait d'abattre un ennemi pouvant tous les mettre au tapis. Du sept contre un, le constat n'était pas très joli. Notre héros soupira, regrettant d’emblée ce qu'il s'apprêtait à faire. Le groupe se jetait déjà sur leur proie, tentant de le rouer de toute sorte de coups. Gesshin lui, opta pour une attaque furtive, un coup dans le dos.

De ceux que l'on ne voit pas venir. Il envoya son coude percuté avec brutalité la colonne vertébrale de sa cible, avant de faire le tour de la mâchoire de cette dernière par le biais de ses mains qu'il joignit l'une à l'autre. Ainsi, il tenait son vis-à-vis dont le dos était dangereusement courbé vers l'arrière. Il n'avait plus alors qu'à forcer un coup sec dessus pour lui briser, dans un craquement sinistre, témoin de la réussite de son enchaînement. Le hurlement que poussa l'arrancar embrasa la foule qui en redemandait. Ce genre de coup sale, traître, déloyal, avait parfaitement sa place en ces lieux. Ils n'étaient plus que six désormais, à vouloir la tête du jeune à la tignasse brune. Enfin, après cette prise de position, deux des six comprirent qu'ils valaient mieux se charger du Soejima avant qu'il ne réitère son action...

On va te fumer !
Te briser !
Te saigner !
Te crever !
Et je vous emmerde, du genre royalement.

Ils avancent, chacun progressant sur l'un des flancs du Soejima bien embêté par la situation. Il se demande encore pourquoi il a tenu à entrer dans cette maudite cage. Si quelques minutes auparavant, il était rempli de rage, celle-ci s'était lâchement envolée à l'instant où il s'était ramassé le premier coup de poing. Et sa haine laissait place à son instinct de survie, qui ne le quittait jamais, et qui, il devait l'avouer, se révélait bien plus dangereux en vérité qu'une soif de violence. La colère ne menait à rien de bon, embrouillant l'esprit, amenant à prendre les mauvaises décisions, à ne pas savoir quand s'arrêter. Fausse votre jugement, votre perception de la puissance supposée de l'ennemi, s'il est bon ou non de tenter de l'éliminer ou s'il vaut mieux fuir. Là, tout ce qui importait aux yeux de Gesshin était de vivre.

Et inévitablement, son esprit et son corps agissaient de concert pour qu'il ne termine pas broyé sous le déluge de phalanges le menaçant. Bloquant d'une main la droite visant sa mâchoire, il repoussa le membre avant d'envoyer son pied à la circulaire dévier le coup de coude ciblant son sternum. Finalement, les heures de tortures appelaient entraînement par sa maîtresse n'étaient pas en vain. Le tout portait adorablement bien ses fruits une fois mis en pratique en situation réelle. S'il était déjà en mesure de cogner fort afin d'écraser son adversaire en une frappe, il manquait cruellement d'aisance et de rapidité dans ses déplacements. Parer les assauts lorsque ceux-ci se font légion, faire face à deux opposants à la fois et ne pas être submergé, c'est ce qui lui enseignait la Quinta.

Sauf qu'il n'était pas le meilleur des élèves. Le front de l'arraché sanguinaire percuta son nez tandis que son camarade lui plia le corps en deux d'un brutal coup de genou. L'impact le propulsa en arrière et son dos heurta l'acier de la cage dans un bruit sourd. Il aurait souhaité essuyer le sang coulant de ses lèvres et ses narines, il n'eut toutefois pas le temps de s'accorder ce luxe. Une pluie de coups tous plus violents les uns que les autres le martela. Pour un peu, on aurait pu croire qu'ils tentaient de l'incruster dans le grillage. S’esclaffant comme des psychopathes après un double meurtre, l'un d'eux voulu lui briser la nuque afin de l'achever. Son geste fut interrompu par l'autre qui, tout aussi égoïste que le premier, s'estimait en droit de porter le coup mortel.

