T'as pas du feu ? [Koshiro - Tokiomi]

L'avantage d'avoir les moyens, c'est qu'on peut se permettre toute sorte de folies. Par exemple engager un détective privé pour retrouver la trace d'un individu qu'on n'a vu qu'une seule fois, et de loin encore bien. Habitué à frayer avec des personnes pas toujours très recommandables, il disposait d'assez de relations pour procéder à ce genre de recherches sans que quiconque lui pose de questions. Aussi longtemps que l'argent ne venait pas à manquer, son contact ne ferait que son travail. Après tout, les auteurs de manga étaient par définition des personnes sortant de l'ordinaire, il n'était donc pas si étonnant de recevoir de la part de l'un d'eux une requête si extravagante. Tokiomi n'avait bien sûr pas daigné le prévenir des risques encourus, ne sachant que trop bien qu'on le prendrait pour un fou et n'ayant aucune envie de révéler ses propres pouvoirs pour accréditer ses dires. Si son limier finissait réduit en cendres, au moins saurait-il qu'il était sur la bonne piste.

Ainsi un beau matin lui vint la nouvelle que l'individu dont il avait demandé à retrouver la trace vivait en bordure de la ville, dans une luxueuse propriété – tout du moins par rapport à l'impression qu'il lui avait laissée, la sienne étant de loin plus fameuse. Une fois qu'il se fut acquitté de sa dette – seule raison pour laquelle le retrouver sous forme de tas de cendres ne l'aurait pas tant gêné – il avait sauté dans sa voiture de sport pour se rendre à l'adresse qui lui avait été renseignée. Si les précédentes fois où il avait eu recours à ses services tendaient à prouver qu'il pouvait s'y fier, le Kuchiki ne parvenait pas à lui faire confiance, aussi avait-il pris ses précautions en emportant son zanpakutō qu'un habile sort de Kidō camouflait sous forme d'un stylo-plume.

Il aurait pu le localiser lui-même pour peu qu'il s'en soit donné la peine mais c'aurait été courir le risque de se faire repérer lui aussi en habit de Shinigami. Or, ignorant tout de cet homme y compris quelle pouvait être son opinion vis-à-vis de l'espèce à laquelle il avait autrefois appartenu, sa première préoccupation devait être de ne pas jouer trop vite cartes sur table. Il serait malheureux que leur première rencontre se solde par la mort accidentelle de l'un d'entre eux, à plus forte raison qu'il ne lui voulait aucun mal... Pour le moment. Oui, il préférait de loin se forger un avis à son sujet avant de lui montrer qui il était vraiment, aussi avait-il éteint son reiatsu jusqu'à n'en plus rien laisser sinon le minimum intrinsèque à tout humain vivant dans un lieu aussi propice à l'éveil spirituel que Karakura.

Vêtu d'une tenue qui ne mettait pas trop en avant ses facilités financières et vantait plutôt sa condition de dessinateur, il gara sa voiture de marque aux abords de la propriété mais s'assura qu'elle ne soit pas visible depuis celle-ci. Laisser en évidence un véhicule de cet acabit le ferait paraître plus suspect qu'il ne l'était, ce qui n'était pas peu dire tant sa propension à éveiller les soupçons était grande. Se parant de sa mine la plus avenante – côté commercial oblige -, il s'aventura jusqu'à la porte avec son carnet à dessin sous le bras afin de parfaire sa couverture. Le bruit de la sonnette lui parut presque irréel tant il peinait à croire qu'il en soit déjà là alors qu'à peine un mois plus tôt il se complaisait encore dans sa condition de renégat. C'était peut-être une erreur qu'il était en train de faire, mais au moins en saurait-il plus sur ce qui s'était passé dernièrement... Si bien sûr le maître des lieux consentait à le recevoir.

Excusez-moi ! Il y a quelqu'un ?

