Il devait s'y plier, ne serait-ce qu'à cause de son crédo. Ce n'était pas de gaité de cœur, mais le cœur n'avait pas sa place dans ce genre de business. Et puis, ce dont il avait été le témoin ce jour là avait fait naitre un nouveau sentiment en lui: une forme de respect à l'encontre de celui à qui il venait rendre visite. D'autant plus que celui-ci l'avait étonné en premier lieux, s'étant immiscé dans le monde de paris dont il était le prince.

Il avait découvert la farce alors qu'il récapitulait avec son équipe les transferts de gains. Une certaine "Bête Noire" avait misé un paquet sur le fait que le Yakushiji sortirait du duel sans même une égratignure. Et ce parieur ingénieux avait gagné une petite cagnotte non négligeable. Proprement estomaqué, partagé entre le dégoût et l'amusement, le Kyuusei avait alors pris sur lui d'aller remettre les gains en personne au gagnant. C'est ainsi que ses pas l'avaient mené aux portes de la Neuvième Division, où il avait demandé un rendez-vous avec son tôlier, sous le prétexte de "lui remettre le rapport attenant à la réunion inter-divisions sur les vérifications de mesure de puissance". Un truc bidon, mais qui prenait tout son sens, à la lumière du combat qui avait eu lieu quelque temps plus tôt. Bref, passé une petite introduction auprès de l'administration interne, le Fukutaisho fini sa route devant la porte du bureau du vieux Manitou. Porte qu'il s'empressa de franchir, avant de poser un baluchon aux formes rebondies sur le sol du bureau du maitre de la place.

- Ceci, je crois, vous appartient, sans aucun doute. Je constate que votre volonté de remporter toutes les victoires contre la Division s'étend sur tous les fronts. Mes félicitations, donc! Vous êtes l'heureux détenteur d'une petite fortune.

Cela l'impressionnait, cet esprit retord, même si le mépris manifeste que le Capitaine de la Neuvième affichait tout le temps ruinait le tableau. Cet homme aurait pu être un modèle, au même titre que Shinjirô, si son image n'était pas enlaidie par sa volonté de se couper du reste du monde, en affichant sa morgue. Partagé, donc, Noboru pris sur lui de rester un petit moment, si l'autre lui permettait, afin d'en savoir un peu plus sur lui. Une question le turlupinait, en fait, au sujet d'une caractéristique que le Lotus Blanc partageait avec son collègue.

- Ma foi, le seul inconvénient du duel dont j'ai pu être le témoin était sa durée. Ce fut certes intense, en un sens, mais j'ai le sentiment que cela s'est arrêté bien trop tôt. Shinjirô n'a pas fini de grincer des dents, croyez-moi. Vous êtes bien le premier cailloux sur lequel il tape qui ne se brise pas...surtout après la volée de coup qu'il vous a mis. Mais bon, on ne peut pas vraiment juger du résultat de tout cela, vu qu'on n'était pas en situation de duel à mort...le plus intéressant serait de vous voir évoluer de concert - même si je sais que ça a autant de chance d'arriver que de vous décrocher un sourire franc.

L'autre lui répliquait sûrement qu'il n'aurait pas envie de s'abaisser à discuter du match avec un être tel que le Vice Capitaine de la Onzième. Cela dit, celui-ci s'en foutait royalement, n'ayant jamais eu à suivre réellement les désirs de ses vis-à-vis.

- D'ailleurs, je suis aussi resté sur ma faim concernant l'utilisation de votre masque. Cela vous a permis certes de résister à l'assaut final, mais j'aurais aimé voir ce que cela vous apportait sur le plan de l'offensive. Mais mes désirs ne comptent pas, hein?

Le fait était que le Vif-Argent cherchait à partager ses expériences sombres avec quelqu'un d'expérimenté dans le domaine, mais était dans le même temps foutrement incapable de pouvoir aborder le sujet d'une correcte manière. Son inimité avec son interlocuteur ne facilitait pas les choses, malgré sa volonté de passer outre ce sentiment pour son évolution personnelle.