Laissez-moi vous mettre d'accord les gars, personne ne me tuera.

Et la semelle de sa chaussure percuta le torse de l'arraché à sa gauche, l'envoyant à terre. Il en profita pour se jeter sur lui, ses doigts s'enfonçant sans une once d'hésitation dans ses globes oculaires, crevant le tout dans deux gerbes d'hémoglobine. Le rouquin, fier de lui, esquissa un sourire, aussitôt effacé par un coup de pied le repoussant au sol. Le faciès ensanglanté, déboussolé, tentant d'effacer le mal lancinant dont il était la victime, le serviteur de la Quinta se releva instantanément. Son désirs de sortir de cette cage en vie était immense. Son regard animé d'une détermination que nul ne parviendrait à briser. Plus dangereux que jamais, il bloqua le crocher du gauche le visant. Le bras tendu de son vis-à-vis s'offrant alors à lui fut frappé au niveau du coude, de bas en haut.

Le hurlement couplé au bruit de l'os éclatant l'alerta de la réussite du mouvement. Le même procédé fut reproduit quasiment à l'identique sur le genou, seule la façon de le briser différant. Le Soejima se retrouvait finalement, face à un adversaire à genou, gémissant et tremblant, auquel il brisa la nuque pour le neutraliser définitivement. Un soupir de soulagement le gagna alors qu'il balayait du regard la cage. Les corps gisaient aux quatre coins, seul deux hommes se tenant encore debout. Lui-même, le visage marqué par la violence de l'épreuve et l'autre arraché au teint basané. Pour avoir aperçu ce dont il était capable et pour être parvenu avec autant d'aisance d'un plus grand nombre d'assaillants, il ne faisait aucun doute qu'il surpassait Gesshin au corps à corps.

Doit-on vraiment le faire ? Faut-il vraiment leur donner ce qu'ils veulent en nous déchirant la tronche ? On pourrait tout aussi bien sortir d'ici maintenant et nous éviter bien des maux. Je vais être franc, je n'ai pas envie de me mesurer à tes poings et rentrer dans cette cage se révèle être une idée stupide. Libre à toi de choisir.

Il ne s'était pas présenté, ni même avancé, ni avait pris la peine de le saluer. Dans cette arène, tout cela était bien inutile.

- Vous êtes vraiment bizarre comme personnage…

Cash. Tout de go. Je le lui avais dit sans ciller, sans soupirer et sans bouger le moindre pouce. Seule ma prunelle visible le fixait intensément. Qui était cet homme ? Mystère et boule de gomme. Néanmoins, une chose était sûre pour moi : Ce rouquin était l’incarnation de la bizarrerie. Un coup blanc, un coup noir. Le genre de type à qui on peut faire difficilement confiance. En tout cas, tel était le sentiment qu’il m’inspirait, ce qui me faisait légèrement hésiter, quant à la décision à prendre. S’il avait été au début celui qui avait chauffé l’atmosphère en se vantant d’écraser tous ceux qui rentreraient dans la cage avec lui, il venait de là de me demander de calmer le jeu. Que penser d’un tel arrancar, moi je vous le demande ? Il pouvait certainement se frustrer face à ma vérité que je lui avais crachée au visage, mais cela ne serait certainement pas pour l’arranger, vu que j’étais extrêmement fort dans le domaine physique. Je pense bien que lui-même avait vu ce dont j’étais capable, ce pourquoi il me fit cette proposition pas forcement inintéressante. En effet, cela nous éviterait bien de soucis à tous les deux, d’une manière ou d’une autre.

