« Kaogake-Fukutaishô ! N'y pensez même pas ! Restez couché. Vous avez encore besoin de soin ! »

Ça, c'était l'infirmière qui s'occupait de lui depuis son entrée à la quatrième il y a de cela quelques jours. La gamine avait l'air d'avoir reprit de l'assurance au fur et à mesure que l'état de l'Ardent s'était amélioré. Haiko le reconnaissait bien volontiers, elle était tenace. L'épisode de sa petite crise de nerf tournée à son encontre le premier jour avait visiblement renforcé le caractère de la jeune femme d'une façon plutôt inattendue. Là où il l'aurait auparavant renvoyé balader, le petit shinigami se contenta d'en sourire tout en revêtant son uniforme. Il l'ignorait sans remords. Enfilant son zanpakutô dans sa ceinture, le jeune homme sortit de sa chambre, son ange gardienne sur les talons. Légèrement plus grande que lui, la shinigami chercha à barrer la route à son patient en se postant devant lui, les bras écartés et l'air sévère.

« Retournez immédiatement dans votre chambre ! Sinon vous... Sinon je... »

Elle semblait hésitante, sans vraiment savoir quoi dire où quoi faire de plus face à l'indifférence affiché par le vice-capitaine qui la regardait avec un grand et franc sourire. La situation l'amusait. Afin d'écourter le malaise de l'infirmière, il abaissa doucement ses deux bras le long de son corps avant de lui prendre les mains jointes.

« Honoka-chan... Je vais bien, ne vous en faites pas. Laissez donc votre patient aller prendre l'air. J'ai besoin d'aller rassurer mes hommes. »

Sur quoi il déposa un doux baiser sur le dos des mains de la brunette qui s'empourpra en bafouillant. Il la dépassa en se dirigeant vers le fond du couloir.

« Je m'excuse de vous avoir effrayé le premier jour. Prenez soin de vous Honoka-chan ! »

Puis, Haiko passa le pas de la double porte menant vers la sortie du bâtiment. La mine réjouit, il ferma les yeux un instant, le visage baigné par la lumière du soleil. Il faisait un temps superbe, quoi qu'un peu frais. Il soupira lourdement avant de se crisper légèrement en posant la main sur son abdomen. Derrière l'uniforme, l’entièreté son tronc était enrubanné de bandages dessous lesquels certaines plaies n'étaient pas encore bien cicatrisées. Mis à part cela et son bandage crânien toujours présent, rien n'indiquait que le shinigami avait livré bataille quelques temps plus tôt dans l'enceinte de la ville des esprits. Pendant un instant, il repensa à son capitaine qui n'avait pas eu autant de chance que lui, toujours cloîtré dans sa chambre de la quatrième. Il se demandait également comment il allait annoncer la nouvelle à sa division...

D'instinct, il rechercha son nécessaire à tabac dans le nœud de sa ceinture... Rien...

« C'est pas vrai... »

Sûrement un coup machiavélique de sa très chère Honoka qui pensait avoir trouvé là le moyen de le faire revenir en arrière. Dommage pour elle, le petit shinigami haussa les épaules en éludant ce problème qu'il résoudrait rapidement une fois de retour dans son bureau. C'est en réajustant son brassard qu'il entama sa marche vers les quartiers de sa division. Juste avant la sortie de la cours de la quatrième division, il croisa l'un de ses collègue. De la deuxième à en juger son brassard. Lui aussi avait l'air d'avoir enduré les affres de la bataille. Il l'interpella, et s'il se souvenait bien de son nom lu dans un rapport d'effectif...

« Uragami-san ? Vous allez bien ? »

L'Ardent ne le connaissant pas vraiment, il avait choisit l'approche la plus spontanée qui soit.

- FINIIIIIIIIII !!!! ♥♥♥

- Boooon ! Ok, si monsieur le prend comme ça, tu peux partir ! Rabat-joie !

