Maîtriser ses pouvoirs de mieux en mieux afin de gagner en puissance, encore et encore. Voilà bien un terme qui est récurrent au sein de la Soul Society. En effet, rares sont ceux sortant de ce schéma. Quoi de plus normal après tout dans une organisation militarisée et dont le mérite est un important moteur d'amélioration des conditions de vie. Ceux dépourvus d'énergie spirituelle vivaient dans les bas quartiers du Rukongaï et étaient destinés à y rester pour toujours. Ceux capables de faire montre de leur utilité pouvaient passer les portes du Seireitei. Ce n'était pas là une fin en soit, car l'Académie attendait ces impétrants où là encore leurs prouesses seront déterminantes. Les plus faibles serviront de bouche-trous au sein d'une division ou l'autre, quand ils avaient la chance d'en rejoindre une. D'autres auraient la chance d'atteindre un siège, accordant des quartiers de meilleure qualité. Sans parler bien entendu des sièges les plus élevés qui offraient une importante forme d'autorité...

Tout tournait autour de la puissance ! Et lorsque l'on parlait de Shinigami, ce mot était relié au Shikaï et au Bankaï. Des pouvoirs qui relevaient principalement de la capacité de l'être spirituel à dialoguer et s'entendre avec l'avatar de son Zanpakutô. Cette arme n'était rien d'autre au final qu'une partie de l'âme de son possesseur. Ce contact, le Yakushiji en était un expert, si bien qu'il avait des siècles durant été professeur de Jinzen au sein de l'Académie. Poste qu'il avait repris dès lors qu'il avait fait amende honorable en venant prêter main-forte à ceux qui étaient les siens durant la dernière guerre. Les académiciens cependant n'étaient pas les seuls à pouvoir profiter de son expérience. Tenzen ne refusait jamais son aide à quelqu'un de respectueux et de travailleur. Sans toutefois tomber dans la franche sympathie, certes, il restait un enseignant sérieux et exigeant, en plus d'un homme froid et renfermé. Mais il estimait que ceux qui méritaient de s'élever devaient trouver encouragement et non frein.

Voilà pourquoi il n'avait pas hésité à inviter Aono à un entraînement particulier. Sa Vice-Capitaine n'était pas dénuée de puissance, et faisait montre de toutes les qualités qu'il attendait d'un bon second. Depuis la perte de ses anciens camarades, il n'avait pas essayé de nouer de véritables liens avec ses subordonnés. Pourtant, il savait à quel point cela pouvait être d'une grande utilité sur le terrain. En effet, son entente et sa complémentarité avec Kamui avait fait d'eux l'un des binômes les plus craints de tout le Gotei 13. Peut-être y aurait-il quelque chose à creuser à ce niveau...
Tenzen patientait donc au sein des quartiers de la division du lotus, dans une salle d'entraînement désertée pour l'occasion. Assis en tailleur au centre approximatif de celle-ci, son qin posé à ses côtés dans l'étoffe qui lui servait d'étui, il attendait. Elle n'était pas en retard, juste qu'il avait jugé bon de procéder à l'une de ses méditations quotidiennes en attendant qu'elle se présente à lui à l'heure convenue...

Voilà qui était étrange. Un entraînement en particulier avec son capitaine n'était pas quelque chose qui apparaissait à tous les coins du sereitei. Aono savait que son supérieur était professeur à l'académie mais ce n'était qu'un détail sur un bas de page. Une simple ligne écrite noir sur blanc sans plus d'importance. Pour elle, il était avant tout le Kyuubantai Taisho. Depuis les trois ans où elle le secondait, elle avait appris à un peu le connaître. Un peu. L'homme n'était pas spécialement secret mais plus du genre taciturne qu'autre chose. Certains en parlait même en tant qu'un ermite mystique. Il n'était pas très loin de la vérité.
Elle s'estimait un bon lieutenant avec de bonnes capacités dans l'ensemble des arts shinigami. Le Kido restait son plus grand défaut mais comme à chaque fois, elle se forçait à s’entraîner, peu importe les difficultés. Seuls les résultats n'était pas impressionnant. En fait, cela prenait part dans une portion plus large de ses capacités. Elle avait mis très longtemps à être officiellement nommé shinigami à cause d'une chose : l'absence de zanpakuto.

Alors qu'elle venait d'arriver au point de rendez-vous, la jeune femme s’arrêta un instant. La porte fait de papier si cher au mode de vie nippon devait probablement laisser voir sa silhouette en contre-jour. Une petite appréhension la saisissait.

Le monde spirituel. Un art, une science, une méthode. Quelque chose que tout shinigami digne de son nom connaissait et maîtrisait. Elle avait fini elle aussi par pouvoir y accéder mais après de longues années d’échec. Si elle savait aujourd’hui transformer son épée en shikai à volonté, ce n'était qu'au prix de nombreux efforts. L'ensemble de techniques qui consistait à manifester son âme dans le monde réel, que cela soit pour réaliser des sorts de Kido où pour appeler son double enfermé dans un morceau d'acier ne lui venait pas naturellement.

