Sociabiliser au sein du Capitanat, Onzième édition [PV Shinjiro]

Cela faisait déjà quelque temps que ça lui était tombé dessus, et pourtant Taka ne parvenait toujours pas à se faire à sa nouvelle place au sein de la Soul Society. Lui, Capitaine ? Si on lui avait suggéré, il se serait contenté de rougir, de se gratter la joue avec son index comme il avait l’habitude de le faire, et serait parti au loin pour repousser ces idées incongrues de son interlocuteur du moment. Et pourtant, quand la proposition lui avait été faite avec sérieux, il avait accepté. Et Shu s’était assuré qu’il ne se rétracte pas. Et voilà où il en était arrivé : lui, Capitaine de la Cinquième Division. A chaque fois qu’il se voyait dans son haori, il se pinçait pour être sûr qu’il ne rêvait pas. Et il ne rêvait pas. Avec son nouveau poste, en plus de devoir s’occuper des Archives, tâche propre à sa Division, venait de nombreuses obligations, dont celle de faire connaissance avec tous ses homologues. Pour la Dixième Division, c’était fait. Il avait également côtoyé en mission Kaogake Haiko, le Capitaine de la Sixième. Kuragari Asuna, propulsée de la Quatrième à l’ensemble du Gotei 13, il connaissait aussi.

Aujourd’hui, c’est le Capitaine de la Onzième Division qui allait recevoir une visite du tout jeune Capitaine Kazegai. Kiryû Shinjirô. Taka avait déjà aperçu l’énergumène, et il était pour le moins colossal, à l’image de ses troupes, les plus physiques du Seireitei. Alors qu’il était en route pour les quartiers de la Onzième, une fois n’est pas coutume, le blondinet appréhendait : d’abord, Shinjirô pouvait sans doute le briser d’une pichenette, car en plus d’être un monstre physiquement, son reïatsu suivait. Le Kazegai n’avait de cesse de ravaler sa salive, pour humecter des lèvres sans cesse trop sèches. Et plus sa destination approchait, plus son index venait frotter sa joue, geste habituel, comme pour se rassurer : rien n’avait changé, après tout. Personne n’avait encore essayé de le tuer pour son incompétence, pourquoi cela arriverait-il désormais ? Et puis, il était devenu Capitaine, donc il devait justement arrêter de penser comme ça.

Il aperçut aux abords du secteur de la Onzième deux Reapers, et fronça instinctivement les sourcils : ceux-là s’étaient incrusté ici après l’éradication des Maho Tsukaï et le décès du précédent Capitaine-Commandant, et considéraient les Shinigami comme des loques. Et, étonnamment, quand c’est eux qui mettaient en doute ses capacités, cela agaçait le Capitaine de la Cinquième. Non pas qu’il ait été, au cours de ces deux ans, spécialement pris à parti, mais sur le principe, cela ne lui plaisait pas. Mais pas le temps de réfléchir à tout ça : il était arrivé à bon port. Il inspira un grand coup, tirancha le col de son kimono, lissa son Haori et fit le pas décisif qui l’amena dans le territoire de la Onzième Division. Il espéra que Shinjirô n’était pas à l’entraînement, ou il le provoquerait en duel en coup simple. A moins qu’il n’ait trop de clichés sur la Onzième. Un coup à se faire tuer, ça. Il se gifla pour se remettre les idées en place et s’enfonça plus avant dans les quartiers de la Division du Capitaine Kiryû.

Plutôt que de chercher bêtement, le blondinet décida de demander au premier Shinigami qu’il croiserait où se trouvait Shinjirô. Normalement, il aurait droit à une réponse construite, car son haori lui valait le respect, aussi peu de valeur ait l’homme dans le haori. Alors, il héla un soldat de la Onzième au loin, et l’autre le rejoignit. Après les salutations d’usage, Taka se lança sur un ton quelque peu hésitant :

- Dites-moi, mon brave, pourriez-vous m’indiquer où se trouve votre Capitaine ?

Hum, le vouvoiement était peut-être de trop.