- Néanmoins, je ne suis pas contre votre idée. A condition que ces gens veuillent nous laisser s’en aller…

En pointant du doigt l’extérieur de la cage, je voulus lui montrer le reste des spectateurs. Ces derniers avaient arrêté de brailler comme de pauvres excités. Maintenant, c’était tout le contraire. Ils bouillonnaient de rage. Tous leurs amis ou connaissances avaient été tabassés ou tués par nos soins. La vengeance semblait être à l’ordre du jour, pour tout le monde. J’eus un soupir. Ces gens n’apprendraient pas ? Malgré le fait qu’ils étaient une bonne cinquante, j’avais la nette impression que me battre contre le rouquin serait une épreuve plus difficile que tous me les farcir. Cependant, j’avais un sentiment de lassitude qui me taraudait. Sautiller çà et là tout en distribuant des pains à qui le voulaient, ce n’était pas forcement mon passe-temps favori. Aussi avais-je eu un gros bâillement significatif que je ne cachai même pas. Ce geste un brin provocateur titilla quelques un d’entre eux qui s’aventurèrent alors vers nous en se ruant comme des forcenés. Mais en deux temps trois mouvement seulement et pour ne rien changer de l’habitude, je les envoyer valsai avec force vers leurs acolytes. Ces derniers eurent finalement peur. J’impressionnais.

- Qui d'autre veut tenter sa chance ?

Ma petite phrase eut son effet. Les autres spectateurs se mirent alors à reculer. Les deux êtres qui demeuraient intacts ou presque dans la cage leur inspiraient la crainte. Il n’y avait pas de doute. Ils allaient tous finir par clamser s’ils persistaient à nous chercher des noises. L’instant qui suivit nous présenta une débandade générale. Comme de sales chiens de rue apeurés, ils fuyaient tous. Tous sans aucune exception. Même ceux qui avaient été éjectés hors du ring par mes soins, rampaient comme des larves pitoyables. C’était vraiment lamentable de voir une telle scène, tant et si bien que j’eus un soupir. Quelle idée de faire des combats clandestins dans l’enceinte même des quartiers de notre vénéré roi ? Il s’en fichait peut-être, mais je trouvais tout de même que de tels actes étaient une insulte à son nom. A moins qu’un espada n’ait supervisé cette pratique de loin ? Non… Pas possible. Je connaissais plus ou moins toutes les têtes qui composaient l’élite de notre armée et aucun d’entre eux n’étaient susceptibles de s’abaisser à de telles activités, même pour palier à l’ennui. Après tout, les arrachés étaient rares pour qu’on les tue inutilement…

- Je suis sincèrement désolé pour vos blessures et pour ma phrase dite tout à l’heure. Mon nom est Sithu, simple nùméros.

Une fois qu’ils furent tous partis, je me retournai vers mon vis-à-vis, avant de m’incliner devant lui. Finalement, mieux valait établir une relation plus ou moins bonne avec ce rouquin. Après tout, il était fort et il me donnerait certainement du fil à retordre si jamais il voulait se battre contre moi. Autant donc miser sur l’amitié ou tout du moins le respect pour n’avoir aucun problème avec cet homme dans le futur. Après tout, qui sait ce que l’avenir nous réservait. Bonne question que voilà. Quand j’y pense d’ailleurs, il devait certainement me trouver bizarre comme moi je l’avais trouvé suspect. Un coup blanc, un coup noir. Mais il y avait une bonne raison à ce volte-face de ma part, après tout : « Pourquoi avoir voulu vous battre contre tous ces gens ? Vous aussi aimez la violence ? » Ma dernière question devait paraitre encore plus insultante après la violence dont j’avais moi-même fait preuve, mais ce n’est pas comme si je faisais exprès ou quoique ce soit dans le genre. Et puis, je n’avais pas eu d’autres choix que de tous les massacrer, sans quoi c’était moi-même qui y passais sans bonnes raisons. La vie d’un arraché n’était franchement pas une sinécure…

- Je peux soigner vos blessures, si vous voulez…

Il avait parfaitement conscience quant cet instant, il n'était pas le personnage le plus facile à cerner dans ce paysage. Tout comme il savait pertinemment que vouloir mettre fin à une bagarre qu'il avait lui-même provoqué n'était pas très acceptable. Et pourtant, gardant cela à l'esprit, il ne semblait le moins du monde mal à l'aise. Pas un brin troublé ou gêné, ni même intimidé devant une foule entière le foudroyant du regard pour ses propos. Participer au massacre d'Arrancars sanguinaires et souhaiter s'en tirer quand les choses deviennent compliquées, forcément que la manœuvre déplaisait aux spectateurs. Et l'appel du sang dans tout cela ? Et le spectacle ? Ces gens avaient misé sur le vainqueur de cette bataille royale, il devait y avoir un seul et unique survivant !

