Il n’y avait pas lieu de perdre son temps à pester contre les décisions de son cher Roi. D’une part, elle était ravie d’être envoyée à même les premiers rangs pour contrer l’invasion d’escadrons Shinigami dans leur dimension, mais de l’autre, elle regrettait amèrement le coéquipier qu’on lui avait assigné. Elle se souvient d’avoir cherché en vain un partenaire à la réunion à laquelle toutes les grosses pointures avaient été invitées, mais semblait-il que la plupart avaient déjà leurs fraccìons, sans compter qu’elle ne souhaitait en aucun cas partir à la chasse au côté de Borick. En bref, tout ce qu’elle voulait, c’était d’y aller en solitaire plutôt que mal accompagnée, mais semblait-il que cette enflure qui la talonnait n’avait rien compris à son urgent besoin de faire cavalière seule. De toute évidence, les forces ennemies semblaient nombreuses, du moins c’était ce dont elle avait pu comprendre vu le sérieux de la situation, puisqu’elle n’était pas du tout apte à détecter seule les énergies environnantes et moins encore de les pister. L’armée de Las Noches n’avait pas tardé à se diviser, encore et encore, et en dépit des efforts déployés pour éviter le crétin à ses trousses, cela n’avait guère fonctionné.

— Pourriture de coéquipier… Tss.

Marmonna-t-elle tandis qu’elle lorgnait avec dédain la silhouette qui avançait derrière. Elle qui croyait sérieusement ne plus avoir affaire à cet imbécile, il risquait bien de la tuer par son niveau d’intelligence sous le zéro et ses manies immatures. Toutefois, elle n’avait pas trop le choix, et aussi devait-elle avoir confiance aux décisions du Rey quant à lui assigner le titre de Segunda. Peut-être avait-il un quelconque potentiel malgré l’absence de cerveau dans cette tête d’ahuri. Il fallait au moins mettre les points sur les « i », histoire d’établir une certaine base entre eux qui leur permettrait fort probablement d’éviter une catastrophe s’ils devaient tomber sur une petite armée de dieux de la mort. S’arrêtant brusquement sans même en avertir Ace, elle se retourna soudainement, un air autoritaire et supérieur, tandis que son index vint frapper sans aucune délicatesse le torse de son nouveau partenaire à maintes reprises. Sa main vint prendre appui sur sa propre hanche, puis elle le mit sérieusement en garde, comme un officier qui tente d’instruire son cadet :

— Bon. É-cou-te-moi-im-bé-ci-le. Ici, c’est plus du jeu du tout! Donc tu vas me mettre ta stupidité de côté et ton comportement puéril, sinon ils risquent de nous tuer tous les deux, t’as compris? Je te conseillerais même de me laisser faire, dépendamment de qui on a réellement en face de nous! Tu n’auras qu’à me supporter avec tes railleries, ça me motivera à démonter nos ennemis au plus vite pour venir ensuite te fermer le clapet. Capiche, stupido? Ah et pendant que j’y pense, m’approche pas une fois ton épée dégainée, j’aimerais pas que tu me coupes par inattention! Et même si ça me dégoute de te dire cela, évite d’aller te suicider direct, tu veux... Pas que je tiens particulièrement à toi, mais si au moins tu pouvais mourir de façon utile, en servant de bouclier, par exemple, ce serait pas si mal!

Et toujours ce doigt sévère qui cognait contre le torse nu du Vasto Lorde, tandis que la scène faisait drôlement penser à l’image d’une gamine qui dicte la bonne conduite à son petit frère. Beaucoup trop occupée à lui ordonner une liste de choses à ne pas faire durant le combat à venir, elle ne remarqua l’arrivée soudaine de plusieurs intrus dans son dos que lorsqu’elle dénota que l’attention de l’imbécile semblait avoir été attirée par autre chose. Curieuse, elle se retourna pour le constater par elle-même. Sans même jeter un regard de plus à celui à ses flancs, elle le repoussa d’une main seule, afin qu’il s’éloigne. Il y avait plus urgent désormais. Un coup d’œil aux alentours lui permit de constater que les lieux étaient parfaits pour un combat; surface plane, sans présence de vestiges quelconques ou de dunes. Ils risquaient de s’amuser ici. Son sourire, mélange d’amusement et d’arrogance, s’estompa immédiatement lorsqu’elle remarqua que les deux têtes meneuses du petit groupe lui étaient bien familières. Son regard s’assombrit peu à peu, tandis qu’elle serrait des poings, tête basse et tremblotante sans qu’on ne puisse y deviner la raison. Avait-elle peur?

— POUAHAHAHAAHAHAHAHAHAAHAH!

Semblait-il que non. Son doigt vint pointer vers les deux Shinigamis, maintenant qu’ils étaient à distance respectueuse du duo d’Espada. Elle trouvait plutôt comique la situation. Une revenante qui s’était auto-suicidée et un crétin voleur d’adjuchas, voilà qu'ils formaient une équipe de choc. Elle allait définitivement apprécier cet échange.

— Mais dites donc ! C’est la réunion des débiles ici ! Tenez, j’en ai un ici aussi, pour ajouter à votre petit club de faiblards.

Elle indiqua du pouce son compagnon. Une fois encore, elle éclata de rire, clairement en train de se moquer d’eux. Après quelques secondes, son amusement laissa place à un air de défi. Dans l'intention de montrer à ces deux rigolos que les temps avaient bien changé, elle enroula une mèche de ses cheveux autour de son index, la main clairement en vue. Sur le dessus de celle-ci, le fameux tatouage noir de son chiffre était parfaitement exposé. Tranquillement, elle abandonna sa blonde chevelure pour extirper son katana de son fourreau. Que les jeux commencent!

ıl ıl Let the game begin. lı lı

Mon regard se porta vers l’horizon. J’avais vu s’écouler plusieurs décennies dans les entrailles de ce monde creux, pourtant, cette géhenne restait immuable. Ce même croissant de lune. Ces mêmes dunes. Ces mêmes plantations effeuillées. Quelques nuages couleur poussière ici et là, et que dire de ce firmament à jamais plongé dans l’obscurité? Peut-être était-ce là le reflet de nos âmes, nous, Hollows. Tout ici n’était que désolation, ça ferait donc son sens. C’est pourtant au cœur de ce tableau affligeant que l’on avait été dépêché, nous, ceux qu’on appelle les spadassins du Rey. Pourquoi? Semblerait-il que cette étendue de sable ait attisé la curiosité de quelques Dieux ennuyés. Pourtant, ils devaient le savoir, Grimmjow n’était pas homme à tolérer que l’on s’invite chez lui de la sorte, après tout, il restait un matou, et les matous sont plutôt territoriaux dans leur genre. Intercepter les intrus et en découdre comme il se devait, tels furent nos ordres à moi et à ma si charmante partenaire, Lili. D’ailleurs, parlant d’elle, cela faisait un bon moment déjà qu’elle me lançait ses quelques directives à la figure, me tâtant du bout du doigt de son air sévère et de son amabilité légendaire. Je crois qu’elle m’aime bien.

Toutefois, bien que mon binôme fût une femme particulièrement séduisante, ce furent deux silhouettes au loin qui parvinrent à capter mon attention. Naturellement, – Puisque ce jeu de rôle était maintenant devenu si naturel - je vins plisser les yeux dans une mimique exagérée, faisant mine de tenter de discerner les deux personnages s’approchant. Pourtant, cette robe noire ballotant sous la subtile brise ne pouvait être inconnue d’un digne représentant de l’Espada. Le blason des Shinigamis, le shihakusho. Ainsi donc, ce sont les intrus qui se présentaient à notre duo insolite. Intéressant. Ils nous épargnaient donc cette pénible tâche qu’aurait été celle de les traquer entre les interminables dunes du Hueco Mundo. Parfait, il y a longtemps que je m’étais lassé de ces petits jeux. Puis, comme il aurait été aisé de le prédire, ce fut la Quinta qui engagea les hostilités, tentant de provoquer nos antagonistes, et moi-même par la même occasion. Je me laissai donc prendre au jeu, souriant bêtement en feignant de ne pas avoir capté la moquerie. Non, mieux encore, je l’encourageai.