- Capitaine Kiryû ?

Il se reposait. Tout simplement. Adossé à l'un des murs de sa division, yeux clos, Kaimetsu posé au sol négligemment, le colosse somnolait. Même si depuis quelques temps, il s’astreignait à un entraînement des plus rigoureux, il trouvait agréable de pouvoir de temps à autre souffler. Ne serait-ce que pour repartir avec plus d'entrain après. Ainsi ne réagit-il pas lorsque le Shinigami vint à lui. Préférant garder les yeux fermés. Préférant rester dans cette posture qui lui permettait de se prélasser. Mais force est de constater que cela ne décourageait pas le soldat. Il restait planté face à lui. Il eut même l'audace de le déranger à nouveau.

- Pardon Taishô mais c'est important. Le Capitaine Kazegai est là. Il vous demande.

Poussant un long soupir de résignation, le colosse prit le temps de se relever, attrapant au passage la poigne de son Zanpakutô. L'immense ombre du Capitaine enveloppait désormais complétement le Shinigami qui l'avait dérangé, ce dernier donnant désormais l'impression de se ratatiner. Il était nouveau au sein de la Onzième, cela se voyait. Il regarda autour du gars, cherchant le fameux Capitaine. Lorsqu'il reporta son regard sur le soldat, il lui fit comprendre d'un signe qu'il ne comprenait pas.

- Je... J'ai trouvé bon de lui dire d'attendre où il était le temps que j'aille vous chercher, Taishô.

Shinjirô ne put s'empêcher de sourire : il n'y avait bien que dans sa division que l'on osait demander à un Capitaine d'attendre plutôt que de le conduire à lui. Cela chassa l'envie à Kiryû de l'engueuler. Remettant sa lame dans son dos, il s'approcha du Shinigami et lui posa une main sur l'épaule.

- T'as bien fait. Retourne t'entraîner, j'vais aller le voir. Il est où ?

Les paroles rassurèrent le Shinigami qui partit suivre les conseils de son Capitaine, non sans lui révéler avant l'endroit où se trouvait le Capitaine. Lorsqu'un haut gradé était nommé, chaque Shinigamis en était informé. Il s'agissait là d'une obligation des plus logiques, évitant ainsi les erreurs lorsque l'on se retrouvait face à un des nombreux Taishô du Seireitei. Tranquillement, il se rendit sur place. Il n'était pas difficile de reconnaître un étranger à la Onzième : la plupart avait l'air complétement coincé, regardant à droite et à gauche de peur de tomber sur un groupe de casseurs. Shinjirô avait évidemment interdit toute action de ce genre mais la réputation de ses gars suffisait à faire peur. Taka semblait pourtant assez à l'aise. A moins qu'il ne s'agisse que d'un simple effet visuel. Arrivé à portée de voix, il prit la parole.

- Il parait que tu m'cherches, mon pote. Bah me voilà. T'es Taka, c'est ça ?

Bien sûr, Shinjirô ne s’embarrassait jamais des convenances. Cela ne l'intéressait pas. Faire des ronds de jambes, il laissait ça aux autres. Lui allait droit au but. Et la nomination de cet homme étant récente, il n'avait pas forcément retenu son nom. Il ne pensait pas en être loin néanmoins.

- Qu'est-ce que tu viens foutre chez moi, mon gars ? Les autres préfèrent éviter l'endroit, depuis quelques temps. Paraît que j'suis de mauvais poils, toussa toussa. Bah... Des conneries, ouais ! Ça fait plaisir de voir un nouveau prendre une place aussi importante. Bienvenue dans la famille !

