La blessure était plus grave qu'il ne l'avait espéré. Et si ses médecins étaient confiants, Kamui restait pour le moment handicapé par la douleur qui l'assaillait en permanence. Face à ça, les Shinigamis de la Quatrième Division ne pouvaient rien faire, la blessure dépassait leur domaine de compétence. Ils possédaient bien quelques experts mais le Kagura n'était pas homme à se lamenter pour cela. Il comptait sur son corps pour se rétablir au plus tôt et sur son esprit pour combattre la douleur. Les traits tirés, fatigués, son visage était plus pâle que d'ordinaire. Mais suivre les recommandations ne l'aidaient pas. Une seule chose lui faisait passer le mal : s'activer, penser à autre chose. Et heureusement, sur ce point, il avait de quoi faire.

Car son retour au Seireitei n'était pas évident. En endossant le rôle de Fukutaishô de la Neuvième division, Kamui avait reprit le rôle d'une jeune femme visiblement organisée mais qui ne savait pas comment conduire un groupe aussi important que la Justice. Et le Kagura en était à se demander comment son mentor avait fait tout ce temps pour accepter une telle incompétence. Les rapports étaient nombreux mais la Justice n'était plus aussi implacable que par le passé. L'un des dossiers le touchait en particulier. Celui de son frère jumeau, Kyoya. Il savait que celui-ci avait de nouveau disparu, comprenant à demi-mot ce qu'avait voulu lui dire Tenzen. Il ne le reverrait plus. Mais cela ne le chagrinait pas outre mesure. Presque trois siècles durant, il avait cru à la mort de ses compagnons. A ses yeux, son bien aimé frère avait péri à l'époque de la rébellion, ni plus ni moins.

Selon le rapport confidentiel qu'il avait, son frère avait été enfermé au Repère des Asticots, prison mythique de la Soul Society dont seule la Seconde division avait les "clés". La Justice condamnait, les Forces Spéciales maintenaient les prisonniers sous contrôle. Il savait que le rapport qu'il avait ne comportait pas tout les éléments qu'il désirait apprendre. Aucune trace des interrogatoires, pas de date d'entrée et seules quelques lignes pour expliquer son retour. Kamui savait que son seul moyen, c'était d'aller directement à la Seconde division pour en apprendre plus. Par bonheur, il avait rencontré l'un des responsables sur Terre. Akucho Uragami, qui était actuellement à la Soul Society. Se rendre à ses quartiers devenait une obsession et l'ancien Taishô de la Troisième division ne se fit pas prier.

Arrivé sur les lieux, il fit mander le Vice-Capitaine, déclinant son identité pour accélérer le processus. Le regard des autres n'avait aucune prise sur lui, Kamui se moquant de ce que pensaient les Shinigamis de son retour. Sa dévotion n'avait pas disparue avec le temps et le bien du plus grand nombre primait toujours. Seule la Soul Society pouvait permettre une protection exemplaire des âmes. Un faux mouvement lui arracha une grimace, le Vizard posant alors sa main sur son estomac. Le pansement était toujours en place sous ses vêtements mais la douleur ne disparaissait pas. Son hôte arriva enfin. Reprenant une posture plus adéquate, Kamui prit la parole, de manière formelle comme il en avait l'habitude, appuyant sur le grade que son interlocuteur portait :

- Akucho-Fukutaishô... J'aurai besoin de vos lumières sur une affaire qui lie nos deux divisions. Une affaire importante et qui nécessite la discrétion de nos services, il s'entend !

Si sur terre, il avait pris la liberté de le tutoyer, ce n'était pas la même chose ici. L'expérience et l'âge penchaient inexorablement du côté du Vizard mais en réintégrant l'armée du Gotei, Kamui avait réintégré également toutes ses anciennes habitudes, comme s'il n'avait jamais quitté le Seireitei. Pour le moment, la discussion qu'ils avaient eue sur terre n'était pas d'actualité. Kamui avait des questions et il comptait obtenir des réponses. Il ne pouvait en être autrement.

- Kagura Kyoya a intégré les rangs de la Onzième Division il y a peu. Avant cela, il a passé quelques temps dans les prisons appartenant à la Seconde Division. Je souhaiterai avoir un accès aux données que vous possédez sur lui. Et voir l'endroit où il était enfermé également.

Outre le fait que ce soit son frère, ces informations pouvaient aussi l'aider à mieux percer à jour certaines choses. Kamui savait son frère mort aujourd'hui. Mais aux yeux du Gotei, il avait seulement disparu. Son enquête pouvait donc ressembler à celles plus conventionnelles qui reliaient généralement Justice et Services Spéciaux. En guise de bonne foi, bien qu’il n’ait rien à prouver, il tendit à son interlocuteur le dossier qui contenait les informations sur son frère.

Depuis son retour de Karakura, le vice-capitaine traitait la pile de rapports qui trainait sur son bureau... ou plutôt les piles de rapport... une véritable avalanche de rapports ! On aurait dit qu'il était parti pendant des années alors qu'il n'était parti qu'une semaine, ajoutons à cela les deux semaines de soins qui ont suivi à la 4ème, cela ne faisait donc même pas un mois et il retrouvait déjà son bureau dans cet état. En son absence, Uragami avait ordonné à son 3ème siège de s'occuper de ceux-ci, il ne savait pas ce qu'était devenu cet incompétent mais il allait entendre parler du pays si il arrivait à lui mettre la main dessus. Enfin cette fois ils étaient désormais deux, il était donc hors de question qu'il s'occupe de tout ça tout seul. Ce n'est non sans un petit rire sadique qu'il divisa les piles en deux et en mit la moitié sur le bureau du capitaine. Celui-ci n'avait pas servi ni été nettoyé depuis des mois et lorsque Uragami posa la pile de rapports, cela souleva un nuage de poussière qui lui envahit les bronches, il éternua alors avec violence, faisant virevolter toute la paperasse au travers de la pièce.