Qui est-ce qui pouvait bien venir le gonfler à cette heure de la journée ? Ses hommes ne venaient jamais le déranger en dehors des rendez-vous réguliers avec son homme de paille. De plus, Real avait la consigne de bien le contacter avant de débarquer lorsqu'elle souhaitait rallier le Quartier Général des désormais Sons of Inferno. C'est que Koshiro était un homme très occupé... Enfin... Oui et non. Pas dans le sens dont on l'entend généralement. Mais il avait une nette propension à ne jamais rester bien longtemps oisif, aimant particulièrement « s'amuser » un peu avec sa désormais fidèle Arrancar de maison. Activité précise à laquelle il s'adonnait en cet instant d'ailleurs, le dérangement n'étant donc pas particulièrement apprécié.

Koshiro sans trop se hâter hésita un instant entre poursuivre ce qu'il était en train de faire et aller voir qui est-ce qui se permettait de venir le déranger ainsi. Si c'était un scout qui venait lui vendre des putains de biscuits, c'est elle qu'il allait bouffer sur-le-champ, clairement ! Il enfila alors un pantalon, prenant garde à ne rien se coincer pendant qu'il en remontait la fermeture éclair. Tâche non aisée considérant le volume actuel du service trois-pièces de l'incendiaire. Soit...

Tu bouges pas d'là. J'reviens vite, t'auras même pas l'temps d'sécher j'te garantis !

Un éclat de rire sur cette réplique aussi graveleuse que peu délicate. Il se saisit d'une chemise à la volée, l'enfilant juste sans prendre la peine d'en attacher les boutons. C'est donc ainsi vêtu qu'il se rendit à la porte, dévoilant lorsqu'il l'ouvrit un binoclard qu'il n'avait jamais aperçu auparavant. Il n'avait déjà pas la gueule d'un flic, ce qui était plutôt bon signe, et ce même s'il ne les craignait pas vraiment. Pas de sensation étrange dans l'estomac non plus, ou du moins ne la captait-il pas avec suffisance que pour s'en apercevoir. Qu'est-ce qu'il pouvait bien lui vouloir ce type ?

Ouais, c'est pourquoi ? Si vous voulez m'vendre un truc c'est pas la peine, j'ai déjà tout c'qui m'faut ! Allez allez allez, on va à l'essentiel, c'est qu'j'ai pas qu'ça à foutre moi !

Tokiomi faillit avoir instinctivement un mouvement de recul quand la porte s'ouvrit sur la haute silhouette du maître des lieux. Une tête de truand pareille, ça devrait pas être permis. L'espace d'un instant, un doute l'assaillit. Celui que le détective qu'il avait engagé avait pu confondre les dossiers et l'envoyer sur la trace du yakuza du quartier. Mais s'il n'avait pas vu Koshiro d'assez près pour le reconnaître au premier coup d'oeil, sa pression spirituelle suffit à lui indiquer qu'il s'agissait bien de la même personne. Bien qu'il se soit attendu à ce que l'homme ne soit guère commode, il ne pensait pas que ce serait à ce point. Néanmoins, en tenant compte de ses airs débraillés et des bruits éloquents qu'il avait pu entendre depuis l'extérieur, il n'était pas difficile de deviner au milieu de quelle activité il l'avait dérangé. Mais le Kuchiki n'était pas homme à se soucier d'arriver au mauvais moment, d'autant plus quand il estimait être motivé par quelque chose d'important.

Je m'appelle Tōsaka Tokiomi. Utiliser son nom de plume était préférable, au cas où le Jimushi en connaîtrait plus sur le monde spirituel qu'il n'en avait l'air. Comme vous le savez peut-être, je suis auteur de manga à succès. À l'approche du prochain concours de la Golden Future Cup organisée par le magazine pour lequel je travaille, j'avais dans l'idée de publier un one-shot qui aurait pour thème les récents événements ayant causé la destruction d'un quartier complet de la ville de Karakura. Or, j'ai cru comprendre que vous vous seriez trouvé sur les lieux lorsque sont survenus ces phénomènes que certains qualifient de... Surnaturels.