Pour l'heure, Tenzen travaillait la pratique de son qin. La maîtrise de son instrument lui était importante, ce pourquoi il n'omettait pas chaque jour d'y passer au moins quelques minutes. Une partie intégrante de sa routine donc. Par contre, pour une raison qu'il ignorait, ces derniers temps étaient plutôt mouvementés. Il fallait toujours que quelqu'un vienne le déranger, pour une raison ou une autre... Simple discussion, quelques questions à poser, problème de pieds lumineux... Le prenait-on pour le guichet d'information du Seireitei ? Enfin, la visite de ce jour était prévue et attendue. Forcément, Noboru devrait se présenter à lui à un moment ou un autre. Le Yakushiji se serait tout de même attendu à le voir plus tôt, le combat l'ayant opposé au Kenpachi datant déjà quelque peu. Car bien sûr, il s'agissait de cela... Il ne prêta même pas attention au prétexte évoqué, seul le nom du visiteur fut suffisant.

Lorsque le Fukutaishô de la Onzième Division se présenta dans cette pièce vide – en effet, le bureau de Tenzen n'était qu'une petite salle dénuée de tous meubles ou toutes décorations – dont la porte coulissante est ouverte sur un jardin zen, il n'y eu d'ailleurs pas la moindre introduction. Juste le don d'un petit baluchon aux sonorités cliquetantes. Ses gains... Les gars de la Onzième pensaient être discrets concernant les paris qu'ils menaient, mais à force de mettre la moitié du Seireitei dans la combine, c'en était forcément venu aux oreilles du Shirohasu. Et le Dieu de la Mort millénaire n'avait pas omis d'en profiter... Ses raisons ? Il n'est pas particulièrement attiré par l’appât du gain, n'a pas une âme de joueur. Mais il aurait été stupide de ne pas chercher à profiter de la situation. Faire grossir quelque peu son bas de laine. Surtout lorsque le gain se trouvait être aussi... facile !

L'entrevue aurait pu s'arrêter là, mais ce n'était apparemment pas de l'avis du Kyûsei. Celui-ci chercha à lancer la conversation, restant debout face au Capitaine au Lotus qui lui restait assis en tailleur, son instrument rangé dans son étoffe à sa droite.

Asseyez-vous... Je suppose qu'il est inutile que je vous propose du thé. Hum ?

Non, ça ne devait pas être son truc... Enfin, l'on ne pouvait être sûr de rien, ce pourquoi il avait cherché à tourner cela comme une question. Cela, accompagné de la proposition de prendre place, pourrait peut-être l'amener à ne pas rester sur la défensive, comme il le faisait présentement.

J'avoue que je ne comprends pas réellement votre déception. Vous avez assisté à ce combat. Pensez-vous réellement qu'il était utile de le poursuivre encore ? Dès lors que la puissance de mon Hollow s'y mêlait, la finalité ne faisait plus vraiment de doute... La seule utilité de ce combat pour moi était de pouvoir éprouver mes capacités, ce qui était largement réalisé. Contrairement à ce que l'on peut parfois penser de moi, je ne prends pas particulièrement plaisir dans l'humiliation. Il était donc préférable que votre Capitaine garde un minimum la face devant son lieutenant...

L'allusion est claire : si le combat avait duré, le Kenpachi aurait été terrassé. Le pensait-il vraiment ? Peut-être pas à ce point là, même s'il pouvait considérer que la victoire était sienne. Il n'y accorde pas beaucoup d'importance de toute façon. Défaite, victoire ou partage, cela revenait au même pour lui.

Je me questionne d'autant plus sur votre envie d'en voir plus que vous êtes vous même ce que l'on nomme désormais un Vizard, n'est-ce pas ? Que vous attendiez-vous donc à voir que vous ne connaissiez pas déjà ? La puissance de mon Cero n'est de plus un secret pour personne depuis que les quartiers de la Dixième Division en ont fait les frais. Strictement rien de neuf ou de particulièrement intéressant pour vous, donc...

- Un peu de thé ne me ferait pas de mal, merci.