Le brave Shinigami de la Onzième, passé un moment d'incompréhension sans doute dû à l'utilisation d'un vous de politesse par un Capitaine à l'égard d'un soldat, demanda au Kazegai d'attendre ici tandis qu'il partait chercher le concerné. Le blondinet hocha la tête et observa l'autre s'éloigner, puis croisa les bras dans son dos et commença à observer les alentours, affutant son esprit pour peut-être repérer quelques pressions spirituelles. Qu'elles soient celles de Shinigami ou de Reapers. Tout en laissant vagabonder son esprit, il fit de même avec son corps, observant l'architecture traditionnelle et les larges bâtiments de la plus combative des divisions. Sans doute étaient-ils ainsi pour laisser un maximum de place à des terrains d'entraînement. Heureusement pour les Shinigami, leurs confrères étrangers vivaient à l'écart, dans un kekkai qui leur était spécialement réservé. Sans quoi, ils auraient sûrement occupé une majorité des habitations du Gotei 13, et cela ne se serait peut-être pas fait sans heurts... Rien que Taka, pourtant pacifiste et prompt à s'écraser pour éviter les problèmes, n'aurait pas laissé ces gens-là occuper impunément sa Division nouvellement accordée, alors le Capitaine de la Onzième... Quelque chose titilla la nuque du leader de la Cinquième, et il leva les yeux. Un seul mot lui venait à l'esprit: gigantesque.

Que ce soit physiquement ou spirituellement, Kiryû Shinjirô était un monstre. Plus ancien des Capitaines encore actifs, il avait les dimensions du pilier de la Soul Society qu'il était. Désireux de faire bonne impression, le Kazegai se retint d'avaler sa salive et adopta un sourire neutre, mais au fond de lui il n'en menait pas large. Il n'aurait fallu qu'une pichenette au géant aux cheveux d'argent pour l'envoyer valdinguer au loin. Lorsqu'il lâcha son prénom, le Capitaine de la Cinquième le confirma à son homologue d'un hochement de tête. Quand aux félicitations qui suivirent, il les accepta en rougissant légèrement, et en frottant l'espace d'un instant sa joue avec son index, avant de s'interrompre, s'efforçant de chasser cette mauvaise habitude. Shinjirô avait l'air plutôt calme, pour quelqu'un qui était supposé être de mauvais poil. Taka passa une main dans ses cheveux, écartant une mèche de devant son œil gauche, puis entama d'un ton courtois:

- Merci pour votre accueil chaleureux, Capitaine Kiryû. Je suis véritablement flatté par la considération que vous me portez... On verra si le temps donne raison à ma nomination ou non. Quand aux raisons de ma présence ici... Disons que je voulais faire connaissance avec vous. En tant que Capitaine nouvellement choisi, j'estime qu'il est de mon devoir d'aller me présenter à mes aînés. Connaître ses alliés ne peut faire que du bien, en particulier en ces temps troublés...

Une ombre passa sur le visage du svelte Shinigami, tandis qu'il repensait au décès du Capitaine-Commandant, à la destruction de Karakura, à l'arrivée des Reapers... Elle disparut aussi vite qu'elle était arrivée, et il reprit de son ton aimable:

- Quelles nouvelles dans votre Division, Capitaine Kiryû?

Pas complétement absurde comme justification, même si le colosse n'aurait certainement jamais agi de la sorte. Il se souvenait d'ailleurs de l'époque où il avait gagné sa place et savait que les autres n'avaient pas nécessairement accepté sa façon de faire. Rien que d'imaginer leur réaction s'il était venu à eux, il se marrait. Oui, décidément ce ne serait jamais passé avec lui. Il haussa les épaules, comme si ce n'était rien. Il l'accueillait ainsi car il ne se prenait pas la tête. Et en ces temps troubles, il ne pouvait se permettre de jouer au gros con. Pas avec ceux qui ne le méritaient pas. Sa colère, il l'a passerait sur les Reapers.

Il est vrai que le temps seul ferait son office : on ne pouvait savoir ce que valait un Capitaine tant qu'on ne l'avait pas vu à l'action. Aux yeux du colosse, savoir se battre n'était pas le seul critère pour être respectable dans cette fonction. Il fallait aussi et surtout en imposer. Marcher comme un seul homme. Pour cela, il fallait imposer le respect auprès de sa division. Sans cela, rien ne tournait. Même s'ils étaient intégrés dans une structure militaire, cela ne garantissait pas l'obéissance totale des Shinigamis. Shinjirô le savait pour avoir été simple troufion. Il avait imposé sa vision de la Onzième à chacun des hommes et des femmes qui constituaient son unité. Ils étaient une famille.