Tokiomi porta la main à son visage pour remonter ses lunettes du bout de l'index. Ce qui ne lui était d'ailleurs guère aisé étant donné qu'il exécutait d'ordinaire ce geste du majeur, mais étant donné le caractère éruptif de son vis-à-vis, il préférait ne prendre aucun risque. Si par malheur son plan devait tomber à l'eau pour un simple geste mal interprété, il ne pourrait jamais se le pardonner. Aussi prit-il soin de mettre en avant les planches à dessin qu'il avait sous le bras en compagnie du reste de son matériel. Une fourniture obligatoire pour accréditer le prétexte dont il s'était servi. Si l'idée n'était pas si mauvaise tout bien réfléchi, il avait d'autres priorités pour le moment. Son regard soutint un instant celui du Jimushi dans l'espoir d'y voir s'y allumer une lueur d'intérêt. Afin d'accroître ces chances de voir se produire un tel événement, il lui glissa subtilement :

Bien entendu, je ne vous demande pas de m'aider gratuitement ! Je veillerai en personne à ce que vous soyez dédommagé à hauteur de votre investissement si vous m'accordez d'abuser de votre temps. Je peux même envisager de vous accorder une prime si je considère le niveau de détails dont vous vous rappelez satisfaisant. Comprenez que la fidélité et le réalisme de ce que je dessine me tient très à coeur et que je n'hésiterai pas à débourser une somme conséquente s'il le faut afin de parfaire mes planches... Mais vous désirez peut-être y jeter un coup d'oeil ?

Cette tirade s'accompagna d'un franc sourire. Son petit discours était peut-être un peu long pour correspondre aux exigences de son interlocuteur, mais il s'était pour sa part trouvé plutôt convaincant. De toute façon, il ne devait en retenir qu'une chose : son prix serait le sien. Qu'il paraisse déjà ne manquer de rien aurait pu être un obstacle, mais Tokiomi savait d'expérience que les personnes fortunées sont encore plus enclines à s'enrichir que les petites gens. Encore et toujours plus, guidés par une avarice sans borne. Le propre de l'humanité. Aussi était-il en droit d'espérer qu'un tel langage saurait le persuader. Ce faisant, il s'efforça d'ignorer le reiatsu d'Arrancar qui semblait circuler librement dans la maison...

Qui c'qui t'a sorti des conn'ries pareilles ? Et qu'est-ce tu veux qu'j'en foute de ton pognon, hein ?

Voilà qui n'était pas un accueil décent, certes. Mais qu'un parfait inconnu vienne le déranger chez lui, il n'y avait déjà rien là pour le mettre dans de bonnes dispositions. D'autant plus si c'était pour l'emmerder en pleine partie de jambe en l'air. Et pire encore, il savait apparemment que Koshiro était mêlé dans des affaires qu'il qualifiait de surnaturelles. Le « special combo » quoi ! Autant dire qu'il n'y avait là rien, mais alors rien pour le tendre à se rendre agréable. Par contre, il lui serait certainement utile d'apprendre comment ce type avait fait pour le retrouver, et déjà en savoir autant. Fallait pas non plus se foutre de la gueule des gens, même les yakuzas du coin n'avaient pas réussi à le retrouver, et voilà qu'un auteur de manga déboulait chez lui comme une fleur avec une raison totalement bidon ?

Au mec qui t'a dit ça, t'as qu'à lui dire d'aller s'faire démonter la nouille par un troupeau d'gorilles !

Ça vit en troupeau les gorilles ? Boh, il s'en tape pas mal de ce détail, à vrai dire.

Et j'vais même te dire : j'suis bien curieux d'savoir où il crèche, que j'lui explique en personne m'a façon d'penser. Allez, fais pas l'malin, file-moi son adresse avant que j'm'énerve...

Il avait comme une petite intuition : bientôt, un nouvel immeuble de cette ville brûlerait et s'écroulerait dans les flammes, avec une grande gueule au milieu qu'aurait dès lors plus jamais l'occasion de parler. C'était comme ça que Koshiro réglait ses problèmes, bien entendu, et jusqu'ici ça avait toujours bien fonctionné, pas de raison de changer de méthode.