Suites aux paroles de son homologue de la deuxième, Haiko ne put s'empêcher de jeter un regard de côté vers les locaux de la division médicale, blasé. Il en était certains, un jour ces infirmières auraient leur peau. Mais après tout, qui pourrait bien leur en vouloir de faire montre d'un peu trop de zèle ? Si ces hommes et femmes n'avaient pas été là, la récente mission aurait été un véritable massacre, une simple mise à mort à grande échelle. Comme tant d'autres, l'Ardent y serait resté... Ses pensées se tournaient de nouveau vers son capitaine. Là, comme une douche froide, une hypothèse terrifiante lui traversa l'esprit. Et s'il ne s'en sortait pas ? Le petit shinigami avait lui-même subit de terribles blessures et même s'il s'était enquit de l'état de son supérieur durant son séjour à la quatrième, il n'avait pu le voir directement. Cet humain, celui-là même qui l'avait envoyé aux frontières de la mort, il s'était défait du capitaine. Ruminer encore une fois cette idée imprima dans son regard une tristesse non dissimulée. C'est alors qu'il répondit à son collègue, l'air éteint.

« A vous aussi, elles vous ont mené la vie dure n'est-ce pas ? »

Ses yeux vinrent fixer ceux de son vis-à-vis. Il tenta un sourire, sans grande conviction. Un geste vain pour essayer de se rassurer. Sa mine s'assombrit de nouveau.

« Moi ? J'arrive enfin à marcher sans trébucher tout les deux pas. Certaines blessures me lancent encore un peu, mais rien de grave. Je m'inquiète surtout pour mon capitaine... »

Et ça, qu'est-ce qu'Uragami pouvait bien y faire ? Rien... Personne, absolument personne n'y pouvait quelque chose. « Encore un » se dit intérieurement le jeune homme en un claquement de langue désabusé. Cela faisait maintenant un moment qu'il tenait les rênes de sa division et il ne voulait pas s'y habituer. La pression émise par certaines maison noble commençait à le fatiguer au plus haut point. Il commençait à comprendre ce qu'avait pu endurer Abarai-senpai et son amie lorsqu'ils se trouvaient à la tête de la division. La présence de Rukia avait tout de même atténué certaines velléités de part son statut. A présent, la sixième se retrouvait sans capitaine, qui plus est sous la direction provisoire d'un roturier en la personne d'Haiko. Avec du recul, on pouvait clairement comprendre que cette situation n'allait pas durer... Du moins, c'est ce qu'espérait l'Ardent qui émergea de sa torpeur.

En remarquant les dossiers que tenait son comparse sous le bras, il se rendit alors compte qu'il n'avait pas eu de nouvelles fraîches depuis un petit bout de temps, si ce n'est la promotion de certains éléments. Ainsi, en tentant tant bien que mal de masquer son amertume, il changea de sujet. Haiko ne voulait pas se remémorer les souvenirs de la bataille de Karakura, pas pour le moment.

« J'ai appris qu'il y avait eu du mouvement au sain de la hiérarchie. Je ne connais pas tout les détails mais, est-ce vrai que Noboru-san à été nommé à la tête de votre division ? »

Haiko n'avait pas vraiment été surpris par la nouvelle. Pour avoir déjà eu l'occasion de se confronter aux deux colosses, il se doutait que le Kenpachi avait dû appuyer sa nomination. Et puis, le Gotei avait bien besoin des hommes et femmes les plus capables de redorer le blason des treize divisions. Il en était également de même vis-à-vis de Yoshiko à la huitième. Ça, il l'avait appris bien après leur petite altercation lors de sa convalescence. Il se demandait d'ailleurs comment Otsu avait réagit à ça. Vu dans quel état il l'avait retrouvé dans cette taverne du Rukongai... Le vice-capitaine se dit aussi qu'il devrait sans doute aller prendre la température auprès de la jeune femme dès qu'il en aurait l'occasion. Il se souvint également d'une autre nomination, à la dixième afin de remplacer le jeune capitaine mort au combat. Encore une fois, le Gotei avait perdu l'une de ses figure les plus emblématique. Quelle tragédie... Concernant le nouveau capitaine, il n'en avait appris davantage. Tout comme le nouveau second de Yakushiji-Taishô. Peut-être pourrait-il en apprendre plus en compagnie de son comparse de la deuxième qui, à en juger par ses documents, s'était déjà remit au travail.

Devant son air imperturbable, Haiko continua pourtant de plus belle.