C'est avec cette scène chaotique que quelqu'un frappa à la porte. Uragami avait encore les yeux rouges et le nez qui coulait à cause de la crise d'éternuements qu'il venait de subir, lorsqu'il ouvrit la porte. S'ensuivit alors une surprise, le Kagura était là. Il avait entendu dire qu'il était revenu au Seireitei et qu'il occupait désormais le poste de Fukutaishô de la 9ème division, mais il ne s'attendait pas à le revoir si tôt et dans ces conditions. En fait il s'attendait à devoir le traquer afin de le retrouver pour lui reparler de son offre, cela n'allait visiblement pas être nécessaire. Bref c'est donc dans un triste état que le vice-capitaine ouvrit la porte et eut honte de se présenter ainsi. Toutefois il se reprit assez vite lorsqu'il entendit le discours de Kamui. La première chose qu'il remarqua était qu'il ne lui avait pas dis bonjour sous aucune forme que ce soit mais cela était sans doute du à la préoccupation qu'occasionnait le sujet dont il lui parlait, il ne lui en tint donc pas rigueur. D'autant plus qu'à le voir ainsi, il paraissait extrêmement affaibli. Rien à voir donc avec l'homme qu'il avait rencontré à Karakura qui semblait si imperturbable et dur comme l'acier, se permettant même des tutoiements qu'il abandonnait là, étrangement.

L'ex-gardien semblait à peine tenir debout et lui faisait penser à un vieil homme, il était métamorphosé et cela lui faisait de la peine de le voir ainsi. Alors pendant qu'Uragami écoutait ce qu'il avait à lui dire, il l'invita à entrer. Il chassa d'un geste vif les quelques feuilles qui s'étaient posées sur la chaise devant son bureau et lui pria de prendre place. Quand Kagura eut fini de parler, Uragami s'assit à son bureau et parla à son tour calmement.

- Kamui-san, si vous me permettez de vous appeler ainsi maintenant que nous avons le même grade, je vais être bref, vous voir ainsi me peine et je ne voudrais pas vous affaiblir davantage avec de longs discours. Vous connaissez ma droiture et mon intégrité envers ma division et le Gotei 13, de ce fait vous savez que je ne peux vous fournir ce que vous me demandez sans l'autorisation d'un officier ayant un grade supérieur au nôtre, un capitaine ou le capitaine-commandant lui-même. De plus, je ne suis plus le plus haut gradé de ma division désormais, il me faudra en parler à mon capitaine avant de pouvoir vous permettre de consulter ce document.

Uragami se sentit coupable d'infliger une telle réponse à cet homme qui s'était visiblement démené afin de parvenir jusqu'à ce bureau et qui semblait extrêmement préoccupé mais il ne pourrait aller à l'encontre des règles du Gotei 13, ces documents étaient confidentiels et si il suffisait que n'importe qui débarque et réclame des documents secrets pour les obtenir, cela n'aurait aucun sens. D'autant plus que cet homme avait fuit des siècles auparavant suite à un coup d'état manqué, était resté en exil depuis tout ce temps et était revenu depuis très peu de temps, trop peu pour lui faire si rapidement confiance.

- En ce qui concerne votre deuxième requête, là aussi je me dois de vous refuser l'accès à la prison, les individus qui y sont détenus sont dangereux et je ne peux courir le risque que quelqu'un s'évade grâce à une aide extérieure ou à ce que vous soyez blessé. Cela me retomberait dessus et serait une faute très grave, je risquerais de me retrouver dans une de ses cellules. J'espère que vous comprenez et ne m'en voulez pas. Pourquoi ne pas tout simplement demander à Yakushiji-taishô les renseignements qui vous intéressent?

Si cela avait concerné une affaire officielle, cela n'aurait été qu'une formalité afin de le laisser entrer et de lui fournir les documents qu'il désirait, mais là il semblerait qu'il s'agissait d'une enquête personnelle. Dans ces conditions, donner une issue positive à ce genre de requête était très difficile. Pourquoi ne s'adressait-il pas à son supérieur direct si il souhaitait en savoir plus? Yakushiji Tenzen-taishô était au courant de tout après tout, il était le mieux placé pour en parler. Si il ne disait rien c'est qu'il souhaitait que rien ne filtre et Uragami respecterait cela.

Lorsque Akucho prit la parole, Kamui tiqua sur sa manière de s’adresser à lui. Si lui-même avait fait l’effort de le vouvoyer et de l’appeler par son grade, c’était seulement parce qu’il respectait la hiérarchie du Gotei. Mais jamais, oh grand jamais, il n’accepterait qu’un tel débutant puisse se permettre de l’appeler ainsi. De par son ancienneté et de par la différence évidente de niveau qui existait entre eux, le Kagura trouvait logique que cet homme le respecte davantage. Qu’ils aient le même grade ne les mettaient certainement pas au même niveau intellectuel. Du moins était-ce l’avis du Vizard. Il n’allait d’ailleurs pas laisser passer cela sans interagir. Lui expliquer sa façon de penser était comme naturelle pour lui.

- Je ne peux vous permettre de m'appeler ainsi. Avoir le même grade ne fait pas de nous des égaux et je pensais que cette logique vous était acquise. Visiblement pas. Je n'ai toutefois pas le temps de vous instruire plus en détail sur vos manières. Prenez donc en compte ma remarque, je vous prie, je déteste plus que tout devoir me répéter.