En attendant, tes dessins, tu peux t'les foutre au cul et t'torcher avec ! Soit dit en passant, s'tu veux mon avis... ça doit encore être un coup d'ces connards de coréens ! Déjà qu'ils font d'la musique de merde, en plus ils peuvent pas s'empêcher d'balancer des bombes à gauche à droite sans raison. Une belle bande de débiles ! Tu s'rais pas coréen des fois toi ? Rha, ouais, j'les déteste !

Son explication ne tenait en effet pas la route, mais ce n'était pas vraiment de sa faute : les films de série B étaient les seuls qu'il pouvait pleinement comprendre et apprécier, et il n'y avait là rien pour motiver et encourager pleinement son imagination. Et puis, créer des trucs, c'était pas vraiment son genre, même s'il s'agit d'une excuse à la con. Lui est bien plus doué dans la destruction que dans la création, c'est comme ça...

Donc, tu vas dessiner des coréens bien moches et bien cons – toi qu'aime le réalisme hein – et y viennent balancer une bombe pour le délire, BAOUM, il manque un quartier, et on n'en parle plus. Ça t'va comme ça, c'est bon, j'peux r'tourner virer ma crampe ?

Délicatesse quand tu nous tiens...

Ça n'a pas d'importance. J'aurais facilement pu obtenir ce renseignement par moi-même si j'en avait pris le temps, mais voyez-vous je suis quelqu'un d'occupé... Et je n'avais à vrai dire pas très envie de m'exposer moi-même à un retour de flammes, si vous voyez ce que je veux dire.

Les simagrées de Koshiro avaient fini par le lasser. S'il avait trouvé divertissants son inventivité et ses commentaires – n'ayant pour sa part aucune affection particulière pour le peuple coréen – il aurait été nettement plus à même de les apprécier dans un contexte plus approprié. Car là, tout ce qu'il voyait, c'était comme il l'avait finement insinué que le Jimushi lui faisait perdre du temps en essayant de brouiller les pistes. C'était tant mieux, en un sens ; cela prouvait qu'il ne donnait pas ce genre de renseignements à n'importe qui. Mais l'ancien capitaine de la sixième division n'était pas n'importe qui, et il entendait le lui faire comprendre. Remontant une fois de plus ses lunettes sur son nez, il plaça son bloc à dessins plus en retrait – il avait tout de même pris la peine d'en amener un vrai, juste au cas où, et ne tenait point à le voir connaître un sort tragique. Il lâcha un soupir.

Nous n'arriverons à rien de cette manière. J'aurais dû commencer par là. Voilà ce qu'il en coûte de tenir à son anonymat...

S'il était clair que son informateur ne vivrait pas très longtemps à filer de pareils énergumènes et que Tokiomi ne tenait pas spécialement à ce qu'il ait la vie sauve, il ne voulait pas non plus précipiter la fin de sa carrière. Le détective pouvait encore être utile et il n'était pas dit que son successeur hypothétique serait à la hauteur. Dans un soupir, Tokiomi s'empara du stylo-plume qu'il portait à la boutonnière et l'approcha lentement de son autre main à mi-hauteur de sorte à ce que Koshiro puisse observer son petit manège. Par le passé, il avait souvent été confronté à ce genre d'individu – sans qu'ils partagent le même potentiel spirituel fort heureusement – et il ne savait que trop bien désormais que laisser ses mains en évidence lorsqu'il procédait à de telles manipulations pouvait lui sauver la vie.

Je vois que vous aimez jouer cartes sur table. Permettez-moi d'en faire de même.

Un circuit d'étincelles se créa entre ses doigts, et à mesure qu'il séparait sa gauche de sa droite le zanpakutō qu'il avait grimé sous forme de cet objet de bureau reprit sa forme initiale, la lame au clair. Il n'avait malheureusement pas pensé à emporter le fourreau, ne pensant pas avoir à le sortir à moins que les choses ne se gâtent. Cela aurait alors été un gain de temps considérable, mais cela pouvait en l'occurrence trop aisément passer pour une déclaration de guerre... L'homme semblait avoir le sang chaud – doux euphémisme – et ils se tenaient ici sur sa propriété. Autant dire que cela pouvait partir plus vite encore qu'en temps normal s'il tenait un tant soit peu à ce qu'il y avait à l'intérieur. Ce qui était selon toute probabilité le cas compte tenu de la forme de vie qu'il y avait ressentie un instant plus tôt.