« Je ne voudrais pas abuser de votre temps Uragami-san, et je me doute du fait que vous ayez sans doute autre chose à faire que de rester ici à discuter. Je dois d'ailleurs moi-même retourner auprès de mes hommes. Toutefois, et si cela ne vous ennuie pas bien entendu, peut-être pourrais-je faire un léger détour en vous accompagnant jusqu'à votre division ? M'écarter de ce bâtiment me ferait le plus grand bien... »

D'un geste de la main, il invita son comparse à diriger la marche. Le bretteur se tenait prêt à lui emboîter le pas, préparant déjà les questions qui lui permettraient de se remettre dans le bain. Il ne doutait pas un seul instant que le vice-capitaine de la seconde division devait être courant de ce qui se passait au Seireitei.

Ce jour-là, je n'avais guère envie de parler. Mes blessures me tourmentaient encore momentanément et j'avais une tonne de travail à faire. Beaucoup plus que je n'en avais lorsque j'étais seul, paradoxalement. Mais je ne sais pas si cela était du au fait d'avoir aujourd'hui un supérieur au dessus de moi, ou si c'était du à tous ces changements qui avaient eu lieu au Seireitei ces derniers temps avec l'arrivée de ces Vizards. En tout cas nous avions du pain sur la planche et de ce fait je n'avais pas le temps de palabrer sur une conversation inutile. D'autant que celle-ci commençait à ne pas me plaire, étant toujours de nature suspicieuse, j'écoutais Haiko qui commençait à poser des questions sur notre division aussi tôt dans la conversation. Pour l'instant il n'y avait pas de quoi fouetter un chat mais si il venait à poser des questions plus pointues, il se retrouverait face au mur impénétrable que je peux être. Bref je le laissais parler et c'était un vrai moulin à paroles, je décidai de ne répondre qu'après ses différentes tirades aux interrogations qu'il m'imposait.


- Oui enfin, elle me mène la vie dure mais elle a bon fond et sans elle je ne serais plus là pour vous parler aujourd'hui. En ce qui concerne votre capitaine, j'ai entendu dire qu'il était très mal en point et risquait de ne pas survivre, c'est malheureux pour vous. Mais n'est-ce pas là une occasion de demander une promotion?


Je posais cette question afin de le connaitre un peu mieux. Si Shima Masaru-taishô venait à ne pas survivre à ses blessures, il était bon d'analyser le potentiel futur taishô en avant-première. Mais je m'avançais peut-être un peu trop, j'étais moi même resté vice-capitaine sans supérieur au dessus de moi pendant pas mal de temps. C'était également le cas de l'ex vice-capitaine Izuru Kira ainsi que Shuhei Hisagi. Bref, je n'aimais pas qu'on pose des questions sur ma division, aussi inoffensives qu'elles puissent être, j'étais bien placé pour savoir que des questions, même banales, pouvaient avoir un objectif précis. J'utilisais souvent cette technique qui avait portée ses fruits à de nombreuses reprises. Je répondis donc le plus brièvement possible sans donner le moindre détail. Si ses intentions n'étaient pas bonnes, il chercherait à en savoir plus par des manières détournées que je ne manquerais pas de relever.


- C'est tout à fait vrai. N'importe qui aurait pu vous l'apprendre. Vous êtes vice-capitaine et vous n'étiez pas sur de cette information? Vous devriez vous tenir plus aux faits.


"Au lieu de batifoler avec des infirmières..." avais-je eu envie d'ajouter, mais je me retins. Après tout, il ne m'avait rien fait pour l'instant, je n'avais donc pas de raison d'être désagréable envers lui. Je me rendis alors compte que j'avais sans doute été un peu froid envers lui qui était relativement aimable. N'aimant pas les injustices, je décidai de m'excuser pour le ton parfois glacial et maladroit que je peux prendre.


- Je vous prie de m'excuser, je suis parfois un peu désagréable. J'ai pas mal de travail ces temps-ci avec tous ces changements qui ont lieu. Ne le prenez surtout pas mal c'est nullement intentionnel.