Ou la volonté de prendre tout le monde à contre-pied. Puérile? Peut être. Question de point de vue, sans doute. Toujours est il que oui, cela ne lui ferait pas de mal. En plus, le thé, c'est antioxydant. Et diurétique. Et avec ce qu'on le faisait chier, en ce moment, c'était bien d'avoir des petites alternatives, de temps en temps. C'est sur cette pensée profonde que le Kyuusei s’esclaffa tout doucement, souriant presque pour lui même, avant de recentrer sur les propos de son interlocuteur. Encore une fois...le Yakushiji semblait désemparé par l'attitude du Fukutaisho. Non, ce n'était peut être pas le mot...c'était comme s'il constatait avec amertume qu'on ne pouvait rien tirer de celui-ci, qu'il était une source continuelle de désappointement. Du moins était-ce que ressentait à l'instant le concerné.

- Certes, il eut pu perdre la face devant moi, si d'aventure j'avais vu sa défaite comme une disgrâce. Mais je l'ai vu dans une telle variété d'états, et j'ai traversé tant de bordel avec lui que je lui apporterais un soutien inconditionnel, quelle que soit l'épreuve qu'il affronte. A vrai dire le seul jour qui me verra vraiment cuit sera celui où il baissera les bras. Quant à vous, Capitaine, je dois dire que votre effet a été réussi. J'ose même pas penser à la tête de nos ennemis quand ils vous verrons arriver tous les deux, et agir de concert, si tant est que vous vous mettiez d'accord pour bosser main dans la main.

Un bouclier et une épée, soit un parfait alliage de deux styles de combats complètement opposés. La misère pour les fous qui oseraient s'opposer au Gotei et à sa force de frappe.

- Cela dit, vous seriez surpris de voir comment peut réagir le colosse quand on le pousse dans ses retranchements. Il est bien trop malin pour se lâcher complètement contre un de ses homologues, mais contre quelqu'un avec qui il a carte blanche, c'est pas la même donne. Après c'est vrai que vous avez eu mille ans pour en voir défiler, des têtes brûlées, alors donner sa chance au premier venu...

Son mépris pouvait se comprendre, en un sens. En mille ans, on devait en croiser, des glands. Et ça, ça devait rendre vachement aigri. Cela dit, l'optimisme existait, aussi, on pouvait toujours y croire. A ce propos...

- Je dois dire que je suis déçu, en fait. Je m'attendais à ce que, du haut de votre millénaire, vous puissiez m'éclairer sur de possibles évolutions dans la vie d'un Vizard. Je dois dire qu'ayant épluché les archives de combat du Gotei, on a eu qu'une référence à proprement parler sur une seconde étape dans l'hollowmorphose, mais le résultat était...comment dire, franchement dégueulasse. Donc, Cero et puis c'est tout. Et bien, comme perspective d'avenir, c'est pas cher payer pour devoir cohabiter avec un taré de première...

Hochant légèrement de la tête, Tenzen approuva. En effet, cohabiter avec un Hollow pouvait parfois paraître être un prix lourd à payer pour en gagner sa puissance. Même si cela ne se limitait en effet pas aux Ceros... Enfin, avant de partir dans sa répartie, il fit appeler Rosai. L'intendant âgé se présenta le dos courbé pour se faire réclamer du thé. Cela ne devrait pas prendre bien longtemps, la vieille âme gardant toujours de l'eau au chaud pour palier aux demandes répétées du Capitaine au Lotus qui ne buvait pour ainsi dire que ça. Lorsque Rosai se retira, il prit alors le parti de répondre en ne relevant rien de ce qui concernait le Kenpachi. À vrai dire, le Yakushiji estimait y être déjà trop souvent confronté que pour s'encombrer de parler tant de lui. Moins on l'évoquait et mieux il se portait. Par contre, il allait revenir sur le cas de son Hollow. Ce n'était pas tous les jours qu'il pouvait aborder le sujet avec quelqu'un qui savait de quoi il s'agissait en réalité.

