Get out of my way, Beetch! [♥ce]

Sujet: Get out of my way, Beetch! [♥ce] Jeu 28 Mar - 3:16

Ce qui était bien à Las Noches, c’était les ouï-dire. Les racontars entre larbins qui se transmettaient à une vitesse fascinante que l’on pourrait soupçonner le vent de tourner en tempête. Il ne suffisait pour celle en soif de rumeurs à tendre l’oreille pour entendre souffler faiblement de maigres dialogues qui savaient bien souvent frétiller la curiosité de la Quinta. L’utilité de ces microbes ne semblait se résumer qu’à fournir les informations d’importance quelconque, bien qu’elle doive admettre que leur passivité les rendait souvent agréables en victime. Quoi qu’il en soit, les nouvelles se répandaient comme de la poudre dans le palais, et c’est sans grand délai qu’elle apprit l’arrivée d’un nouveau membre au sein de l’Espada. Se poster auprès des pies le temps d’accumuler suffisamment de données avant de faire irruption chez son allié était devenu coutume; ainsi ce qu’elle entendit ne sut guère la réjouir comme les autres fois. Alors qu’épier les discussions s’était toujours avéré amusant, ce qui se faufila dans sa curieuse oreille eut l’effet d’un coup de marteau sur son tympan. Loin d’être réjouie par les rumeurs qui circulaient à une vitesse beaucoup trop rapide avant même de devenir des vérités, elle décida de confirmer ces vagues hypothèses de son propre chef dans l’espoir peut-être de réfuter ces dires. Abandonnant les insectes du Rey à leur fantaisie, elle se promit qu’ils paieraient cher si les rumeurs s’avéraient erronées.

Une furie libérée dans le dédale du nid, une indomptable tornade qui mouvait tout sur son passage, pis encore, une fusée décollée dans le mauvais angle, c’était ce à quoi pouvait être comparée Lili. Les poings brutalement refermés, les épaules haussées au point de frôler ses oreilles qui frétillaient tant le sang lui battait les tempes, elle était aveuglée par une indignation sourde. Elle n’avait que faire des regards crédules que lui lançaient les Arrancars et elle se balançait complètement du chahut qu’elle causait; ce qui importait pour l’instant, c’était de se rendre aux quartiers du nouveau-né dans l’espoir seulement de voir par ses propres yeux ce qu’elle redoutait être la réalité. Ses quelques semaines au sein de l’Élite lui ayant permis d’accumuler moult expériences en orientation, elle sut arriver à destination en moins de temps qu’il en fallut pour le dire. Sans ménagement, elle ouvrit la porte à l’aile réservée au deuxième au risque de la fracasser en mille fragments, mais l’écho que fit celle-ci lorsqu’elle entra en collision avec le mur adjacent fut le seul à l'accueillir. Il était évident qu’il ne se trouvait pas en ces lieux. Sans perdre un instant, la bête retourna à la chasse, passant cette fois-ci par des avenues différentes. Le corridor dans lequel elle se trouvait étant plus étroit que les autres, elle ne s’empêcha pas de bousculer avec une brutalité masculine celui qui venait en sens inverse, criant sur un ton qui ne souhaitait aucune réplique :

— Hors de mon chemin, vermine!

Et de poursuivre sa route sans lui jeter un seul regard. Quelques pas à peine plus tard, elle s’arrêta soudainement, piétina sur place le temps d’une brève réflexion, puis revint en arrière pour s’adresser au malheureux qui avait croisé sa route. À peine fut-il remit de son embrassade avec le mur qu’elle plaqua d’une main seulement la tête de l’Arrancar, dont la moitié du visage était écrasée, ce qui lui offrait une ravissante grimace. C’est en conservant la pression contre son crâne qu’elle l’immobilisa dans une position plus ou moins confortable, oreille tournée en sa direction pour qu’il puisse bien entendre sa question. Le ton était cinglant au point qu’on devinait sans aucune difficulté les humeurs de la Quinta :

— T’as vu le Segunda trainer quelque part? Hm? Tu l’as vu? HM?