Le fait qu’il soit encore blessé ne faisait pas de lui un infirme. Kamui ne se rendait pas compte de l’image qu’il projetait aux autres mais il savait garder pour lui sa souffrance, sans l’étaler en public. Ainsi, il préférait avoir un traitement identique aux autres malgré son état d’apparente fragilité. Se baser sur le simple visuel était une absurdité, encore plus lorsque cette remarque provenait du Lieutenant de la Seconde Division, pourtant réputé pour ne jamais se baser sur l’apparence.

Pour le reste, la réponse fournie par Akuchi fut logique et le Kagura s’en était douté avant d’arriver jusqu’à lui. Qui ne tente rien n’a rien, voilà pourquoi il avait tout de même essayé d’obtenir ces informations sans passer par la voie officielle. Que son Capitaine puisse garder les rênes de ce savoir ne l’étonnait d’ailleurs pas. Désormais, Akucho allait lui aussi rendre des comptes directement à son supérieur, mettant sans doute en péril ses propres projets. Intérieurement, Kamui bouillait d’impatience. Mais ce n’est pas ainsi qu’il obtiendrait ce qu’il cherchait. S’il fallait passer au dessus, il le ferait. Après tout, son enquête pouvait facilement se justifier par une recherche réelle d’un potentiel déserteur et il appuierait sur ce point très précis pour accélérer les démarches. Malgré tout ; le Kagura ne parvenait pas à comprendre que cela puisse être si compliqué d’obtenir des informations. Il était Lieutenant de la Division de la Justice, ce qui lui donnait normalement accès à tout dossier susceptible de conduire à la traque et à l’arrestation d’un fugitif. Cette perte de temps, même si elle n’était qu’illusoire dans ce cas précis, restait absurde. Mais Akucho ne faisait qu’obéir aux autres. Il ne pouvait l’en blâmer.

- Je comprends votre refus et je ne vous en veux pas. Je ferai donc comme vous me le conseillez… J’obtiendrai une audience avec votre Capitaine et je lui présenterai une requête officielle signée de la main même de Yakushiji-Taishô. Bien que je déplore cette perte de temps, je sais que je ne peux pas faire autrement.

Son Capitaine ne savait pas réellement qu’il se renseignait mais ce dernier connaissait parfaitement Kamui : sans doute se doutait-il des démarches de son ancien élève. Après tout, il s’agissait de son frère jumeau.

- J’aurai cette autorisation dès ce soir. Pensez-vous pouvoir m’obtenir un rendez-vous officiel avec votre capitaine d’ici demain ou dois-je là encore passer par mon mentor pour obtenir audience ? Je comprends la réticence des vôtres me concernant, sans doute que mon ancien statut n’aide pas à l’accomplissement de ma mission. Sachez néanmoins que l’enquête que je mène, bien qu’elle concerne mon frère, est tout ce qu’il y a d’officielle. Il s’agit des prérogatives de la Justice que de mener des enquêtes sur les Shinigamis. La Seconde et la Neuvième Division sont censés travailler main dans la main, après tout vous enfermez ceux que nous arrêtons et jugeons. Je regrette ces démarches.

De son temps, alors qu’il occupait encore le poste de capitaine de la Troisième Division, Kamui avait spécialisé son unité dans la traque des cas particuliers, en soutien aux hommes de la Seconde Division. Aujourd’hui, avant de partir véritablement en quête du corps de son jumeau, il devait assimiler des informations qui n’apparaissaient pas dans les rapports de la Neuvième. Tenzen lui avait clairement expliqué que lui aussi avait cru mort Kyoya alors qu’il était enfermé dans les prisons de la Soul Society. Sans doute n’avait-il jamais obtenu la confiance de ses pairs malgré son retour et que le Commandant lui avait alors caché cette information importante. Quoi qu’il en soit, s’il devait passer par les voies indiquées par Akucho pour obtenir son dû, il le ferait.

Uragami vit qu'il avait offensé Kagura par sa familiarité et il s'en sentit désolé, d'autant que cela était nullement intentionnel. Il est toujours quelqu'un de très poli et de très formel, il respecte les grades et en attend de même pour les autres, de ce fait il prit une liberté envers cet homme qu'il n'aurait pas du prendre. Mais qu'il se soit senti offensé et qu'il ait pensé que le vice-capitaine lui manquait de respect était du au fait qu'ils ne se connaissaient pas assez bien. En effet, lorsque Uragami utilise un langage un peu plus familier avec quelqu'un c'est qu'il s'en sent proche, si il s'en sent proche c'est qu'il apprécie la personne et il a tendance à apprécier les personnes ayant une prestance et une présence forte. Ce qui était son cas et celui de certains capitaines comme Yakushiji-taishô ou Shinjirô-taishô. Vivre en solitaire lui fait parfois oublier que tout le monde ne pense pas comme lui et lui fait commettre ce genre de maladresse. Il se sentit donc obligé de répondre après s'être fait reprendre.

- Veuillez bien croire qu'il n'y avait là aucune offense, Kagura-fukutaishô, au contraire. Mais vous avez raison et vous prie de m'excuser d'avoir pris cette liberté à votre égard.