Je vous accorde que devoir composer avec cette... impureté... *Un bruit similaire à un grincement de dents se fait percevoir en son esprit* est parfois un prix qu'il est regrettable d'avoir à payer. L'influence que cela peut avoir sur le caractère, l'humeur... Enfin, je n'ai sans doute pas besoin d'en discourir plus avant avec vous, vous savez à quoi je fais référence.
Pour autant, peut-on dire que cela ne se limite qu'au simple Cero ? Ce masque, aussi lourd à porter soit-il, nous offre une augmentation de puissance qui est loin d'être négligeable. Vitesse, énergie, force de frappe... Mais une fois encore, cela n'a pas à vous être conté.

Pour l'instant il met un terme à sa réplique. Son intendant avait en effet été rapide, et revenait déjà avec deux coupoles ainsi qu'une théière fumante. Une odeur de thé vert, seule variété qu'il consomme. Le Yakushiji à ses habitudes et n'y déroge pas. Pas d'agrément non plus. Seuls les thés mal préparés méritaient qu'on les saccage à coup de sucre, de lait ou autre. Et en cela Rosai était un expert, aucune amertume à couper, juste le goût intense de la plante... Le vieil homme les sert tous deux avant de se retirer sans un mot. Le Dieu de la Mort boit une longue gorgée sur-le-champ avant de poursuivre.

Pour moi, cela est suffisant et je dois vous avouer ne pas chercher à pénétrer plus loin les secrets de ce croisement contre nature. La Resurrección serait... une souillure bien trop lourde ! Comme vous y faites référence, le cas de Tōsen Kaname ne prête pas envie de tant franchir les limites...

L'un de ses successeurs... ou prédécesseurs, suivant la chronologie où l'on se plaçait. À croire que sur ces derniers siècles, la Neuvième Division était destinée à être dirigée par un hybride... Soit ! Kaname constitue le seul Vizard connu à avoir passé ce cap. Un corps lourdement transformé, une psychologie profondément affectée... Non, si cela est évitable, il est clair que Tenzen préfère ne pas avoir à aller jusque là.

Je reste cependant sur mon avis que cette impureté peut-être un atout primordial, tant que nous parvenons à la garder sous contrôle. À partir de là, il est je pense dans notre intérêt de toujours chercher à progresser dans le domaine, sans toutefois aller trop loin. Cela dit, je ne peux pas encore prétendre être un expert sur la question... Une soixantaine d'années tout au plus, voilà l'expérience que j'en ai...

Et pour ce qu'il en savait, Noboru pouvait très bien avoir maîtrisé son Hollow avant lui. Environ un siècle à être torturé lentement par Ikarib, avant qu'enfin Tenzen et lui ne se confrontent. Cette domination du Shinigami sur le Hollow durait donc à présent depuis un demi-siècle, et il ne cessait pourtant d'être harcelé par celui-ci. Par contre, une nouvelle fois du peu qu'il en sait – se basant sur quelques rapports rédigés par d'anciens Capitaines désormais membres de la Division Royale – sa maîtrise est plutôt bonne, autant en durée qu'en terme de puissance. Et Noboru ? Le mieux est encore de lui poser la question.

Où en êtes-vous pour votre part ? Je suis curieux je vous l'avoue de connaître vos propres avancées dans le domaine...

Pragmatique, le Capitaine Yakushiji. Même s'il ne semblait pas accepter totalement la "situation" qui lui était tombée dessus, au même titre que le Kyuusei, il ne dénigrait pas l'apport de puissance que l'être qu'il avait en son sein. Apport de puissance du reste bien connu du Vif-Argent, puisqu'à nouveau son interlocuteur ne lui apprenait rien de nouveau sur les avantages de l'appartenance à la famille des Vizards, comme on les appelait. C'est d'ailleurs ce que Noboru allait répliquer avec amertume lorsque l'intendant de la Division se présenta pour opérer le rituel du thé, laissant un instant de répit et de recueillement entre les deux hommes.