Elle avait tâtonné, essayé et échoué avant de recommencer à nouveau, changeant une chose par-ci, une chose par-là. Même encore lorsqu'elle libérait Mitsumeru elle avait l'impression de n'être qu'un amateur. Presque un imposteur quand elle repensait au poste qu'elle occupait.
Un petit sourire se dessina sur les lèvres du lieutenant. Elle n'était pas ridicule dans ses tâches voir même plutôt douée si elle se laissait aller à son orgueil. Ho... elle était encore loin des monstres qu'étaient Noboru ou Reisen mais comme elle les avait identifié, ils étaient des monstres. Parfois elle se disait qu'ils pourraient très bien tenir tête aux plus faibles capitaines du Gotei 13.

Non, elle était sérieuse et ordonnée. Appliquée dans son travail, elle pouvait faire des merveilles face à l'administratif. Un de ces seuls avantages sur l'homme aux cheveux de neige qu'était son collègue de la onzième division. Mais surtout, ses capacités offensives, ce qui faisait d'elle un soldat plus que toute autre chose, s'appuyait sur un style bien différemment que de généralité de Dieu de la mort. Elle possédait en elle un calme couplé à une explosive qui, même sans shikai pouvait se montrer très dangereuse pour ses cibles.


Encore une fois, non. Elle se sentait légitime à son poste. Tout du moins de l'assurer avec au moins le minimum requis. Jetant un regard en arrière sur la petite cour, elle y observa le calme reposant exprimé par les jardins et le ciel bleu. Elle n'était que dans le vestibule du monde spirituel mais elle ne pouvait plus être mis à la porte. À partir de là, le seul chemin possible était de continuer à avancer. Ses doigts frappèrent doucement sur le cadre de bois du portail. Elle l'ouvrit juste assez pour passer puis se mit à genoux dans un signe de soumission comme la coutume le souhaitait. Sans regarder son supérieur avant qu'il n'est pris la parole, cela serait un manque de respect incroyable, elle énonça une information, ce qui justifiait sa présence.

-Vous m'avez fait appeler Taisho.

Aono se montra ponctuelle. Tenzen n'avait pas douté qu'il en soit ainsi. C'était le genre de personne qu'elle était, il ne fallait pas s'en faire à ce niveau. D'un signe de la main, il l'invita à approcher, ce qui en soit ferait la parfaite réponse à sa question sans même qu'il ait à prononcer le moindre mot. À quoi cela pouvait-il bien servir qu'il lui confirme qu'il l'avait fait appeler, alors que tous deux savaient parfaitement que c'était le cas ? La question n'était qu'usage et bienséance bien entendu, aussi ne s'attarda-t-il pas là-dessus. Bien sûr, elle s'exécuta non sans omettre de fermer la porte coulissante derrière elle. Les yeux du Taishô étaient clos pour l'instant, ce qui ne l'empêchait pas de suivre son cheminement exact dans la pièce, autant par l'oreille que par la perception du Reiatsu. Il attendit alors qu'elle s'installa face à lui, comme son geste l'avait indiqué clairement. Alors seulement, ses paupières se soulevèrent à moitié, plantant son regard dans les émeraudes de sa Vice-Capitaine. Alors, seulement, il prit la parole.

J'aimerais savoir, Mitsuko... Quel est l'état de vos relations avec Mitsumeru pour l'heure ?

La question était directe et sans détours, autant aller directement à l'essentiel. S'il voulait l'emmener plus haut dans ses capacités encore, il valait mieux savoir tout de suite ce qu'il en était. Après tout, c'était bien pour cela qu'il l'avait fait appeler, et pas pour prendre le thé...

Je suis désireux d'évaluer votre niveau, ainsi que de voir jusqu'où vous pourriez aller. Je suis bien sûr disposé à vous aider dans votre progression. Vous n'êtes pas sans ignorer que le Gotei 13 a plus que jamais besoin de soldats puissants. Une lourde menace a été mise en déroute il y a quelques années, mais cela n'exclu pas le fait que le Hueco Mundo est toujours peuplé d'un grand nombre d'âmes maudites à éradiquer. Si une nouvelle armée entière devait se déverser à nos portes, je ne pense pas que les seuls Capitaines pourraient se montrer suffisants pour contrer la menace, comprenez-vous ? La plupart manque de discipline ou possède un esprit bien trop faible. Si une nouvelle heure sombre devait sonner, j'ai besoin de savoir dans quelle mesure je pourrai compter sur vous...

Son ton comme toujours était peu avenant. Dépourvu d'emphase, comme s'il ne récitait que des banalités. Pour autant, il savait qu'elle comprendrait l'importance de ce qu'il lui annonçait, et savait qu'en conséquence elle ne pourrait que se livrer. Il ne la voyait pas désobéir à un ordre, de toute manière...

À genoux devant son supérieur, Aono l'écouta sans mot dire et à distance respectueuse. Un souci des convenances qui, pour certains étaient un poids écrasant. Pour d'autres, comme elle, étaient un code de vie sur lequel s'appuyer en toute occasion. Pourtant, lorsque Tenzen énonça l'attaque Quincy ayant eu lieu trois ans plus tôt, sa concentration se brisa un moment. Elle ne put retenir ni la grimace, ni le mouvement de son bras gauche, se rapprochant de son corps. Comme si, il cherchait protection. À l'image de sa relation avec son épée.