« Ouais, on en a un ici pour vous ! Fis-je donc de ce timbre aigu et si irritant que j’avais l’habitude d’employer. Les faiblards! »


À priori, nos antagonistes semblaient être d’anciennes connaissances de la cinquième lame. Du moins, c’est ce que laissait envisager cette première joute. Un élément qui saurait jouer en notre faveur. Ce sourire niais toujours imprégné à mon visage, je vins prendre place par terre aux pieds de Lili, m’assoyant tel un enfant, en indien. Puisqu’il s’avérait que je sois l’unique élément de surprise de cet affront, aussi bien les leurrer quant à ma véritable place au sein de ce détachement. Cette tâche représentait-elle toutefois un réel défi pour moi? Moi, qui me cachais des miens. Moi, qui n’avais jamais eu qu’une moindre valeur aux yeux de ces chimères que je côtoie. Moi, qui me jouais de l’entièreté de ce monde creux. Occultées derrière ces verres teintés, mes prunelles s’attardèrent brièvement à nos hôtes. Un mastodonte frôlant les deux mètres, accompagné d’une jeune femme à la silhouette délicate; frêle. J’aurais pu m’exalter face à la carrure du premier, cependant, c’est plutôt la sobriété de la seconde qui m’intrigua dans l’instant. Et puis, Lili semblait avoir des affinités avec ce séduisant capitaine, quel piètre partenaire ferais-je si je m’insinuais de la sorte entre eux. Aussi, levai-je mollement le bras, venant indiquer les Shinigamis du doigt.


« Hoy ! Pas toi hein le gros truc tout gigantesque et tout pas beau. Fis-je innocemment en reprenant mon rôle. Toi, l’autre. Tu veux bien jouer avec moi? »

Quand le monde avait-il cessé de maintenir la raison pour se perdre en plein cauchemar ? Ces dernières heures n’étaient-elles pas simplement le fruit d’une longue et effroyable nuit, chimères tordues de son esprit inquiet à l’idée d’être un jour découverte pour ce qu’elle était ? Un loup parmi les agneaux.
Asuna ne rêvait pas, pourtant. Elle se sentait lointaine à tout ce qui l’entourait, comme flottante dans une brume irréelle sans prendre vraiment conscience des événements autour d’elle. Tout allait de mal en pire au rythme d’une logique cauchemardesque. Avait-elle pu être réellement saisie au milieu de circonstances qui l’avaient conduite, par pur hasard, à faire équipe avec un capitaine dont elle ignorait l’existence jusque là, afin de s’envoler vers le Hueco Mundo pour livrer bataille avec le genre Hollow où elle retrouvait, tout aussi fortuitement, l’Arrancar qui des lunes plus tôt avait eu un aperçu significatif de ses capacités réelles ?
La jeune femme était inquiète, mais surtout consternée d’un tel enchainement d’événements qui démontrait sa malchance à échelle cosmique. Asuna maudit les farceurs qui avaient eu l’idée d’une association incompréhensible entre une vingtième siège bonne à tout faire et un capitaine réfléchissant avec sa troisième jambe. Elle maudit ce dernier de simplement exister. Elle maudit aussi l’Arrancar blonde face à eux, d’avoir survécu, et de n’avoir tiré pour seul enseignement de leur rencontre que davantage d’imbécilité. Elle maudit aussi son compère, pour la forme.

« Je ne la connais pas, Capitaine, mentit effrontément Asuna. Les Hollows se ressemblent tous. »

Elle détourna les yeux de la jeune femme blonde, feignant de ne pas lui accorder plus d’attention qu’elle n’en méritait. L’enfant se pâmait d’un chiffre qui, s’il était significatif, en disait long sur les qualités de l’Espada au regard du duel qu’elles avaient mené par le passé. Asuna ne ferait toutefois pas l’erreur de la sous estimer. D’autant qu’elle devrait se brider davantage que la dernière fois, à moins de parvenir à fausser compagnie du capitaine. Nul ne devait être témoin de ses pouvoirs et en réchapper vivant.
Il restait l’autre garçon au visage d’ahuri, posté en tailleur. Il paraissait rivaliser d’idiotie avec sa congénère, ce qui n’impliquait pas qu’il fût inoffensif pour autant. Il tourna justement son attention vers Asuna, et demanda d’une voix candide si elle souhaitait jouer avec lui. La jeune femme ne sut pas quel sens il donnait au terme « jouer ». Elle n’était pas certaine de vouloir le connaître et suspecta une signification sous jacente plus perverse dans le verbe.

« Non. »

Une négation catégorique, brutale, sans ambiguïté. Asuna n’avait le cœur à jouer, encore moins avec un Hollow. Elle se tourna vers le capitaine de la Septième Division, lasse de ces échanges qui ne rimaient à rien.

« Capitaine, je ne crois pas qu’ils soient en mesure de nous aider. Peut-être devrions nous poursuivre notre chemin sans chercher plus avant la confrontation ? »

La jeune femme Arrancar avait eu raison sur un point. Parmi eux, il y avait au moins trois imbéciles. Asuna était certaine qu’au moins l’un d’eux allait se manifester pour briser ses efforts de paix. L’appel du sang se révélait trop puissant pour les faibles d’esprit.

Une expression légèrement répugnée vint coller au faciès de la gamine lorsqu’elle constata l’absence totale de limite à cet abruti collé à son flanc. Si elle ne pipa aucun commentaire désobligeant en guise de répartie au Segunda, c’était parce que les deux crétins en face d’elle méritaient à ce qu’on leur accorde plus d’attention. Si l’un n’avait pas hésité à dévoiler leurs liens forgés par le passé, l’autre avait préféré mentir quant à ces retrouvailles, niant le fait qu’elles s’étaient croisées naguère, et que leur mémorable rencontre s’était soldée dans le sang. Un sourcil arqué vint répondre à l'obscure feinte de la jeune Shinigami, marquant notamment son interrogation quant à l’utilité de pareil mensonge. Elle ne s’attarda pas à ce petit détail, promettant d’y remédier plus tard, lorsque les jeux seront lancés. Au moins pouvait-elle accorder quelques mots au Capitaine quant à ses provocations. Par la même occasion, elle fit tournoyer habilement son épée dans sa main, sans grands efforts, afin de montrer à ce duo les évolutions acquises depuis longtemps. En bref, elle faisait tout pour éviter d’être mésestimée. Elle avait été suffisamment faible par le passé.

Je devrais te renvoyer la même! Ta stupidité et tes manières d’éternel puceau! Y’a que le Haori qui fait changement, et encore, tu demeures le plus crétin que j’ai croisé… de la Soul Society.

Un regard en coin en même temps qu’elle précisait, en vue de cibler par cette provocation son cher collège qui semblait avoir trouvé son aise sur le sable. Sans réellement se préoccuper de lui, elle remit son attention sur le petit escadron, tandis que la lame rectangulaire et aiguisée pointait dorénavant sur le seul Capitaine des lieux. Le sérieux qui régnait en maitre sur le visage de Lili lui donnait un air tout autre; il en chassait les dernières traces d’immaturité qui en faisaient son portrait. Quelques secondes de silence vinrent planer sur les lieux obscurcis par l’astre lunaire, venant semer une certaine confusion quant à cette trêve inopinée. Dans un murmure qui mourut avant de parvenir jusqu’aux oreilles de ses adversaires, elle s’adressa à son compagnon, sans même détourner le regard : « Tu vas m’excuser, mais j’ai un compte à régler avec ton jouet. » Le temps d’un sourire en coin, présage de très mauvais augures, avant qu’elle ne disparaisse subitement, preuve d’une remarquable vélocité.