Un œil ouvert bien grand s’approcha de celui de sa victime qu’elle interrogeait sans finesse, voulant ainsi insister sur l’importance de son interrogatoire. Quelques secondes s’écoulèrent, mais elle n’attendit pas la réponse pour le relâcher de son emprise, faisant quelques pas pour s’éloigner tout en lui faisant dos. Bras croisés contre sa poitrine, mine vexée, voilà l’image parfaite d’une gamine en pleine bouderie. La tête haute et les yeux fermés, elle tentait de maitriser ses excès de colère en prenant quelques courtes respirations. Le calme redevenu et le silence installé, il ne s’écoula que cinq secondes avant qu’elle ne se retourne dans un regain d’énergie inattendu. Toujours sur une voix qui traduisait bien son indignation, ce fut toute qu’une confession qui suivit, sans jamais s’inquiéter du fait que la pauvre victime n’avait que faire de ses lamentations :

— Tu sais quoi? Tu sais ce que j’ai entendu dire? J’ai entendu dire que le Segunda était un enfant! Qu’il avait l’air super gentil… Limite, certains semblaient convaincus qu’il était rigolo. Ri-go-lo… Non mais merde, tu l’as vu, toi, le Segunda? C’est quoi, un caniche? Arrrghhh!

La cause de tout son émoi venait d’être révélée au misérable Arrancar, qui avait peut-être déjà perdu le fil de toute cette histoire. Si seulement cette histoire avait un fil… Pour Lili, tout semblait clair dans sa tête. Ouïr l’arrivée d’un nouveau Segunda depuis la promotion de Dark s’était révélée être une bonne nouvelle, au premier abord. Toutefois, entendre les quelques commérages quant à une possible humeur puérile, une sympathie larmoyante et un sens de l’humour clownesque rendait le personnage farfelu et peu crédible. En quoi un tel individu pouvait siéger sur l’un des trônes les plus importants de l’Élite du Rey? S’il ne pouvait prendre au sérieux la mission qui leur avait été confiée – et dont Lili ne se rappelait plus les lignes, comment était-ce possible qu’il se soit saisi d’une place du podium? Qu’était devenue la destination de l’Espada désormais, si on commençait à adhérer dans les rangs des fous pour distraire le roi? Tant de questions se bousculaient dans sa tête, elle qui voulait plus que tout défendre les intérêts de Grimmjow, en gage de dû pour l’attention qu’il portait sur sa personne. Il fallait qu’elle mette le grappin sur le Segunda, qu’elle puisse constater par elle-même l’étendue de sa stupidité, et qu’elle fasse quelque chose pour le virer de ce poste, pour le bien de l’Espada... Pour le bien du Roi!

ıl ıl Blonde Fury. lı lı

« Déguerpis à présent, va prendre possession de tes quartiers ! »

D’un pas rapide mais aléatoire, Ace s’orientait un brin au hasard dans l’enceinte du palais. Arborant cet air supérieur emprunté au Rey, il gesticulait maladroitement en imitant ce dernier. La vérité, c’est qu’il déambulait dans ces longs couloirs depuis un long moment maintenant et qu’il n’avait pas la moindre idée quant à sa destination. Certes, on lui avait préalablement fourni les informations nécessaires à son orientation, mais il n’en avait capté que quelques mots, son attention ayant progressivement été captée par la tignasse de Grimmjow dont le bleu ressemblait curieusement au sien. Aussi n’eut-il que vaguement compris ce qu’on lui expliquait quant à son rôle dans cette organisation ou même le poste qu’il allait à présent y occuper. Tout ce qu’il savait à présent, c’est qu’on lui avait gravé quelque chose au niveau du flanc gauche du cou et qu’on l’avait ensuite jeter à la porte avec ces ordres.

Ce fut une vague silhouette au loin qui tira finalement l’Arrancar de ses rêveries. Une forme de vie, enfin! Poussé par sa curiosité maladroite, il s’élança à sa rencontre, animé de sa gaieté habituelle. Le pas léger, gambadant presque, le jeune homme souriait bêtement en envoyant la main vers la belle inconnue. Cependant, dans l’instant, celle-ci ne sembla pas animée de la même joie de vivre, envoyant le Vasto Lorde dans le décor au moment même où il fut à sa portée. Son visage vint alors embrasser le mur immaculé, lui arrachant une plainte sourde. Un élément qui devait avoir échappé à la demoiselle, puisque cette dernière n’avait daigné s’arrêter. Tentant alors de s’extirper de cette inconfortable position, la moue boudeuse, Ace laissa échapper un simple mot. « Beetch ! » Bien que ce fût là un bref murmure, il sembla pourtant avoir atteint la blonde, puisque cette dernière revenait sur ses pas. Regrettant tout de suite ses propos innocents, le visage du jeune homme devint presque suppliant. « Désolé, désolé, c’est pas ce que je…Aiiilleuhh! »

