Si vis pacem para bellum.

Un dicton ayant traversé les âges, une phrase immortelle qui explicitait parfaitement les temps troublés dans le monde des Hollows. Les quelques instants de répits n'étaient que les tristes prémices d'un nouvel affrontement entre les différentes entités de l'univers. Des rixes sanglantes s'en suivraient, indubitablement. Un contingent fut formé pour entrer en lice contre cette race inattendue. Trois années paisibles pendants lesquelles Nephilim nourrissait l'espoir qu'un tel évènement se produise et il n'avait point était appelé pour en faire partie. En découdre avec ces Maho Tsukai aurait été le grain de sel corsant son spleenétique train-train quotidien. Injustice résonnait en son for intérieur. Qu'avait-il de moins que ses comparses ? Etait-ce sa perpétuelle introversion qui avait joué en sa défaveur ? L'adjuchas n'en savait rien. Condescendre à accepter ce qu'il considérait comme une sanction n'était guère dans ses moeurs. Contraint d'assurer la sécurité du palais lorsque les combattants seraient envoyés dans le monde des humains, il les regardait jalousement s'adonner aux ultimes préparatifs avant l'instant H.

Las Noches. Cette bâtisse nébuleuse surplombait le paysage, peut importe où l'on se situait, l'unique moyen de se repérer entre les dunes de l'Hueco Mundo était cet édifice ivoirin surdimensionné. Bastion de la terreur, il abritait l'élite des habitants de cet univers morbide. Ou tout du moins, contenait en son sein une infime poignée d'entités dévastatrices, corrigea la conscience de Nephilim en voyant quelques arriérés déambuler dans les corridors du palais. Une éternelle servitude jusqu'au trépas, tels étaient les dogmes enseignés par le Roi et ses bras droits. Alors que penser était proscrit, s'agenouiller jusqu'à s'en flinguer les genoux étaient une obligation. Ici et là, une fois ou deux - voir même trois, le carrelage de Las Noches était indubitablement impeccable, immaculé. Cette vassalité maladive n'était guère appréciée par le Numéros, préférant d'une part la solitude à une telle compagnie et d'autre part les susnommés, aussi nombreux pouvaient-ils être, n'étaient qu'un fardeau à traîner. Cela changera, s'espérait-il à penser d'un rictus carnassier.

L'éternité c'est chiant. Perché sur le haut d'une colonne en ruine, Nephilim scrutait les vas et viens de chacun, d'un regard sévère. Ils le répugnaient tous autant qu'ils étaient, celui-ci n'omettait d'ailleurs jamais de bougonner quelques injures personnalisées pour défouler son cortex en ébullition. Ceux-ci étaient parfois même les cibles de ses mégots de clopes. Dans la pénombre du château nébuleux, l'Arrankar jouait avec son crucifix - habituellement pendu à son cou - qu'il passait habilement entre ses doigts. L'autre main tenait sa tête, pesante, encombrée des milles et une idées pour occuper son éternelle lassitude. Rien ne lui venait, loin s'en fallait. Soupirant, il s'alluma une énième cigarette d'une brève flammèche spirituelle. Alors qu'il appréciait la fumer envahir ses poumons, le mur jouxtant le pilier où il siégeait se mit à trembler, une, deux, trois fois. Etait-ce la réponse à ses prières ? La guerre arrivait-elle jusqu'aux portes de Las Noches ? Sa journée allait-elle mieux se conclure qu'elle n'avait commencé ?

Un rire orgastique résonna dans le couloir et Nephilim fondit sur la scène d'une risette carnassière prolongeant la bribe de son masque. Si tôt sur les lieux, ses espoirs churent instantanément. Rien, ni rixes, ni sang. Seul un être étrange hurlait, répétant une demi-douzaine de fois le même mot. Ses mimiques singulières, son absence de téguments et ses yeux écarlates lui octroyaient un aspect maladif. Apparemment, ce n'était pas seulement physique, pensait Nephilim en écoutant ses dires incohérents. Plutôt curieux qu'inquiet, le Numéros s'approchait de l'albinos, priant que celui-ci puisse tout de même le divertir. Mieux le valait-il d'ailleurs, car lui créer de faux espoirs - de la sorte - coutait généralement cher.

« Ca va pas, mec ? »