Yoshiko était installée à son bureau, en train de remplir un peu la paperasse que Tōjō avait en retard. C'était fou de voir comment il travaillait. Fou de voir qu'il avait toujours du boulot en retard. Un truc de dingue quand même. Parfois, métaphoriquement parlant, elle lui donnait un coup de pied aux fesses, lui faisant quelques remontrances. Mais il arrivait toujours à lui faire son regard de chien battu. Et au final, elle lui pardonnait. Toujours d'ailleurs. Mais il viendrait forcément un jour ou l'autre où ça ne passerait plus vraiment. M'enfin, plus ce jour était éloigné, mieux c'était à dire vrai.

Quoi qu'il en soit, donc, la Shinigami était donc en train de faire quelques paperasses quand on avait toqué à son bureau. Elle avait alors redressé la tête et l'avait légèrement penché sur le côté, avant que sa douce voix ne s'élève dans la pièce. Elle n'allait pas laisser la personne qui était devant sa porte y rester durant des heures et des heures, n'est-il pas ? "Désolé de vous déranger Fukutaishô. Un message pour vous." Il s'était alors rapproché d'elle pour lui transmettre le message. "Merci beaucoup." lui avait-elle dit avec un sourire. Toujours le sourire. Ou presque toujours d'ailleurs. C'est toujours mieux de croiser le regard de quelqu'un qui sourit plutôt qu'une personne qui tire la tronche tout le temps, n'est-ce pas ? L'homme prit congé et Yoshiko déplia la petite feuille de papier. Une réunion entre lieutenants. Ce qui était étrange, c'était qu'elle se produisait en même temps, plus ou moins, que la réunion des Capitaines. Signe que ça devait être plutôt grave. Quoi que ... A quelques reprises, Yoshiko avait assisté à quelques unes de ses réunions. Et à chaque fois, c'était plutôt marrant. Mais là, son petit doigt lui disait que ce n'était pas le cas.

Yoshiko posa son stylo. Enfin, sa plume ... Très différent pour écrire de ce qu'elle utilisait sur Terre auparavant, m'enfin, passons. Elle se leva donc et elle quitta son bureau. Il était temps de se pointer à cette réunion. C'était pas encore l'heure, mais comme elle avait la mauvaise habitude de flâner et de s'attarder en cours de route, valait mieux qu'elle parte un peu plus tôt que prévu. Yoshiko marchait donc, sans se presser, hochant de la tête à quelques reprises quand elle croisait quelqu'un qui la saluait. Elle en faisait de même, tout simplement. Il lui fallut bien quoi ? Une bonne grosse demi-heure pour atteindre le lieu souhaité. Mais fort heureusement pour elle, il n'était pas encore l'heure. A dire vrai, même, il restait bien encore une bonne quinzaine de minutes avant que la réunion ne débute. Que des hommes présents. Hormis Nanao. D'un seul coup, en la voyant, son visage s'illumina, ou presque. Au moins, elle ne serait pas toute seule. Enfin, elle se doutait que Aono ne tarderait pas à les rejoindre. "Bien le bonjour à tous." avait-elle dit le plus simplement du monde avant d'aller s'asseoir.

Un lourd soupir de soulagement et Haiko se laissait aller en arrière, allongé sur les tatamis de son bureau. Une pile épaisse de paperasse s'étalait sur la table basse au milieu de la pièce. Il venait enfin d'en terminer avec les rapports et autres sujet à traiter au sein de sa division. Il n'avait toujours pas eu l'occasion de rencontrer son supérieur qui avait déjà été appelé aux quartiers de la première. Les récentes disparitions à la Soul Society n'auguraient rien de bon, en démontre la réunion de crise organisé par le capitaine commandant. Étrangement, Haiko ne paraissait pas plus inquiet que ça. Pour l'heure sa fonction principale était d'assurer le bien être de sa division et d'être sûr que ses hommes seraient prêt à répondre à l'appel du devoir le moment venu.

Il se leva avec une furieuse envie de fumer. Après tout, se détendre un peu après avoir gratté de la paperasse ne pouvait pas faire de mal. Ainsi, il traversa son bureau en direction de l'étagère où se trouvait entreposé de nombreux instruments de musique de toute sorte. En bas de l'étagère, une boîte ouvragé renfermait différents types de tabac classés dans de petits casiers. Posant la boîte sur son bureau, il choisit l'un des tabac qu'il affectionnait le plus, un arôme de Java. Roulant une petite quantité de ces mèches brunes dans une feuille plutôt épaisse, il l'alluma, s'imprégnant de la forte odeur de clou de girofle encensant lentement la pièce. Il aurait pu profiter de ce moment si un messager ne l'avait pas interpellé devant sa porte.