Il n’eut pas le temps de formuler ses excuses qu’à nouveau son visage rencontrait le mur avec brutalité. Son assaillante vint alors emprisonner son crâne dans une bien curieuse posture, s’imposant à lui telle une dominatrice. Cependant, outre ce ton ferme et cette autorité, avec une telle proximité, Ace ne put qu’étouffer un gloussement à la vue de ce gros œil qui le fixait. Elle l’interrogea brièvement, suite à quoi, elle le relâcha afin de s’éloigner. Profitant de cette soudaine liberté, le jeune homme se retourna, s’adossa au mur, puis se laissa lentement choir jusqu’à prendre place par terre. Il replaça doucement ses lunettes, puis vint tirer la langue à celle qui lui faisait à présent dos. Un geste qu’il réprima presqu’immédiatement, son interlocutrice faisant volte-face afin de se lancer dans un long discours. Le Vasto Lorde ne lui accorda cependant qu’une brève attention, n’ayant capté qu’un terme auquel la blonde semblait attacher un intérêt particulier, Segunda. Un mot qui lui semblait étrangement familier, et ce, pour l’avoir jadis déjà entendu quelque part. Et par jadis, ici, il faut comprendre quelques minutes, puisque ce fut là le titre que le Rey accorda au jeune Arrancar tandis que les esprits de ce dernier vaquaient ailleurs.

« Blablabla, c’est tout ce que j’entends. Tu m’ennuies. »

Finit-il par dire au terme du monologue de la jeune femme. Il arborait à présent un air blasé, fixant ses ongles avec un intérêt feint.

« T’es qui toi premièrement? »

Relança-t-il, relevant subtilement les yeux vers son interlocutrice. Cependant, sa curiosité enfantine eut finalement raison de son indifférence feinte. Se redressant brusquement, le Vasto Lorde se rapprocha de sa congénère, se penchant vers cette dernière afin de brièvement humer le curieux parfum qui émanait de celle-ci. Un délicat effluve sucré n’appartenant pas à ce monde vint alors caresser ses narines, l’intriguant prestement. Reniflant la blonde aux allures puériles, le curieux personnage put dénicher la provenance de cette délicieuse fragrance. Appâté, ce dernier lui lécha la lèvre supérieure.

— Quoi? Mais c’est quoi ton problème sale microbe! De quel droit tu t’adresses à moi sur ce ton? Le Roi ne t’a pas montré à quel point le respect envers tes supérieurs est de mise lorsque tu leur parles? Attends que j’aille reporter tes dires à Grimmjow, il va-t’en faire baver mon p’tit. Tu peux pas savoir à quel point tu vas couiner comme un porc, et puis il fera de toi la nourriture préférée de ses Menos grande! Avec ta tronche de cake, ils vont se battre pour te bouffer tout rond… et je serai là, avec mon appareil photo…

Au grand dam de sa nouvelle victime, elle ne pouvait plus s’arrêter. Sa langue était en mouvement constant, sans cesse en train de libérer un flot de paroles abjectes à l’égard du paltoquet. Elle gesticulait à un point tel que l’air en était perturbé. Par chance qu’elle n’avait rien sur quoi se défouler, car en dépit de ses maigres bras, elle aurait pu sous l’impulsion de la colère balancer une voiture sur l’ignoble personnage. Il était risqué pour ce jeune Arrancar de se mettre à dos cette furie qui venait de le désigner comme son bouc émissaire, alors que déjà aux prémices de cette fortuite rencontre son indignation frôlait le plafond. Tout de cet être l’irritait. Le ton qu’il employait, les paroles qu’il débitait, les expressions de son visage, même le frétillement de sa narine droite qu’elle croyait percevoir malgré la distance. Et pourtant, n’importe quel tiers aurait perçu une légère ressemblance entre ces deux acteurs, soit l’air juvénile qu’ils partageaient ou leur comportement similairement puéril. Par chance qu’il n’y avait aucune autre présence aux alentours pour soulever la remarque, car elle n’aurait guère apprécié une telle insulte à son égard. À ses yeux, le personnage se rapprochait davantage de l’image du clown que de celui d’un docile serviteur, comme il se devait d’être.

