Combien de temps depuis que j'avais quitté Soul Society, le Sereitei et tout le reste ? Combien de temps j'étais resté à l'écart de tout cela ? Cette guerre, plutôt ces guerres, elles n'étaient rien pour moi et pourtant il me semblait que j'avais perdu quelque chose. Combien de temps depuis que j'avais quitté ces lieux. J'avais l'impression que cela faisait des siècles. Non j'avais l'impression que c'était hier. C'était un peu des deux, un peu de ça et un peu d'autre. Le nid m'avait écarté de ma vie et pourtant entouré de tous ces êtres si exceptionnels je ne m'étais jamais senti aussi vivant.

Et puis ce départ précipité, cette opportunité, cette évasion, cette vie d'errance, cette vie d'insouciance, cette vie où je ne vivais pas. Vivre, mourir, quelle importance. Rien d'intéressant mis à part ça, cette guerre, ces guerres qui ne m'intéressaient pas. En fait si, j'étais pas seulement à la bonne place pour y prendre part. Mais quelle était-elle cette bonne place ? La Soul Society ? Elle qui m'avait rejetée comme tant d'autres avant ?

Pourquoi pas ? Qu'avais-je à y perdre ? Qui étais-je ? Quel était mon but ? En avais-je un ? Avais-je le droit d'en avoir un ? Oui. Non. Qui sait. Quoi qu'il en soit on m'accepta à nouveau. Etrange, curieux, bizarre. Plus d'un siècle d'absence et j'étais à nouveau là, parmi ces hommes que j'avais quittés, j'étais là à revoir certains visages que je chérissais, non que je haïssais.

Pourquoi j'étais là ? Si facilement. J'étais là mais je n'étais pas libre. Cette liberté était une prison. Une prison à ciel ouvert. Cette tenue blanche, ce grade, cette fonction, ces obligations, tout cela était une prison, une prison dorée, une prison de cristal, une prison de pouvoir où toute une division me surveillait. Tous suspects, tous coupables. Confiance absente, suspicion présente. Je sentais les regards sur moi, de la méfiance, de la peur et de la surveillance.

Je n'étais pas dupe, je savais que personne ne m'acceptais vraiment. J'allais devoir m'astreindre à ce respect qui m'est du. Je suis capitaine, oui c'est cela, le capitaine et ces immondes vilipendeurs me doivent le respect. Ils vont s'y astreindre, je vas les y obliger. Je marchais dans le Sereitei, je déambulais ici et là. Ils pensent que je ne les voie pas mais je le sais, ils sont là, ils me surveillent. Même caché dans les broussailles je les voie. Pas moyen de passé inaperçu.

Je les vois là en noir. Ils marchent les uns derrière les autres, de long en large comme si de rien n'était, comme si ils ne savaient pas que je savais. Oh oui je sais, je sais tout. Ils se relaient, ils agissent, ils surveillent, ils sont bien organisés les fourbes. Et quelle organisation ! C'était un capitaine c'est sur, un vice capitaine sinon. Oui forcément, ça serait plus discret !

Pourquoi moi ? J'ai rien fait ? Pas encore ... alors pourquoi moi ? Mais le voilà le lâche qui se faufile derrière cette cohorte grouillante. C'était lui c'était sur. Pourquoi il serait là sinon, c'est pas logique qu'il soit là. Mais pourquoi lui, je le connais pas, c'est louche d'envoyer un inconnu, faut envoyer quelqu'un de connu quelqu'un de confiance quelqu'un de respecté. Mais oui, il n'y a pas de confiance, pas de respect en ce monde, seulement de la solitude. La solitude c'est la vie.

Un gamin, c'est un gamin, on se moque de moi. C'est ce gamin qui a envoyé cette armée noire me surveiller. Je ne l'aime pas. Non. Pas du tout.

- C'est toi hein ? C'est toi qui les as envoyé ! AVOUE QUE C'EST TOI ! OUI ! Je le sais que c'est toi, c'est forcément toi, c'est logique. PERSONNE D'AUTRE ! C'est sur, c'est certain même !

Petites fourmis écrasées sous mes sandales. Petite armée noire qui déambule. Je vous anéantis. Je suis le plus fort. Respectez moi ! Aimez moi ! Non ! Je vais vous tuer ! Vous écraser.

- AHAHAHAH ! Oui, je sais tout ...

Il ne parle pas, il ne dit rien. C'est un test, il veut voir si je réagit, si je dis quelque chose. Il veut me tester c'est ça. L'armée noire m'a vue, m'a évaluée et lui il est là pour finir le travail. Sinon pourquoi est-ce qu'il viendrait s'assoir ici à côté de moi. C'est pour m'étudier de près.

- NOOOOOOOON ! Je ne suis pas une chose. Non je suis normal !