Si on crut au tout début que ses désirs étaient de croiser le fer avec le Capitaine, il ne s’agissait là que d’une énorme méprise. Disparue, apparue en cours de route, disparue de nouveau, puis enfin réapparue en plein centre du minuscule escadron formé d’adversaires de différents niveaux, elle venait de dévorer la distance avant même qu'on puisse constater son avancée. Sa technique de rapidité, impressionnante et brutale à la fois, lui offrait l’avantage de détruire tout ce qui se trouvait aux alentours. Elle déplaçait l’air de manière si violente que le sable en était marqué par des trous, et les pauvres Shinigamis de piètre niveau furent propulsés vers l’arrière. Mouvements déstabilisants et surprenants à la fois, elle avait là l’avantage pour porter un rapide coup d’épée à la silhouette noire, avant de disparaitre à nouveau, attaquant chacun de ses angles morts sans se soucier du Capitaine. Au nombre de trois assauts qui eurent l’effet d’une constante bourrasque gorgée de reiatsu, elle s’en prenait à la vingtième siège, tentant avec précision de profiter de la moindre ouverture. Lorsque sa technique fut dissipée et que sa vitesse redevint ordinaire, elle demeura aux flancs des deux Shinigamis, reposant ses offenses sur sa maitrise du sabre. Toujours et encore, Asuna était la cible de ses nombreux assauts.

C’est bon? Ta mémoire a été rafraichie microbe?!

Si sa victime ne prenait pas sa place dans ce croisé de fer, elle risquait de crouler sous les coups précis et calculés de la Quinta. Un rire traversa la barrière de ses lèvres, tandis qu'elle tentait du mieux qu'elle pouvait, au vu des circonstances, de garder un oeil sur le capitaine.

Citation :

Je sais pas du tout s'il m'est possible de commencer aussi brutalement, mais je prends en compte le fait que ça m'a bouffé une bonne dose d'énergie, même si je ne l'ai pas précisé dans ma narration.

Rapide… Cette fille était tout bonnement trop rapide. L’atmosphère autour de moi s’ébranlait, à un tel point que je faillis tomber par terre, sur mes fesses. La belle affaire j’vous jure. Mais alors que je pensais rapidement sentir le tranchant de sa lame sur ma peau mate, il n’en fut rien. La jeune arrancar attaquait plutôt la vingtième siège à outrance. J’avais voulu réagir, mais je ne pouvais pas faire grand-chose en l’état : J’étais trop lent. Bien trop lent. C’était là ma faiblesse majeure. Cependant, rien n’était encore joué et je préférai voir à quel point cette vingtième siège se débrouillait : Le fait même que le capitaine-commandant l’ait choisi pour qu’elle travaille avec moi en binôme voulait tout dire. Elle devait être forte. Au moins aussi forte qu’un troisième siège ou un lieutenant. De plus, la dent qu’avait la Quinta contre la shinigami appuyait fortement mes opinions : Kuragari Asuna n’était pas insignifiante. Loin de là. Maintenant que j’y pensais d’ailleurs, j’en vins à me demander pourquoi elle m’avait menti. Le caractère puéril de Lili en disait long sur sa sincérité ; sans compter que l’excuse sur la ressemblance des hollows de ma soi-disant alliée, était complètement bidon. Je pouvais comprendre pour de simples gillians de pacotille ou encore pour des adjuchas, mais pour ce qui est des arrancars hein…

Alors qu’un combat semblait débuter entre femmes, mon regard se posa sur l’autre arrancar. J’étais prêt à parier qu’il était le serviteur de la quinta, mais quand bien même, je n’avais pas vraiment l’intention de le sous-estimer. Et s’il fallait que j’essaye de l’écraser à pleine puissance dès le départ, je n’allais pas m’en priver. Si le Rey l’avait envoyé ici, ce n’était certainement pas pour rien. Son cas me faisait d’ailleurs penser à celui de la fameuse Asuna. Les leadeurs de chaque faction ne faisaient rien au hasard. Ils étaient bien trop rodés et expérimentés pour prendre cette confrontation à la légère. Et quand on sait à quel point une invasion de shinigamis au Hueco Mundo peut être dangereuse, on envoie ses meilleurs éléments sur le champ de bataille. C’était ma logique, mais en même temps LA logique. Ce type devait cacher quelque chose, donc. Levant une main au-dessus de ma tête, je l’agitai rapidement comme pour donner le signal aux autres shinigamis derrière nous. Ces derniers eurent du mal à se relever de l’attaque de la Quinta, mais s’exécutèrent bientôt. Ils se dispersaient un peu partout. Ce n’est pas que je les envoyais à la boucherie, mais le simple fait de rester derrière nous, faisait d’eux des cibles trop faciles. Aussi, gagnait-on du temps pour ce qui était des recherches sur le(s) Maho Tsukai…

- Je n’aime pas me battre… Dis-je soudainement à l’égard de l’arrancar mâle, tout en dégainant lentement mon zanpakutoh de son fourreau. Mais bon, je suppose que c’est inévitable, n’est-ce pas ? Ton jouet est occupé, donc tu vas devoir te contenter du gros truc pas tout beau, conclus-je, sourire aux lèvres.


« Umeru, Gōrudensanzu »

Mon réiatsu se manifesta violemment et se diffusa dans l’air. Un cercle de sable se forma autour de ma personne, tandis que mon trancheur d’âme brillait dans mes doigts. Il s’allongea rapidement et prit une forme plus conséquence : Celle d’un bisento géant. Je le posai sur l’une de mes épaules, tandis que ma pression spirituelle finit par s’évanouir, après avoir provoqué une légère bourrasque sur les lieux. Ledit cercle de sable était également conséquent. Il agissait comme un bouclier autour de moi, ce dont mes adversaires allaient vite se rendre compte. Ma lenteur était ainsi comblée par mon shikai. Les attaques surprises et véloces avaient peu de chance de m'atteindre. De ma main de libre, je retirai ma pipe entre mes lèvres, avant de la vider de ses braises et de la ranger à l’intérieur de mon kosode. Je finis enfin par saisir mon bisento des deux mains, avant de mimer une attaque dans le vide ce qui engendra un gros bloc de sable. Ledit bloc fila façon missile vers le ciel avant de s’éclater en une large bande. On aurait dit un gros nuage au-dessus de mon vis-à-vis. J’eus alors un sourire assez mauvais et murmurai : « Nuretasuna ». L’agrégat se transforma en une multitude de billes de sables qui finirent par s’abattre sur l’arrancar, de façon violente et ultra-rapide, telle une soudaine averse qu'on ne voit pas venir.


Les dés sont jetés. Les hostilités sont dorénavant lancées.

ıl ıl That's how we roll. lı lı

Mon regard purpurin dût abandonner l’escarmouche opposant les deux crinières dorées. Tu venais de bouger à ton tour, Shinigami. C’est donc que tu t’étais lassé de cette absurde attente toi aussi. Pourtant, c’est un manque de conviction que je devinais dans ces quelques mots à mon égard. Tu n’aimes pas te battre? Voilà qui est déconcertant. Ne ressens-tu pas cet irrépressible désir de lacérer ma chair de cette lame que tu prétends brandir au nom d’une juste cause? Ton Zanpakutō ne te hurle-t-il donc pas de me trancher, moi, modeste âme, damnée de surcroît? Toi, qui te proclame Dieu de la mort, ne devrait pas flancher ainsi face à ton labeur. Impose-moi ton châtiment Céleste! Cependant, soit bien sûr du lieu où tu comptes m’expédier, car, si c’est en enfer, je crains, malheureusement, que nous n'y soyons déjà.