-Fragile.

La nuance était fine avec d'autres notions. Distante, tendue pouvait être comprise comme des synonymes mais il n'en était rien. Un instant, son regard se porta sur la garde de son arme, la sondant mais sa question intérieure resta sans réponse.

-Je suis capable de la montrer sous sa vraie forme. Cependant, je n'entre pas facilement en contact avec elle. Je dirais même que, si j'arrive à atteindre le shikai c'est avant tout grâce à elle.

Malgré les difficultés de sa manieuse, Mitsumeru était toujours prête à répondre présent. Un bien fait ô combien précieux. Même à cet instant précis, elle devait être là, calme comme un serpent camouflé, tous les sens aguets. De ce qu'Aono connaissait de son tempérament, elle devait même sourire, trouvant l'échange entre les deux gradés de la neuvième division intéressante. Car tout comme le lieutenant, elle voulait devenir plus forte. Elle partageait le même orgueil et la même volonté de pouvoir se dresser en remparts inébranlable entre la Soul Society et ses agresseurs.

-La première fois que j'ai pu entendre son nom, j’étais pris de terribles fièvres dus à un poison. Depuis, les seules fois où j'ai réussi à aller à son encontre volontairement se comptent sur les doigts de la main.

Cinq fois. Cinq petites est minuscule fois. Au prix de longues heures de concentration qui plus est. Lorsque Aono avait observé certains de ses collègues, elles les avaient jalousé de savoir si rapidement pouvoir entrer dans cette transe où ils ne faisaient plus qu'un avec leur sabre. Mais cette vérité blessante était aussi ce qui la poussait à essayer encore et encore. Ne pas savoir accepter la défaite, tout tenter pour arriver à la victoire. Des valeurs qu'elle avait apprises à la nibantai.

-De fait, j'y arrive bien plus facilement en étant inconsciente. Lors de rêves durant la nuit, souvent.

Mais tous ces efforts valaient le coup. Le plaisir de pouvoir discourir avec l'âme de son zanpakuto, sentir que vous étiez toutes les deux sur la même longueur d'onde... Mieux, apprendre à la connaître, ce qu'elle aime, ce qu'elle déteste. Cela n'avait pas de prix.

-À l'académie, mes professeurs disaient qu'un zanpakuto était une partie de votre âme. Ce n'est pas mon impression. Ce que je ressens ressemble plus à une âme soeur. Quelqu'un d'autre, qui, par sa simple présence, me conforte et me soutiens. Une relation fusionnelle mais qui est avant tout un échange. Plus l'une de nous deux progresse, plus l'autre devient forte. Ai-je répondu à vos attentes taisho ?

Probablement pas. Ou en tout cas, elle n'avait pas annoncé haut et fort qu'elle pouvait utiliser le Bankai. Elle n'était ni grande gueule, ni menteuse. La jeune femme avait simplement énoncé la vérité, sans superlatif ni faux modestie. Car savoir se connaître, être franc avec soi-même était la première pierre du chemin vers la réussite. Être franc avec les autres n'était que la suite logique de cela.

Je vois...

Pas une véritable réponse qu'elle lui posait en clôture de son exposé des faits. Juste qu'il avait besoin de réfléchir afin de bien peser toutes les informations dont certaines lui semblaient contradictoire. Son Zanpakutô et elle se trouvaient désireuse de progresser, et il n'y avait apparemment pas de souci majeur concernant leur entente si ce n'était qu'Aono paraissait éprouver quelques difficultés à communiquer aussi souvent qu'elle le voudrait avec Mitsumeru. Avec une entente qu'elle définissait elle-même de fragile, elle parlait pourtant d'âme soeur... Mais après tout, le problème était peut-être là ? Ou dans sa manière d'atteindre la concentration nécessaire au Jinzen, passage indispensable à quiconque voudrait développer les pouvoirs de son Zanpakutô.

Vous en parlez comme d'une âme soeur. Pourtant, vos professeurs avaient raison. C'est bel et bien une partie de votre âme qui s'est scindée de vous afin de devenir votre arme !

Tenzen se saisit de Kagami Biraki et la tira de son fourreau, laissant apparaître sa lame miroitante, d'un entretien impeccable sans nulle contestation possible. Il la posa alors en équilibre sur ses genoux, soit la position traditionnelle du Jinzen. La seule véritable forme efficace de méditation avec un Trancheur d'âmes.

Votre Zanpakutô est autant une partie de votre âme que volonté indépendante. Vous devez le respecter et le craindre à la fois... Tout comme vous devez le forcer à vous respecter et vous craindre à son tour ! C'est cette relation que vous devez chercher dans un premier temps. Votre lame n'est pas votre amie, pas plus qu'un serviteur. Au cas où vous ne le sauriez pas, il vous faudra pour atteindre le Bankaï être capable de matérialiser l'avatar de votre Zanpakutô dans le monde réel pour ensuite le soumettre. Et c'est bel et bien de combat dont je parle ici...
D'ailleurs, vous ne pourrez pas parfaire votre Shikaï sans passer par de nombreux affrontements en votre monde intérieur... Cela dit, tant que vous n'y parviendrez pas avec aisance, cela restera toujours une embûche dans votre progression. Bien. Mettez-vous en position !