Le thé était fort, intense sur le palais, retranscrivant parfaitement le goût de la plante. A vrai dire, il n'était guère surprenant que Tenzen apprécie ce rituel - ce qui était notable, vu la vitesse à laquelle il s'empressa de goûter la première gorgée - puisque tout était un écho de l'image qu'il renvoyait aux autres: la force, le caractère, peut être même une certaine authenticité. Marrant, comme un moment tout simple de la journée pouvait être interprété pour en dire long sur l’identité de la personne qui le vivait...

- Niveau humeur, je n'ai pas encore vu de changement notable chez vous, ou alors peut être que vous étiez encore plus stoïque face à la provocation par le passé...Cela dit, on ne vous nomme pas Maître du Jinzen pour rien...

Il avait dit ça entre deux gorgée rapide, histoire de ne pas se brûler la langue comme un gland. Le sujet de l'ancien Capitaine renégat le fit sourire: on pouvait pas dire que sa tentative d'évolution était une réussite.

- Il est bien vrai que quand on lit les archives de combat sur la transformation de Kaname, ressembler à une grosse mite toute moche, non merci. En même temps, le gars avait l'air d'avoir un pet au casque à la base, il s'est laissé emporter en quelque sorte par le hollow en lui. J'ose espérer que c'est différent pour nous, qui tenons ferme face à son influence...

Point de vue sitôt partagé par le Lotus Blanc. Si les deux hommes avaient quelque chose en commun, c'était bien leur volonté inflexible. A voir ce que cela donnerait si d'aventure leur chemin les menait vers "l'évolution ultime" du Vizard...

- Concernant mon cas, je dois l'avoir vaincu la première fois à peu près à la même époque que vous. J'ai eu la chance de faire ça au cours d'un entrainement avec Shinjirô, ce qui a facilité mon "passage". Maintenant, je ne pense pas avoir le même niveau de maîtrise que vous, vu ce que l'on raconte sur votre Cero à la Dixième. Disons que je n'ai pas la même rigueur d'esprit, étant déjà pas mal énervé sur les bords...comparé à un shinigami de 700 ans mon aîné, et qui suplante tout le monde question méditation, j'ai encore du chemin à faire...et puis, j'ai un parcours plutôt erratique, question formation, je peux pas prétendre à connaitre par coeur les méthodes pour évoluer. Disons que je suis plutôt autodidacte.

Il avait intégré la Soul Society grâce à l'entrainement prodigué par le colosse d'Argent. Autant dire que question formation académique, il pêchait grave. Cela dit, dans un hypothétique monde parfait, le Yakushiji pourrait remédier à cela. Encore faudrait il gagner ses galons auprès de lui.

- Et vous, comment s'est passé cette victoire. Z'aviez quelqu'un pour limiter la casse? Vu l'époque, vous étiez pas encore ici, si je ne m'abuse...

Se moquait-il de lui ? Son comportement avait bel et bien changé, c'était un fait. Mais comment pourrait-il le remarquer outre mesure alors qu'ils ne s'étaient jamais rencontré avant que ce Hollow en son âme fasse surface ? Bien sûr, il ne pouvait pas non plus savoir ce qu'il se passait dans son esprit, et le fait qu'il lui coûtait généralement de faire taire Ikarib afin que justement ses réactions n'en soient pas par trop affectées.

Et bien... Sans cette influence néfaste, Hitsugaya-kun seraient toujours à la tête de la Dixième Division sans doute. Ce à quoi je ne peux que manifester quelques regrets, lorsque l'on voit quel spécimen a repris ses fonctions...

En effet, Eiichirô n'était pas pour Tenzen ce que l'on pourrait qualifier de référence. Mais soit, ils n'étaient pas là pour parler de lui.

Dans la plupart des cas je parviens à en refréner l'influence, il me faut juste accepter que mon agressivité occupe une plus grande part de moi-même...