Et en parlant de famille, les Capitaines en faisaient évidemment partie. Le Gotei était dur. Mais juste. C'est pour cela que le colosse restait. C'est pour cela qu'il plaçait sa lame au service du Seireitei. Au final, il n'était pas différent des soldats qui se trouvaient au sein de son groupe : il obéissait simplement aux ordres donnés. Même s'il pouvait se permettre de gueuler, contrairement à ses gars.

- Pas con, l'initiative, j'dois l'admettre.

A la question posée, la réponse était déjà toute trouvée. Ses gars n'avaient pas le temps de réfléchir tant lui et Krow leur mettaient la pression. Les entraînements étaient plus nombreux. Plus difficiles. Le Kenpachi faisait en sorte de les préparer pour qu'ils soient au sommet de leur forme. Il n'attendait rien d'autre que l'excellence. La raison en était évidente : il s'attendait à un conflit avec les Reapers et pour avoir une chance, son unité devait être préparé au mieux. Eux, les soldats du Gotei par excellence, ne pouvaient pas être médiocres. Ils représentaient al force de frappe principe de cette armée. De fait, ils devaient en imposer.

- Mes gars travaillent à fond, aucun répit pour eux. Avec ce qui se passe en ce moment, j'préfère mettre toutes les chances de notre côté, tu vois. Ma division est sensée être en première ligne en cas d'attaque. On doit montrer qu'on n'est pas à prendre à la légère. Si j'veux qu'ils reviennent vivants, j'peux pas faire autrement. Surtout avec ces branleurs qui ont envahis notre "chez-nous". J'peux te dire que mes gars sont gonflés à bloc... J'espère que ça motivera les autres à faire pareil.

Par "les autres", il parlait bien sûr des Shinigamis constituant les autres unités du Gotei. On avait beau mettre en avant la cruauté des hommes de la Onzième division en plein combat, ils restaient la force de frappe majoritaire en cas de conflits. Et on se reposait sur eux. Et à l'image de leur Capitaine, les Shinigamis de la division du Combat se voulaient impitoyables.

- Ça va pas être évident pour toi, j'suppose. Tu viens d'être Capitaine, tu vas devoir t'imposer auprès de tes gars. Et en plus tu dois gérer cette crise de merde. Tu la sens comment, cette histoire de Reaper ? T'as des échos des autres divisions ? En tout cas, j't'aime bien, mon pote. T'as une bonne gueule. Si t'as besoin de moi, t'hésites pas et tu me dis. Vu ?

Citation :: Désolé pour le temps, je te ferais plus attendre comme ça ^^

Le colosse à la tête de la Onzième se révélait sacrément bavard, mais sa personnalité collait avec l'image que s'en faisait Taka et avec les échos qu'il avait eu: un homme forgé à même le fer, rigoureux et dur, qui jamais ne ploie et cherche toujours à s'élever. Un guerrier né, en quelque sorte, qui jamais ne cèderait face à ceux qui essaieraient de l'envoyer dans la servitude: sacré contraste avec le blondinet. Il apparaissait clair que comme beaucoup de ses semblables, il avait particulièrement mal digéré l'invasion des Reaper, et qu'il voulait préparer sa Division à toute éventualité. Un instant, Taka imagina une guerre ouverte entre les Dieux de la mort orientaux et occidentaux: à coup sûr une telle chose fragiliserait le Gotei à un point tel qu'il serait facile pour un adversaire de le briser. Mais difficile de voir aussi loin sous le coup de la colère, aussi ces pensées pessimistes ne rentraient pas en ligne de compte. Comme s'il cherchait à jauger Taka, le Capitaine Kiryû avait évoqué les Reaper, justement, demandant au Faucon son opinion sur l'affaire, avant de lui dire, avec sa franchise habituelle, qu'il l'appréciait. L'ex Vice Capitaine de la Dixième en fut fort aise, et il s'en fallut de peu qu'il ne rougisse: un ami comme Shinjirô, il y avait de quoi être heureux. Mais pour l'heure, il allait répondre à ses questions et entretenir la conversation, ce serait déjà une bonne chose.