Il se sentit à la fois désolé, blessé d'avoir été en partie rabaissé par la remarque en terme d'égalité qui est somme toute relative et à la fois admiratif que malgré tout il ait gardé son sang froid et ait continué à parler calmement, avec la forme et les manières. Il vit que Kagura avait également pas très bien pris les manières compatissantes d'Uragami, ce qu'il comprenait, il était quelqu'un de fier et n'aimait pas qu'on le traite comme un infirme, là encore il sentit qu'il avait commis une maladresse. Quelqu'un de "normal" n'aurait probablement rien remarqué mais Uragami était fin observateur, il comprit sa bêtise en voyant que, par de petits gestes, le Kagura cherchait à reprendre de sa consistance et à paraitre moins affaibli, de plus, son Reiatsu le trahissait, celui-ci émettait de toutes petites vibrations typiques des personnes agacées. Il s'apprêtait à reprendre la parole mais avait peur de se planter encore alors il préféra attendre la suite du dialogue. Lorsqu'il eut finit de parler, Uragami put répondre.

- N'ayant moi-même pas travaillé sur le rapport concernant votre frère, ceci s'étant passé bien avant que j'arrive à ce poste, je ne peux donc pas juger s'il s'agit d'une affaire officielle ou personnelle et vous comprendrez que je ne puis me fier qu'à vos dires. Le mieux serait encore d'avoir l'avis de mon capitaine qui fait partie des gradés du Gotei 13 depuis beaucoup plus longtemps que moi et en saura surement plus à ce sujet. Il n'est cependant pas nécessaire de lui demander une audience, il ne devrait pas tarder à arriver et nous pourrons le lui demander directement. J'étais d'ailleurs en train de dépoussiérer un peu son bureau quand vous avez tapé à ma porte. Pour ce qui est de l'autorisation de votre supérieur, nous verrons cela directement avec Kyûsei-taishô, je pense qu'il sera possible d'outre-passer cette règle le temps que vous puissiez nous fournir ce papier plus tard. Si cela vous convient bien ainsi?

Et d'ailleurs, Uragami eut à peine le temps de finir sa tirade qu'il entendait le capitaine qui s'approchait. Les lamelles de bois qui ornaient le chemin pour arriver aux quartiers de la seconde étaient en très mauvais état et craquaient lorsqu'on marchait dessus. Le vice-capitaine s'y était habitué et avait pris pour habitude de marcher soit sur les côtés des lamelles qui sont plus solides, soit sur l'herbe car il détestait plus que tout au monde de faire du bruit. Les sièges de la seconde en faisaient également de même, mais le nouveau capitaine, ex-vice-capitaine de la 11ème, n'avait pas encore prêté attention à cela et marchait nonchalamment, il était donc repérable et identifiable d'assez loin. Uragami aurait très bien pu les faire réparer depuis très longtemps, mais c'était une façon très simple de savoir si ceux qui approchaient appartenaient à sa division ou non, ainsi il pouvait se préparer à l'avance à recevoir une visite inopinée.

- Poum, poum, poupoum...

Le Kyuusei marchait d'un bon pas, avalant les mètres pour se rendre jusque dans les locaux de son nouveau chez lui. Aujourd'hui avait été plutôt tranquille, en comparaison avec les quelques folles semaines qui avaient succédé à sa prise de fonction au sein de la Deuxième. Un rythme effréné pourtant nécessaire étant donné le travail à fournir pour faire tourner la boite sans anicroche. D'autant que, parti dans sa petite croisade, le Vif-Argent avait sacrifié le peut de temps libre qui lui restait - ayant même été jusqu'à négliger quelque peu ses activités "annexe", les laissant aux bons soins de ses anciens camarades de la Onzième. En même temps, c'était bien pour ça qu'il les avait formé, non? Il n'empêche que ça lui fendait le cœur, de devoir s'éloigner pour un temps de ce genre de camaraderie. Et c'était surtout un problème pour lui qui aimait bien tout contrôler. Enfin, aujourd'hui, le monde pesait un peu moins sur ses épaules, il se sentait étonnamment léger. Ça avait commencé ce matin, comme si la nuit lui avait apporté bien plus qu'un repos réparateur. Il avait comme l'impression que cette journée était faite pour lui, qu'elle portait son nom. C'était peut être le cas...

...et ben non.

Devant lui, Uragami et un autre homme semblaient être dans une conversation courtoise. Ce ne fut que lorsqu'il pu dévisager l'interlocuteur de son Lieutenant que le Capitaine déchanta: la vie était bel et bien une sacrée fourbe. Lui faire croire que tout va bien dans le meilleur des mondes, pour ensuite lui assener une vilaine claque sur la tête. Pas de doute, ça puait. Et, habillé comme il l'était des attributs de sa fonction, il ne pouvait même pas faire le coup du type qui s'est planté de pièce, ou celui du technicien de surface venu nettoyer les meubles. Il était pris comme un moucheron dans une toile de fil de fer. Au temps pour lui. Il aimait bien être préparé pour ce genre de chose, avait même prévu d'aller voir le Vice Capitaine de la Neuvième - du moins, de graviter autour de lui pour voir ce qu'il pouvait en tirer - mais l'autre le prenait au dépourvu. Soit, autant s'adapter.

- Bien le bonjour, que me vaut le plaisir de cette visite, Vice Capitaine Kagura?

Quand on avait eu le frère comme boulet, facile de reconnaitre le second. Et passer dans le formel malgré son aspect bourru servait au Kyuusei à prendre à contrepied ce que son physique pouvait laisser transparaitre. Il allait presque faire demander du thé lorsqu'un début de haut-le-cœur le saisit. Chiotte, il allait pas faire comme tous ces papys à siroter de la tisane et manger des biscuits secs, ça jamais! En même temps, l'heure n'était pas aux mondanités. Il avait devant lui le bras droit revenu d'exil du Vieux Lotus, un type qui était, aux dires de son subordonné, un tantinet dangereux et porté sur l'exécution sommaire - enfin, c'était ce qu'avait semblé dire Uragami lors de leur dernière discussion, encore qu'il n'avait pu le prouver. Cela dit, il ne fallait pas crier au loup avant d'en avoir vu la queue. C'est bien pour ça que le Vif Argent faisait des ronds de jambe.