Je perdis graduellement mon sourire précédent. À présent, j’arborais un simulacre d’étonnement face à cette manifestation de réiatsu. Mes lèvres s’allongèrent comme pour dire wow, tandis que ma chevelure s’agitait avec ferveur. Je poussai même cette comédie jusqu’à applaudir, l’innocence de mes traits m’accordant une étonnante crédibilité. Cependant, outre ces pitreries, mes pupilles ne te lâchaient pas, Shinigami. J’observais ta gestualité avec un intérêt non feint, particulièrement intrigué par ton nouveau jouet. C’est d’ailleurs cet instant de répit qui m’accorda une longueur d’avance sur toi. Ta technique, en soi, fut d’une déconcertante vélocité. Ton mouvement, toutefois, restait atrocement lent. Cela dit, si je n’avais pas été ainsi dans une immobilité parfaite, à l’affût des intentions que tu voilais derrière la libération de ta trancheuse d’âme, je n’aurais probablement pas été en mesure de me dérober de la sorte de cette soudaine averse. En de telles circonstances, ton geste ne pouvait qu’être prévisible, la vélocité de mon sonido surplombant celle de ton assaut. Il t’est toutefois permis de ressentir une certaine satisfaction, Shinigami. Bien que rapide, mon temps de réaction restait encore à désirer. Ainsi, je ne pus empêcher quelques billes de sable de venir se loger dans mon épaule gauche avant de m’éclipser, m'arrachant une plainte sourde.

Mon simple sonido ne se révéla pas aussi véloce que la technique de mon binôme, et encore moins brutal. Toutefois, il me permit tout de même d’engloutir le peu de distance qui me séparait de toi, charmant capitaine, et ce, à une vitesse plus que remarquable. Toutefois, tu n’étais pas ma cible. « Bouh! » Soufflai-je tout simplement en réapparaissant au dos de celle qui avait si sèchement décliné mon offre précédemment. Dans les airs, à mis hauteur, j’armai un coup de pied circulaire vers la tempe de la pâle Shinigami. J’avais tenté de la surprendre entre les assauts répétés de mon binôme. Toutefois, que cette offensive eut porté fruit ou non, j’y avais concédé assez de puissance pour y voir un danger potentiel. On ne me refuse pas de la sorte.

En cet instant, Asuna regretta amèrement d’avoir eu raison. Bien entendu que le sang coulerait ce soir, quelle audace d’avoir cru qu’il en aurait été autrement ? Elle ne pensait pas néanmoins que ce serait le sien à couler le premier.
Elle entendit le murmure de la jeune femme adressée à son compagnon, et sut qui allait être la cible du premier assaut. Asuna, dont la vitesse était plus qu’appréciable, en était encore à dégainer son arme que l’Arrancar était déjà sur elle. La Shinigami interloquée se retrouva confrontée à une mobilité de déplacement qui n’avait plus rien de comparable à celle dont elle avait souvenir lors de leur dernière rencontre. Elle parvint à contrer le premier assaut, de justesse, manquant de se faire décapiter net. Le second en revanche lui laissa une belle estafilade sur toute la longueur de son bras armée, et ce fut un reflexe miraculeux qui lui permit de ne pas perdre quelques doigts au passage du sabre de son adversaire. Asuna serra des dents, à la fois contre la douleur, et parce qu’elle se demandait, choquée, pourquoi le Capitaine la laissait se battre, seule, face à l’un des membres d’élite du Hueco Mundo, elle qui pourtant n’était que vingtième siège, et simplement venue en renfort de soutien.
Elle n’eut guère plus de temps de maudire le capitaine qu’elle perçut la masse spirituelle colossale de l’Espada près de son flanc vulnérable. Ses réflexes ne furent pas à la mesure de ses capacités de détection et elle ne put empêcher l’arme de s’enfoncer dans la chair fragile de sa hanche. L’enfer se termina sur cette blessure cuisante, et Asuna fit front, déjà bien affaiblie, à l’Arrancar qui retrouvait enfin une vitesse décente. Mais une nouvelle mauvaise surprise attendit la Shinigami, puisqu’elle se sentit de nouveau dépassée par les qualités de sabreur de son adversaire à un tel degré qu’elle se demanda si elle combattait réellement la même idiote de la dernière fois. Le souffle court, elle se retrouva acculée sous les assauts frénétiques de l’Espada qui menait brillamment le jeu.

Soudain, Asuna détecta une autre présence à ses cotés. Elle espéra un quart de seconde qu’il s’agît du Capitaine mais le pied qui se dirigea vers son visage eut tôt fait de briser toutes ses espérances. La vingtième siège apprécia la logique des Arrancars à s’en prendre à supposément la plus faible. Mais elle ne voulait pas mourir, même si elle devait se révéler à un capitaine. Ainsi décida-t-elle d’agir à son tour.
D’un geste ample du bras, la jeune femme abattit son sabre sur la jambe du garçon, au niveau de la cheville, là où l’os était le plus simple à sectionner. À défaut de couper le membre, au moins parviendrait-elle à détourner le coup loin de sa tête. Son action la rendit toutefois vulnérable à l’assaut de son autre adversaire. Elle sentit l’acier mordant du sabre déchirer son ventre ; une explosion de douleur lui prit les entrailles et Asuna grimaça, pour ne pas hurler par reflexe. Une lueur de détermination meurtrière s’alluma dans les pupilles azur de la Shinigami. Elle saisit le bras de l’Arrancar, l’obligeant de ses maigres forces à ne pas retirer son arme. Son index et son majeur se tendirent vers la poitrine de son ennemie.

« Sōren Sōkatsui. »

Une déflagration de feu bleu fusa entre ses doigts ; le souffle de l’incendie lui donna assez d’élan pour reculer, tout en arrachant au préalable l’arme de son ventre. Elle tituba de quelques pas en arrière, un flot de sang s’écoulant de sa blessure qu’elle tentait de contenir de sa main. Cette dernière luisit d’une énergie pâle, et la cataracte pourpre ne fut plus que fins ruisselets.

« Capitaine, comptez-vous prendre la peine d’agir ? »

Son ton bien que courtois laissa néanmoins transparaître une irritation qui allait grandissante.

L’Espada avait fait mouche à plusieurs reprises. Elle prenait gout de plus en plus à ces échanges au fer. Non seulement elle voyait poindre une inévitable victoire dans ce duel déséquilibré, mais en plus, elle était persuadée d’en ressortir sans même une égratignure, tant sa victime semblait crouler sous les coups. La pauvre n’avait juste pas prévu l’assaut, et peut-être même s’était-elle fait à l’idée que sa maîtrise au sabre n’avait guère fleurie depuis ces dernières décennies. Malheureusement non. La Shinigami le constatait à ses dépens, au prix du sang devenu marre à leurs pieds. Voir surgir de nulle part son compagnon Espada lui mit le sourire aux lèvres. Semblait-il qu’il ne tolérait pas à ce qu’on s’approprie ce qui avait été déclaré sien, mais qu’importe, plus nombreux ils étaient sur cette insignifiante chose et plus vite elle irait rejoindre les moult squelettes enfouis sous le sable du Yermo. Dans un cri teinté par une gloire certaine issue d’un triomphe acquis à ses yeux, sa lame vint se ficher dans la chair de son adversaire. Son visage s’était approché si près de celui de la martyre qu’elle put humer avec délectation les exhalaisons de son sang, qui imbibait autant le corps que le sable, mais lorsqu’elle voulut déloger l’arme, rien.

