« Arrière goût d'Éternité »

→ Elle avait dormi longtemps et pourtant elle ne se sentait ni mieux, ni plus reposée qu’avant. Son corps était allé retrouver l’étreinte rassurante du sable, et elle y avait sommeillé comme elle le faisait du temps où elle était encore Adjuchas, entièrement immergée. Malgré son aspect doux et délicat, sa peau n’était pas plus sensible à la morsure du Quartz qu’alors, et elle pouvait sans mal s’y déplacer sans en ressentir de douleur ou ne serait ce qu’une gêne. Ainsi sous terre, elle était à la fois coupée de tout et unie avec le Yermo : le sable lui transmettait les vibrations venant du sol, et lui offrait une large perception de ce qui se tramait à la surface, tout en la protégeant d’un voile protecteur. Personne ne la devinait, ou presque, et personne en tout cas ne venait la chercher. Elle demeura longuement afin d’apaiser son esprit.


Mais rien n’y faisait. La serpente émergea du sol dans un nuage de poussière, extirpant son buste nu du sable tandis que l’énorme majorité de son anatomie reptilienne restait tapie. Leste, elle se laissât tomber mollement en arrière sur le sable blanc du Yermo. Au dessus d’elle, il n’y avait que les ténèbres de cette Nuit éternelle… Ni étoiles ni nuages, et une Lune qui semblait irréelle.
Elle se sentait toujours aussi agitée, et les remouds de son âme ne semblaient pas vouloir se taire. Elle était énervée, frustrée, et… triste, aussi. Mais elle ne l’admettrait pas. Ces sentiments, tout comme le souvenir de leur « dispute » n’avaient de plus qu’au plus profond de son être, enfermés à double tour et mis en quarantaine. Elle ne voulait pas y penser. Il ne restait de tout cela plus que l’odieuse marque sur son sein.

→ Qu’est ce que je vais faire maintenant ? |

Elle s’adressait à Natrix et Naer. Les deux serpents faisaient tout leur possible pour remonter le moral de leur maitresse, ce qui malheureusement équivalait à bien peu de choses… Pas même capables de lui répondre, ils ne pouvaient que l’écouter, se frotter affectueusement contre son visage et, dès qu’ils en avaient l’occasion, se rassembler au dessus de son tatouage pour lui en épargner la vue. Malgré tout, elle leur était reconnaissante de ce « peu de chose ». Ces deux êtres, qui n’avaient même pas une individualité totale et n’étaient en théorie qu’une partie de son corps demeuraient pour elle une compagnie précieuse : des compagnons éternels. Elle leur était reconnaissante de chacune de leur attention, et trouvait un peu de consolation dans l’acte simple de caresser leurs corps du bout des doigts. Pourquoi ne pouvait-elle se contenter de cela ?
Naezka avait vécu longtemps dans le Yermo, gardant son territoire et chassant souvent distraitement pour occuper son temps. Mais elle n’en avait jamais été satisfaite. Toujours à l’affut, toujours à la recherche de quelque chose qui lui échappait et qu’elle semblait chercher depuis toujours… Quand cela avait il cessé ? Tsk. Elle le savait parfaitement, pas la peine de le lui rappeler !
Soudaine en proie a une vague douleur, l’Arrancar ramena ses bras sur son visage, se couvrant les yeux. Désormais, ce sentiment renaissait de ses cendres et revenait s’installer au creux de ses entrailles. Ne pourrait-elle donc jamais s’en défaire … ? Sans doute que non, elle était voué a le satisfaire ou le ressentir pour l’éternité. L’éternité… À nouveau, elle la sentait peser lourd sur elle.

La demoiselle demeura longuement immobile ainsi, remplaçant un néant par un autre. Qu’elle se cache les yeux ou non, elle verrait après tout la même chose : un noir pur s’étendant à perte de vue. Depuis combien de temps était-elle là, cette lune … ? Était ce vraiment un astre, ou un simple dessin suspendu au plafond de cette boite étrange qu’était le Yermo ? A part Las Noches, il n’y avait rien. On parvenait étrangement à se repérer parmi les dunes alors qu’elles s’étendaient, se répétaient à perte de vue… Il y avait de quoi se demander comment se monde avait vu le jour, et s’il avait un sens. Était-ce une autre planète ?

→ Qu’est ce que je peux encore faire, de toute facon … ? |

Tout semblait avoir perdu son sens, et retourner au chaos initial. Elle n’aimait pas cette promotion, elle n’aimait pas le fait de ne pas avoir eu le choix. Elle n’était pas venu à Las Noches pour avoir des responsabilités, elle n’avait jamais cherché à être Espada ! Elle se retrouvait coincée dans la foire au monstre, et désormais qu’elle ne s’y trouvait plus tout a fait de son plein gré elle avait l’impression d’être un gros serpent prisonnier dans une corbeille qui ne pouvait plus qu’attendre l’heure du spectacle pour faire ses tours. Cette idée la répugnait, la révulsait au plus haut point. Elle avait envie de se casser et d’envoyer se faire fouttre tout ses enfoirés ! Mais pour aller ou … ? Rien ne semblait en vouloir la peine, et elle n’avait plus d’endroit ou retourner. Elle n’avait même plus faim.
Son corps frémis, effleuré par un léger sanglot alors que ses bras se resserraient. Mais même seule au monde elle ne pleurerait jamais. Et pourtant, ainsi seule avec l’Éternité, l’infini et le sable, elle s’abandonnait sans trop l’assumer à une certaine mélancolie.


Lorsque Naezka retira ses bras parce qu’elle avait entendu un bruit et sentit des pas sur le sol, elle se fustigea d’avoir une fois de plus manqué d’attention : sa colère la rendait totalement imprudente, et il était grand tant qu’elle retrouve ses réflexes habituels ! Cela mis à part, une paire de cuisse serrée dans un short très court et une poitrine opulente vu par en dessous n’était pas la vue la plus désagréable qui soit. Le serpent se contentât de lever les yeux, cherchant en vain un visage entre la courbe des deux seins.