Keita se promenait dans les rues de Tokyo afin de trouver un bon emplacement pour jouer de la basse. Il savait que cela n'était pas autorisé, mais il n'avait pas d'autres moyens pour gagner de l'argent et pouvoir manger. Keita aurait très bien pu avoir un autre moyen pour s'enrichir, mais ce moyen, il l'avait quitté pour sa famille. Malheureusement, actuellement, il n'avait plus de famille et aucune envie d'en trouver une autre. Sa vie était comme une montagne russe, tout dépendait de combien d'argent il gagnait dans la journée et lorsque cela n'allait pas très bien, il devait faire des économies. De plus, il avait découvert qu'il avait un don et ne voulant pas le gâcher, Keita s'entraînait en cachette.

Tout en réfléchissant à ce qu'il devrait faire dans la soirée, il regardait autour de lui pour trouver un endroit dans le centre-ville de Tokyo. Ne trouvant rien pour le moment, il se déplaçait tranquillement, sans courir afin de se rendre autre part. Des gens passaient et venaient, discutant de tout et de rien. Keita gardait son visage las habituel lorsqu'il trouvait un endroit pour jouer de la basse. Il s'agissait d'une grande place où des gens se rassemblaient. Cela était le lieu idéal pour jouer. De ce fait, il se mettait contre un petit muret non loin d'un escalier.

Avant de sortir sa basse, il regardait autour de lui et voyant qu'il n'y arrêtait pas d'y avoir de l'affluence, Keita sortait sa basse et jouait un peu pour trouver un rythme. Celui-ci trouvé, il sortait son plectre de basse et la faisait frotter contre les cordes de sa basse, mettant le rythme. Puis, une fois le rythme lancer, il chantait.

- Sekai no hajimari no hi
Inochi no ki no shita de
Kujira-tachi no koe no
Tooi zankyou Futari de kiita....

Des gens le regardaient de différentes manières. Certains se disaient surement pourquoi il jouait ici au lieu de travailler, d'autres devaient le plaindre et d'autres encore devait se dire pourquoi il jouait. Il en passait surement, mais il ne s'en préoccupait pas. Il faisait ce qu'il pouvait pour jouer en donnant un sentiment à sa musique. Toutefois, il ne savait pas quel sentiment il dégageait sur sa chanson. Était-ce un sentiment de tristesse ? De bonheur ? De malheur ? Keita ne pourrait le dire. Tout ce qu'il espérait au fond de lui était de trouver les réponses à ses questions.

2020. L'année écoulée avait été marquée par bien des changements. Son arrivée au Japon avec Thomas. Tout d'abord, cela n'avait été que dans le but d'effectuer une année sabbatique, prendre un peu de repos avant d'attaquer de longues études supérieures afin de devenir interprété, son talent pour les langues étant déjà bien affirmé. Tout naturellement elle avait choisi le Japon, puisqu'elle en parlait déjà très bien la langue. Ce qu'elle y avait trouvé au final fut une vie spirituelle particulièrement agitée. Des hybrides attaquants la ville, et une nécessité pour elle de rejoindre les défenses improvisées de la capitale nippone. La négociation avec son père n'avait pas été aisée, mais finalement il avait laissé la jeune Quincy prendre son envol, estimant qu'elle était désormais assez puissante que pour pouvoir prendre ce genre de décision seule.

Et là voilà à présent. Il y a une grosse semaine, Hans avait été battu, enfermé dans l'Institut Ellington et interrogé. L'affaire s'apprêtait à éclabousser, mais la jeune femme n'avait plus vraiment envie d'y penser pour l'heure. Elle était sortie seule. Enfin, c'est ce qui avait été convenu, mais elle n'ignorait pas que Thomas la suivait discrètement, gardant toujours un œil sur elle, restant à l'écart. Elle en avait conscience bien sûr, son sonar ne la trompant pas. Mais elle préférait faire comme si de rien n'était. Jouer le jeu et continuer d'avancer. D'aller rassasier sa curiosité. La petite aristocrate aimait toujours nouer de nouvelles connaissances, et elle venait de sentir une nouvelle énergie spirituelle qu'elle n'avait pas encore rencontré. Un Fullbringer. Tout d'abord guidée uniquement par cette énergie, s'y adjoint bientôt le son d'une basse, puis d'un chant. Le tout provenant de la même personne.