Une réunion des vice-capitaines ?! Et bien... Même lui ne pourrait plus y couper désormais. Attachant son insigne au biceps, son katana à la ceinture, il s'en alla de son bureau. Direction les quartiers de la première division, le pas léger, la mine décontractée, accompagné par l'odeur sucrée de sa cigarette. Pas stressé pour un sou, Haiko tira une grande bouffée sur sa cigarette avant d'entrer dans la salle où se trouvait déjà la plupart de ses confrères et consœurs. Le sourire aux lèvres, il souffla sa fumée dans les airs avant de saluer l'assemblée de la main tenant sa clope. Plutôt désinvolte comme entrée, même si ce n'était pas son intention. Il jeta un bref regard à chacun des shinigami présent et, constatant qu'il ne connaissait personne, il se présenta, l'air visiblement enjoué.

« Bonjour à tous ! Je suis Kaogake Haiko, vice-capitaine de la sixième division. Enchanté ! »

Il remarqua alors la lueur assassine dans le regard de son homologue de la première. Le jeune homme observa négligemment sa cigarette avant de continuer, à peine gêné.

«  Hm... Oui... Si cela dérange quelqu'un, qu'il me le dise. »

Sur quoi il alla s'asseoir à sa place, au milieu, à la gauche du siège en bout de table. Tirant une autre bouffée de tabac, il affichait encore son air insouciant en fixant le vice-capitaine de la première. L'ordre du jour ne semblait pas l'inquiéter plus que ça pour le moment. Pour lui, cette réunion était l'occasion parfaite de jauger ses éventuels future compagnons d'arme.

S'apprêtant à tirer une autre bouffée de clou de girofle, Haiko tiqua lorsque son homologue lui fit remarquer sa désinvolture. Sur le coup, le jeune shinigami n'avait pas vraiment apprécié le ton un peu trop cassant de son vis-à-vis, mais il n'en montra rien. Toutefois, il comprenait que son petit écart de conduite pouvait déplaire et se contenta de répondre à l'air sévère de son collègue en levant les yeux au ciel, soupirant d'un air déçu. Il éteignit alors sa cigarette du bout des doigts avant d'en déposer le reste dans un petit étui de métal qu'il cachait à sa ceinture. Puis, comme si de rien n'était, le vice-capitaine de la sixième croisa les bras tout en reposant doucement son dos sur le dossier de son siège. La banane à ses lèvres s'était amoindri, écoutant attentivement Reisen qui venait de se lever.

Le jeune homme savait ce qu'il en était concernant la chose tombée au Rukongai, mais à Karakura ?! Sa mine se renfrogna un peu plus. L'un de ses bras se décroisa pour amener sa main à son menton. Haiko demeurait pensif car visiblement, même la douzième n'avait réussi à obtenir que peu d'informations sur le sujet. Il remuait ses pensées... mais pas trop non plus. Ce serait un coup à émettre les hypothèses les plus farfelues un peu trop hâtivement. Il fallait développer avec le peu d'informations que les lieutenants de division avaient à leu disposition. Peut-être que collectivement, ils pourraient arriver à quelque chose de plausible en attendant le rapport éventuel de leur capitaine respectif.

Lorsque Reisen eut fini de parler, Haiko leva les yeux vers le vice-capitaine Ise avant de se racler discrètement la gorge pour demander la parole. Ses yeux se posèrent de nouveau sur son homologue de la treizième.

« Nous avons trop peu d'information pour émettre la moindre hypothèse pour le moment. Je me demande d'ailleurs si une équipe aurait déjà été envoyé sur le lieu du phénomène... » Il se redressa, posant ses coudes sur la table. Puis, il reprit. « Est-ce que ceux du Hueco Mundo pourraient en être responsable ? Si oui, dans quel but ? L'un d'entre vous aurait-il par hasard des contacts au sein du Monde Creux ?

Haiko restait perplexe... Il pensa un instant à ressortir la cigarette de son étui avant de jauger du regard Reisen. Non... Ce n'était pas une bonne idée...

Cinq ... Cinq lieutenants étaient arrivés avant Yoshiko. Ce qui signifiait que d'autres n'allaient pas tarder à arriver. Parce qu'ils n'allaient pas faire une réunion à cinq. Pour sûr. Mais ça signifiait aussi que la jeune femme n'était pas la dernière à arriver. Sans doute qu'elle s'en serait voulue si c'était le cas. Mais au moins, elle savait qu'il y avait d'autres personnes à venir. S'asseyant, Yoshiko regarda ceux qui étaient déjà présents. Elle cherchait du regard sa vieille amie, Aono. Mais celle-ci n'était pas encore arrivée. Sans doute que ça ne tarderait pas vraiment. Quand bien même Aono n'était pas encore arrivée, Yoshiko observait les autres lieutenants. Ils ne la connaissaient peut-être pas personnellement, parce qu'elle était du genre discrète et n'aimait pas trop faire de vague. Ou bien se faire remarquer. Elle préférait même quand c'était tout le contraire. Mais cela ne signifiait pas pour autant que Yoshiko ne connaissait pas ses collègues lieutenants. Disons juste qu'elle ne les connaissait pas personnellement. Ou du moins, pas autant que son Capitaine ou bien que son amie Aono. Enfin, passons.