Je crois qu'ils ne sont pas très... Oh. Problème résolu on dirait bien. Quelle force de persuasion tu détiens.

Aussi soudainement que le mouvement protestataire s'était enclenché, le type au teint basané s'était chargé de l’annihiler. Il n'avait certes fallu que d'une démonstration de force, cette dernière laissait néanmoins en admiration le jeune serviteur de la Quinta. C'était exactement ce qu'il avait toujours désiré faire, calmer les ardeurs des masses en un rien de temps. En ne faisant la démonstration que d'une infime partie de sa puissance. Le Soejima observa d'un œil amusé les misérables déguerpir des lieux, la panique marquant chacun de leur visage. Ainsi se déroulait les choses, en ce monde. Les forts méprisaient les faibles qui fuyaient à grandes enjambées face à la colère de ces premiers.

Tu n'as pas à l'être, je suis le seul fautif de ces plaies. Tu ne m'as ni frappé, ni poussé à m'enfermer dans cette cage avec ces brutes. Et cela va te paraître fou, je suis néanmoins quelque peu heureux d'avoir été blessé à ce point. La souffrance aide à évacuer la colère, chez moi.

Formuler ainsi, l'explication pouvait paraître douteuse, laisser planer des soupçons de masochiste en plus d'être classé de dégénéré. Un coup d’œil à son visage sévèrement marqué par l'épreuve dans la cage appuierait ce jugement. Gesshin ne fit rien pour autant pour tenter d'expliquer où il voulait en venir. Il laissa l'Arrancar se présenter, apprenant ainsi nom et rang au sein de cette armée sanguinaire. Assoiffés de sang dont il semblait être une des rares exceptions. Trop peu nombreux étaient ceux ne pensant que par la force et la violence. Il était appréciable de faire la connaissance de ce Sithu.

Mon nom est Soejima Gesshin, fraccion de la Quinta Espada. Pour ne rien te cacher, je n'avais pas réellement envisagé que le défi serait si difficile à relever. Je m'étais imaginé seul face à un unique adversaire, pas lâché au beau milieu d'une meute. Fort heureusement, tu étais là. Je crois pouvoir affirmer sans me tromper que tu as grandement contribué à ma survie. Je t'en remercie. A ce propos, que faisais-tu là, un besoin de te changer les idées ?

Il s'inclina légèrement vers l'avant, avant de se redresser, pour mieux expulser un soupir. Il avait volontairement évité la seconde question de son interlocuteur. Aimait-il la violence ? Non. Pas tellement. Et pourtant. Le fait est qu'il ne parvenait pas à s'en extraire, baignant dedans d'aussi loin que ses souvenirs remontaient. En gardant à l'esprit qu'il pouvait en user lors de ses combats, son non n'était pas catégorique, simplement voulait-il s'en persuader. Il accueillit la proposition de Sithu avec soulagement, son corps avait besoin d'être débarrassé de ce mal lancinant et il en était bien incapable de le faire seul. Du moins, pas avant des jours, sa régénération étant faiblarde.

Si cela n'est pas trop te demander, cela serait avec grand plaisir...