Abasourdie par la résistance de sa lame fichée dans le corps de l’ennemi, et par l’impossibilité de se dégager, elle ne sut trouver le temps d’y placer un commentaire qu’elle entendit la brève incantation, annonciatrice d’un contrecoup imparable. Tirer sur son arme ne servait à rien, si ce n’est qu’envenimer la blessure, et son bras était si fermement agrippé qu’elle ne pouvait trouver un moyen de s’abriter du feu à venir. Par réflexe, sous le coup de l’adrénaline, sa main libre vint repousser le bras qui chargeait l’attaque dans le but de dévier celle-ci, mais si le mouvement fut bien pensé et rapide, il ne suffit guère à la protéger entièrement. Un rayon bleuâtre vint lacérer en entier son flanc droit, brûlant et déchiquetant sa chair de l’épaule jusqu’aux côtes en lui arrachant un cri de douleur. La puissance était telle que la Quinta fut propulsée vers l’arrière, délogeant par le fait même la lame qui avait semblé immuable auparavant. Disparue dans la fumée, sans aucune vision pour constater l’étendue des dégâts, on pouvait du moins deviner que son état était comparable à celui de la vingtième siège, au vu de l’odeur de chair brûlée laissée dans la place.

Ce qu’il n’était pas possible de savoir vu l’écran de fumée qui se dissipait lentement sous le souffle du zéphyr, c’est que Lili avait réussi à activer sa resurreccion lors de sa chute, fusionnant avec l’épée qui avait été projetée en arrière avec elle. Quoiqu’on puisse percevoir une silhouette difforme qui prenait lentement conscience, elle ne laissa le temps aux protagonistes de la scène de se prémunir de ce qui suivit. Dans un dernier cri de rage, en une fraction de seconde, son corps en entier se divisa en une multitude de fibres solides et acérées qui couvrirent une large superficie de l’arène, menaçant tous les acteurs, autant allié qu’ennemis. L’attaque fut rapide et maladroite, mais il n’y avait guère besoin de s’appliquer. Les pointes acérées étaient suffisamment longues et nombreuses pour atteindre tout le monde. L’instant qui suivit, elle avait retrouvé sa forme arrancarisée que la Shinigami connaissait tant, mais son état, trop lamentable, ne lui permettait aucunement de profiter davantage des réserves d’énergie qu’elle possédait. Sans même un regard vers ses adversaires, elle s’écroula dans le sable tandis que son pouvoir se résorbait peu à peu. Le voile de fumée s’était levé; on pouvait clairement constater qu’elle avait poussé ses limites trop loin.

Grièvement blessée, exténuée et défaite, elle n’avait d’autre choix que de laisser à son compagnon le soin de s’occuper d’eux…

ıl ıl The Awakening. lı lı

Le tranchant du Zanpakutō vint se heurter à l’assaut du Segunda. Vive, concise, la fine lame argentée s’était interposée avec une adresse admirable, préservant son bretteur. Le Vasto Lorde, à cette constatation, fut épris d’un curieux plaisir, un sourire candide s’insinuant à nouveau au creux des traits de son visage. Ainsi donc, la flegmatique Shinigami rétractait son refus précédent et acceptait volontiers de divertir cet Espada que trop ennuyé. Une pensée qui réjouit le gamin. Son offensive se heurta donc à la bordure acérée de sa nouvelle partenaire de jeu. Cependant, s’il est vrai que l’épée s’était gracieusement opposée à la puissance physique de l’Arrancar, elle ne sut toutefois lui lacérer la chair. À vrai dire, l’impact s’apparenta davantage à un duel d’escrimeurs, l’acier de la trancheuse d’âme venant se confronter à cette particularité du peuple du Yermo, le Hierro. Le Segunda, amusé, maintint ainsi la pression exercée sur la lame de la Shinigami, affrontant son regard azuré de ses prunelles cramoisies. Ce n’est qu’en percevant le nouvel assaut de la Quinta du coin de l’œil, que ce dernier finit par abdiquer. Au moment opportun, il flancha sous l’effort de la sobre inconnue, se laissant brusquement repousser par sa contre-attaque, la livrant ainsi au courroux de la princesse blonde.

Se reprenant dans l’immédiat, Ace ancra sa dextre dans le sable, venant freiner son recul sous une trainée de poussière blanche. Il s’avéra d’ailleurs qu’un tel manège n’était pas aussi spectaculaire qu’il n’y paraissait. C’était même plutôt douloureux. L’énergumène acheva ainsi cette action parfaitement inutile assis au sol, la main en feu et presqu’au bord des larmes. D’ailleurs, il voulut insérer ses doigts au fond de sa bouche afin d’atténuer cette désagréable sensation de picotements et de brûlure. Un geste qui fut néanmoins interrompu par une soudaine bourrasque de vent, résultat d’une déflagration survenue à quelques lieues de son emplacement. Relevant alors les yeux vers la provenance de ce vacarme, le Vasto Lorde resta médusé face à un spectacle accablant. Projetée dans les airs, la Quinta regagna le terrain sablonneux avec une singulière brutalité, soulevant un nuage partagé entre la poussière et la fumée résultant de sa précédente calcination. Dans l’instant, la seconde lame en resta de marbre, épiant la brumeuse silhouette de sa partenaire d’un air absent. Il patientait, tout simplement, à l’affût de cet instant où la bouillante donzelle s’extirperait de cette fâcheuse situation en beuglant, comme à son habitude. Cependant, rien de tel ne se produisit. Dès lors, un silence macabre vint envelopper le terrain désertique, tandis que les traits du Vasto Lorde s’occultaient lentement sous un voile de chagrin.


« Hoy, Lili? »

Fit-il finalement, sa voix s’évanouissant presque dans un murmure. Aucune réponse ne lui parvint. Se redressant alors doucement, l’Arrancar voulut rejoindre son binôme. Cependant, son action fut freinée dans son élan, un hurlement s’élevant subitement de la fumante carcasse de la Quinta Espada. En l’espace d’une seconde, c’est un véritable déluge de tentacules acérés qui s’extirpa du nuage opaque, se déployant sur le terrain à une vitesse faramineuse. Le Vasto Lorde ne s’accorda point le temps de réfléchir. Reculant de manière saccadée, il donna vaguement l’impression de progresser par le biais de légères téléportations, s’éclipsant brièvement à chacun de ses pas, dévorant rapidement une bonne distance. Saltador. Il s’éclipsa ainsi dans une séquence de sonidos véloces, sa dernière foulée l’arrêtant aux limites de cet assaut inopiné, ne laissant qu’une pointe affutée venir brièvement lui lécher la joue, laissant une fine entaille à sa suite. Ça avait été juste. L’instant d’après, les tentacules se rétractèrent tous, abandonnant le corps de la cinquième Espada dans le sable blanc du désert. Ace s’en approcha alors d’une démarche lente et incertaine, venant se poster auprès de celle-ci, la considérant d’un regard sans éclat. Il l’observa ainsi le temps d’un instant. Aucune mimique. Aucun sourire. Aucun commentaire. Il finit toutefois par s’accroupir, saisissant la carcasse entre ses bras avant de se redresser. Le Vasto Lorde s’éloigna ainsi de quelques pas, venant reposer la Quinta à quelques lieues de son emplacement initial. Un pâle sourire s’insinua brièvement au creux de ses traits, suite à quoi, il tourna le dos à sa congénère. De sa dextre, il dégaina la lame jusque-là restée à sa ceinture. Il la brandit lentement devant lui, désignant la vague dégaine des intrus au loin. Un sinistre murmure s’échappa alors de ses lèvres.