Devenir Capitaine n'est jamais facile. Mais devenir Capitaine alors que d'autres personnes à la légitimité plus que douteuse se chargent de toutes les tâches confiées à vôtre autorité est d'autant plus ardu. Et c'est exactement ce qui était arrivé à Taka. Avec un léger sourire, il s'adressa à son homologue de la Onzième:

- Pour le moment, je m'en sors. Il faut dire que j'ai eu pas mal de choses à compiler, et de fait je ne suis pas trop sorti de la salle des Archives. Ça m'évite d'avoir à faire à mes hommes! Hum, pardon pour le trait d'humour douteux. Pour ce qui est de ma Division, je pense m'en sortir plutôt bien. Les Shinigami m'ont accueilli à bras ouverts, après la débâcle de leur précédent Capitaine, et mon curriculum vitae m'a valu leur respect. Je m'efforce d'être proche d'eux pour éviter les conflits, et j'essaye de retenir leurs noms et leurs visages. Après, je n'ai que quelques tâches mineures, vu que la plupart des aspects sérieux du Gotei sont réservés à nos amis de l' Ouest...

Taka marqua une pause, avant d'attaquer le vif du sujet. Ils devaient avoir les oreilles qui sifflaient comme des bouilloires, ces Reaper, à force d'être au centre de toutes les discussions:

- Avant même d'être à la Cinquième, j'ai eu à faire à eux. Comme vous le savez peut-être, j'étais Vice-Capitaine de la Dixième, et comme ils n'aiment pas les Vizard, j'assurais souvent la liaison entre eux et le Capitaine Shu. Ils sont si condescendants que, même avec toute la force du monde, feindre l'insensibilité à leurs provocations est impossible. Toutefois, de vous à moi... S'ils sont si forts, je me demande bien où ils étaient lors des précédentes crises. Parler, c'est facile, mais agir se révèle bien plus compliqué. Et je pense que beaucoup de monde partage mon point de vue.

La majorité des retours de ses hommes évoquaient le problème Reaper. Et nul doute qu'ils jugeraient son efficacité en tant que Capitaine par rapport à la façon dont il règlerait les problèmes...

- Pas faux. Mais on s'en branle de c'qu'ils faisaient avant.

Souvent, cet argument était ressorti des discussions parlant des Reapers. S'ils étaient si forts, où étaient-ils pendant que le monde souffrait et était aux portes de l'anéantissement ? Pour le Kenpachi, cela n'avait aucune espèce d'importance. Les faits parlaient pour eux : ils avaient abattus Grimmjow et s'étaient alloué des quartiers parmi le Rukongai, sans demander un quelconque avis. Et les Shinigamis n'avaient eu qu'à accepter cela, à se taire et à faire profil bas. Inconcevable pour lui. Irréel également. Ils avaient été surclassés par une espèce cousine de la leur mais qui se pensait supérieure. Pour l’heure, les Reaper dominaient les débats. Mais plus pour longtemps, il se le jurait.

De toute évidence, quelque chose de grave s'était passé. Mais Shinjirô n'était pas un homme de réflexion. Seulement d'action. Les stratégies, il les laissait aux autres tant qu'on lui désignait qui taper. Et ce qu'il constatait depuis l'arrivée de ce zoo ambulant, c'est qu'il n'avait plus personne à fracasser. Asuna était Commandant depuis peu de temps mais n'avait clairement aucune emprise sur eux. Et parfois, alors que la déprime pointait son nez, le colosse se disait que jamais Shunsui n'aurait laissé faire les choses. Aujourd'hui, ils n'étaient plus que l’ombre de ce qu'ils avaient été par le passé. Cela l'agaçait.