- Y a bien quelqu'chose pour lequel je peux me rendre utile, pas vrai? Sinon, je vois pas pourquoi vous seriez ici. A moins que ce soit Tenzen qui vous envoie?

Il était déjà assez passé pour un con la dernière fois qu'il avait vu le vieux renard, d'autant que celui-ci se trouvait en compagnie de l'Argenté et que l'histoire avait encore une fois failli finir en eau de boudin. Et en plus Noboru avait prouvé aux yeux de tous qu'il avait autant de sens de la décision qu'une moule bouchot. Bref, quand il s'agissait des types de la Neuvième, valait mieux sortir les gants en plastique et la jouer cool.

Cela ne lui convenait évidemment pas mais il n’éprouvait pas le besoin de l’exprimer à intelligible voix. D’autant qu’Akucho avait raison : son capitaine approchait. L’aura de ce dernier était d’ailleurs redoutable, même au repos, et pour un expert de la filature comme l’était Kamui il n’était pas difficile de le sentir arriver. Il verrait donc directement avec le responsable de l’unité, souhaitant seulement que ce dernier ne fasse pas de misères : il lui coûtait de perdre autant de temps et sa sagacité légendaire ne résisterait sans doute pas à une discussion trop longue sur le bien-fondé de sa mission. C’est donc dans le silence qu’il attendit l’arrivée.

Et quelle entrée… L’homme était une vraie force de la nature, cela apparaissait comme évident dès le premier échange de regard. Capitaine, il l’était depuis peu. Et selon ce qu’il avait appris, il s’agissait de l’ancien Lieutenant de la Onzième division. Il en avait l’allure et le Kagura doutait que quiconque puisse lui contester le droit de porter ce Haori. Et si son physique n’était pas en adéquation avec sa manière de parler, cela ne surprit pas outre mesure l’ancien Taishô de la Troisième Division. Il faut dire qu’il avait entendu parler de l’intelligence pratique de cet homme. Certaines voix n’hésitaient d’ailleurs pas à dire qu’il avait été le véritable cerveau de la division du Combat. Autant dire que la discussion s’annonçait palpitante.

Fidèle à ses coutumes, Kamui abaissait déjà la tête en guise de salutation. Alors qu’il se relevait, il positionna son corps face à l’homme qui venait d’arriver, indiquant par ce biais qu’il avait désormais toute son attention. Le langage du corps était parfois plus complet que les simples mots. Et l’ancien membre du Kanshu était un adepte de ce genre de signes.

- Mon Capitaine n’a pas de lien avec ma présence ici-même, Kyuusei-Taishô. Mais ce sont bien les affaires de la Neuvième Division qui m’ont poussés à venir à votre rencontre.

Bien évidemment, il avait cru – certes bien naïvement – que cela se réglerait entre Akucho et lui-même. Mais qu’importe son interlocuteur tant qu’il obtenait ce qu’il recherchait. Il savait que son frère avait été sous les ordres de cet homme pendant un temps. Peut-être qu’il obtiendrait par ce biais davantage de réponses ?

- Nous venons d’ouvrir une enquête sur la disparition du Shinigami répondant au nom de Kagura Kyoya. Ce nom ne devrait pas vous être inconnu, je présume, puisque vous étiez encore Vice-capitaine de la Onzième lorsqu’il a été intégré à votre division. Le dossier que nous possédons sur lui est bien maigre et ne comporte aucune information sur son incarcération. Je souhaiterai avoir accès à ces rapports que vous détenez, ainsi qu’un droit de visite de la cellule dans laquelle il a été enfermé des siècles durant.

Il n’avait pas spécifié qu’il était son frère au Capitaine mais Akucho saurait l’attester. Par ailleurs, la ressemblance était là même si les deux frères avaient toujours mis en avant leurs différences. Pour le moment, le Kagura préférait ne pas insister quant à l’importance que ces recherches revêtaient pour lui. Il restait là, observateur, attendant que l’un complète ses dires ou que l’autre réponde directement à ses demandes. Si nécessaire, et comme il l’avait déjà dit, il obtiendrait une requête officielle. Mais était-ce réellement indispensable ?

- Votre Lieutenant a pour le moment refusé de m’obtenir ces informations et si je comprends ses réticences, j’en reste pour le moins étonné. J’espère seulement qu’elles ne sont pas liées à mon ancien statut et que cela ne sera pas une barrière pour nos enquêtes futures.

Kamui ne donnait pas l’impression d’être un Fukutaishô. Et pour cause, dans son esprit, il était l’égal de l’homme portant le Haori face à lui. Question de bon sens.

Alors qu’Akucho reprenait la parole, avançant une fois encore son sempiternel argument, Kamui se décala très légèrement dans sa direction, montrant que le Vice-Capitaine avait en effet capté toute son attention. Alors que les mots s'enchaînaient, l'ancien Capitaine observait le malheureux lieutenant qui ne s'apercevait même pas de ce qu'il faisait. Tenzen lui avait un jour enseigné que les puissants creusaient généralement leur propre tombe. Il saurait lui dire la prochaine fois que les puissants n'étaient pas les seuls à agir avec impudence. Uragami avait la mémoire sélective et en accusant à mi-mot le Kagura, il se mettait face à une situation qu'il ne comprenait pas. Comment pouvait-il envisager les conséquences qui pesaient sur ses frêles épaules alors qu'il ne connaissait en vérité rien de celui qui se dressait face à eux deux, l'élite de la Seconde Division ?