Aussi prit-il le soin de ne pas l'orienter vers lui un seul instant pour ne pas risquer de l'offenser, se contentant de corriger sa prise sur son manche. En dehors de l'entraînement, il ne l'avait plus manié depuis fort longtemps et serait sans doute incapable de réitérer ses prouesses d'antan dans son maniement. Tout ce qu'il pouvait espérer était de n'avoir pas à s'en servir, ou le cas échéant de pouvoir se contenter d'user de ses capacités. Le zanjutsu avait jadis été l'une de ses grandes spécialités, du moins en apparence. Il se contentait de retenir par coeur tout ce qu'on s'évertuait à lui montrer et de le restituer le plus fidèlement possible mais l'oubliait aussi vite qu'il l'avait appris. Inutile de dire que depuis le temps son répertoire était d'un vide absolu malgré les quelques bottes qu'il avait répétées la veille encore.

Vous l'aurez compris, je ne suis pas qu'un simple mangaka. Aussi, si votre récit m'intéresse en effet dans le cadre de mon travail, j'aurais aussi et surtout quelques questions à vous poser en tant que... Sympathisant ? Admirateur ? Je suppose qu'on peut dire ça comme ça... Tant est-il que vous pouvez m'aider et j'ose croire que je peux moi aussi vous être utile. Comme je vous l'ai-dit, votre prix... Sera le mien.

Et si tu ne me donnes pas ce que je veux, c'est toi qui le paiera au prix fort, mon gros.

Et t’espères faire quoi avec ton cure-dent là ?

Comme si ce genre de tour de passe-passe pouvait impressionner quelqu'un comme Koshiro. L'incendiaire en avait vu d'autres, et en produisait lui-même de très persuasif. Et même bien plus impressionnants en fait, comme la disparition d'un quartier dans les flammes, par exemple. Alors bon, le coup du stylo-bille/katana était certes original mais bien basique à côté des tas de choses qu'il avait pu voir. Et dans le registre des menaces, tout simplement ridicule... Et pourtant, le binoclard semblait s'en défendre, dire qu'il n'était qu'un sympathisant désireux d'en savoir plus. Le Jimushi ne savait pas trop d'où il sortait ce débile – peut-être bien de Corée finalement – mais dans son pays à lui, le Japon, pourtant fière patrie des samouraïs, se pointer chez les gens sans y être invité pour leur présenter leur katana, ça ne faisait clairement pas partie des coutumes. Et ça, c'est un message qu'il comptait bien lui faire passer.

Tu crois qu'ça va changer queq'chose de m'agiter ça devant l'tarin, hein ? Tu vois ça ?

Le déséquilibré notoire indiquait alors la cicatrice qui lui barrait horizontalement le visage. Vestige de jeunesse qui ne s'était pas bien terminé pour le coupable, comme il allait très bien le lui faire comprendre.

J'le dois à un sabre comme le tien. Enfin, comme le tien... c'ui-là il se rangeait pas dans la poche quoi. Et tu sais c'qu'il est dev'nu le type qui m'a fait ça ? Il a hurlé dans les flammes jusqu'à c'que sa chair soit bien croustillante, pendant qu'moi j'me fendais la gueule !

Véridique ! Lui et ses copains, ils avaient bien grillé. Et effectivement, Koshiro y avait pris grand plaisir, rien de plus normal pour lui. Cependant, le type qui lui faisait face aujourd'hui n'était pas un simple yakuza, pas besoin d'être une lumière pour le comprendre. Des gars armés d'un katana et qui s'amusaient à faire des petits sortilèges juste pour faire joli... Il connaît d'ores et déjà une catégorie de personne qui correspond à cette description. Et on pouvait clairement dire qu'il ne les portait pas dans son cœur...