— Qui je suis? fit-elle d’un air exagérément outré. Je suis ta Reine! Han Lili, Quinta Espada, fidèle cinquième bras du Roi! Je fais partie de l’Élite. Je SUIS l’Élite! Alors incline-toi face à ta supérieure, baise-lui les pieds, abaisse-toi à la même hauteur que tes pairs, les coquerelles, pour faire place à ta Reine, pour lui laisser prendre appui sur ton dos, afin que ses belles bottes ne soient pas souillées par la crasse que tu as répandue par ta présence!

Cet air hautain qui teintait chacune de ses paroles lancées à outrance, elle venait de l’emprunter au Sexta. Les bras croisés sur sa poitrine, elle parlait les yeux fermés, le menton relevé fièrement. L’entièreté de ses manières était empreinte de dédain, tandis que son arrogance à l’égard de l’insecte n’avait d’égal que sa colère. Tandis qu’elle expliquait à cet incapable les règles de tenue qui encadraient son piètre grade, elle sentit sa présence pénétrer sa bulle. Un cri de surprise traversa la barrière de ses lèvres lorsque son regard tomba sur la tignasse bleue de l’Arrancar, constatant soudainement à quel point son visage était presque fondu dans sa poitrine. Du moins, c’était ce qu’elle crut, mais avant même qu’elle puisse le déloger dans une brutalité qui lui était familière, la langue de l’infect larbin vint se coller à son nez et descendit rapidement jusqu’à sa bouche, tandis qu’un filet de bave avait été laissé en guise de souvenir à cette intrusion. Dégoûtée, choquée, surprise, il n’y avait point de mots pour qualifier la tornade d’émotions qui lui lui frôlaient l’esprit à ce moment précis. Au final, cet amalgame de pensées négatives eurent l’effet d’une bombe, l’encourageant sans aucune hésitation à plaque sa botte sur son visage dans un majestueux coup de pied, qui eut bien fait de l’envoyer valser à l’autre bout du corridor étroit.

— T’es M.A.L.A.D.E.?!

De sa manche, elle passa à plusieurs reprises sur sa bouche, puis sur son visage entier, se donnant presque des claques tant elle était répugnée par ce geste anormal. Le sang lui battait les tempes à un point tel que de la fumée aurait pu s’échapper de ses oreilles. Ses mains se refermèrent sur elles-mêmes avec tant d’agressivité que ses ongles lancinaient sa chair. Une veine à son front palpitait au même rythme que battait son cœur, signe qu’on l’avait mis hors de ses gonds. Elle avait bien du mal à constater l’audace du microbe, qui venait définitivement de souiller de sa putride écume le visage pur de la pauvre Espada. Irrécupérable, elle rejoignit à grandes enjambées sa victime au fond du corridor. Ses talons cognaient si fort contre le carrelage que le son provoqué aurait pu ébranler les fondations mêmes du palais. Tandis que la distance qui les séparait se faisait dévorer à une vitesse inquiétante, la main de Lili vint se déposer sur la garde de son arme, accrochée à la ceinture. Nul besoin d’avertir le Rey de l’inconvenance de sa conduite, elle était en droit de punir cet être qui ne semblait guère attaché à sa vie. Et alors qu’elle allait dégainer sa guillotine afin de lui porter le coup fatal, elle s’arrêta…

Au cou de sa victime, un étrange point noir familier à la marque qu’elle-même possédait à sa main venait d’attirer son attention. Plissant des yeux à l’extrême afin d’en percevoir les détails, elle comprit vite fait la signification du symbole gravé dans la chair de son ennemi. Puis elle comprit, elle vit de ses propres yeux, aussi clair que la clarté elle-même, les contours du chiffre deux qui donnaient l’illusion de la narguer. Soudainement stupéfaite, elle ravisa son geste qui aurait pu s’avérer létal, et s’exprima dans un murmure presque inaudible :

— C’est donc toi…

ıl ıl They call me Ace. lı lı

Le Vasto Lorde s’éprit d’un air contrarié. Il avait su capturer le goût sucré, mais à présent, la délicate saveur se mourrait lentement au fond de sa bouche. D’abord étonné par la succulence des fines lèvres rosées de la princesse, ce dernier avait pourtant su en apprécier la qualité. À vrai dire, il en avait raffolé, rien de moins. À ses yeux, la bouillante demoiselle était maintenant synonyme de sucrerie, voyant en elle une source perpétuelle de régal. Aussi voulut-il à nouveau se servir aux dépends de cette dernière, daignant finalement lui accorder un brin de son attention. Toutefois, il n’eut point le temps de s’exécuter. En émergeant de ses pensées, ce furent les dessous de la Quinta qui l’accueillirent, celle-ci, malgré sa tenue légère, armant un coup de pied dans un geste d’inconscience. Abruti face à un tel spectacle, l’Arrancar ne pensa même pas à s’esquiver, acceptant tout bêtement la botte qu’on lui plaqua sévèrement au visage. S’en suivit alors une longue série de culbutes qui amenèrent le malheureux au bout du couloir, le mur du fond arrêtant finalement sa progression dans une bien drôle de position.

