Il est dans ce monde des créatures du jour, qui, jouissant d’attributs favorables, assoient leur domination sur les autres résidents de cette cruelle planète. Ainsi la naissance fait les chasseurs comme les chassés sont également le fruit de la naissance. Dans ce monde de modernité où la mort venait réconcilier ses expérimentateurs avec un mode de vie plus primitif où le fort mangeait le faible, Fuan était de cette seconde catégorie peu enviable du cycle terrifiant de l’Hueco Mundo. Se profilait à lui deux prédateurs bien distincts. Dans un premier temps, ses ennemis naturels, ces fameux dieux de la mort empruntant un kimono noir et tranchant à tout va tout ce qui ressemblait de près ou de loin à un hollow. Dans un second temps, ses propres congénères d’une voracité telle que le cannibalisme n'apparait plus comme un obstacle.

Se faire pourfendre ou dévorer, aucun de ces destins ne plaisaient au jeune arrancar renégat. Pour s’en éloigner, l’électron libre s’inspira de ses ancêtres gibiers, son instinct l’amenant à se reposer le jour dans son vieil hôpital désaffecté et à se déplacer la nuit où les shinigamis demeuraient moins actifs pour les patrouilles. Naturellement, la balance voulait que le nombre d’hollow s’en trouve agrandi dans ce créneau horaire, néanmoins, le caractère limité de leur intelligence rendait plus aisé toute manœuvre de fuite, sans compter que seule une minorité de ces bêtes masquées cherchaient à le pourchasser.

De cette manière, parcourant furtivement les rues, se cachant de la vue de quiconque, oubliant presque son invisibilité, la petite chose usait de ses talents pour s’infiltrer dans les enseignes de restauration, dans les boutiques alimentaires, dans les chocolateries et autres foyers de plaisirs culinaires pour procéder à une sorte de libre service. Toujours professionnel dans ses manœuvres, ne laissant aucune trace de sa présence si ce n’est l’absence de quelques produits, le voleur encapuchonné achevait dans la plus pure tradition ses courses nocturnes en retournant dans son QG. De façon méticuleuse, il rangeait ses provisions pour finalement s’arroger la liberté de trier son butin selon ses préférences dans l’idée de conceptualiser l’équivalent d’un généreux repas.

Non loin de sa demeure se tenait ce qui ressemblait à un parc. Dans ce coin de verdure à peine éclairé par quelques lampadaires, l’arrancar aux prunelles d’opales prit place sur un banc dont le bois trahissait l’humidité ambiante. Ce vent frais et délicat servait de caresse aux pores au moins faciaux de sa peau. Malgré l’obscurité reine des lieux, l’exilé parvenait à percevoir à travers elle ce qui s’apparentait à un petit étang. L’odeur et le bruit subtile de ces eaux mouvantes suffisaient à réveiller le plus enchanteur des concerts au sein de l’enveloppe charnelle de celui qui sortait de son sachet un praliné au chocolat au lait en guise d’entrée. Loin des formalités distribuées à l’occasion d’une éducation sérieuse, Yuzuru jouissait du privilège de commencer par ce qui lui plaisait le plus. A peine croqua t-il dans cette merveille sucrée qu’une explosion de saveur le fit fondre à une intensité telle qu’il perdit l’équilibre, le faisant chuter en arrière.

Ce ne fut qu’à cet instant précis, où la douleur derrière le dos de son crâne le ramenait à un sens plus tangible de la réalité, que le Candide intégra dans son peskis une énergie spirituelle non identifiée. Le problème ne fut pas tant qu’il localisa une menace potentielle mais plutôt que cette dernière se situait juste à quelques mètres de lui. De suite, montèrent au niveau de son visage une chaleur alimentée par une émotion soudaine engendrant ce qu’un bon observateur appellerait des sueurs froides. Naturel… Paraître naturel… Une tactique que le médiocre stratège avait mise au point dans la probabilité d’une telle situation. Cette stratégie risible justifia qu’il continua à se délecter de chocolats déjà dépourvus de la moindre saveur, dos contre terre, masquant difficilement ses tremblements particulièrement perceptibles au bout de ses doigts et lèvres. Le danger tomberait-il dans le subterfuge ?

Toi ! Faut qu'on cause !