- C'est la même pour nous, Taka. Les gens parlent mais n'agissent pas. C'est facile de dire qu'ils n'ont pas leur place chez nous. Encore faut-il que quelqu'un les jette dehors. Moi j'me suis déjà proposé. Mais on me garde à l'oeil. Tout comme ils ont muselés la seconde division. En un sens, ça me fait presque rire. Ces blaireaux pensent qu'on peut faire taire le Kenpachi.

Il ricanait. Quitte à mourir, il assumerait chacun de ses choix. Mais il n'était pas fou pour autant : les Généraux qui avaient fait leur apparition étaient du même acabit que les Capitaines de division. Ils avaient amenés l'élite de leur race pour s'assurer qu'il n'y aurait aucune rébellion. Et ça fonctionnait. Shinjirô ne pouvait agir seul, même lui le comprenait. Mourir sans gloire était hors de question.

- Mais j'leur réserve une surprise à ma façon, ouais ! A ma façon ! Suis-moi, gamin. J'vais te montrer un truc.

Dans sa bouche, cette appellation n'était pas péjorative. Alors qu'il s'avançait au coeur de sa division, suivit par le Capitaine, il gardait le silence. Les hommes se poussaient à leur approche. Pas par peur. Mais seulement par respect. Shinjirô s'arrêta alors devant un gigantesque terrain d'entrainement. De très nombreux anges de la Mort s'entraînaient durement ici. Attila, l'un de ses Sièges les plus fidèles, assuraient le suivi des consignes. Lorsqu'il perçut le Capitaine, il fit cesser les mouvements. Comme un seul homme, les Shinigamis se tournèrent devant les deux Capitaines, dégainèrent leur arme et saluèrent. Arrachant un sourire sur le visage de Shinjirô.

- L'esprit de ma division, c'est ça. Vaincre ou mourir, quelque que soit l'ennemi. Pas pour le Gotei. Mais pour moi. Oh j'vois déjà les tronches de ceux qui m'entendraient dire ça. Trahison et j'en passe. De pauvres petites merdes qui ne comprennent rien à rien, ouais !! C'est de ça dont je te parlais... Regarde-les. Regarde leur détermination. Le respect ne s'apprend pas. Il se gagne. Et si t'y arrives, alors ils mourront pour toi. Ces Reapers cherchent une seule chose : briser ce lien. Ils peuvent courir avec la Onzième !

Shinjirô était véritablement quelqu'un d'appréciable. Pour quelqu'un comme Taka, c'était le meilleur interlocuteur possible: franc du collier, honnête, avec lui il n'y avait pas besoin de chercher de midi à quatorze heures pour être fixé, il n'y avait pas besoin de chercher des dizaines d'interprétations à ses propos: Shinjirô pensait ce qu'il disait, et disait ce qu'il pensait. Et il avait en plus de ça ce côté insoumis, comme un cheval fou que nul ne pourrait soumettre... Un excellent modèle pour Taka, surtout maintenant que ce dernier était Capitaine et qu'il allait devoir commander à des hommes et ne plus être un larbin silencieux. Observant le colosse tandis qu'il le suivait jusqu'au cœur de ses quartiers pour assister à ce qu'il voulait lui montrer, il se jura de tout faire pour devenir comme le Kenpachi: fort et avec des convictions fermement chevillées au corps. Sur le chemin, les hommes s'écartaient, et dans leurs yeux brillaient une espèce d'admiration. C'était le signe que le Kenpachi était un bon Capitaine. Dans le cas contraire, il ne serait pas resté à sa place si longtemps, surtout vu la mentalité belliqueuse de ses hommes. Et puis, vint la fameuse "surprise".