Par là il attendait d'elle qu'elle se calque sur sa posture : en tailleur, lame en travers des genoux. Il poussa également un léger soupir en se disant qu'il vaudrait mieux revoir jusqu'aux bases de la technique. Le Yakushiji ne s'était pas attendu à tant de difficultés de la part de sa Vice-Capitaine.

La concentration à elle seule ne fait pas tout. Vous devez prendre conscience du poids de votre Zanpakutô sur vos genoux, tout en visualisant votre monde intérieur. Si vous avez du mal à ce propos, voyez-le tout simplement comme un trou noir... Du moment que vous parvenez à vous persuader que cela représente parfaitement l'âme de Mitsumeru. Et lorsque vous sentez que votre concentration est parfaitement stable... Imaginez-vous vous jetant dans ce trou noir. N'ayez aucune hésitation ni peur. C'est un principe qui devrait fonctionner en principe avec facilité sur quelqu'un tel que vous...

Il attendait à présent qu'elle tente de mettre en application les conseils qu'il venait de lui donner. Cependant, il trouvait l'exercice un peu trop facile à présent qu'elle était guidée, et rajouta donc une difficulté supplémentaire.

Allez-y, lancez-vous... mais dès que vous y serez, dès que vous aurez pu apercevoir Mitsumeru... Revenez sur le champ ! Cela me permettra de prendre conscience du temps que vous y emploierez...

Aono suivit les ordres. Libérant sa lame de son fourreau, elle se déplaça elle-même légèrement pour pouvoir apposer son épée en équilibre. Dans un premier temps, elle se contenta de la fixer, rassemblant en elle tous les souvenirs et émotions qu'elles avaient expérimentées. Mais, avec cet ensemble joyeux, était venue une inquiétude. L'idée de combattre son allié ne lui était, étrangement jamais venue à l'esprit. Le faire, ne briserait-il pas sa relation avec son âme soeur ?

Avant ça, rien que se mettre en état de vouloir agresser Mitsumeru, le lieutenant ne se sentait pas capable d'y parvenir. Elle avait trop cravaché pour en arriver à ce stade et si elle voulait progresser, elle ne voulait en aucun cas le perdre. Des yeux semblaient se dessiner sur la lame, renvoyant cette couleur émeraude qu'elle possédait. Son reflet la dévisageait, sourcil froncé, lui révélant les nuages qui gênait son esprit. Alors ferma-t-elle les yeux. Sa logique l'avait poussé jusqu'ici et clairement, elle rencontrait une falaise sans fond .

Il ne restait plus qu'à croire. Croire et faire confiance que rien ne brisera cette relation durement acquise. Que rien ne pourrait l’empêcher de progresser. Croire que son capitaine avait raison et savait plus de choses qu'elle. L'accepter. Sauter.

-As-tu peur ?

La jeune femme ouvrit les yeux sur le même paysage désertique, ce même ciel aux couleurs étranges qu'elle voyait en de rares fois. Mitsumeru était toujours sur son trône fait de serpent vivant, toujours en mouvement. Aono leva les yeux au-dessus d'elle comme si elle allait apercevoir une simple échelle la ramenant à la réalité. À défaut de la trouver, elle reporta son attention sur l'avatar de son sabre.

-Oui.
-Tu as peur de me perdre .
-Pas toi ?
-Non. Il ne peut y avoir de progrès sans échange. Il ne peut y avoir d'avancée sans changement. Penses-tu que tu aurais tant progressé en hakuda si tu n'avais jamais combattu .
-Mais...
-Ton capitaine t'attend.

À peine la femme-serpent énonça son dernier mot quel disparu. Une main d'un vert clair emplit tout le champ de vision de la Mitsuko pour frapper la lieutenante d'une pichenette dans le front. Le shinigami eut la terrible impression d'être projeté dans un mur. Voir un immeuble entier comme autant de murs, autant de barrières qu'elle n'avait jamais perçues dans son esprit. Une fois revenu dans la salle d’entraînement, son corps s'arqua de lui-même, réagissant au coup imaginaire. La jeune femme inspira fortement comme si elle avait passé de longues minutes sous l'eau. Là aussi, ce n'était pas loin de la vérité. Alors qu'elle s'était plongé dans son monde intérieur, elle avait tout simplement arrêté de respirer, restant en apnée pendant un certain temps. Sa propre peau reprenait quelques couleurs maintenant que l’oxygène emplissait ses poumons. Sa main droite se crispait sur le tatami, y arrachant quelques pelures. Elle sentit une goutte de sueur descendre lentement le long de sa nuque.

Le lieutenant se massa le dos d'une main, une sensation fantôme restant en mémoire des murs invisibles qu'elle avait percutés. Elle ne revenait toujours pas avec quelle facilité elle avait réussis à atteindre l'âme de son zanpakuto et a contrario, avec quelles douleurs elle en était ressorti. Relevant le regard vers Tenzen, elle reprit la parole.

-Ce fut...particulier. En un battement de paupières, je me suis retrouvé auprès d'elle et pourtant, je ne savais comment la quitter.