En s'arrêtant devant le musicien, elle sourit. Une personne que devrait rencontrer Melody sans doute. Liz n'allait pas l'interrompre, autant le laisser terminer son morceau. Et peut-être qu'après ils pourraient éventuellement échanger quelques mots ?

Keita chantait tout en jouant de la basse et bien qu'il puisse mieux faire s'il avait un coach ou quelqu'un lui apprenant les tonalités qu'il pourrait prendre, il s'en sortait à merveille. Le chant était l'un de ses talents, tout comme de jouer de la basse d'ailleurs. Il le faisait, car il appréciait la musique, mais aussi en raison du fait qu'il n'avait plus que cela et qu'il ne voulait pas abandonner cela. De plus, jouer l'apaisait et ne le faisait plus penser à ses dons bizarres qu'il avait et pourquoi il l'avait eu. Keita n'y pensait pas et chantait en harmonisant sa voix avec le son de sa basse.

Les gens passaient de plus en plus pendant que certains restaient devant lui pour l'écouter. Keita n'ouvrait les yeux que quelques fois et remarquait que des personnes restaient plus longtemps que d'autres. Il n'entendait pas un seul instant les bruits d'exaspération de ceux qui partait. Keita se concentrait sur sa musique et elle seule. Il ne voulait pas perdre son rythme. Il ne se posait plus aucune question dans sa tête, le vide était fait et la seule chose qu'il arrivait à entendre était le son de sa basse. Cette musique était très importante pour lui. S'était la première qu'il avait faite et qu'il avait jouée pour ses sœurs décédées. Lui-même ne s'en rendait pas compte, mais le sentiment qu'il dégageait était assez complexe. Il transmettait un sentiment de tristesse, mélangé à un sentiment nostalgique avec un soupçon de peur.

Lorsqu'il arrivait à la fin de sa prestation, il levait le regard vers le ciel en se demandant si ce qu'il faisait plaisait à sa famille et s'il suivait la bonne voie. Keita n'en savait rien, mais s'était la seule qui lui restait. Quoi qu'il en soit, il avait fini sa prestation et se levait pour saluer les personnes qui étaient restées pour l'écouter. Des personnes lui donnaient quelques pièces et il remerciait ceux-ci pour leur générosité. Après quoi, il regardait ceux qui restaient et ne recommençant pas à jouer. Il grattait juste un peu de sa basse pour régler les cordes de celle-ci. Il remarquait alors qu'une demoiselle restait. Keita la regardait et se demandait qui elle était.

- Souhaitez-vous quelque chose mademoiselle ?

Keita la regardait sans la dévisager, mais gardait ses yeux sans expressions ou presque. On pouvait voir dans ses yeux un brin de solitude.

- Oui. Je souhaitais savoir comment on peut en arriver à jouer dehors par un froid pareil ! Ce ne doit pas être facile tous les jours, mais je suppose que la passion aide à surmonter les difficultés.

Elle avait été repérée. Liz était restée plus longuement que les autres auditeurs, car elle savait que devant elle il n'y avait pas qu'un musicien chantonnant au son de sa basse, mais un Fullbringer possédant une énergie spirituelle assez notable pour qu'elle s'interroge sur ses capacités. Une question lui trottait à l'esprit mais qu'elle ne se permettait pas de poser encore, attendant de voir comment la discussion allait se poursuivre. Est-ce que sa basse était son fullbring ? Si c'était le cas, est-ce qu'il l'utilisait de la même manière que Melody ? Ce serait intéressant de voir les similitudes pour une jeune femme aussi curieuse que l'était Elizabeth. Cela lui faisait sans doute du bien de penser à ce genre de futilités plutôt que de rester enfermée chez elle, craignant de se mettre dans des situations pouvant la placer dans une situation inconfortable. Après tout, depuis la dernière attaque des chimères et de Hans, la population se rendait compte que quelque chose d'anormal se produisait à Tokyo. La moindre manifestation de pouvoir se devrait donc d'être au plus discrète.