Moi, j'vais t'dire un truc. J'aime pas trop les Shinigamis et les fils de pute ! Et toi, j'crois qu't'es un peu des deux.

Provocation purement gratuite. Quoi qu'elle pourrait servir à une chose précise : faire comprendre à ce pauvre type qu'il s'était invité chez le mauvais gars, et qu'ici il n'était clairement pas le bienvenu. Surtout compte-tenu de ses manières plutôt inédites.

J'sais pas si t'es au courant, mais les admirateurs y s'pointent avec des fleurs, du chocolat, ou d'la bonne bibine... Mais y s'la jouent certain'ment pas samouraï, nan, ça, jamais d'la vie ! Alors si tu rangeais ton baratin et qu'tu décampais avant que j'te foute mon pied au cul, c'est un bon plan ça non ? Sois d'jà content que j'te foute pas ta raclée tout d'suite, parce que s'pointer chez les gens pour faire le malin avec ton canif, c'est une très bonne raison j'trouve pour te casser la gueule. Ou p't'être que ça t'branche comme programme, chacun prend son pied comme y peut après tout...

Il comprend vite, mais il faut lui expliquer longtemps...

Quelle autre réaction avoir, quand Koshiro se formalisait du fait qu'il ait choisi de sortir sa lame pour lui faire comprendre qui il était en vérité ? Ce n'était pourtant pas faute d'avoir à tout prix évité de l'en menacer. Mais il fallait croire que même une telle précaution n'était pas suffisante pour passer outre le manque de jugeote de cet individu. S'il n'avait pas mis longtemps à saisir que le bougre était brut de décoffrage comme on en faisait rarement – il n'avait d'ailleurs pas manqué de l'assimiler aux capitaines successifs de la 11e division –, il s'étonnait un peu plus à chaque seconde de voir à quel point il pouvait être borné. Malgré une envie grandissante de lui expliquer sa façon de penser, Tokiomi s'efforça de rester parfaitement détendu.

Ne valait-il pas mieux prendre tout cela à la légère, sachant qu'une bonne partie de Karakura était encore en pleine reconstruction suite aux récents événements ? S'il avait pu y survivre – et être déjà en aussi bon état si peu de temps après – cet humain devait être d'une puissance considérable, et un affrontement détruirait immanquablement tout le quartier à peu de choses près. Quelle que soit son envie de riposter avec la répartie appropriée, il avait plus à gagner à garder son calme et à le laisser faire le premier pas s'ils devaient effectivement en venir aux mains. Après tout, si leur confrontation était inéluctable, la maison qui risquait fort de partir en flammes, ce n'était pas la sienne. Et il n'aurait jamais pu supposer que son choix de mots était aussi pertinent.

Je ne vous permets pas ! Ma mère était... - il parut réfléchir, marquant une courte pause - Exactement ce que vous venez de dire, mais au moins elle était la meilleure.

L'indignation affichée de prime abord avait eu tôt fait de céder sa place à un rictus ironique. Si il y avait bien une personne au monde pour laquelle l'ex-capitaine de la 6e division n'avait pas le moindre respect, c'était sa mère, qui s'était servie de lui en lui faisant atteindre le poste de capitaine grâce à ses relations uniquement pour obtenir une position plus avantageuse au sein du clan. Un comportement qu'il ne lui avait jamais pardonné, pas plus que celui dont elle avait continuellement fait preuve envers lui. Il n'avait été à ses yeux qu'une marche de l'escalier qui la mènerait jusqu'au sommet. Sans doute le Jimushi ne s'attendait-il pas à ce que l'on réponde à son insulte sur un tel ton. Mais sans lui laisser le temps de s'en ébahir, le renégat reprit :

Absolument rien. Si j'avais voulu en faire quelque chose, croyez bien que ce serait déjà fait. Je crois que nous nous sommes mal compris. Je ne suis pas en meilleurs termes que vous avec la Soul Society. Je ne suis pas un Shinigami. Ou plutôt disons que ce n'est plus d'actualité, même si j'ai emporté certains... Souvenirs en partant. Disons que nous avons eu de légers différends. Sans cela, pensez-vous que je serais venu jusqu'ici pour en savoir plus sur leur situation actuelle au risque de me jeter dans la gueule du loup ? Mais ayant longtemps été l'un des leurs, j'aurais beaucoup à vous apprendre... Comme je vous l'ai dit, je ne pensais dès le départ pas obtenir cette information gratuitement.