Aono fit craquer sa nuque pour tenter d'en chasser les derniers résidus dérangeants. Elle n'arrivait toujours pas à comprendre la raison d'un tel changement comparé à d'habitude. Faute d’expérience jugeât-elle.

-C'est d’ailleurs Mitsumeru qui m'a renvoyé dans mon propre corps. J'ai l'impression qu'un troupeau de bœufs m'a écrasé. Combien de temps ai-je mis ?

Tenzen suivit l'opération, les yeux fermés. Bien entendu, il ne se concentrait que sur la pression spirituelle d'Aono afin d'en suivre le cheminement et les moindres fluctuations. Une manière pour lui de vérifier que l'exercice était presté de manière correcte et sans souci. Rien de plus que de la routine, lorsque l'on savait qu'à chacun de ses cours il en faisait de même pour quelques dizaines de Shinigamis. Bien qu'alors, tous ne pouvaient pas profiter de ses conseils personnalisés, son habitude allant vers le fait de n'aiguiller que le meilleur élève de chaque cours, celui dont la méditation se déroulait le mieux. Les travailleurs récompensés, ainsi qu'il fonctionnait. Mais soit, pas l'heure de détailler sa manière de donner cours. La Mitsuko parut bien se débrouiller. Son Reiatsu se faisait parfois hésitant, mais ce serait un détail à gommer progressivement. Un point qui ne pourrait être résolu qu'avec une pratique fréquente. Elle revint soudainement, comme victime d'un choc plus important que ce qu'il devait en être réellement. Il écouta donc ce qu'elle avait à dire avant de lui faire poursuivre l'exercice...

Plus vous prendrez l'habitude de vous y rendre et plus vous trouverez cela aisé. Il va vous falloir travailler votre confiance dans le domaine, et cela ne pourra s'acquérir que par la pratique ! Plus vous vous sentirez à l'aise, et plus ces transitions vous paraîtront insignifiante.
Pour vous répondre, cela n'a pris que quelques minutes. Si j'en crois ce que vous m'en disiez plus tôt, c'est donc ici un net progrès... Passons donc à la suite !

S'il l'avait fait revenir immédiatement, c'était certes pour mesurer le temps qu'il lui faudrait... Mais surtout et principalement dans le but de pouvoir l'y renvoyer sur-le-champ ! Elle disait n'avoir pu s'y rendre de sa propre volonté que cinq fois au maximum ? Et bien, deux fois en l'espace de quelques minutes, voilà qui figure un très bon exercice, n'est-il pas ? S'il lui fallait de la pratique, Tenzen savait comment la lui faire acquérir simplement... Toutefois, ce qu'il allait lui demander allait être un peu plus corsé à présent...

Vous allez y retourner à présent ! Sans attendre. Retournez auprès de Mitsumeru et affrontez-la ! Soyez observatrice, vous vous rendrez sans doute compte qu'elle n'utilise pas ses pouvoirs de l'exacte manière dont vous le faites. Ce qui est normal, elle se connaît bien mieux que vous ne la connaissez après tout...
De plus, je vous conseille de rester parfaitement concentrée. Ceci n'est pas un jeu, et toutes les blessures qu'elle vous infligera se répercuteront sur l'état de votre corps... Le réceptacle ne saurait rester intacte si l'âme est touchée, c'est malheureusement un principe de base.
Allez-y ! Et faites de votre mieux !

-Ton capitaine est quelqu'un d'intelligent.

Comme souvent, dès qu'Aono posait le pied dans son monde intérieur, Mitsumeru était la première à prendre la parole. Une étrange règle tacite entre les deux âmes. La fraîcheur avait été fière de réussir plutôt bien l'exercice donné par Tenzen. Elle savait qu'elle était encore loin du niveau qu'elle se devait d'avoir pour son poste mais il fallait l'avouer, elle avait gagné des points de confiance très importants. L'homme n'était pas professeur à l'académie pour rien et avec du travail, elle ne doutait pas de beaucoup progresser sous son égide.

L'acte de foi qui avait suivi en avait été très facilité. Elle avait adopté l'idée générale qu'il lui avait décrite. Un immense trou noir. Un siphon qui par sa rotation l'emmenait toujours plus profondément en elle-même. Jusqu'À...

-Kyoushuu no Hebikuni.

Elle avait murmuré le nom de cette lande, Nostalgie du Pays des serpents. Il lui paraissait encore plus vivace que quelques minutes auparavant. Les couleurs étaient plus chatoyantes et le sol désertique encore plus blanc. Il faisait presque mal aux yeux. Mitsumeru non loin, hocha la tête en signe d'assentiment. La jeune femme sentait l'explication en bordure de son esprit mais n'arrivait pas à la matérialiser sous forme de mots. Semblant comprendre ses soucis, l'âme de son zanpakuto reprit la parole.

-Tu as toujours eu du mal à te figurer ce monde.

D'un grand signe de la main, elle engloba le paysage si particulier les entourant.

-Ici, tu ne maîtrises rien et par conséquent, tu n'as pas confiance. Tu ne le sens même pas mais cette absence de contrôle te fait peur. Le rituel veut qu'un shinigami doive entendre le nom de son zanpakuto pour parvenir à le faire exister en ce monde. Tu'as peur tu'as empêché de m'entendre à cette époque. Elle t’empêche de me faire totalement confiance maintenant.