- Non… Pas vraiment pour me changer les idées. J’avais espoir de pouvoir nouer quelques liens avec « mes pairs ». Peine perdue apparemment. L’arrancarisation n’arrange rien à l’état de certains…

C’était clair et net. Ils étaient tous des débiles profonds qui ne pensaient qu’à une chose : Destruction, destruction et destruction. Encore et toujours la même chose. Autant dire donc que je tombais des nues, une fois de plus. J’aurai vraiment souhaité connaitre des gens on ne peut plus calmes, civilisés, maitre d’eux même et de leurs instincts primaires. Ne disait-on pas que celui qui domine ses pulsions est puissant ? Dans mon cas par exemple, c’était un bel adage qui en disait long. J’étais maitre de moi-même et j’étais plus ou moins puissant au corps à corps. Prouesse qui avait même bluffé le dénommé Soejima. Un individu qui n’arrêtait pas de m’intriguer, je devais l’avouer. S’il y a une demi-heure, il me paraissait comme étant un vantard qui pétait plus haut que son cul, là c’était tout de même différent. J’avais presque affaire à un arrancar honnête qui reconnaissait ses torts et qui s’avérait être un homme plus ou moins calme. De quoi me ravir, je vous assure, même si prudence était toujours de mise avec moi. Au sein de Las Noches, pour ne pas dire au sein du Hueco Mundo, on n’était jamais à l’abri d’un acte de traîtrise…

- Bien. Je vais vous transporter moi-même jusqu’à mes quartiers.

Ni une ni deux que sans attendre son avis, je réussis à le hisser sans mal sur mon dos. Ma force me permettait de soulever bien plus, malgré mon corps frêle qui ne laissait jamais soupçonner mes potentialités martiales. Autant dire que j’étais une énigme pour beaucoup de personnes. Une fois que l’olibrius fut correctement installé sur mon dos, je me mis à multiplier les sonidos à travers les immenses couloirs du château. Le pauvre allait certainement avoir du mal à tenir cette cadence infernale, à moins qu’il ne soit lui-même très rapide, ce dont je doutais un peu. De ce fait, je me mis à craindre un vomi de sa part. Manquerait plus qu’il me salisse, après que j’ai voulu lui venir en aide. Secouant soudainement la tête dans tous les sens, j’essayai d’extirper ces mauvaises pensées de mon esprit, avant de grimper des marches d’escaliers à une vitesse fulgurante. Nous avions enfin quitté les sous-sols du château, pour nous rendre à la zone est. Là même où se trouvait mon modeste appartement, loin des regards et loin des autres habitations. Un petit coin isolé et paisible, somme toute. Ma folle course dura plus ou moins cinq petites minutes, jusqu’à ce que j’arrive enfin devant une porte qui donnait accès à mon tout petit coin de paradis dans ce monde de brutes…

- Voilà. Nous y sommes.

Là encore, j’ouvris la porte de mon antre et allumai la lumière, avant d’aller le lâcher sur un divan. Il pouvait se rendre compte que mon petit coin à moi ne manquait pas d’espace –étant donné l’immensité du palais dans lequel on pouvait facilement se perdre- mais la décoration était plutôt sobre. Mis à part quelques divans et poufs çà et là, plus une table au beau milieu de la pièce sur laquelle il y avait quelques fruits, l’endroit n’avait rien de superflu. Au contraire, il était un peu terne, mais il me ressemblait bien, je pense. Je laissai Soejima dans le salon, pour m’engouffrer dans une autre pièce adjacente. Il se passa une petite minute, avant que je ne revienne avec un matériel médical, digne d’un humain. En vérité, les arrancars n’avaient pas besoin de ces choses puisqu’on comptait dans nos pouvoirs la régénération ; mais bien de hollows ne la maitrisaient pas correctement dont moi, ce qui expliquait pourquoi j’avais un tel nécessaire. Je me mis à genoux devant lui avant de sortir quelques boites et des bandages. « Veuillez retirer votre haut et me montrer vos blessures, ainsi que les zones où vous sentez des douleurs » Mis à part les quelques petites plaies visibles, il fallait bien qu’il m’aide à savoir, pour que je puisse lui prodiguer des soins efficaces.