Ca blablatait un peu à droite, à gauche. Mais pas Yoshiko. Elle attendait patiemment que tous pointent le bout de son nez, et ce même si la jeune femme se doutait qu'il y aurait des absents. Ou bien des retardataires. Comme partout dans une réunion. Certains ne prennent pas la peine de se pointer ou s'en foutent totalement. Et d'autres et bien ... D'autres ne pouvaient pas réellement s'empêcher d'être en retard. Une marque de fabrique, dans un certain sens. Ce qui aurait pu arriver à Yoshiko, d'ailleurs, si elle n'était pas partie un peu plus tôt. Elle adorait flâner, marcher sans but. Et prendre son temps. Trop idéaliste ? Sans doute qu'il fallait qu'elle revienne un peu terre à terre. Parce qu'un jour, à force de flâner, et bien, ça pourrait lui apporter quelques ennuis. Enfin, n'allons pas lui porter la poisse dans l'immédiat non plus.

Perdue dans ses pensées, ou du moins, ça semblait l'être, la jeune femme retrouva ses esprits quand elle entendit une voix réconfortante. Une voix avec qui elle avait eu longuement le temps de discuter durant les trois dernières années. "Plaisir partagé, tu le sais bien." Elle aimait bien parler avec elle de temps à autre. Yoshiko savait qu'elle pouvait se confier et que Aono garderait tout ce qu'elle pourrait dire pour elle, n'allant pas mettre sa parole en doute ou bien n'allant pas lui amener quelques ennuis. "Ils restent là, dans un coin de la tête." avait-elle répondu en pointant du doigt sa tempe droite. "Mais il est vrai que je parais bien moins soucieuse que par le passé." Il était vrai qu'avec le temps, Yoshiko avait moins l'impression d'avoir une certaine pression sur les épaules. Et ce n'en était pas plus mal d'ailleurs. Elle se sentait mieux, oui, même si Tōjō pensait bien souvent qu'elle n'était pas totalement sereine et qu'il y avait encore quelques petites choses qui devaient la déranger. Mais rien de bien grave.

Un nouveau lieutenant venait de pointer le bout de son nez. Avec des manières ... comment dire ... Un peu rustre ... fumer en pleine réunion. Pourquoi pas. A la question qui venait de poser, ou du moins, ce n'en était pas vraiment une mais ça y ressemblait, Yoshiko aurait bien répondu par la positive. Mais avec le temps, et avec Tōjō qui fumait souvent, elle avait pris, plus ou moins, l'habitude de la fumée. Même si elle n'aimait pas réellement à dire vrai. Tant pis. Quelqu'un d'autre lui ferait sûrement la remarque. Ce qui ne tarda pas à dire vrai. Le Lieutenant de la 13ème lui fit une remarque qui aurait pu en déplaire à plus d'un. Au moins, ça signifiait que certains ne prenaient pas leur boulot à la légère. Un jour ou l'autre, sans doute qu'il faudrait que Yoshiko prenne du temps pour apprendre à connaître un peu plus ses collègues. Ca ne lui ferait pas de mal, pour sûr. Poursuivant sur sa lancée, Reisen en vint à leur expliquer le comment du pourquoi de leur présence dans cette salle. Yoshiko leva un sourcil interrogateur. Curieux faits, il n'y avait pas à dire. Bien plus que cela, surtout si ça s'était produit à la voix au Rukongaï, et à la fois à Karakura. Y avait-il un lien ? Sans doute. Yoshiko l'aurait su un peu plus tôt, sans doute qu'elle aurait pu harceler un peu Tōjō, histoire d'en savoir un peu plus sur le sujet. Non pas que son Capitaine avait la langue bien pendue mais tantôt, elle arrivait à le faire parler.

Tout ceci était fort dérangeant. Une attaque du Hueco Mundo ? C'était possible, mais Yoshiko préférait ne pas y songer. Comment diable auraient-ils pu faire une incursion au Rukongaï sans qu'aucun Shinigami ne le sache ? Yoshiko était loin d'être du même avis que les autres, même si, dans l'immédiat, elle préférait réfléchir plutôt que de l'ouvrir. Toujours mesurer ses paroles. Un marrant le Vice Capitaine de la Division qui avait un franc parler bien à lui. Ca lui faisait penser aux guerres auxquelles elle avait pu assister sur Terre, avec des bombes, justement. Mais il avait raison. Ca ne servait à rien de s'affoler ou faire des suppositions complètement loufoques avant même de savoir de quoi il en retournait réellement. Il n'y avait plus qu'à attendre.