Aono restait sans voix à l'écoute des explications de Mitsumeru. Elle ne savait que trop bien ses paroles étaient vrai. Cela n'en était pas pour autant extrêmement douloureux. Son propre sabre lui mettait le visage devant ses erreurs, ses échecs. La voix monotone de la femme-serpent en rajoutait encore plus à la honte qu’éprouvait la jeune femme. Son ton était détaché, comme si elle se moquait éperdument de la lieutenante, lui énonçant un simple fait, avec toute la cruauté que l’indifférence pouvait provoquer.

-Il y a plusieurs façons de provoquer la confiance.

Sans s'en rendre compte, la fraîcheur avait baissé le regard, son âme alourdie par les conclusions de Mitsumeru. Lorsque cette dernière reprit la parole, elle fit rapporter à elle l'attention de l'humaine. Plus précisément, la surprise se dessina sur le visage d'Aono en reconnaissant un bruit de chaîne venir de quelques mètres devant-elle. Sur la main droite de son âme sœur existait désormais un gantelet en métal représentant une gorgone. C'était les cheveux, fouets métalliques qui avait émis ce bruit si particulier.

Bien vite, bien trop vite, les chaînes traversèrent l'espace les séparant pour venir s'enrouler autour de la cheville de Mitsuko. Le lieutenant avait bien tenté d'éviter l'assaut dans un réflexe mais encore trop plongé dans ses pensées, son corps semblait trois plus lourd que d'habitude. Déjà, son pied gauche décollait du sol, suivant le mouvement ordonné plusieurs mètres plus loin par la femme-serpent. La fraicheur suivit une trajectoire en courbe, levé à près de trois mètres de hauteur.

Elle en était encore au stade de l'incompréhension la plus totale que Mitsumeru apparu dans un semblant de schupo juste au-dessus d'elle. Le plat de son lai percuta la poitrine de la lieutenante la propulsant sur la terre craquelée avec force. Aono se releva sur un genou avant que son souffle s'échappe de ses lèvres, la laissant les poumons en feu.

-Durs de respirer n'est-ce pas . Que ressent su maintenant que tu es de l'autre côté du miroir ? ...as-tu peur ?

La Mitsuko respirait à grande goulée sans pouvoir se débarrasser de ce poids qui pesait sur sa poitrine. Elle y passa la main pour y découvrir trois griffures, probablement fait lors de l'attaque précédente. Sous ses doigts, elle sentit sa peau se recouvrir d'une bande de roche de plus en plus solide, accentuant la sensation. Elle jeta un coup d’œil courroucé vers son zanpakuto mais sa colère n'était là que pour camoufler la peur qui s'était insinué en elle. Et si, ici et maintenant, elle mourrait..

-Ton capitaine t'avait pourtant prévenu d'être concentré non . Il t'a dit de me provoquer. Pensais-tu que je n'allais pas réagir .

Mitsumeru s'approcha d'un pas assuré. Elle avait une parfaite confiance en elle-même, en ses pouvoirs. Arrivé à près de trois mètres, ses poings se fermèrent sous sa colère. Un vrai colère, pas le simple artifice qu'avait éprouvé a manieuse quelques secondes plus tôt.

-Réagis Aono ! Tu es lieutenant maintenant ! Qui va défendre la soul society si tu traînes au sol ?! Qui va te reconnaître en tant que shinigami si tu es incapable de combattre ? Qui va tuer ta sœur ?! QUI ?!!!

Le discours et surtout, les deux dernières questions blessèrent profondément la jeune femme. Encore plus profondément que la honte qu'elle avait éprouvée plus tôt. Sa main se serra sur le sol, l'effritant puis traçant des sillons profonds alors que son poing se formait. Ce fut un grondement qui s'échappa de ses lèvres.

-Moi.
-Bien.

Un sourire satisfait venait d'éclore sur les lèvres de Mitsumeru. Un sourire impatient également. L'air se remplissait de tension et dans le ciel, des éclairs verts déchiraient les nuages orange. Lorsque la lieutenante se releva, l'air tourbillonnait légèrement autour d'elle. De simple grain de poussière mêlé à de la terre. Elle était loin de pouvoir faire exploser son reiatsu comme certains mais elle n'en avait cure. La femme-serpent exhalait le défi et l'envie d'en découdre. Aono, en toute politesse, ne pouvait que répondre à ses attentes. Probablement pour la première fois qu'elle savait matérialise son shikai, énonça telle la phrase de libération avec cette violente envie d'en découdre.

Gegitsomade Konasu... Mitsumeru

« Percute-les jusqu'à les tailler en pièces ». Jamais cette phrase n'avait eu autant d’écho en son for intérieur. Dégainant son sabre, celui-ci suivit le mouvement, venant s'enrouler autour de son poignet puis de sa main droite comme un chat se calant sur les genoux de sa maîtresse. L'instant d'après, le shinigami disparaissait pour réapparaître au-dessus de son adversaire. Son poing armé de métal fusa vers cette dernière avait déjà anticipé bloqua facilement l’assaut. Un instant, leurs deux regards se superposèrent, deux émeraudes se fixant l'un, l'autre.