Tous ces hommes, agissant comme un seul, il y avait de quoi rester bouche bée, ce que fit d'ailleurs le frêle blondinet l'espace d'un instant. Et les paroles du Kenpachi le confirmèrent: il était l'âme de la Onzième. Si un jour un conflit de grande ampleur éclatait, ils ne suivraient pas l'intérêt du Gotei, mais bien celui de Kiryû Shinjirô. Et au vu de leur qualité guerrière, il vaudrait mieux pour le Gotei que les deux intérêts soient similaires... Cela dit, en voyant ça, Taka se posa une multitude de questions: arriverait-il un jour à acquérir ce respect des hommes de la Cinquième? Le peu de temps qu'il était resté à la Dixième, il avait réussi à être apprécié de tout le monde, mais il y avait un monde entre Capitaine et Vice-Capitaine, tout comme il y avait un monde entre apprécier quelqu'un et être prêt à mourir pour lui... Et puis, jetant un regard au géant, il se demanda comment tout cela avait commencé. Il ne savait même pas comment il avait accédé à son poste, tout juste savait-il depuis combien de temps il était Capitaine... Non, il ne s'en souvenait même pas, la honte. Il rougit intérieurement, puis se reprit, cessant d'admirer la discipline des hommes de la Onzième.

Il se tourna vers le Kiryû, puis commença sur un ton curieux:

- Dites-moi, Shinjirô, depuis combien de temps êtes-vous Capitaine, déjà? Et comment s'est passé votre intégration à la Division? Une telle loyauté est plus qu'admirable, et je ne vous cache pas que si j'ai rien que la moitié de cette réaction de la part des hommes de la Cinquième, je serais heureux... Enfin, je vais chercher à gagner encore plus de respect, on m'a toujours dit que je visais trop bas... Ha ha.

Taka ricana un instant, puis se reprit, gêné. Non, il ne valait mieux pas que ses vieux travers ressortent.

Le colosse posa son regard sur Taka, essayant de déchiffrer ses expressions. Il est vrai que voir un tel spectacle pouvait paraître impressionnant et en un sens, il avait justement cherché à lui en mettre plein la vue. Non pas pour se mousser – il était arrivé à un point où se vanter était désormais dérisoire – mais plutôt pour lui faire comprendre l’importance d’un tel lien entre les hommes et les femmes d’une division et leur Capitaine. Se détachant de ses gars, il retourna quelques instants la question du jeune Capitaine dans son crâne. Depuis combien de temps était-il à la tête de la Onzième ?

Le temps ne représentait pas grand-chose pour un Shinigami en général. Il ne représentait presque rien pour Shinjirô en tout cas. Cela faisait plusieurs années. Point barre. Seules les circonstances de sa nomination importaient en réalité. La mort de l’ancien Capitaine lors d’un combat titanesque. Ikkaku avait été un combattant valeureux. Mais même lui n’avait pas eu les épaules pour résister face à la furie du Kiryû. De temps à autre, Noboru et lui reparlaient de ce combat. Ils avaient gagnés leur place au Gotei ce jour-là.

Devait-il le lui dire ? Shinjirô n’avait pas honte de son parcours. Il en était même plutôt fier. Il avait toujours été cet homme fort, sans attache. Et la hiérarchie lui avait toujours posé problème, même lorsqu’il n’était que simple troisième Siège. Combien de fois avait-il eu des problèmes de comportement. Mais sa carrure avait toujours suffit à calmer les pulsions des uns et des autres.

- J’saurais pas trop te dire. C’que je sais, c’est que j’dois pas être loin d’être le plus ancien maintenant. T’as entendu parler d’Ikkaku ?

Il avait toujours été un Lieutenant et un Capitaine réputé. Faisant la fierté de la Onzième. Mais il appartenait à une génération désormais perdue. Celle de l’ancien Kenpachi.

- Bah j’l’ai défié lors d’un combat à mort, respectant ainsi les anciennes traditions guerrières du Gotei. Par le passé, j’appartenais déjà à la Onzième. Troisième Siège en sortant de l’Académie. Mais les contraintes me rendraient dingue. Impossible d’évoluer en respectant les règles. Alors j’me suis cassé pendant plus de deux cent ans. J’ai ramassé sur la route Noboru et j’peux te dire que pendant ces deux siècles, on a pas perdu notre temps.