« Oh la vache! »

Fit-il finalement. Difficile de savoir si c’était là une expression, ou son impression de l’Espada.

Pour la troisième fois consécutive, la douceur de la Quinta l’avait frappé, littéralement. Cette beauté blonde était d’une grâce incontestable et que dire de son tact ou même de ses manières! En bref, une véritable souveraine digne d’avoir ses royales postérieures bien au chaud dans le confort de ces sous-vêtements tapissés d’hippopotames rosés. Sa dentelle devait fort probablement être encore au lavage. Se reprenant de son infortune, le jeune Arrancar vint docilement se rasseoir, acculé au mur face à cette furie qui contemplait sa nuque d’un œil perplexe. Aussitôt, le souvenir de cette ferrade lui revint, du moins, le souvenir qu’on lui avait effectivement inscrit quelque chose à ce niveau. Quant à savoir quoi exactement, c’était là une toute autre histoire. Ceci dit, il n’en laissa rien paraître. Gonflant son thorax d’un faux air de fierté, la nouvelle recrue se pointa du pouce, bravant son interlocutrice de son regard vitré et de son sourire le plus franc.

« Fuck Yeah, c’est moi! On m’appelle Ace! »
Il garda la pose quelques instants. Il s’agissait là de sa première introduction à l’un de ses congénères et il tenait à ce que cette posture – qu’il avait si longuement pratiqué – soit irréprochable. Si bien, qu’un long moment s’écoula ainsi dans un mutisme parfait, cette mimique puérile et ce sourire figé lui accordant un air qu’on qualifierait familièrement de crétin. Son niveau de concentration n’excédant toutefois pas celui d’un bambin, le regard cramoisi de l’Arrancar finit par se lasser de cet affront l’opposant au magnifique bleu azur des prunelles de Lili. Il en vint plutôt à épier la svelte silhouette de son interlocutrice, une légère rougeur venant réchauffer ses joues au moment où il croisa à nouveau sa jupe. Ce n’est que quelques instants plus tard, alors qu’il se faisait violence pour ne pas sauter à nouveau sur ces lèvres alléchantes, que Ace prit soudainement conscience des propos précédents de la pipelette blonde.

« Minute, minute, minute! Quinta Espada!? »
S’accordant une légère pause, celui-ci marmonna brièvement en comptant sur ses doigts.
« Ça veut dire que t’es la cinquième plus forte ici?! Balèzzzeee! »
Un nouvel arrêt lui permit de jeter un œil aux alentours.
« En même temps, vu l’activité dans ce trou, c’est pas bien dur. »
Acheva-t-il sur un ton complètement innocent.

Estomaquée… Lili le restait devant cet énergumène, dont elle soupçonnait l’absence d’une forme quelconque d’intelligence. Pour les rares fois qu’elle demeurait de glace suite aux insultes d’un interlocuteur, on pouvait y déceler une raison particulière à ce mutisme, alors que la stupidité de l’Espada l’avait une fois de plus harcelée. Sa répartie semblait au point mort, ou du moins tentait-elle de comprendre une certaine logique chez cet être particulier. Les commérages entendus n’étaient qu’un aperçu léger du portrait de ce nouvel arrivé, ils semblaient même en atténuer les défauts, alors que la Quinta en avait espéré tout le contraire. À cet instant, la seule interrogation qui traversait son esprit au point d’en imprégner l’entièreté de sa boite crânienne, se résumait à « comment »? Bien que la question demeure tenace et qu’elle avait la vive envie de la partager à l’idiot concerné, elle n’en fit rien, persuadée qu’il ne comprendrait rien de ce qu’elle bafouillerait. Même si la patience ne faisait partie de sa bouillante personnalité, elle se promit de garder sa langue jusqu’à un entretien futur avec le Rey, quitte à ce qu’elle doive s’excuser de remettre en question sa sélection personnelle. Plus elle l’observait agir, moins elle était convaincue de ses aptitudes. Aux côtés de l’ancienne deuxième lame, il n’était qu’une mouche inoffensive. Savait-il au moins en quoi consistait un Cero, ou avait-il une capacité quelconque, hormis sa stupidité, pour avoir ses ennemis?