-Je connais toutes tes tactiques Aono. Tu oublies déjà que j’étais à tes côtés quand tu les as développé ?

La femme-serpent se déplaça d'un demi-pas pour que sa main gantée puisse remonter créant une longue estafilade du poignet au creux du coude de la lieutenante. Cette dernière eut beau s'écarter d'un nouveau schupo, elle sentit la roche se créer sur son bras et alourdir rapidement son membre. Elle fit une grimace de dégoût à cause de sa stupidité.

-Je vois ça. Je m'en souviendrais à présent.

Aussi, la Mitsuko effectua un léger schupo pour se placer en retrait. Avec plus de distance et donc plus d'élan, elle se propulsa vers sa cible d'un second schupo, bien plus puissant cette fois-ci. Son genou vint percuter le gantelet d'acier de Mitsumeru, cette dernière s'en servant pour protéger son visage. L'impact propulsa de nombreuses volutes de fumée comme des petits nuages se mettant à flotter dans ce monde intérieur. D'habitude, Aono effectuait le Kumo Daishunpo pour blesser l'adversaire et ensuite, se servir des nuages pour frapper sa cible sans que celle-ci ne la voit venir. Mitsumeru utilisa bien entendu le Yamata no Orochi pour se défendre de la seconde-attaque. La roue ainsi créée avait l'avantage d'occulter une large partie de l'assaut, peu importait d'où il venait en face d'elle.

Alors, Aono décida d'innover. Réapparaissant dans le dos de la femme-serpent, son pied fila pour venir la frapper dans le creux du genou. La forme matérialisée du zanpakuto siffla de douleur sous l'impact, chassant d'un revers Aono. Le mouvement était attendu, une simple réponse physique, presque bestiale, comme l'on chassait un moustique agaçant dans un instant de colère. Le shinigami plaça son bras en opposition pour mieux créer une clé et soumettre son adversaire. Sa main gantée quant à elle, se posa à plat sur le dos de Mitsumeru.

La jeune femme avait le souffle plus que cours, elle était à bout de forces. Les divers schupos avec la couche de roche sur sa poitrine lui avaient coûté et son front était recouvert de goutte de sueur. Clairement pas en état de maintenir la clé. La femme-serpent s'en rendit bien compte et d'un magnifique poirier, envoyèrent ses deux pieds dans le visage d'Aono, l’éjectant au loin.


Mitsumeru se rapprocha de sa manieuse, le visage soucieux quant à l'état de cette dernière. Le visage de la lieutenante était assez enflé sur toute la partie gauche mais pourtant, elle souriait. Le zanpakuto s'agenouilla auprès de le shinigami, soulevant légèrement sa tête. La Mitsuko ne put s’empêcher d'avoir un petit rire, bien vite arrêté par la douleur au visage et le poids sur sa poitrine.

-Haha...tu es forte.
-Tu l'es également. Tu as vu que j'étais forte et pourtant, tu m'as mis en échec. Quel enseignement en tires-tu ?
-Ce n'est pas si mal ici...

Aono sourit, contente d'être félicité par Mitsumeru. Si elle n'avait pas été si longue à régir, peut-être qu'elle aurait finit par gagner. Cette fois-ci, lorsqu'elle revint dans son corps originel, elle ne percuta pas les étranges murs. Rassérénée, elle eut l’impression de simplement s'endormir, passant d'un monde à l'autre en un battement de paupières. En réalité, c'était plus long que ça et le « réveil » devint particulièrement douloureux. La femme-serpent quant à elle, avait réussi son coup. Il y avait plusieurs façons de forcer la confiance. Le shinigami avait pu distinguer qu'elle pouvait s'en sortir dans ce monde étrange. Un léger aperçut qu'elle pouvait avoir confiance en elle pour y arriver. Car il est plus facile de forcer les autres à se faire confiance qu'à ce qu'ils fassent confiance à quelqu'un d'autres.

Une fois de retour dans les terrains d’entraînement de la Kyuubantai, la jeune femme fut prise d'une toux douloureuse, sa main se portant automatiquement vers sa poitrine. La pierre commençait à s’effriter et tomber d'elle-même. Aono se força tout de même à se mettre à genoux, front sur le tatami en guise de soumission à son capitaine.

-Toutes mes excuses Yakushiji-Taisho, j'ai perdu.

Restant là les yeux fermés, toujours dans sa position de méditation, Tenzen suivait attentivement même les plus infimes fluctuations de Reiatsu de sa jeune Vice-Capitaine. Grâce à l'habitude de cet exercice, il pouvait analyser beaucoup de choses lorsqu'il était ainsi concentré. La manière dans la pression spirituelle pouvait en apprendre énormément. Toute la palette des émotions pouvait s'y retrouver notamment, de manière si précise qu'au final le Yakushiji pouvait se faire une idée de ce qu'il se déroulait dans le monde intérieur d'Aono. Divers sentiments... de la surprise au désespoir en passant par la peur et la colère. Rien de fantastiquement évident, et il fallait des sens aiguisés dans le domaine pour pouvoir s'en rendre compte, mais c'était bel et bien là. Puis finalement, une lente chute de sa pression spirituelle qui malgré quelques soubresauts finit par se troubler... C'en était donc terminé ! Le Shirohasu leva alors légèrement ses paupières, constatant ainsi des blessures d'Aono qui finit par revenir à elle. Ce qu'elle fit alors ne l'étonna pas d'elle... S'incliner ainsi et demander pardon...