« Rasgar, Janemba. »

« Idiot, dit Asuna, murmurante, à l’oreille du capitaine évanoui. »

Tous deux devaient faire peine à voir, ainsi surpris dans cet échange intime, où l’habituel enthousiasme de deux partenaires se retrouvait ici dans leurs sangs mélangés. Sans tendresse ni douceur, Asuna repoussa l’homme ; elle le fit basculer de coté, et le corps lourd alla choir dans le sable qui très vite prit une teinte vermillon. Elle se redressa en grinçant des dents, la douleur irradiant de tous ses membres et aperçut, au loin, le garçon qui se rapprochait lentement de sa partenaire, mise hors de combat par le précédent assaut. Si la situation restait pour le moins désespérée, la vue de son ennemie au sol mit du baume au cœur à la jeune femme.
Elle profita de la distraction de l’Arrancar restant pour s’ausculter et fut rassurée de constater qu’hormis une nouvelle blessure au bras, elle n’avait que peu subi l’attaque. Le Capitaine trouvait toute sa valeur dans le rôle de bouclier humain, finalement. Elle lança un coup d’œil à ce dernier, constata que son état était des plus mauvais, et décida ne pas y accorder plus de temps et d’énergie que nécessaire. Son autre adversaire était encore occupé, aussi profita-elle de ce délai pour panser ses propres plaies. Sa peau se ressouda maladroitement en bourrelets grossiers de chair cicatricielle, et bien que son corps continua de la faire souffrir, elle fut satisfaite de ne plus avoir à se soucier de feu ses hémorragies. Un peu tremblante sur ses appuis, encore légèrement sonnée par les attaques incalculables qu’elle venait d’essuyer, Asuna fut chassée de son engourdissement par la déflagration d’énergie spirituelle qui eut lieu là où se tenait le garçon quelques instants plus tôt.

La jeune femme réagit à l’instinct, d’entre ses lèvres jaillit une nouvelle incantation ; l’instant suivant, un bouclier s’érigea autour d’elle, une pyramide étrange dont la base se tint aux cieux à l’inverse de sa pointe profondément enfoncée sous le sable. La protection était solide, mais Asuna douta qu’elle tînt plus que quelques minutes. Face à elle, la Shinigami percevait une masse de reiatsu incroyable dont l’essence avait en partie changé. Ce qui n’augurait rien de bon.
Inquiète devant ce déferlement de puissance, Asuna traça rapidement des lignes sur ses bras en usant de son propre sang comme encre. Elle s’agenouilla et inscrivit à même le sable d’autres lignes, n’hésitant pas à se brûler le doigt contre les grains minéraux à cause de sa vitesse d’exécution. Elle apposa ses paumes contre le sol puis projeta son esprit vers toutes les énergies spirituelles des environs qu’elle devinait être de nature Shinigami. Un unique mot claqua et sa voix fut portée à tous, du moins l’espérait-elle.

« Ici Kuragari Asuna, vingtième siège de la Quatrième Division. Le capitaine Himesaki est tombé au combat, je répète, le capitaine Himesaki est tombé face à l’Espada. Ceci est un appel à l’aide. »

Elle coupa la communication par crainte de trop épuiser les dernières forces qui lui restaient. Asuna douta que l’on vînt l’aider, mais si elle devait survivre, elle ne souhaitait pas que l’on lui imputât la mort d’un haut gradé. Elle se redressa, le souffle court.
Elle, seule, face à un adversaire de force inconnue ; elle, épuisée, lui en parfaite possession de ses moyens. Asuna pressentait sa mort arriver, inéluctable. Elle n’eut pas peur car elle n’était pas seule

« Dépèce, Taigun no Sobame. »

Sa lame s’épancha d’un sang épais et gras qui vint s’abattre sur le sol en cascades rouges. Quelques gouttes vinrent éclabousser le visage déjà sali du capitaine évanoui, et le sable autour s'imbiba du pourpre tandis que sous la surface se mirent à germer d'innombrables horreurs. Asuna secoua son arme et attendit que vînt l’acteur de son trépas.

ıl ıl Are you scared of me? lı lı

L’Arrancar huma l’air sereinement. Les yeux clos, le minois rivé vers les cieux, il laissait lentement retomber l’effervescence de sa pression spirituelle. Cela faisait maintenant si longtemps qu’il n’avait arboré les traits de cette vile chimère, si bien, qu’il avait fini par en oublier cette délectable sensation. L’excitation de la résurrection.

Délicatement, le Vasto Lorde déploya les paupières, venant porter son regard carnassier à sa dextre griffue. D’un geste engourdi, il balaya l’air devant lui, se saisissant de quelques cristaux de sable chutant encore suite au déchainement d’énergie ayant résulté de sa métamorphose. Refermant sa poigne brusquement, il laissa alors lentement s’égrainer le fruit de sa cueillette. Il n’avait point perdu de sa vigueur de jadis. Puis, ses prunelles bestiales glissèrent vers son torse, venant admirer cette nouvelle apparence partagée entre le vermillon et le violacé, digne compromis entre son allure d’antan et son actuel statut d’Arrancar. Son plein potentiel avait été atteint, place maintenant aux sanglantes représailles. À cette dernière pensée, le Segunda releva le visage d'un geste toujours empreint de torpeur, venant poser le regard sur la lointaine silhouette de son antagoniste. Celle-ci s’était cloitrée à l’intérieur d’une charmante incantation adoptant la forme d’une pyramide inversée. Un sourire déchira brièvement l’impassibilité du visage de l’Arrancar. Sa candeur n’était dès lors plus qu’une réminiscence, cette mimique-ci, était celle d’un être avide de sang. La chimère redressa alors sa posture, et entreprit sa marche funèbre.

L’Arrancar ne s’arrêta finalement qu’à quelques pas du polyèdre bleuté. Il pencha légèrement la tête sur la droite, observant cette construction d’un intérêt tout particulier. À priori, bien que ce fût là une œuvre d’énergie, elle semblait vouloir s’imposer en véritable barrière, se dressant entre ce prédateur et celle qui avait été désignée en tant que proie. La seconde lame resta ainsi un long moment, comme s’il avait voulu se jouer de celle emmurée dans cette prison. Après tout, entre les dunes du monde creux, la chasse n’était-elle pas devenue un simple jeu pour ceux ayant atteint le stade suprême de l’évolution? Puis, brusquement, Ace vint à nouveau exhiber sa dentition bestiale, ayant capté le regard de la donzelle outre ce bouclier qu’elle avait su élever autour d’elle. L’instant suivant, il brandit le bras vers cette dernière, armant son index et son majeur comme s’il s’agissait là d’un pistolet, puis, tira.

Un coup. Deux coups. Trois coups. Les phalanges du Vasto Lorde vinrent se heurter à la pyramide, fissurant légèrement sa façade, sans toutefois parvenir à y créer une ouverture. Celui-ci brandit alors son autre bras. Quatre coups. Cinq coups. Six coups. Il n’en résulta toutefois aucun réel progrès, du moins, en apparences. Quelques craquelures ici et là, mais aucune brèche conséquente. Pourtant, le sourire fauve persistant au creux des traits du Segunda laissait croire à un triomphe. S’inclinant alors légèrement, celui-ci accorda un bref aperçu sur la queue dressée dans son dos. L’instant suivant, c’est une extension de sa colonne vertébrale qui s’en extirpa à une vitesse vertigineuse, fondant sur la construction de la Shinigami. Les fissures précédentes s’ébréchèrent alors brutalement sous l’impact de ce nouvel assaut. Pourtant, la technique du Vasto Lorde ne s’en contenta pas. Poursuivant de son élan véloce, l’extrémité acérée se rendit à la jeune femme, le cœur de cette dernière dans sa ligne de mire.