Tout ce qu'elle se permettait pour l'instant était alors de faire légèrement pulser son Reiatsu. Elle ne le laissait pas s'exprimer trop fort, et se contentait de le museler jusqu'au murmure avant de le laisser s'élever à nouveau avec un peu plus de force, espérant provoquer par là une réaction si jamais le musicien avait quelques dons pour la détection. Sinon, eh bien ce ne serait pas un problème, elle parviendrait sans doute à placer dans la discussion une allusion ou l'autre, jusqu'à apprendre ce qu'il savait de ses dons et du monde spirituel. Un peu comme elle avait déjà pu le faire avec Klaus, même si elle tenterait cette fois-ci de se faire tout de même plus discrète. L'aristocrate venant d'une très riche famille laissa alors tomber dans l'étui à guitare du jeune homme un billet de deux milles yens, ce qui ne représentait pas grand-chose pour elle, mais beaucoup pour quelqu'un qui en avait besoin, elle en avait bien conscience.

- Est-ce votre travail ? Oh, je ne veux pas dire juste de jouer dans la rue, mais la musique, tout simplement. De nombreux artistes viennent sans doute à Tokyo dans l'espoir d'y « réussir ». Et vous ?

Ayant fini de gratter de sa basse afin de régler les cordes pour d'autres morceaux qu'il jouera plus tard. Pour le moment, il ne comptait pas jouer davantage. Le froid ne le dérangeait pas, mais il ne voulait pas qu'il ait trop d'humidité sur sa basse, sinon il devra en acheter une neuve et cela était trop cher pour lui. Or, ce n'était pas ce qu'il voulait. Il avait posé une question à la demoiselle en face de lui lorsqu'il faisait l'ajustement du cordage. La jeune femme lui répondait gentiment, malgré le fait que ses yeux restaient sans expression ou presque. Keita était toujours autant perdu. Et le fait d'essayer de joindre les deux bouts grâce à son talent à la basse n'était pas chose aisée.

Keita ne réfléchissait pas trop. Il connaissait déjà la réponse à la question qu'on venait de lui poser. Toutefois, il ne répondait pas de suite. En premier lieu, Kei choisissait de ranger sa basse dans son étui. En le faisant délicatement pour ne pas l'abimer, il remarquait le billet de deux milles yens. Cela l'étonnait. Qui avait bien pu mettre un aussi gros billet dans son étui. Bien entendu, cela allait l'aider, mais dans un sens Keita trouvait cette somme trop importante à ses yeux. À choisir entre garder ce billet ou le rendre, Keita préférait le rendre à celui ou celle lui ayant offert. Hélas, retrouver la personne en question n'allait pas être simple, et même presque impossible.

- Oui. Ma passion pour la musique répand de la chaleur dans mon corps. Cela me permet de jouer pendant un petit moment. Cependant, la durée est, en moyenne de dix minutes.

Keita fermait alors son étui en laissant l'argent dedans à l'exception du billet de deux mille yens. Son objectif était clair et il devait remettre cet argent à la personne en question. Ne voulant pas exposé le billet aux gens se trouvant aux alentours, Kei rangeait le billet dans une poche de son pantalon usé. La demoiselle lui posait une autre question et n'étant pas quelqu'un de malpoli ou autre, il allait y répondre de ce pas.

- La musique est mon travail et ma passion. Malheureusement, bien que j'aie pu être en hausse. Des "circonstances" ont fait que je me retrouve à jouer dans la rue. Keita remarquait alors qu'il ne s'était toujours pas présenté. Ne souhaitant pas être discourtois et manquer de respect à quiconque, il s'inclinait. Une fois cela fait, il la saluait. Je me nomme Shinodaï Keita. Enchanté de vous connaître mademoiselle. Sauriez-vous par hasard qui a mis un billet d'une somme plus ou moins conséquente dans mon étui. Je voudrais remercie cette personne.