S'il l'avait pu, sans doute aurait-il souri pour montrer à quel point la situation l'amusait. Mais Kamui n'était pas homme à faire montre de ses sentiments. Et c'est avec cette impassibilité légendaire qu'il étudiait les traits du lieutenant. Il était donc évidement désormais que Tenzen aurait à intervenir par la suite. Ce qu'il demandait, il ne l'obtiendrait que grâce au concours de son Capitaine et la réponse de l'Akucho venait de l'en persuader. Ils ne le prenaient pas au sérieux. Pire encore, ils remettaient en doute son intégrité et ses valeurs sous prétexte qu'il avait attenté à la vie du Sotaishô quelques siècles auparavant. Le bien du plus grand nombre ne signifiait rien pour ceux qui ne pouvaient comprendre cette notion. Des mots creux pour des esprits vides. Son mentor avait eu raison de le mettre en garde.

Sans doute que le Yakushiji remonterait les bretelles du tout nouveau Capitaine. Sans doute que cela n'aurait aucune prise sur ce dernier, la notion de respect des Anciens étant désormais oubliée par ces jeunes âmes. Aucun des deux hommes ci-présents ne comprenait les enjeux de cette enquête. Ils ne connaissaient rien de la politique interne du Gotei, rien de ce qui cimentait le groupe initial de Tenzen. Lui savait que son frère était mort. Il savait qui l'avait tué. Mais mettre en avant sa disparition et enquêter sur cela protégerait obligatoirement son Capitaine. En jetant en partie le discrédit sur l'unité qui avait eu la charge de la surveillance de Kyoya, soit la Onzième division. Kamui n'espérait pas mettre en doute leur intégrité, pour autant il savait que cela soulèverait des questions quant à la responsabilité réelle de ces hommes d'élite sensés garder à l’œil un ancien traître.

- Je n'ai pas pour habitude de me justifier auprès d'un enfant. Il me semblait m'être montré clair avec vous à ce sujet, pourtant...

La remarque avait fusé dans le silence le plus total. Sans doute passerait-il pour impertinent aux yeux du Capitaine. Mais si ce dernier appréciait les paroles inutiles de son Lieutenant, Kamui n'y voyait lui qu'une perte de temps inacceptable. Surtout de la part de cet homme.

- Votre âge n'excuse ni votre incompétence, ni vos accusations à peine couvertes. Vous n'avez pas fait grand cas de mon statut lorsque vous m'avez cherché et trouvé sur terre. Dois-je vous rappeler la teneur de notre discussion ? Je ne pense pas qu'il y ait eu quoi que ce soit d'officiel dans votre proposition de m'intégrer à l'Oshinobi Keikaku. Alors même que j'étais encore considéré comme disparu par le Gotei 13. Comment allez-vous vous expliquer, Akucho-san ? Je trouve risible que vous remettiez ma parole en doute alors que vos activités sont suspectes. Mais rassurez-vous : si la Seconde Division ne fait pas grand cas de ce genre d'affaire, celle de la Justice y portera un intérêt tout particulier.

Il avait jusqu'à ce jour gardé cette information pour lui, n'en faisant mention qu'à son mentor. D'un commun accord, ils avaient gardés la nouvelle pour eux, attendant de pouvoir se servir de ce cas. Qu'importe ce qu'ils pensaient en ce moment précis, le comportement d'Akucho, à l'époque, était suspect et pouvait être interprété comme un acte de trahison, n'en déplaise à son Capitaine. Soulever ce point devant le plus haut responsable de la Seconde division n'était pas anodin. Car sa mission était de prévoir ce genre de défection. Kamui venait tout simplement de glisser un loup dans la bergerie. Il ne lui restait qu'à en voir les effets sur le moyen terme, car effets il y aurait forcément.

- Pardonnez-moi cet aparté, Kyuusei-Taishô. Mon état de santé joue malheureusement sur mon caractère et je suis moins patient qu'à mon habitude. Je vous prie d'excuser mes propos, si ces derniers vous ont paru déplacé. Je présume que mon passé gèle mes demandes. Discuter plus longtemps me parait donc futile, pour vous comme pour moi. Ainsi je vais suivre les conseils de votre Lieutenant et en référer à mon Capitaine. Vous verrez alors que ma parole à plus de crédit que vous ne voulez bien le croire.

Fatigué, il l'était inévitablement. Bien que partiellement agacé par les accusations sournoises de la Seconde division, Kamui avait cherché à masquer une partie de ce qu'il ressentait. Mais ses propos à l'encontre de Akucho prouvait bien entendu qu'il était las. Mais malgré tout, il soulevait plusieurs points précieux. On ne le prenait pas au sérieux. Ils oubliaient qui ils avaient en face d'eux, de toute évidence.

