Le grand jour.
Un jour dédié à notre chère famille et je me suis levée tôt pour cela, pas le temps de gaspiller une seconde. Je suis déjà accaparée par les enfants et là, ils me regardent, me posent des questions sur ce que j’écris. Je leur dis.
Maintenant, ils veulent te dire certaines choses.[L’écriture est très appuyée et maladroite]
QISMAT ! T’ES PARTI OU ? TU NOU MANQUE ![L’écriture est un peu moins appuyée, toujours aussi maladroite]
AUJOURD…D’HUI TAMA VA JOUE AVEC NOU[L’écriture est plus soignée, penchée, celle d’un gaucher]
Qismat, on t’en gardera un. Tu nous manques.
Riheb.
P.S. : Je vais mettre les rubans rouges, je les ai bien conservés !*****
Elle aurait voulu être pleinement heureuse de cette journée de congés mais non, il n’était absolument pas mérité, ni demandé à la base. Cela faisait deux ans que les Reapers étaient installés si bien que la Division 2 avait des allures de Division 13. Autant être entourée des gens que l’on aime plutôt qu’accompagnée de brouhaha d’un ton prudent avec la rage au ventre de ses collègues. Depuis le temps que les enfants de la maisonnée voulaient lui montrer leur progrès, leurs découvertes, Idjouher n’allait pas laisser passer cette chance. Le matin, elle prit le temps de parler avec les femmes ainsi que de participer aux tâches ménagères en laissant les enfants jouer dans l’arrière-cour. Rapidement, la discussion finit par tourner autour des potins de quartier puis sur la vie privée de leur pilier. Oui, elle ne vivait que pour sa famille et jamais pour elle-même ce qui fit sourire Lalla Zohra tranquillement assise sur un tabouret sous le porche de fortune à l’abri du soleil éclatant d’été. Elles étaient si loin de la vérité. Comment avoir une vie amoureuse sans l’envie d’en avoir et même pire, n’avoir aucune notion de cette idée folle ? Qismat avait essayé maintes fois de lui expliquer et avait même tenté sa chance, avec douceur comme avec violence, Idjouher n’avait pas répondu. Qu’est-ce qu’il fallait répondre de toutes façons ? Cette façon qu’il avait à la regarder lui faisait penser aux Hollows qui voulaient la tuer quand elle en croisait et ne s’était pas gênée pour le lui dire.
« L’amour est une façon d’avoir faim. Le consommer est l’apaiser. Plus tu me résisteras… »- Abbes serait un bon parti ! Tu pourrais même l’entraîner pour qu’il devienne Shinigami ainsi vous pourriez vivre au Seireitei, suggéra Akatane.
- Non.- Il est grand, fort, calme, vous vous connaissez depuis longtemps… continua à énumérer Akatane avec une épingle dans la bouche en étendant un drap.
- J’ai dit non.- Tu n’aimes pas mon père, Idjouher ?Ce fut Riheb qui finalement réussi à clore le sujet, la mine étonnée et un peu tristounette encadrée de ses cheveux bruns longs décorés des fameux rubans rouges, présents de Qismat. Elle avait beau grandir, elle restait une enfant que l’on voulait dorloter à jamais
- Ton père et moi sommes amis. Je l’aime mais pas dans le sens qu’Akatane voudrait.Au vu du sourire éclatant de la jeune demoiselle aux rubans rouges, cette réponse lui allait comme un gant et lui montra un petit bateau de papier bien droit et soigné.
- Tu es sûre que ça va marcher, ça ? demanda Riheb en inspectant une dernière fois sa création.
Affectueusement, Idjouher lui prit la main pour l’attirer à quelques lieues de la maison où un cours d’eau passait, un simple ruisseau entre deux pâtés de maisons où un figuier fatigué coulait ses vieux jours. Toutes les deux s’amusèrent à le faire voguer le plus loin à l’aide de fines branches mortes puis le laissèrent couler, diluant l’encre qui composait leur lettre commune.
- L’âme de Qismat...sa destination reste une question en suspens. Par contre, pour son corps qui fait partie de notre environnement, autant que tout ce qu’on aurait voulu lui dire fasse partie du même ensemble. L’eau, l’air, la pierre, le feu de la Soul Society.Riheb était pendue à ses lèvres, ses grands yeux marrons tournés vers le visage de sa précieuse grande sœur essayaient apparemment de chercher une autre réponse tout en assimilant la précédente.
- Tu l’adorais, hein ?Idjouher ferma les yeux, le sourire léger et triste figé sur ses lèvres retenait un suspense difficile à gérer pour Riheb qui retenait sa respiration.
- Oui. Je l’adorais.Et Riheb éclata de rire, cristallin, léger, un gazouillis qui attisait le rire plus soutenu de la Shinigami.
- Qu’est-ce qu’il aimait le plus manger ?
- Le chocolat.Riheb était étonnée, puis fronça les sourcils pour fouiller sa mémoire, persuadée qu’un élément pareil n’aurait jamais dû lui échapper puis finit par soupirer de frustration.