Personne ne veut me laisser en paix. Je n'ai rien fait. Pas encore. Je prépare pour le moment alors laissez moi travailler. Comment vous voulez que j'accomplisse ma tâche si je suis dérangé constamment. Pourquoi il me parle ? Je ne le connais pas. Je ne sais pas qui c'est. Je ne l'ai jamais vu. Normal. Oui normal, il était pas là quand j'ai quitté ma vie de shinigami. Je crois. Jamais vu en tout cas. Mais pourquoi il me parle. Visite médicale, suspect, aider. Mensonge que tout ça. Il était là pour moi. Il pense surement que je le vois pas venir avec ses petites phrases, son côté gentil. Mais je sais qu'il est là pour moi. Il travaille pour "lui" c'est certain. Qui d'autre ? Il était au nid avec tous les autres et puis disparu quand je me suis échappé. Le revoilà. Lui aussi est revenu. Et maintenant il me surveille.

- Ahahaha ! Une visite médicale ! Mais oui ! Mais bien sur ! Dis lui que c'est non ! Dis lui que je sais ! Dis lui qu'il vienne lui même ! Un suspect ? Nooooon ! Le suspect c'est toi ! Etrange, bizarre, louche. Oui c'est cela ! Pourquoi il serait ici ? Pourquoi il est pas là bas ? Pourquoi il est pas avec les autres dans la dimension, dans la zone ! Pourtant il devrait, oui, il devrait lui aussi être transporté dans l'autre dimension. Des paysages, des sons, des esprits. Pas de frontières, qu'une destination, la quatrième !

Etrange individu que voilà. Jeune, trop jeune. Gamin idiot. Trop facile, tu ne m'auras pas. C'est moi qui te surveille. Envoyé de l'homme en noir, tu es son espion mais tu vas m'aider. Oui, tu vas me conduire à lui. Je vais le trouver. Je vais le traquer et ce sera grâce à toi.

- Ahah ahah ahahah !

Jouer le jeu, jouer avec lui, le surprendre, l'accepter, lui faire croire que je sais, le piéger. C'est cela. Tu es mon cobaye maintenant. Tu va servir ma petite expérience pour retrouver Ryusuke Fujita. Il fait jour tu pourras pas te cacher dans la nuit cette fois. C'est plus ton tour, c'est mon tour désormais. J'ai les cartes en main désormais. Voilà le mettre en confiance, se rapprocher de lui. Personne ne nous regarde. Si ! L'armée noire nous observe, toujours, elle est là encore et encore. Bientôt elle ne sera plus.

- GNYAAAAHHH ! Je vous anéanti ! Subissez mon courroux, ma puissance, ma domination, ma grandeur !

Fini, terminé, disparue l'armée noire. Petites traces sur le chemin, petites traces sous mes sandales ! Vous fuyez ma violence, je suis le plus fort une fois de plus. Maintenant nous sommes seul. Je m'approche de lui, accroupi sur ce banc. Je lui murmure à l'oreille la vérité qu'il doit entendre.

- Je ... sais ... où .... il ... est ... Oui ... il ... est ... caché ... Ryoma ... Fuzuki ... caché ... dans ... le ... noir !

Envoyé de l'homme en noir ! Il savait qui j'étais. Tu es démasqué ! Je sais que tu sais ! Nous savons tous les deux désormais. Mais tu ne sais pas que je sais, ce sera ta perte ! Oh oui, c'est cela. Comment peux-tu expliquer me connaitre si tu n'étais pas en train de me suivre. L'armée noire est ton espionne. Tu es seul désormais, seul avec moi. Mais tu te sens pris au piège. Tu es seul maintenant et tu le sais. Nulle échappatoire. Tu veux fuir, lâche, immonde petite créature. Tu veux le retrouver lui mais tu ne t'échapperas pas, il ne m'échappera pas une nouvelle fois.

- Il ne faut rien dire, il faut qu'on soit discret, il a des yeux partout, il voit tout, il nous entends, il nous connait, il sait ce que l'on fait, il sait ce que l'on pense, il sait ce que l'on va faire, il sait ...

Non, j'en dis trop, pas plus, il pourrait soupçonner quelque chose. Il ne faut pas. C'est moi qui sait, lui doit rester dans l'ignorance, penser qu'il est encore maître de ses décisions. C'est cela, faisons comme ça. Prudence, vigilance, prévoyance !

- Qui que tu sois tu as raison. Cherchons le, il doit être ici, il ne peut pas contrôler son armée noire de si loin. Son pouvoir est grand mais pas autant ! Mais attention, il faut que l'on soit plus malin que lui. Rintaro Fujita c'est lui qu'on cherche.

Il n'était pas caché dans les ombres, le soleil brillait des milles feux de la mi journée. Il n'était pas caché dans les nuages, le vent soufflait tel un murmure rauque haut dans le ciel et doux à nos oreilles. Il n'était pas cachée dans la verdure environnante de cet étrange petit parc, les fleurs exaltaient leur parfum emplit de fraicheur. Il n'était pas non plus dans le bassin adjacent, les carpes nageaient sereinement en rond l'une derrière l'autre. Nous devons le chercher ailleurs, chercher le noir, le désespoir et la trahison.