Citation :

En accord avec Noboru, j'ai posté avant lui car c'était plus cohérent. Il va répondre donc à ma suite ^^

Il avait à peine posé sa question que les événements s'étaient enchainés de façon incontrôlable. Le Lieutenant Kamui, très formel, avait dévoilé la raison de sa venue, qui allait de paire avec le conflit qu'il entretenait apparemment avec Uragami, juste avant l'arrivée du Kyuusei. Une enquête avait été ouverte sur la disparition de Kyoya, alors troisième siège sous l'autorité directe de Noboru, et son frère maintenant revenu au sein du Gotei en prenait les rênes. Remarquable coïncidence, qui soulevait immédiatement deux question dans l'esprit du Capitaine de la Deuxième: primo, pourquoi n'y avait-il eut aucun mouvement de la part de la Justice au moment de la disparition de Kyoya - qui remontait maintenant à un bout de temps - et secundo, pourquoi ressortir très précisément ce squelette du placard, alors même que le Kagura était réintégré dans les rangs des shinigamis, le mettant ainsi sur le devant de la scène, en position conquérante? Des questions qui devaient être digérées le temps d'en sortir quelque chose.

Et alors que le Kyuusei allait s'enquérir du bien fondé de cette démarche - puisqu'elle le concernait directement, du moins en grande partie - son subordonné réitéra la réponse protocolaire consistant à présenter une demande écrite du Capitaine en charge de la Justice - à savoir le vieux Tenzen - afin de pouvoir obtenir ce qu'il cherchait. Rien de plus simple et pourtant cela coinçait. Et fortement. Montant sur ses grands chevaux, le Kagura en vint alors à mettre en avant son status de transfuge, comme cause de sa persécution, puis à s'en prendre directement à l'Akucho, mettant en avant une rencontre qu'ils avaient eu sur Terre, et mentionnant une hypothétique intégration au sein d'un truc appelé Oshinomachin Shikaku. Le nom en soit n'était pas important, mais bien plus l'était le sens de tout cela: en effet, lors de leur première rencontre, Uragami avait fait mention de projets concernant la Terre, et s'était fait recadré, le Kyuusei lui rappelant son vrai but en tant que Lieutenant de la Deuxième Division. Seulement, les accusations de Kamui portaient une toute autre lumière sur ces projets. L'Akucho avait voulu la jouer cavalier seul, quitte à frayer avec des déserteurs jugés dangereux. En soit, cela sonnait comme une trahison. Le problème était que ledit déserteur se trouvait maintenant à seconder les opérations de la Justice elle-même, preuve que son ancien status était complètement caduque, puisque le Sôtaisho lui-même lui reconnaissait l'importance nécessaire pour la prise en charge de ce poste épineux. Tout comme l'avait été le status de Tenzen, fut un temps. Ce qui faisait de cette affaire un sacré sac de nœuds. Sa mâchoire se crispant au fur et à mesure de la discussion, le Vif Argent laissa échapper un soupir, histoire d'éviter à agir sous le coup de la colère.

- Je n’accepterais pas qu'on se chamaille comme des gamins au sein de ma propre Division.

Il était calme, c'en était flippant.

- Et il n'est nullement ici question d'âge ou de vécu. Excuses rejetées, Kagura Fukutaisho. Le Gotei est une formation militaire, et à ce titre, chacun est tenu de respecter la hiérarchie en place, du plus jeune de nos bleus au plus vieux Capitaine. De même, chacun est tenu de suivre le protocole en vigueur lorsqu'il est question d'administration. Et non, je ne conteste pas votre droit à l'information de par votre provenance. De ce que j'ai entendu à mon arrivée, le Lieutenant Akucho n'a nullement fait mention de votre passé dans sa remarque, et votre début de réponse est donc hors de propos. Si je me souviens bien, déserter et obtenir grâce est un peu une tradition dans votre Division, et jusqu'à présent il n'y a pas eu de problème. Jusqu'à présent. Alors cessez donc de nous la jouer vilain petit canard et conformez vous aux règles!

Il ne lui tendrait pas cette perche. Et il avait lourdement insisté sur le grade de l'homme en face de lui, tout en gardant le contrôle de sa voix. Deviser avec ce Lieutenant tenait de la lutte de haut vol, car nul doute qu'un serpent se cachait derrière cette posture rigide. Mais le Kyuusei était chez lui, dans le monde dont il avait la responsabilité, et la dernière chose qu'il voulait était qu'un autre vienne redire après son travail. En y réfléchissant bien, il commençait même à comprendre Shinjirô, sur certains points.

Mon pauvre vieux, je me sens plus proche de toi que je l'ai jamais été, là...

Ceci étant dit, et avec la très nette impression d'avoir pissé dans un violon, le Vizard repris.

- Du reste, je suis personnellement impliqué dans cette affaire, puisque j'avais la charge directe du dénommé Kagura Kyoya. Si je me souviens bien, rien n'a été fait de votre côté lors de sa disparition, malgré mes signalements répétés au sein de la hiérarchie, quand bien même une enquête s'ouvrait pour tout autre disparition ou désertion. Vous devez donc avoir tout ce qu'il vous faut pour continuer vos recherches. Si jamais vous aviez besoin d'informations complémentaires - ce qui pourrait être le cas si le dossier du dénommé Kyoya était incomplet ou comprenait des pièces manquantes de votre côté - je serais ravi de vous offrir mon aide, de façon officielle, et pas pour vos beaux yeux.

Il fallait que l'autre arrête de se prendre pour Dieu le Père, genre d'attitude que son mentor avait adopté lui aussi, et qui lui valait la haine farouche de bon nombre de gens. Il était un Vice Capitaine qui devait le respect à ses équivalents, et à ses supérieurs. La très haute opinion qu'il semblait avoir de lui, et qu'il affichait lorsqu'il parlait du poids de sa parole en était un bon exemple, et confirmait au Vizard quelques soupçons initiaux à son égards: il avait affaire à un activiste, un type qui ne ferait en aucun cas profil bas, et qui était animé d'une volonté et d'une fierté immenses, qu'il mettait sans doute au service de ses idées. Une véritable tornade, donc.