Suite à cela, comment allais-je lui annoncer que je ne retournais pas dans mes quartiers car j'avais déjà pris tout ce dont j'avais besoin pour ne pas faire de détour? Il risquait de mal le prendre et croire que je cherchais à me débarrasser de lui. Dans le fond ce n'était pas totalement faux car je n'aimais pas que l'on me suive comme une ombre, mes destinations ne concernant que mon capitaine et moi. Je dus donc sacrifier un peu de mon précieux temps à continuer la discussion avec lui.


- Excusez-moi encore mais je ne retourne pas à ma division tout de suite, j'ai certains rapports à porter comme vous le voyez là, dis-je en désignant mes papiers d'un signe de tête. Mais je peux continuer à discuter ici encore un peu si vous le souhaitez. Cependant, n'avez-vous pas des choses à faire Kaogake-fukutaishô?

Une occasion de demander une promotion ? Le visage du vice-capitaine s'assombrit brusquement. Autant planter un poignard dans le dos de son capitaine déjà mourant. Haiko n'avait clairement pas apprécié cette dernière question. A moins que cela ne soit un sarcasme, auquel cas son homologue de la deuxième ne faisait pas vraiment une première bonne impression. En ces temps difficiles, une simple réponse positive de l'Ardent aurait pu passer pour une usurpation. Est-ce que l'homme en face de lui le provoquait ? Peu probable. Celui-ci avait visiblement été marqué par la dernière mission en date et cela expliquait sans doute son comportement quelque peu... sec disons. Même sans ça, les shinigamis de la seconde division n'étaient pas vraiment réputés pour leur côté loquace.

Là où Haiko pensait entamer une conversation des plus légère, l'attitude sur la défensive de son interlocuteur le prit à contre pieds. Il ne s'attendait vraiment pas à ça. La deuxième remarque de son comparse, frôlant la remontrance, lui arracha un lourd soupir désabusé. Rester cloîtré dans un lit n'était pas vraiment la meilleur des façon pour se « tenir plus au faits ». Il se rendait bien compte qu'il n'était pas vraiment tombé sur la bonne personne avec qui tailler le bout de gras. Pour un peu, le vice-capitaine aurait préféré rebrousser chemin pour s'en retourner auprès de sa machiavélique infirmière. Peu envisageable... Non, il préférait penser à Noboru, lui qui allait devoir commander une troupe d'assassins et d'espions. Ça lui changerait de la onzième !

Uragami continua en se fendant d'une excuse qu'Haiko accepta d'un signe de tête compatissant. Après tout, n'avait-il pas lui-même été une plaie pour les membres de la quatrième au cours de sa première semaine de soin ? Il comprenait parfaitement son homologue, même si celui-ci semblait faire montre d'un zèle presque... dérangeant. La présence de l'Ardent le dérangeait, sinon pourquoi une telle question. Haiko devait l'avouer, son comparse ne le mettait pas vraiment à l'aise et à vrai dire, il ne se sentait pas vraiment en état pour en faire autant à son égard. Son professionnalisme était louable, mais en son fort intérieur, le vice-capitaine de la sixième savait qu'il n'avait pas choisit le bon moment pour l'aborder.

Qu'il en soit donc ainsi. S'armant de nouveau d'une mine plus décontracté, Haiko s'écarta légèrement du chemin de son compatriote.

« Oh non, ne vous embêtez pas pour moi. Je ne voudrais pas interférer dans vos affaires, Vice-capitaine Akucho... Je dois moi-même aller retrouver mes hommes. »

Il le laissa alors passer en se dirigeant vers le côté opposé, vers les quartiers de la sixième division.

« Prenez soin de vous et ne vous surmenez pas trop « cher collègue »... A trop travailler, on en oublie parfois les choses les plus simple. Uh uh... »

Dit-il enfin en ricanant doucement. Son ton léger, presque moqueur, n'avait pourtant rien de médisant. Comme il se plaisait à la faire avec ses hommes prenant parfois trop à cœur leurs entraînements et autres assignations. Une pointe d’insouciance ne faisait pas de mal de temps en temps. Il se disait d'ailleurs qu'Uragami en aurait bien besoin. Sans se retourner, il le salua d'un signe de la main avant de s'en aller au loin, vers ses responsabilités...

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