Toujours accoudé à la table, les doigts croisés, Haiko écoutait attentivement ceux ayant pris la parole à sa suite. Se tournant d'abord vers Lavi en hochant la tête. Ensuite, face au doux sarcasme de son collègue de la dixième, il se contenta de ricaner gentiment en levant brièvement la main pour l'excuser. Le jeune homme restait client de ce genre d'écart, même si celui-ci lui était adressé. Il en fallait bien plus que ça pour faire sortir notre shinigami de ses gonds ! Outre sa remarque, lui et son homologue de la onzième au franc parlé disaient vrai. Pas de précipitation ni de jugement hâtif... Le petit shinigami était tout de même déçu. Soupirant lourdement avant de s'adosser de nouveau dans son siège, il posa son regard sur sa collègue de la neuvième.

La jeune femme appuyait les dires de ces derniers, pas étonnant... Le jeune homme fixa alors un point quelconque sur la table en face de lui, une certaine déception mêlée de résignation pouvait se lire dans son regard. Même s'il était vrai qu'eux autres lieutenant n'étaient pas apte à prendre des initiatives sans leurs supérieurs, un peu de curiosité ne faisait pas de mal ! Haiko ne put d'ailleurs pas s'empêcher de marmonner pour lui-même.

« Hm... Alors c'est ça... Vice-capitaine ? »

Sur quoi il gratifia l'assemblée d'un autre long soupir. La situation perdait grandement de son intérêt pour notre vice-capitaine de la sixième et il n'avait pas besoin d'élever la voix pour le faire remarquer. Aux claquements de paumes de Reisen, Haiko le fixa, l'air un peu blasé. Toutefois, il gardait espoir en se disant intérieurement « Aller, fais nous rêver... ». Malheureusement, le lieutenant de la treizième se contenta de « prôner » la patience en attendant ces chers capitaines. Haiko en était réduit à se demander ce qu'il faisait là. En fait, peut-être que notre petit shinigami s'attendait à un peu plus d'entrain, moins de rigueur, un grain de curiosité en plus... Dans le bref silence qui suivit, le shinigami parcourut l'assemblée du regard, opérant dans son esprit une sorte de classification des personnes en présence, un peu à la manière d'un enfant qui commencerait à faire la distinction entre le bien et le mal.

Deux types de personnes s'étaient démarqué. D'un côté se trouvaient ceux qui semblaient les plus sympathique aux yeux d'Haiko : Lavi, qui dégageait une sorte d’insouciance bienheureuse, il avait l'air d'être un jeune homme accessible à qui l'on pouvait parler de tout. Kiyomaru de la dixième l'avait bien fait sourire avec ses mimes. Enfin, il y avait Noboru, l'incarnation parfaite d'un bourrin de la onzième avec un franc parlé qui lui était propre. De l'autre côté... Les rabat-joie, avec le vice-capitaine Ise, mais ça, ça n'étonnait pas vraiment Haiko. Reisen, un peu trop vieux jeu. A sa suite se trouvait la demoiselle de la neuvième, un peu du même genre. Ces deux-là rappelaient à Haiko certains vieux instructeurs de l'académie. Tout en effectuant ce petit manège mental, le jeune souriait, ricanait ou faisait la moue, fronçait les sourcil, levait les yeux au ciel...

En déposant son regard sur Miloë, il sembla pensif. La jeune femme n'était pas encore intervenu et rien que pour cette preuve d'intelligence, Haiko l'envoya direct' dans sa catégorie mentale « gens sympathique ». Le jeune homme aperçut alors son brassard, celui de la septième... Ça le rendait nostalgique car notre ex-instructeur avait gardé de très bon souvenirs de l'académie. Perdue dans ses pensées, Haiko ne put s'empêcher d'afficher un franc sourire en observant Miloë. Vu que cette réunion n'avait visiblement aucune utilité, il ne voyait pas vraiment pourquoi il participerait davantage... C'est ainsi, lâchant un dernier long soupir, que notre shinigami se leva doucement. Il s'excusa en inclinant le tête avant de se diriger vers la sortie.

« Chers collègues, il me semble inutile de prolonger cette réunion, nos ordres arriveront bien assez tôt. Veuillez m'excuser, mais j'ai à faire. Au plaisir. »

Sur quoi il passa le pas de la porte coulissante en reprenant le reste de sa cigarette de son étui de métal rangé à sa ceinture.