Si par le passé il n'était pas un homme prompt à la colère ni à quelque sorte d'émotion sinon la lassitude de côtoyer des êtres clairement inférieurs spirituellement parlant. À présent, son caractère se montrait plus tranché, laissant encore moins de place à la tolérance qu'auparavant. Entre les conseils pressant d'Ikarib qui portaient une influence sur son état d'esprit, le fait que ce dernier perturbait ses méditations n'étaient pas non plus étranger à ses sautes d'humeur. En effet, se replier en son monde intérieur avait toujours été une méthode privilégiée pour trouver la paix. Or, il ne la trouvait plus réellement via ce biais depuis qu'il devait faire face à cet invité surprise. Maître du Jinzen, oui, de par ses connaissances en la matière. Mais plus pour lui-même, incapable de trouver encore une méthode pour progresser lui-même, devant désormais affronter son Hollow et non plus l'avatar de son Zanpakutô... Cela, il n'en dit rien. Qui respecterait encore la véracité et l'efficacité de ses cours si l'on apprenait qu'il était pour sa part devenu incapable de communiquer plus avant avec son propre Zanpakutô en toute sérénité ?

Vous avez raison. Je me trouvais encore en exil lorsqu'Ikarib s'est manifesté. Sans personne pour m'aider à maîtriser quoi que ce soit... L'on a imputé quelques mille neuf cents décès à l'Agung, mais j'avoue que j'ignore en quelles proportions le volcan et moi en avons été responsable... J'en suis venu personnellement à la conclusion que tous ces morts me sont imputables car jusqu'à preuve du contraire le magma n'aurait pas coulé sans mon intervention...

Sa mine est sombre, indiquant qu'il n'en tient aucune fierté. Un fait qu'il a fini par accepter, car il n'aurait rien pu faire pour l'anticiper et le contrer.
Le Shirohasu termine alors son thé sans chercher à relancer la conversation, laissant planer ses dernières paroles. Si Noboru avait encore quelque chose à évoquer, il était évident qu'il ne se gênerait pas pour le faire. Sinon et bien, il ne semblait pas du genre à s'éterniser sans y trouver une nécessité... Tout du moins Tenzen ne le congédiait pas, c'était toujours ça.

Ça sonnait bizarre, de voir le Tenzen parler de l'agressivité inhérente à la présence d'un Hollow à ses côtés. A vrai dire, le Fukutaisho avait toujours pensé que le type en face de lui était bourru par nature, mais vraisemblablement ça n'avait pas toujours été le cas. Difficile d'imaginer un Yakushiji plein de paix, presque bon avec les autres...non, c'était presque plus flippant aux yeux du Kyuusei que le constat actuel sur la personnalité du Lotus. Enfin bon, après quelques entretiens, c'était bien normal de commencer à entrevoir la personnalité de son interlocuteur...

Il devait quand même noter que le Capitaine se livrait à lui alors que leur relation avait commencé sur une pente savonneuse. Chose peut être improbable, mais il semblait que quelque chose pourrait ressortir de tout ça. Oh, il ne s'y trompait pas, Tenzen n'était pas du genre à changer d'avis vite - pour un type d'au moins trois fois son âge, il avait sûrement eu le temps de réfléchir sur la condition humaine et ses relatifs clichés - mais peut être alors, à la lueur de ce partage, comprendrait-il mieux ce qui poussait Noboru à avancer. Tout comme celui-ci tentait de le faire. C'était une chose de se détester cordialement, s'en était une autre de refuser la collaboration, alors même qu'on était sur le même bateau. Et le Vif-Argent n'était pas stupide au point de négliger ce détail capital.

Mais pour en revenir aux confessions du tôlier de la Neuvième, elles en disaient beaucoup sur ce qui motivait sa politique d'excellence. Avoir tant de sang sur les mains, ça peut rendre fou. Ou pousser à prendre certains choix de vie plutôt extrêmes. Et encore, le Kyuusei pouvait se tromper. Tenzen semblait prendre constamment à contre-pied les opinions que l'on pouvait avoir de lui.

- Je vois. Une sacrée affaire, hein...heureusement, on paye chacun pour ce que l'on a pu faire dans le passé, d'une manière ou d'une autre, sans qu'on en soi conscient soi-même, quelques fois. Question d'équilibre.