Puis une lueur vint illuminer son regard d’un bleu azur au même instant qu’une idée électrifiait son esprit abasourdi. Un poignard dans le dos, une attaque sournoise, un coup létal pour cet être fragile, c’était ce à quoi se résumait son noir dessein. Comme si le corps suivait aveuglément le cours de ses pensées, sa main revint prendre appui sur la garde dans un automatisme effrayant, sans pour autant en extirper la lame. Mettre un terme à sa pénible existence et s’acquérir le rang de Segunda pour le bien de son Roi, n’étaient-ce point deux actes généreux, d’une pierre deux coups? Mais ce qui ne lui permettait de trancher sa proie sans perdre une seconde de plus, c’était un doute insinué au fin fond de ses réflexions. En dépit du fait que les combats entre Espadas étaient monnaie courante à Las Noches, elle hésitait. Son plan lui paraissait d’une facilité déconcertante, au point qu’une analyse approfondie de son stratagème était de mise, afin d’éviter quelque surprise désagréable qui soit. Après tout, le chiffre lui avait été offert par le Rey, et Grimmjow savait opter pour des armes de qualité. Mettant fin brusquement à toute cette méditation inutile, elle extirpa son épée et se pencha vers celui qui avait pris son aise au sol.

Les yeux plissés, c’est d’un geste sans délicatesse qu’elle fit usage du plat de la lame pour fouetter sans ménagement la joue de l’inconnu non seulement en guise de mandale pour le punir de son audace, mais surtout pour forcer sa tête à se retourner. Le signe indélébilement gravé en noir s’exposa en toute clarté. Elle approcha son visage si près que sa respiration venait caresser le cou du crétin d’Espada, souhaitant examiner sous toutes ses coutures la marque pour s’assurer de l’authenticité de celle-ci, allant même jusqu’à gratter de ses ongles l’épiderme; sait-on jamais. Un « pfft » s’échappa de ses lèvres, tandis qu’elle rengainait son arme. Les poings sur les hanches, elle le dévisagea quelques instants encore avant de s’exprimer, cette fois-ci sur un ton légèrement moins irrité qu’auparavant :

— Ce que j’m’en fous de ton nom. Tout ce qui m’intéresse, c’est de savoir ce qui a tant intéressé notre Roi pour qu’il te choisisse toi, parmi tous les autres qui ont pourtant un atout dans cette compétition; leur cerveau. T’es pas net comme mec, c’est moi qui te le dis!

Une main vint extirper une sucette d’un rose fuchsia de sa blouse blanche. Elle la fourra rapidement dans sa bouche avant même que l’emballage qu’elle venait de lancer à ses pieds n’atterrisse. Malgré sa bouche pleine, elle trouva moyen d’articuler quelques mots à son intention :

— Et puis raconte-moi donc comment on t’a trouvé. Ils ont vraiment dû creuser loin pour dénicher un truc pareil.

ıl ıl An hidden truth. lı lı

Il est d’usage de craindre le tranchant d’une épée. D’autant plus si celle-ci est maniée de la poigne d’une fougueuse blonde aux caprices princiers. D’ailleurs, il serait aisé de se l’imaginer en souveraine tyrannique, dressée en hauteur – toujours affublée de sa jupe bien entendu – piaillant ses ordres en agitant son jouet à tout bout de champ. Néanmoins, lorsque la Quinta eut brandi sa lame, c’est de l’émerveillement qui vint s’insinuer au creux des traits du Vasto Lorde. La donzelle avait une posture majestueuse et un air supérieur pouvant inspirer le respect de ses pairs. Cependant, Ace ne releva rien de tout cela, seul l’éclat argenté du ninjato semblait réellement le captiver à vrai dire. Et comme il aimait bien toucher à tout ce qui brille, inévitablement, celui-ci voulut tâter le bout de la lame du doigt. Un geste qu’il réprima bien malgré lui, l’indomptable blonde le tirant finalement de sa transe d’une gifle. Dans l’instant, l’Arrancar en resta brièvement médusé, le geste ayant été si spontané qu’il n’avait eu le temps de réfléchir à une réaction adéquate. Toutefois, il ne tarda pas à se reprendre, ses lèvres se mettant subitement à trembloter, tandis que des larmes parvenaient à ses yeux. Le coup du chien battu, un classique! Mais alors qu’il voulut exploiter l’emprise de ce simulacre de chérubin, son assaillante accentua la pression exercée sur sa joue, déformant son facies d’un bizarre de mimique et le forçant à tourner la tête. Elle avait donc su résister à son charme candide? Impossible!