Tout de même, c'était un monde... De son temps, un être humain ordinaire n'aurait jamais pu développer un tel potentiel – principalement parce que Soul Society aurait envoyé quelqu'un pour l'exécuter s'il avait représenté un quelconque danger. Et même si celle-ci avait certes été fort occupée ces derniers temps était-ce vraiment une excuse pour avoir laissé un tel problème passer entre les mailles du filet ? Rétractant son sabre en lui restituant le camouflage optique qu'il y appliquait encore un instant auparavant, il le remit à la place dans la poche de sa veste et fit mine d'en tirer une carte de visite qu'il lança à Koshiro avant de faire volte-face, sans se soucier qu'il l'attrape ou non. Bien entendu, les informations qu'il y avait fait figurer étaient choisies avec soin pour que le Fullbringer ne puisse pas retrouver sa trace – simple précaution qu'il avait prise avant de venir, et il avait de toute évidence bien fait.

Mais je ne vous dérange pas plus longtemps. À défaut d'être instructif, au moins cet échange aura-t-il été divertissant. Comme convenu, votre nom sera crédité si je fais quelque chose de votre version des faits. De plus, vous recevrez d'ici peu une enveloppe anonyme contenant la prime dont je vous avais parlé pour votre participation à mon enquête. En espérant que cela vous prouve que je suis un homme de parole...

Citation :

Fin du RP pour ma part.

Ah ben voilà ! C'est qu'il avait enfin compris ce qu'il lui restait à faire : se barrer, purement et simplement. C'est qu'il avait mis le temps le binoclard, alors que depuis le début il était évident que le Jimushi n'avait clairement pas l'intention de coopérer. Et tout le blabla qu'il était capable de produire n'y changerait strictement rien. Sa mère était une pute ? Tant mieux pour lui ! Celle de Koshiro aussi l'était, et il n'en faisait pas tout un plat. Surtout qu'il l'avait fait flamber lui-même. Est-ce qu'il faisait part de son ressenti familial pour autant ? Non, bien sûr que non. Cela dit, fallait être foutrement faible que pour laisser sa mère se faire insulter et tout simplement acquiescer. Et ce même si l'insulte était véridique.

Quant à son petit discours sur son amour de la Soul Society... Pouah, qu'est-ce que l'incendiaire pouvait s'en foutre, hein ? Soul Society ou pas, cela restait surtout un Shinigami, point. Comme Kamui, comme Shu. Même si ces deux clampins, ça faisait un bon moment qu'il les avait plus croisé dans le coin. Tant mieux, ça faisait des chieurs en moins dans ses pattes ! Sûr qu'il allait pas les pleurer. Il n'en restait pas moins qu'il ne portait clairement pas ces gens dans son cœur. Aussi n'eut-il pour réaction qu'un haussement de sourcil face à ce blabla qui ne l'intéressait en rien.

Tout ce qu'il souhaitait, c'était que ce type déguerpisse et vite ! Que faire donc de cette carte qui frappa la porte avant d'aller s'échouer au sol, où elle resterait jusqu'à ce que le vent fasse son travail et l'éloigne à jamais de lui ? Pour le reste, Koshiro ne l'écoutait même plus. Tout ce qu'il retenait, c'est qu'il faisait enfin demi-tour et se cassait, comme le Jimushi l'attendait.

C'est ça ouais ! Cassos la baltingue !

Et sur un haussement d'épaule, il fit demi-tour à son tour pour rentrer en sa demeure, claquant la porte derrière lui. C'est qu'il avait encore une volaille bien chaude sur le feu...

Sujet: Re: T'as pas du feu ? [Koshiro - Tokiomi]

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