C'était son crédo. La balance cosmique, tout le tintouin. Ça lui permettait d'accepter pas mal de chose, de le rassurer, peut être. On a des grandes aspirations à la liberté, c'est pas pour autant qu'on n'aime pas avoir le confort d’une situation bien carrée. C'est mieux pour la santé du cigare.

- En tout cas, je me félicite de vous avoir trouvé, Capitaine. Des gens pour me motiver, j'en trouve plus trop, ces temps-ci. Si d'aventure d'autres paris vous tentent, vous savez où me trouver. Et le thé était excellent. J'vais pas vous déranger plus longtemps, on a tous à faire.

Finissant sa dernière gorgée, sur le coup, il se leva pour se mettre en route. Effectivement, même si ces petits moments étaient précieux, à leur manière, ils avaient toujours une fin. Et puis, rallonger la sauce n'aurait rien donné de bon. C'était le problème avec deux hommes à l'aise dans l'expression des sentiments. Prenant congé, Noboru se dirigea donc vers la porte, avant de se tourner pour un ultime salut.

- Oh, et, en passant, mon épée est vôtre, le jour où vous en aurez besoin. Je peux pas nier que ce n'soit pas l'amour fou entre nos deux contingents, mais j'arrive quand même à voir au delà de tout ça. On est dans le même radeau à la dérive, en quelque sorte. Ça peut vous paraitre complètement con, mais je préfère que vous le sachiez maintenant qu'on est encore tranquille, à se tourner les pouces au Seireitei. Comme ça, le jour où tout va nous péter à la gueule, vous saurez où tourner votre regard.

Il n'était pas du genre à ruminer ses pensées sans s'en ouvrir. Au moins, ça avait toujours le mérite d'être clair. L'autre comprendrait peut être pas, à l'aune de la situation actuelle, mais le Kyuusei entendait bien limiter le baroufs autour des deux divisions à la simple compétition un peu trop bruyante. Ce que le Capitaine Yakushiji montrait constamment à la face du monde trouvait un écho dans la volonté inébranlable du shinigami. Et cela suffisait à lui apporter un crédit indubitable.

Finalement, ce Noboru se montrait petit à petit de moins en moins... hum... « pro-onzième » pourrait-on dire. Le fait d'avoir fait ses armes avec quelqu'un comme le Kenpachi n'avait pas vraiment dû l'aider à engranger les règles minimales d'étiquette, dirons-nous. Et s'il avait plaint Shinjirô lors de leur dernier affrontement, c'était peut-être au final l'inverse qui gagnait plus de véracité. Le Kyûsei n'était pas un mauvais bougre, il aurait juste largement gagné à recevoir un enseignement plus digne au sein de l'Académie plutôt que de grandir au Rukongaï avec le Kiryû en « guide spirituel ». Malheureusement, l'on ne pouvait pas revenir là-dessus, ce qui est fait est fait. Pour autant, il y avait peut-être matière à faire quelque chose de lui, qui finalement ici était parvenu à manifester respect et envie de dépassement de soi. Sans doute les deux qualités que Tenzen prisait le plus...

Mais l'intervention la plus étonnante fut sans doute la dernière. Il ne faisait ni plus ni moins que de se proposer à son service si les événements venaient à s'y prêter. Compte-tenu des antécédents, voilà bien l'une des dernières choses à laquelle il aurait pu s'attendre.

J'en prends bonne note, Kyûsei-Fukutaishô. Mes salutations à votre Capitaine...

Que pouvait-il bien dire d'autre ? En effet, la proposition n'était pas tombée dans l'oreille d'un sourd, quoi qu'en disent certaines blagues de mauvais goût sur son grand âge. La deuxième partie quant à elle n'était là que pour en profiter pour se rappeler au bon souvenir du Kenpachi. À présent que Noboru avait quitté les lieux, Tenzen se contenta de ressortir son instrument et de reprendre sa pratique là où il l'avait laissée à l'arrivée du Vice-Capitaine. Une discussion courte mais intéressante qu'il pourrait à présent remâcher calmement tout en pinçant les cordes de son guqin...