Le souffle chaud au creux du cou et la dextre de la donzelle caressant sa peau, cette fortuite rencontre prenait des allures de préliminaires. Cependant, au-delà de ce tableau romanesque, c’est avec sa rudesse habituelle que Lili écorchait l’épiderme du nouvel Espada, décidément captivée par ce qu’on y avait incrusté. Si bien que l’Arrancar décida de prendre lui-même connaissance de son tatouage. Alors que la Quinta se redressait et se lançait, comme à son habitude, dans un long discours, Ace se saisit du manche de sa propre épée et dégaina l’instrument. N’écoutant dès lors plus que d’une oreille distraite, l’énergumène tentait en vain d’apercevoir sa ferrade via le reflet que lui renvoyait la lame argentée. Un manège qui n’aurait eu de cesse, si ce n’avait été des quelques derniers mots de la jeune femme à son intention. Il se raidit alors brusquement. Baissant la tête, son minois vint s’assombrir derrière quelques longues mèches de sa tignasse bleutée, tandis qu’il s’observait à présent via le miroitement de l’acier. D’un timbre différant de l’ordinaire, sa voix parvint finalement à la blonde dans un murmure presqu’inaudible.

« Moi…? »

D’où est-ce qu’il provenait? Parlait-elle des quelques fragments de sa vie humaine dont il ne conservait qu’un pâle et brumeux souvenir? Ou faisait-elle plutôt allusion aux vestiges de son errance entre les interminables dunes de cette géhenne? L’avidité l’avait lentement transformé, tandis que la faim lui avait progressivement dévoré la conscience. Ce désert de sable blanc avait été le témoin de ses actes sordides, mais également le tombeau de son âme. Est-ce là ce qu’elle désirait savoir? Qu’il n’y pas longtemps encore, son masque immaculé avait lui aussi été souillé du sang de ses innombrables proies? Que dans les abysses de son être subsiste encore une chimère digne de cette Elite? Eh bien, certes. Ce trône; celui du segunda espada, était un prix qu’il était venu revendiquer à juste valeur.

« Si je te le disais, je suis persuadé que tu ne me croirais pas. »

Fit-il sur un ton dénué de sa ferveur habituelle.

En relevant son visage, les traits du Vasto Lorde se révélèrent particulièrement sinistres. Son sourire, tantôt bête, tantôt radieux, s’était évanoui. Ses mimiques espiègles n’étaient dès lors plus qu’une réminiscence. Tandis que derrière ces verres teintés, on devinait à présent un regard carnassier. Il confronta ainsi les prunelles de la Quinta le temps d’un instant, lui imposant sa présence oppressante et son mutisme contrariant. Toutefois, au bout d’un moment, l’Arrancar plaqua subitement une paume sur ses lèvres, pour ensuite s’étaler sur le dos en s’esclaffant.

« T’as eu peur hein?! Hein?! Moi si en tout cas, j’ai réussi à m’effrayer! »

Finit-il par dire au terme de son hilarité. Se redressant alors, celui-ci vint se rasseoir face à la belle blonde.
« Bon allez, et si tu me disais ce que j’ai sur la nuque, P’tite Lili. »

Elle feint de ne pas y avoir cru. Ou sinon elle tenta de se persuader qu’il était bon acteur, aussi crève-cœur que cela puisse être de lui avoir déniché une qualité, ce qui expliquerait aisément ce pourquoi elle s’était sentie menacée par l’air lugubre qu’il s’était approprié. La disparition de cet aspect candide l’avait non seulement impressionnée, mais aussi s’était-elle avouée persuadée que la subtile idée qui avait germée au fond de son esprit était devenue une certitude, lorsque son expression s’était fait d’un sérieux funèbre qui seyait soudainement si bien à ce personnage atypique. Au final, elle se cherchait des excuses et elle parvenait à en trouver pour préserver sa fierté et en faire part à voix haute s’il soupçonnait qu’elle s’était fait prendre à son stupide jeu. Mais si elle était énormément préoccupée de savoir s’il s’était rendu compte de la réussite de sa blague, lui semblait davantage entrain à rigoler, peu importait si le piège avait fait mouche ou non. Lorsqu’il la questionna innocemment sur sa réaction, sans toutefois s’y attarder pour une quelconque réponse, elle s’empressa de croiser les bras, de hausser le minois et d’emprunter un air indifférent, tandis qu'elle lançait sans attente sa courte réponse qui trahissait évidemment bien son mensonge :

Moi? Me faire prendre? Pfft, même pas.

