Des jours qu'elle était maintenant retournée à l'Institut, enfin résolue à se pardonner sa folie de lui avoir brisé le poignet pendant cet espèce de chaos. Rompre son vœu de faiblesse en vue de se rattraper. Une intention déçue dès lors qu'elle fut confrontée à l'absence de celui pour qui ses efforts faisaient sens. Son tuteur disparu sans laisser de traces. Aucune raison apparente à ce départ inattendu, de quoi la laisser en proie à une succession de spéculations de plus en plus alarmantes à mesure que Muda ruminait cette invraisemblance. N'avait-il pas promis de l'aider à réprimer sa vraie nature ? Pourquoi alors disparaître si brusquement ? Un abandon de sa part ? Dans cette optique... des mensonges ? Douter soudain de la sincérité du pardon qui lui avait été accordé. Spontanément, refouler cette possibilité. En refuser la pensée même.

Enfermée dans sa chambre, nerveuse, à gesticuler et gémir sous le regard muet d'Eimi, alors étrangère avec ce qu'elle vivait. Prêtait-on plus d'attention à son expression qu'on pouvait y lire une étincelle de satisfaction. Une entité perçue au mieux comme rivale, au pire comme sangsue à l'affection que pouvait lui accorder la seule personne recouvrant de l'importance à ses yeux. Malgré le revirement positif dûment perçu de la situation, une fausse note dans ce que la petite avait anticipé. Plus que de la simple souffrance, émanait désormais, de l'attitude sa mère, de nouveaux signaux nourrissant l'appréhension. Globalement, un calme retrouvé. Néanmoins, c'était sans s'attarder sur une aura autrement plus inquiétante que celle de la culpabilité. Cette impression... la même que si elle était arrivée au bout de son cheminement... avec une conclusion des plus toxiques.

-Muda ?

Pas la moindre réponse. À la place, tourner sa tête légèrement sur le côté, vers un coin de la pièce. Le buste droit, les tibias sur le lit. Dans ce que ne pouvait percevoir un humain lambda, les crépitements de sa pression spirituelle, jusqu'à un niveau potentiellement meurtrier, sans l'être véritablement. Une retenue réduite à peau de chagrin. Confrontée à ce spectacle, outre l'inquiétude, sentir sa gorge nouée et mise dans l'incapacité d'émettre un son quelconque. Pour la première fois, se sentir menacée par sa présence, et faire pour se rendre invisible à sa perception. L'instant d'après, la disparition quasi instantanée de sa silhouette.

Une série de bringer light la menant là même où ces monstres humanoïdes étaient venus les attaquer. Une raison pour s'être rendue sur place ? Pas qu'elle puisse expliquer de façon intelligible. Une pulsion, à tous les points de vue. Impulsée et dominée par cette dernière. Sans, certainement que la chose aurait été incapable de s'avancer vers la foule avec tant de facilité. Une facilité qui n'était pas sans trahir une hostilité, palpable dans sa démarche.

S'arrêter au milieu de la route. Une voiture sur son flanc droit freinant in extremis. Que sorte le conducteur, proférant d'abord des jurons, sa figure se décompose nette dès lors que l'imprudente rentre ses serres assez profondément dans le capot pour le traverser et écraser le moteur s'y trouvant. Des grondements mécaniques, de la fumée, puis l'explosion allant pour meurtrir le bras de l'espèce de monstre sans que celle-ci n'esquisse le moindre signe de douleur. Une apathie glaçante, interpellant les témoins et les conviant à prendre leurs distances, à côté de quoi certains se laissaient aller à la panique. Effectivement, le souvenir encore frais de l'attaque alors essuyée en cet endroit.

L'espace de quelques minutes, la plupart des passants avaient déjà pris la poudre d'escampette, de sorte à ce que la menace alors identifiée remarque une présence particulière. Celle d'une semblable. Une bataille dans laquelle elle n'avait pas pris part, mais dont on lui avait fait part. En bout de ligne, une révélation. Ces zombies n'étaient pas des entités autonomes. Le fruit d'expérimentations, selon toute vraisemblance. Des expérimentations portées par des congénères. Et hasard suspect que Calum soit disparu à peu près dans le même temps que cet événement. Très clairement, cette idée la noyait dans une rage noire.

Cette femme fullbringer dans son champ de vision... l'une des leurs ? Instinctivement, s'avancer vers sa position et ce, d'un pas de plus en plus rapide. Par là, une intention qu'il était difficile de ne pas voir, tant son regard disait ses pensées. La certitude de sa culpabilité, a minima par association. Coupable de son enlèvement, voire... Augmentation incontrôlée de son énergie spirituelle, délivrant tout son potentiel intrinsèque. La voir morte. Une image déjà présente dans son esprit. Une image qui en réveille une autre. Celle d'une claque, et des mots qui lui sont associés. Aussitôt, s'effondrer au sol, haletante, ne dégageant plus qu'une infime parcelle de son reiatsu ; de sorte à donner l'impression qu'une entité invisible était venue reprendre l'énergie alors sienne. Ses pupilles se relèvent, éprouvées par une retenue que sa cible pouvait dissiper en un rien de temps.

-T'es des leurs ?

Une question a priori simple, mais imprécise. Dans l'environnement proche, des corps jonchant la chaussée. Sans vie ? Juste évanouis. Une survie qui tenait au peu de temps pendant laquelle sa pression spirituelle avait pu trouver sa libre expression. Pour autant, qui pouvait affirmer qu'ils étaient sauvés ?

Spoiler:

- Et toi, l'es-tu ?

- Je pense qu'une bonne manière de savoir si nous sommes des leurs ou non reste encore de savoir de qui tu parles. Connais-tu Melody McKenzie ?

Une répartie qui ne manqua pas de décontenancer la Muda, comme le montrait sa mine hébétée. Si elle l'était ? N'était-ce pas évident que non ? Coupée sec dans la droite lignée de son cheminement. Des leurs... Mais de qui ? Se rendre alors compte que sa question n'avait pas le moindre sens, telle quelle. Au moins son désappointement avait-il permis à son interlocutrice de se donner le temps de réflexion nécessaire pour demander une information pertinente, autant que surprenante. Melody ?

-C'est... Mais... Comment que tu...

Et là, le souvenir qu'on lui avait parlé du travail de Melody. Car oui, les humains travaillaient pour survivre et s'intégrer parmi leurs semblables. Le sien, de boulot, était un peu particulier. Elle faisait des chansons et devait gribouiller son nom sur les morceaux de papiers que lui tendaient de parfaits inconnus. Une pratique jamais comprise de la sauvage, mais si ça pouvait suffire à leur bonheur... D'ailleurs, comment les appelait-on, ces gens ?

-T'es sa groupie ?

Et ça devait lui permettre de mieux comprendre quoi que ce soit, de le savoir ? Reste que l'idée qu'elle soit de cette organisation obscure retombait comme elle était apparue. Elle n'en devait pas moins rester sur ses gardes, ce qui se voyait au travers de son expression un brin sceptique.