- C'est ça, oui. Il est grand et petit. C'est l'homme en noir, une âme errante étrangère noir au dessus de tout. Il est partout et nul part. Le trouver est difficile mais il faut le faire. ON EST OBLIGE DE LE FAIRE ! On le doit, oui, on le doit. Trouver Ryuzo Fukuda.

Dressé sur un banc, on voit le monde différemment. Rien, pas de changement, pas de nuance. Debout dans un arbre on voit les gens autrement. Rien, pas le moindre déguisement dépisté. Droit sur un toit, on voit le Seireitei incomparablement blanc. Là ! Du noir dans cet océan immaculé.

- Tout, je te dis tout. Il est là, ça y est, là bas ! Je l'ai trouvé mais chut, il ne doit pas savoir, il est soupçonneux, il est dangereux, il légion ! Oooooh, des relatiooooons. Oooooui il faut les prévenir, les alerter, les faire venir, vite, très vite, avant qu'il ne s'échappe à nouveau. Terrible menace qu'il est, il faut agir avant qu'il ne sache.

Tu est pris au piège, te voilà découvert, je cours à ta poursuite, petits pas rapides, caché ici et là. Ton espion est obligé de venir, tu seras démasqué toi aussi vil espion, charognard de l'homme noir,.

Il est par là, je le sens. Il laisse sa noirceur derrière lui, des traces imperceptibles pour ceux qui ne savent pas quoi chercher, où chercher, comment chercher. Mais moi je sais, j'ai cette connaissance en moi. Il n'est pas aussi infaillible qu'il le croit. Il n'est pas aussi tout puissant qu'il le pense. Je le connais, je connais ses défauts, je connais ses faiblesses, je sais comment les exploiter. Je sais toute cela mais lui ne le sait pas. Jusqu'à aujourd'hui je n'ai rien dit, mais aujourd'hui il est temps. C'est maintenant que tout se joue. Oui, c'est maintenant que je vais en finir. Petit rire intérieur que je garde pour moi. Je jubile. Une sorte d'extase nouvelle que j'expérimente là.

Je cours il est là, je le vois, l'homme en noir, fuit. Immonde raclure, lâche, vil serpent. Il tente de se soustraire à moi une nouvelle fois mais c'est terminé, cette fois c'est fini. Immense labyrinthe aux murs blancs qui défilent partout. Dédales immense aux recoins insondés. Et puis nous voilà au détour d'une impasse, une ombre furtive se dresse devant moi, immobile, muette. Elle me regarde de ses yeux noirs et profonds. Cette fois c'est mon tour. Reiki Fumiko, vile marionnette de Ningyo no Joo ma lame de tranche enfin. Transpercé tu n'es plus. Evaporé dans ce monde pur et maculé tu n'es plus qu'une volute qui se disperse dans le vent.

Son zanpakuto à la main, Hiretsu est immobile, les yeux hagards regardant dans le vide. Le petit homme était face au mur, le vent soufflant dans ses cheveux, sa longue mèche virevoltant au gré du vent. Les regards sont sur lui, surpris, inquiets parfois. Témoins de son comportement étrange des murmures s'élèvent. Un regard sadique autour de lui impose le silence et disperse les être ahuris par cette scène surréaliste. Un homme surgit alors, le capitaine de la troisième division reconnait ce visage, il n'est pas inconnu, mais impossible de mettre un nom ou une rencontre sur cette tête. Dodelinant du buste, la tête légèrement tremblotante, son arme en main mollement tenue, il s'adresse à cet intrus.

- Toi, je t'ai déjà vu quelque part. Ta tête me dit quelque chose. Tu me suis ... c'est ça ? Pourquoi ? Qu'est-ce que tu cherches ? Qu'est-ce que tu veux ? Parles, oui parle. Non ne parle pas, ne dis rien. Je m'en fous. Mais sache une chose, oui, fais attention, je te surveille, je t'ai à l'oeil. Je serais derrière toi, ou peut être pas. Tu ne sauras jamais si je suis là, ou peut être pas. C'est cela, peut être pas.

Hiretsu arborait un regard froid, sadique, un petit regard de fouine. Et en même temps il faisait lentement glisser la lame de son wakisashi sur sa langue, jusqu'à son cou. L'ex taulard laissa derrière lui le vice capitaine qui l'avait croisé bien plus tôt. En guise d'au revoir, l'asocial de service pointa son interlocuteur de sa lame d'un air pseudo menaçant en ricanant d'une voie aigue avant qu'il ne range son zanpakuto dans son fourreau accroché à son corset de piercings le long de sa colonne vertébrale.

Hiretsu quitta doucement les lieux, marchant en marche arrière gardant en vue celui qu'il reconnaissait enfin comme l'un des vice-capitaines qu'on lui avait brièvement présenté et dont il n'avait strictement rien à foutre.