Quant aux paroles qui suivirent, ils eurent l’effet d’une flamiche sur de l’huile, puisque la jeune gamine redevint la furie. En quoi elle était petite? Elle ne pouvait deviner s’il usait de ce qualificatif pour sa grandeur, mais elle ne trouva guère le moyen d’analyser ce nouveau sobriquet sous toutes ses coutures, puisque son étroit esprit dénicha dans celui-ci une réelle provocation. Quoiqu’elle ne possède pas un gabarit à la hauteur de sa valeur, sa grandeur d’âme était immense au point qu’il n’y avait de mot pour la décrire, sans compter sa puissance et ses qualités, trop nombreuses pour les réunir en un seul et unique diminutif. Petit était loin de lui convenir, de la décrire et de la représenter. Mais il était ignorant, et son ignorance allait couter cher s’il continuait à mésestimer ses mots. En somme, l’idée au départ qu’une furtive entaille au bon endroit, au bon moment, revenait lentement la hanter. Dérober le trône qu’il avait acquis par d’obscurs moyens, au risque d’en offusquer sa Majesté. C’était pour son bien, après tout. Mettre un terme à son insignifiante existence représenterait finalement plus un service qu’un meurtre, et ce qui paraissait fait d’égoïsme ne pouvait être qu’un acte d’extrême bonté.

Si tu tiens à ta vie, je te conseille d’abandonner ce sobriquet.

Mais il y avait d’autres formes à la générosité et son conseil en était une. Elle épargnerait une fois encore sa vie, parce qu’elle avait pitié pour ces tristes créatures dépourvues d’intelligence. Qu’il ne considère pas son acte de bonté sujet à répétition, car la prochaine fois qu’il ouvrirait la bouche pour en sortir une quelconque idiotie à son propos, sa lame finirait dans la chair de son cou, et ce qui était le chiffre deux deviendra néant. Elle s’en fit la promesse. Pour l’instant, elle calma ses dernières ardeurs d’une profonde respiration, puis elle se pencha en sa direction, un poing appuyé sur la hanche et la sucrerie toujours coincée par sa dentition. Un poing en sa direction suffit pour le désigner clairement, tandis que sa langue se déliait pour lui envoyer une insulte gratuite, du moins peut-être trop subtile pour les esprits les plus primitifs comme le sien :

Même si je te le disais, je suis sûre que tu ne sais pas compter jusque-là, p’tit con.

Quoi? Après tout, elle pouvait bien se le permettre, en guise de monnaie d’échange pour sa récente provocation. Elle regagna en hauteur tandis qu’elle extirpait sa friandise le temps de se délecter entièrement des calories, avant de rapidement la refourrer dans sa bouche. Il était bien parvenu à lui lécher les lèvres en humant les délicieuses saveurs de son précédent bonbon, il fallait se méfier d’une pareille réaction s’il avait une vue sur un tel délice. Il ne serait peut-être pas apte à se retenir, ou même ne le jugera-t-il même pas nécessairement, si on repensait à son manque de gêne et de tenue. Bien, il fallait maintenant lui tirer les vers du nez; mettre les points sur les i pour mieux l’orienter vers les réponses espérées. Il fallait à tout prix qu’elle connaisse les conditions de sa venue et quelques bribes de son histoire, pour pouvoir dresser un portrait plus ou moins adéquat de ce personnage et ensuite décider de son sort. Elle finirait bien par trouver une utilité à cet imbécile, autre que tester l’efficacité de sa lame :

T’as le chiffre 2 tatoué sur ton crâne. Tu sais ce que cela signifie? D.E.U.X. Elle ne se gêna guère pour l’aveugler de son index et de son majeur, dressés à quelques millimètres de son visage. Allez, maintenant, à ton tour de répondre à mes questions. D’où tu viens et pourquoi le Rey t’a choisi TOI au lieu du crabe qui passait par là. Qu’est-ce que t’as de plus que les autres?

Sujet: Re: Get out of my way, Beetch! [♥ce]