Il est vrai qu’il avait été considéré comme déserteur. On ne quittait pas l’armée si facilement. Mais jamais on ne l’avait retrouvé et pour cause : les régions se trouvant au-delà du Rukongai échappaient au contrôle du Seireitei. Un endroit dangereux pour tous. Son retour avait été perçu comme une insulte à l’époque. Et Ikkaku avait été désigné pour s’occuper de lui. Un véritable échec.

- Une fois le manteau de Capitaine sur le dos, il m’a fallut regagner la confiance des gars que j’avais quitté. J’vais pas te mentir, mon pote : c’était pas évident. Mais l’avantage avec ma division, c’est que les actes sont plus importants que les mots. Aujourd’hui, j’vois que j’ai pas perdu mon temps. Et ce sera pareil pour toi. Prouve leur seulement que c’toi le boss. Ca roulera après.

C’était aussi simple que ça. Ce n’était pas sans raison qu’aujourd’hui, il était encore Kenpachi. Et ce n’était pas sans raison non plus que son élève était devenu Taishô de la Seconde division.

L'histoire de Shinjirô était somme toute assez simple, bien que riche en rebondissements, et bizarrement, elle convenait bien au personnage: pas de fioritures, pas de virages, juste le chemin le plus direct pour agir comme il l'entendait. Et son conseil, bien qu'assez banal de prime abord, confirma à Taka qu'il pourrait lui aussi devenir un Capitaine estimé. Ça lui prendrait peut-être du temps, mais en cette époque troublée, les occasions de briller aux yeux de ses troupes seraient peut-être nombreuses. Après que le Kenpachi se soit tu, le frêle Capitaine de la Cinquième Division resta silencieux, observant encore un instant la discipline de la Onzième. Il faudrait aussi qu'il aille rendre visite à Kyuusei Noboru de la Deuxième Division, à l'occasion... Lui aussi devait se révéler très intéressant dans son genre. Écartant une mèche de devant son œil gauche, le Faucon commença à envisager de retourner à ses quartiers. Non seulement il se voyait mal retenir le colosse plus longtemps, mais cette démonstration de discipline lui donnait une motivation à toute épreuve et des idées plein la tête. Il fallait qu'il agisse et qu'il commence à montrer à ses hommes qu'il était le Capitaine dont ils avaient besoin. Lissant son haori immaculé, le plus petit des deux Capitaines présents se tourna vers son aîné et lui adressa ces paroles:

- Je vois. Merci beaucoup pour votre temps et pour cet exemple des plus marquants, Shinjirô-san. J'espère qu'un jour j'aurais moi aussi l'occasion de vous montrer la même chose de la part de la Cinquième. Après une courte pause, il reprit: Et maintenant, si vous le permettez, je ne vais pas vous retenir plus longtemps et retourner à mes Quartiers, où du travail m'attend sans doute.

S'inclinant respectueusement à l'adresse de son vis-à-vis, le tout fraîchement promu commença à esquisser un mouvement de recul, prêt à faire demi-tour au cas où le géant aux cheveux argentés le retienne. De son point de vue, la conversation avait été suffisamment instructive, puisqu'elle lui avait permis de se faire une idée précise de la personnalité du Capitaine de la Onzième, et il ne voulait pas abuser en l'occupant plus longtemps pour des broutilles, mais il n'excluait pas l'idée que son interlocuteur ait encore quelque chose de derrière les fagots à lui montrer. Fort peu probable, mais un homme du calibre du Kiryû était sans doute plein de surprises et de choses impressionnantes à voir.

» La Onzième et le respect [Shinjirô & Noboru]
» Perdu chez la onzième division [PV KIRYÛ SHINJIRÔ]
» L'assemblée de l'astre rouge [Réunion du Capitanat]
» Droit au but ! [Pv Shinjirô]
» Les lâches de la Onzième [Kyûbantai]

Sociabiliser au sein du Capitanat, Onzième édition [PV Shinjiro]

Sociabiliser au sein du Capitanat, Onzième édition [PV Shinjiro]

Sujets similaires

Sujets similaires