Je sais... j'ai pu m'en rendre compte. Vous ne devez pour autant pas en nourrir de honte Mitsuko. Il n'était en rien garanti que vous preniez l'avantage dès le premier essai. Au moins cela vous a-t-il, je l'espère, permis d'en apprendre plus. Vous pourrez également vous servir de cette expérience afin de la renouveler ultérieurement, seule. Je pense en effet que vous n'avez plus besoin de moi durant un temps. Vous savez donc ce qu'il vous reste à faire... Pratiquez, jusqu'au jour où vous parviendrez à la vaincre. Poursuivez encore, jusqu'à ce que vous vous sentiez en pleine confiance. Alors... revenez me voir, et nous passerons à la leçon suivante ! Mais pour l'instant... Contentez-vous d'aller vous reposer, vous l'avez mérité !

Par ces derniers mots, il la congédiait. Enfin, il ne mettait pas un terme à la conversation de manière ferme et définitive, mais au moins pouvait-elle prendre la décision de s'en aller sans avoir à se demander si son Capitaine le prendrait mal. Quoi qu'il en soit, dans l'état où elle se trouvait, il serait difficile de croire qu'elle puisse préférer s'étendre dans une discussion désormais inutile alors que son corps autant que son âme ne devaient aspirer qu'au repos. Tenzen pour sa part en tout cas referma les yeux, décidé à profiter du temps qu'il lui restait jusqu'à sa prochaine obligation pour méditer quelques instants, tout simplement.

Toujours le front contre le sol, Aono écouta les paroles de son capitaine. Elles les prenaient en compte comme ses messies qui sur terre se faisaient passer pour les vaisseaux de la parole de Dieu. Elle savait son faible niveau dans la maîtrise de l’énergie spirituel et imaginait aussi bien les talents qu’avait démontrés Tenzen.

-Merci Yakushiji-Taisho, je vais me retirer pour l'instant.

Suivant ses paroles, elle sortit, laissant le leader de la neuvième division à son propre entraînement. Après une centaine de pas, lorsqu'elle estima être assez loin, la jeune femme s'assit lourdement contre un mur. Ses jambes étaient étendues sur les planches de bois tandis qu'elle soufflait lourdement. En sortant, elle avait tenté de faire bonne figure mais la grimace de douleur qui ornait ses traits ne trahissait personne. Elle avait eu beau attendre de se retrouver seule pour laisser sa défaite transparaître clairement sur son corps mais elle, savait ce qu'il en était.

Toujours le front contre le sol, Aono écouta les paroles de son capitaine. Elles les prenaient en compte comme ses messies qui sur terre se faisaient passer pour les vaisseaux de la parole de Dieu. Elle savait son faible niveau dans la maîtrise de l’énergie spirituel et imaginait aussi bien les talents qu’avait démontrés Tenzen.

-Merci Yakushiji-Taisho, je vais me retirer pour l'instant.

Un petit sourire orna alors les lèvres d'Aono qui se transforma bientôt en une grande et éclatante démonstration de joie. Tout son visage semblait s'illuminer à ce contact.

-Tu n'as jamais été plus belle qu’aujourd’hui Mitsumeru. Si forte, si sûrs de toi...

La jeune femme avait encore en tête l'attitude de son zanpakuto. Cette impression que peu importaient le passé, peu importaient les échecs de la lieutenante, au final, il suffisait de continuer d'avancer. C'était ce qu'Aono avait toujours fait mais depuis qu'elle avait été nommé à son poste, elle n'avait fait que stagner à son niveau. Elle ressentis mieux que jamais, la sensation d'être prisonnière que son épée avait expérimentée. Tous ces murs mentaux qu'elle avait dressés d'elle-même pour s’empêcher de la rejoindre, garder le contrôle d'elle-même et ne rien céder à sa partenaire.

-Excuses-moi Mitsumeru. Cela ne se reproduira-plus pas. Je te le promets.

Elle ne comprenait que trop bien la réaction de la femme-serpent à avoir été si volontaire au combat. Au final, son sabre, son amie, son âme sœur... ne souhaitait qu'une chose depuis le début : l'aider. Si Aono n'en avait jamais douté, elle n'avait jamais réellement pris conscience de l’entièreté du sentiment. De nouveau, sa main passa, effleura l'acier de son épée. Sur une plus grande longueur cette fois et de nouveau, la lame laissa une douce chaleur émanée à ce contact. Une reconnaissance mutuelle des sentiments de chacune. La lieutenante ferma les yeux un moment, savourant l'instant.

-Allons nous reposer. Demain nous recommencerons puis après-demain et le jour d'après jusqu'à ce qu'on brise tous ses murs.

La jeune femme rouvrit les yeux puis se releva en s'aidant du mur. Elle était toujours percluse de douleur et avait la poitrine lourde mais acceptait ces effets volontiers. Il s'agissait des mots que son zanpakuto avait utilisé pour lui faire comprendre et elle ne les ignoreraient pas. Plus jamais.