ıl ıl Entertain me! lı lı

Le dard affûté sût ébranler la jeune femme. S’insinuant au cœur de cette marée de bras livides, sa fougue lui avait accordé le désir féroce de la pénétrer. Cependant, à l’impact, le membre fébrile ne parvint qu’à entamer la poitrine de l’Ange de la mort, ne lui concédant qu’une morsure futile. Ainsi donc, elle avait su atténuer la vivacité de cet assaut par l’intermédiaire de cette curieuse technique. Le Segunda n’en était que plus amusé. Son hôte acceptait donc de se prêter à ce jeu pervers, refusant d’être la simple proie au destin scellé. Un rictus prit naissance au coin des lèvres de la chimère. L’instant suivant, la lance de vertèbres se rétractait, serpentant docilement jusqu’à son maître, comme s’il avait voulu ainsi témoigner sa déception. Ace se redressa, la queue s’agitant de nouveau à son dos et le regard braqué sur son divertissement du moment. Il trépignait d’impatience.

La voix de la blonde siffla alors d’une mélodie macabre, tandis que le terrain devenait complice de ses fantaisies. Dès lors, un bruit assourdissant pourfendit les cieux. L’Arrancar en resta de marbre, son rictus précédent s’altérant progressivement en un sourire carnassier. Puis, ce fut le désert du Yermo qui vint se corrompre sous la volonté de l’ennemi, le sable blanc s’accaparant d’une teinte rougeâtre. Ace s’exécuta alors de légers sauts vers l’arrière, tentant de fuir cette manifestation prenant naissance aux pieds de la Shinigami. Toutefois, sa tentative fut vaine, la moisissure ne tarda à s’imposer en maître au cœur du monde creux, tandis que l’astre de la nuit succombait également aux caprices de la blondasse. Le Capitaine disparut sous la couche écarlate. Les vestiges du polyèdre s’évaporèrent. Puis, finalement, l’auteure de ce curieux spectacle s’évanouit à son tour dans les ténèbres. Ace était à présent seul, seul au cœur de ce théâtre des ombres, bercé de cette symphonie lugubre.


« Oh? »

Unique syllabe provenant du Segunda. Ramenant le poing à ses lèvres, il vint finalement étouffer un son s’apparentant vaguement à un ricanement. Il était seul dans la pénombre des lieux. Son antagoniste devait probablement rôder dans les ténèbres dont elle avait fait son domicile, à l’affût d’une opportunité. Voilà là un jeu qui plaisait à l’Arrancar. Non, affirmer une telle chose serait mensonger. Dans la présente situation, la Shinigami était plutôt celle qui lui plaisait. Un Ange de la mort jouant dans la noirceur avec une chimère du Hueco Mundo. Intéressant! Au bout du compte, ce fut un véritable rire qui s’échappa de la gorge du Vasto Lorde, déployant les bras tout en relevant le minois vers les cieux enténébrés. Il était fébrile. Tout ça le rendait fébrile! Il fallait que ça dure! Son hilarité finit cependant par s’estomper. Dans un mouvement de rotation, il vint réchauffer l’articulation de son épaule gauche, touché précédemment par le Shinigami tombé au combat. Un sourire macabre persistait sur son visage, tandis que sa voix s’élevait à nouveau.


« Hoy, Shinigami! Vas-y, divertis-moi! »

Il était fou car il riait. Seul, dans les ombres, il s’esclaffait, gamin dérangé qui se moquait du noir, sans crainte des monstres qui pouvaient s’y tapir.
Elle était folle car elle pleurait. De joie. Jamais seule dans les ombres, elle gémissait son bonheur, jeune femme dérangée qui se nourrissait du noir, et des monstres qui pouvaient s’y tapir.
Et entre eux deux réunis, il y avait la Dame, qui les dépassait de très loin en démence. Elle n’était plus une simple lame. Elle était la terre souillée, le ciel obscurci ; Elle était les ombres, Elle était la nuit, Elle était la peur, les monstres, les horreurs, les cris lointains, les mécaniques, les folies cachées, les pleurs voilés.
Elle était ce qui rampait sur le sol, Elle était les craquements de bois, les craquements d’os, la chair qui se tord, les membres qui se congestionnent, qui se remplissent de sang huileux et explosent. La Dame était les terreurs primordiales, les envies obscures, les perversions assumées ; Elle était rires, Elle était larmes, et tout l’enfer de son être se tendait en une convulsion éternelle, une vibration où la note était Sang et le musicien Folie.

Asuna et sa Dame marchèrent dans le précipice de noirceur ensemble. Elles plaisantèrent, comme deux bonnes amies, échangeant mondanités et nouvelles, sur le monde de dehors et sur celui-ci. Elles escaladèrent les Monts des cendres, où s’avilissaient les vainqueurs au milieu des charognes des vaincus, et prirent plaisir à ce spectacle que d’aucuns auraient trouvé dérangeant. Elles s’amusèrent de ces corps nus se montant l’un l’autre au milieu du sang et de la crasse. Puis elles se détournèrent et repartirent.
Elles visitèrent ensuite les Lames, où l’acier rencontrait la chair, puis les Craquements, murmures de vœux arrachés, jamais rendus, et pour finir la fosse des Osseux, où le claquement des dents brisées se mêlait à l’écho endeuillé d’un orgue fantôme.

Elles reprirent leur route. La Dame guida Asuna dont le bruit de ses pas se fit silence, et sa silhouette une ombre nouvellement née. Elles marchèrent enlacées l’une à l’autre, mère et fille, amantes unies par le sang, sœurs qui ne faisaient qu’une.
Elles dansèrent et chantèrent, les machines leur répondirent de leurs cris de métal.
Mais le temps consacré à leurs étreintes touchait son terme. Elles durent, à contre cœur, se lancer dans leur dernière marche, où la destination n’était rien de moins que leur séparation.
Elles profitèrent du temps passé ensemble, et ces quelques éternités, furent semblables à un doux songe. La fin vint cependant, elle aussi, comme chaque chose mortelle, et Asuna dû se résoudre à la quitter.
La Dame pleura une dernière fois, de larmes noires et non plus pourpres, et sa lame brilla dans le sinistre silence de son être. Asuna se tint derrière le garçon fou, silencieuse et sans expression, ombre parmi les ombres. Son souffle caressa la nuque de l’enfant monstre, ultime baiser avant la fin.
Le dénouement à venir s’incarna dans le bruissement de sa lame goudronneuse qui s’abattait sur la bête.

ıl ıl Such a pain in the ass. lı lı

Un souffle chaud lui caressa la nuque.

« Oh, te voilà donc, Shinigami! »

Un ange de la mort dans toute sa splendeur, enjôlant ce condamné, le consolant d’une douce volupté, avant que ne s’abatte cruellement le tranchant de sa faux. L’Arrancar ne put réprimer un curieux rictus au coin des lèvres. L’instant suivant, il se retournait d’un geste prompt, toujours animé de ce désir ardent de violence. Cependant, lorsqu’enfin il croisa le regard azuré de la Shinigami, il resta figé face à l’assaut de sa trancheuse d’âme. Vive et concise, tout comme la première fois. Néanmoins, au contraire de l’attaque précédente, celle-ci avait été assenée avec une intention limpide, la mort. La lame funèbre lui lacéra le torse, s’insinuant dans sa peau d’un trait diagonal, le marquant de l’épaule jusqu’au milieu du poitrail. D’ailleurs, le Zanpakutō aurait probablement su trouver son chemin jusqu’aux côtes de la chimère si la dextre de cette dernière ne s’était pas interposée de la sorte, emprisonnant le poignet de la demoiselle. Non, entre ces puissantes serres, il serait de convenance de dire qu’il lui broyait le poignet, littéralement.