- Pourquoi tu n’as jamais préparé des gâteaux ou des friandises au chocolat ?
- Il aurait été capable de voler les friandises pour toi, il était hors de question qu’Abbes et Qismat ait une raison de se taper dessus.
- Il parait qu’il y a un confiseur chez les Shinigami.
- Oui, c’est vrai.Espiègle, Riheb laissa s’étirer un long moment de silence et minauda :
- Si tu n’as pas d’idées pour nous gâter…autant apprendre d’un maître ?
- D’accord, tu as gagné. Je vais y aller mais la prochaine fois, essaie de ne pas espionner les rares Shinigami passant par là.Pris en faute, Riheb mit sa main sur le cœur et jura de ne plus recommencer. Tous étaient à cran, s’ils devaient se passer les nerfs sur des citoyens de districts reculés, autant ne pas leur donner de raisons de le faire. Cette situation était plus que désastreuse…
De retour à la maison, Idjouher expliqua rapidement qu’elle allait acheter des chocolats de chez Cho’. Rapidement, elle mit son shihakusho et son hakama, sans oublier de compresser sa poitrine fort peu importante déjà et de fixer Saif-al-Jawza à sa ceinture. Pressée de consacrer de nouveau du temps aux siens, la kabyle prévint de son absence et disparut en un shunpô en passant par les toits que ses pieds nus connaissaient par cœur, les tabi à la main.
Arrivée devant le gardien qu’elle salua poliment, Idjouher remit ses tabi pour pénétrer dans l’enceinte du Seireitei. Une boutique de sucreries ne devait pas être difficile à trouver. C’était une bonne idée histoire d’adoucir un tant soit peu le cœur aigri et lourd de ses compères. En posant quelques questions aux Shinigami sur place et à l’odorat, la kabyle arriva à bon port : chez Cho’, une petite boutique faite à partir d’une remise réaménagée pour mettre des étalages et ouverte à l’arrière pour permettre d’en cuisiner afin de ravir les plus patients à l’arrière. Ingénieux et sans trop dépenser de moyens pour arriver à un enthousiasme rafraîchissant. Pourquoi ne pas essayer et faire partager ? Ni une ni deux, Idjouher s’engagea dans la longue file sans broncher.
Deux heures plus tard, ses pieds étaient au supplice. Rester planter des heures étaient dans ses cordes mais avec des tabi inconfortables était de trop. Toute en finesse et en agilité de velours, Idjouher parvint à l’article désiré, approchant sa main prudemment, elle se saisit d’une autre plus rapide que la sienne dont le poignet était paré d’un bracelet à peine caché par la manche de son shihakusho. Elle appartenait à une jeune femme arborant un châle blanc où lézardaient ses cheveux rouges. Leurs regards se croisèrent, ce fut dommage de constater que la colère habitait ses yeux turquoise.
- Mais heu...dites donc c'est mon chocolat, je l'ai vu avant vous! Et puis la galanterie voudrait que vous me le laissiez !Idjouher resta neutre, toujours la main sur celle de sa comparse bien nerveuse, il valait mieux la laisser d’abord tempêter avant de discuter calmement. Il y avait bien une solution à tout même pour des chocolats. Après tout, ce n’était pas que pour elle.
Tout à coup, son visage prit la teinte de ses cheveux et lâcha sa main, peut-être que le contact la dérangeait après tout.
Sai. Elle vous a prise pour un mâle.Cela lui était tellement naturel d’être prise pour un garçon qu’Idjouher n’en fut absolument ni embarrassée, ni courroucée. Cependant, jamais elle n’aurait cru que cela allait gêner facilement autrui. Parfois, cela pouvait blesser l’orgueil de quelques jeunes recrues téméraires pendant les séances d’entraînement mais cela s’arrêtait là.
Et la Shinigami à la chevelure de jaspe s’inclina, bredouillant des excuses.
- Mademoiselle, je vous en prie... Attention, venez par là je vous prie, prévint doucement Idjouher de sa voix profonde en entraînant sa consœur vers elle, menacée par quelques coups de coudes.
Avisée, Idjouher prit rapidement le sachet de chocolats et le mit devant la Shingami.
- Je suis venue ici pour partager ces bonbons. Je n’en ai besoin de peu, je compte un peu m’inspirer tout simplement. Si vous le voulez, je l’achète et nous pourrions partager.Il était hors de question qu’une rare oasis de détente pour Shinigami soit le théâtre de piques de crise alors qu’il était simple de trouver un terrain d’entente.
Malheureusement, les gens se poussaient et s’engageaient vite dans la boutique. Tant pis, elles allaient s’entendre plus tard. Idjouher fit signe à la Shinigami aux yeux turquoise de l’attendre, alla rapidement à la caisse pour payer le dû, revint en jouant des hanches pour laisser la place aux autres clients et retrouver son obligée.
En signe de bonne volonté, Idjouher lui remit le sachet et lui fit signe de sortir au plus vite de cette fournaise naturelle saveur praliné.