- Pour conclure, et à la lumière de cette discussion enrichissante, je vais donc de ce pas organiser une rencontre officielle comprenant les Capitaines de la Neuvième et de la Onzième Division, ainsi que moi même, afin de pouvoir statuer sur cette disparition. Il va de soi que votre présence est requise, puisque vous êtes en charge de cette affaire. Il y a eu quelques négligences dans ma Division avant mon arrivée, mais je suis bien décidé à remettre les choses en ordre. Ceci étant dit, cette affaire relève aussi de la Sécurité Intérieure, et j'attends donc votre entière collaboration concernant un action conjointe. C'est pourquoi, sachez le, j'opterais dans cette réunion pour vous fournir un partenaire issu de la Deuxième pour vous aider dans votre tâche. Car si la Neuvième Division doute de notre implication dans ce genre d'affaire, j'y porte au contraire un intérêt tout particulier. Je vais aussi faire préparer ce dont vous aurez besoin pour votre enquête, afin que vos investigations se déroulent au mieux lorsque vous serez revenu avec votre autorisation. Maintenant, si vous le voulez bien, je vais devoir avoir un entretien personnel avec mon subordonné, relativement aux accusations que vous avez portés sur lui. Il est ici sujet à des accusations de trahison qui portent même sur le bien fondé de la décision du Sôtaisho à votre égard. Il va donc falloir démêler tout cela compte tenu de votre réintégration au sein du Gotei.

Que l'Akucho ne s'y trompe pas: son action était impardonnable. Mais elle se situait en plein milieu d'un panier de crabe politique, ce qui rendait toute action lourde de conséquence. De bonnes migraines en perspective. Ce qui n'empêchait pas le Kyuusei d'avoir une très bonne idée de l'équipier qu'il choisirait pour aider le Kagura dans son affaire. Car l'autre ne devait pas être dans l'erreur: la Seconde n'était en aucun cas assujettie à la Neuvième, et l'autonomie de son Capitaine lui assurait de quoi nager lui aussi au milieu des gros poissons. Il adorait son idée, lui rappelant le genre de truc qu'il pouvait trouver pour mettre le Kenpachi dans la mouise. Car le Fukutaisho en face de lui voulait jouer au con, et avait trouvé le plus redoutable des challengers.

Noboru était un véritable capitaine et là-dessus, Kamui n'en avait désormais plus le moindre doute. Si un instant, il l'avait sous-estimé de par son ancienne appartenance à la Onzième division, il ne ferait plus jamais la même erreur. Qu'est-ce qui l'avait ainsi poussé à s'agacer pour si peu ? Le fait d'avoir été éloigné si longtemps des autres Shinigamis ne l'aidait pas à faire la part des choses. Mais il réapprendrait vite à composer avec les différentes forces en place. Pour le moment, la teneur de la discussion donnait raison à cet homme et Kamui savait se taire lorsqu'il se savait en faute. Ici, comme il l'avait signalé, il n'était pas totalement dans son état normal, la douleur et la fatigue étant de bien mauvaises conseillères. Et si ça n'excusait rien, cela restait aux yeux du Vizard la raison principale de ses débordements.

Mais soit, document officiel ils voulaient, document officiel ils auraient. Tenzen le lui fournirait sans rechigner, l'enquête ayant été ouverte officiellement. Quant à s'expliquer sur les raisons d'une ouverture tardive, le Kagura préférait laisser cela à son mentor. Il n'y avait sans doute pas une personne plus capable que lui pour se faire comprendre sur les procédures de la Neuvième division. Les deux Capitaines risquaient de prendre plaisir à la discussion future, d'autant que l'idée de Noboru était assez bonne. Outre le fait de dissiper les malentendus et doutes sur chacun, elle permettrait aussi l'établissement d'une procédure réelle à appliquer dans ce genre de situations.

Alors qu'Akucho repartait dans une explication qu'il jugeait laborieuse, Kamui gardait le silence. A quoi bon alimenter une discussion dans laquelle il se savait de toute évidence perdant ? Savoir admettre que l'on n'obtiendra rien à s'entêter était une force qu'il possédait. Là-dessus au moins, il pourrait donner des cours. Contrairement à ce qu'il pensait, il n'avait aucune raison d'être fier de ce qu'il avait avancé comme arguments pour mettre en doute la parole du Vice-Capitaine de la Seconde. Choix tactique, pour le moment. La demande du Fukutaishô de la Seconde division le surprit même s'il n'en laissait rien voir et d'un signe de tête, il accepta sa demande. Il n'y avait aucun déshonneur à faire passer un message. Ces deux-là se fourvoyaient quant à ses motivations réelles. Mais là où Noboru avait visé juste, c'était en mentionnant son titre. Le respect du protocole et de l'étiquette étaient deux notions que Kamui suivait à la lettre. Une fois le grade mit en avant, il ne pouvait que se taire et obéir. Il était un soldat au service du plus grand nombre. Leurs intérêts convergeaient.

- Je comprends. Yakushiji-sama sera informé de votre demande, Akucho-Fukutaishô. Je vais donc me retirer en attendant de récupérer le sésame qui m'ouvrira les portes de la Connaissance. Kyuusei-Taishô, j'ai pris plaisir à converser avec vous.

Abaissant la tête en guise de salutation, Kamui se retira. Oui, il avait pris plaisir à cette discussion mais pas dans le sens commun du terme. Car il venait de s'apercevoir que ses ennemis étaient toujours aussi nombreux au sein du Seireitei. Même s'ils n'avaient plus les mêmes visages.