Le Segunda faiblit sous les répercussions de cet assaut, reculant d’un pas chancelant, tandis qu’il portait son autre main à cette entaille partagée entre le vermeil et l’empreinte noirâtre laissée au passage de la lame. Il resta ainsi un instant, observant son thorax en pleurs. Après avoir erré plusieurs décennies entre les dunes de cette géhenne, c’était la première fois qu’il posait le regard sur son essence vitale. Curieux. L’Arrancar finit toutefois par relever le minois vers celle qu’il gardait captive, ses traits exprimant une douleur véritable. Néanmoins, ce sourire carnassier persistait. Délaissant cette vile entaille, il leva mollement le bras, armant sa dextre griffue comme s’il aurait voulu perforer la Shinigami et extirper son cœur. À vrai dire, c’est explicitement ce qu’il avait l’intention de faire.

Ce fut un bras qui vint interrompre son geste, faisant irruption depuis le stigmate scindant sa cage thoracique. Dans l’instant, la seconde lame en resta médusée, fixant ce membre livide qui avait su freiner son élan. En très peu de temps, une seconde main s’extirpa de la surface goudronnée, serpentant sournoisement jusqu’à venir lui broyer la gorge. Puis, finalement, deux membres supplémentaires jaillirent à leur tour, ondulant jusqu’à la poigne qui retenait l’ange de la mort. L’Arrancar avait été immobilisé. Ainsi donc, ce sont là les horreurs qui sommeillaient dans les tréfonds de cette frêle créature. Les pupilles cramoisies de l’Espada s’arrêtèrent sur la svelte silhouette drapée de noir. Il respirait avec difficulté. Néanmoins, il souriait encore. Non pas d’avidité ou encore de cruauté comme il l’avait fait plus tôt. Il souriait de plaisance. Un léger rire s’échappa finalement de sa gorge, entrecoupé de brefs toussotements.


« Hoy, Shinigami. L’interpella-t-il de sa voix compressée.
- Y’a pas à dire, t’es une putain de plaie! »



Son sourire retrouva sa candeur. Il resserra son emprise autour du poignet de la blonde. Dès lors, des épines acérées s'extirpèrent de sa carcasse sanglée, désireux de perforer cette dernière de ce nouvel assaut.

Qui y avait-il à dire ou à faire dans ces quelques instants qui précédaient la fatalité ? Asuna l’ignorait. Devait-elle gémir ? Devait-elle être en colère ? Devait-elle alimenter encore l’espérance d’un dénouement plus heureux ? Elle ne savait pas. Pour elle, il n’y aurait ni pleur, ni rage, ni espoir. Le seul sentiment qu’elle perçut dans son cœur fut une pointe d’irritation face au spectacle du garçon se débattant avec sa blessure, et qui pourtant s’accrochait, continuant ardemment de vouloir vivre.
Malgré tout, Asuna ne lui en voulut pas d’avoir été le plus fort.
Suite à cette pensée, il n’y eut plus que la douleur.

Les pointes osseuses labourèrent bras et jambe, organes et gorge. Asuna cria car il n’y avait rien à accomplir d’autre. Ses hurlements se perdirent dans les ténèbres qui lui répondirent par une complainte désespérée. Leurs cris se mêlèrent dans une disharmonie stridente, les derniers bruits d’une bête blessée.
Il n’y eut plus rien d’autre ensuite. Asuna ne sentit plus son propre corps, qui lui échappait en partie, et seule son autre main qui s’agrippait à son adversaire lui permit de rester debout, vacillante. Elle pencha la tête vers l’avant et entraperçut entre le voile sanglant de ses yeux la boucherie qu’était devenu sa carcasse. Un fin filet de sang coula le long de son menton. Elle se redressa et aperçut enfin, marque indélébile, le chiffre de l’enfant ; un deux d’encre gravé dans la chair du monstre. Elle esquissa un sourire en se rappelant, vaguement, d’un dicton humain disant qu’on mesurait la valeur d’une personne à l’aune de celle de ses ennemis.

« Lâche-moi, maintenant. Le jeu est terminé. Tu as gagné, dit-elle simplement, sans supplique ; simple constat énoncé à haute voix. »

La main de fer qui lui enserrait le poignet se relâcha, à contre cœur. Le bras d’Asuna vint choir contre son flanc, inerte, si ce n’était mort. Elle tenta de faire volte face, mais sa seule jambe valide flancha sous le poids de son corps blessé ; la jeune femme s’affala sur le garçon puis le repoussa, se servant de cet élan pour faire quelques pas loin de lui. Elle tituba sur un mètre ou deux, s’immobilisa et lança à l’adresse de son ancien adversaire :

« Nous voilà tous deux les spectateurs… de la fin… d’un monde. »

Le sang afflua dans sa bouche en une gerbe opaque qui rejoignit le sol déjà souillé. La silhouette déchirée d’Asuna s’écroula vers l’avant, sans bruit.
La joue collée au sable rougi, Asuna parvint à trainer son bras blessé jusqu’à son arme et à s’en saisir pour la rapprocher au plus près de ses yeux, visage contre visage. Du doigt, elle caressa tendrement la lame de son âme.

« Ne me… laisse… pas. »

Le voile de ténèbres se déchira et la moisissure au sol flétrit en quelques secondes, rendant au désert son aspect premier, ne laissant plus nulle trace de ce qui y avait établi résidence pendant un temps court et infini. La Dame répondit à Asuna, que tout irait mieux à présent. Asuna ne l’entendit pas.

ıl ıl Remember my name. lı lı

Une fissure parcourra le masque bestial de l’enfant, s’étalant rapidement sur tout son corps de chimère. Puis, un craquement, évoquant curieusement celui d’un os brisé. L’instant suivant, son déguisement violacé vola en éclats, restituant la candeur de ses traits. Un soupir s’échappa finalement de la gorge du Segunda, son regard grenat porté vers la voûte céleste. L’astre lunaire déchirait à nouveau la nuit paisible de sa nitescence opalescente. Ses prunelles glissèrent ensuite vers l’horizon lointain, toisant les dunes blanchies s’étalant à perte de vue. Voilà que cette géhenne retrouvait sa monotonie. La seconde lame ne put qu’éprouver une certaine déception.


« Terminé, hein? »


Fit-il dans un simple murmure. Ace détourna le regard vers l’ange de la mort, étendu dans le sable fin. Doucement, ses pas le conduisirent à elle, traînant sa lame à sa suite tel un fardeau. Il contourna la carcasse meurtrie, puis, vint s’asseoir face à celle qui fut son antagoniste. Il l’épia ainsi le temps d’un instant. Elle n’avait pas rendu l’âme, pas encore. Mais alors que son devoir aurait été de lui soutirer ce dernier souffle de vie, l’Arrancar n’en fit rien. Il se pencha plutôt vers cette dernière, prenant appui sur son épée qu’il ancra dans le sable.


« Hoy, Shinigami, fit-il dans un souffle.
- Dis, tu vas pas crever ici hein?
Aucune réponse ne lui parvint.
- Ce serait malheureux, j’ai même pas eu le temps de te demander ton nom.
Il marqua une légère pause, observant la blonde.
- Hoy! Faut pas mourir, Shinigami, continua-t-il, bien que conscient de discuter seul.
- C’était plaisant aujourd’hui, je me suis réellement amusé!
- D’ailleurs, si ça te gêne pas, j’aimerais bien qu’on remette ça, un de ces jours qui sait.
Un léger sourire s’insinua sur son visage.
- Et c’est pour ça que tu dois pas crever ici! »


L’enfant se redressa finalement, jeta un dernier regard sur la Shinigami, puis, s’en éloigna. Il se rendit à sa charmante partenaire, Lili. Dès lors, il s’était à nouveau affublé de ce rôle puéril qu’il tenait au sein de l’Espada. Il chargea la Quinta sur son épaule, une mimique exténuée au visage. « Allez ma grosse, on rentre à la maison ! » Il se mit alors en route. Néanmoins, alors qu’il s’éloignait, l’Arrancar leva le bras, saluant son antagoniste de ce dernier geste.



« On m’appelle Ace. Tâche de t’en souvenir, Shinigami ! »