- Je ne supporte pas cette ville !

La phrase avait été balancée sur un ton monocorde, prouvant la lassitude qu'il éprouvait à cet instant précis. Posté sur le toit d'un bâtiment, El Emperador contemplait la ville qui se dressait sous ses yeux. Et le spectacle ne lui plaisait décidément pas. Il avait vu tellement de lieux depuis son arrivée sur terre, tellement de merveilles, qu'il ne comprenait pas pourquoi toutes les âmes possédant un minimum de pouvoir se complaisaient ici. Karakura était une véritable verrue sur la face du monde, une verrue qu'il comptait bien éradiquer lorsqu'il prendrait enfin ses fonctions de régent. Et pour arranger le tout, les Shinigamis et autres créatures de ce type pullulaient un peu partout par ici, rappelant étrangement au blondinet cet autre animal que les hommes appelaient des "rats". Ne pouvant se permettre d'être repéré trop facilement, Borick avait évidemment masqué son reaitsu. Il aurait été grandement préjudiciable de devoir affronter des moins que rien sous prétexte qu'il était Arrancar.

Bien qu'il soit invisible aux yeux de ces mortels, il savait qu'il ne pouvait se permettre de rester trop longtemps sur ce toit. Une âme possédant un minimum de pouvoir pouvait l'apercevoir et il préférait éviter cela. De toute façon, l'envie de se mêler à cette foule venait de le prendre. Poussant un petit soupir, le blondinet se jeta dans les airs pour retomber avec grâce sur le sol, remettant en place d'un simple geste de la main les quelques mèches qui lui étaient tombées devant le visage. Puis, non sans avoir remis ses mains dans les poches, il entreprit de marcher tout droit.

Sa curiosité était telle qu'il s'arrêtait parfois pour écouter telle discussion, pour observer telle bagarre. Il trouvait vraiment ces hommes et ces femmes captivants, se délectant des notes et constatations qu'il tirait de ces différentes observations. Pour diriger en Seigneur, on se devait de connaître le peuple. Une philosophie que n'avait jamais appliquée Fou-Lu. Une grossière erreur aux yeux de celui qui se croyait supérieur à son propre maître. Au détour d'une rue, quelques artistes faisaient leur spectacle, attirant la foule alentours qui prenait plaisir à les observer. Jongleurs, peintres, clowns. Tout ceci n'était rien aux yeux du Fraccion. Et il aurait rapidement passé son chemin si d'autres artistes n'avaient pas attirés son attention. Se rapprochant de ces deux personnes, il observait leur numéro avec bonne humeur. Des cracheurs de feu... Voilà ce qu'il avait face à lui. Intéressant en réalité. Captivant même.

- Je ne comprendrais jamais la fascination des hommes pour le feu...

Une réflexion pour lui-même. Mais prononcée à voix haute.

Pour une raison qui ne regarde que lui, Koshiro a besoin de chaînes... Du genre solides quoi ! Le genre de truc qui ferait qu'on lui poserait forcément des questions s'il tentait d'en obtenir sur le commerce par un marché légal. Et bon, c'est pas trop son registre en plus... Lui est plutôt du genre à magouiller dans le marché de substances psychotropes, qu'il fait venir par bateau en le camouflant derrière une compagnie de thé au nom de l'un des troufions qui bossent pour lui. Une planque correcte, suffisante pour l'instant, mais qui risquerait de ne pas suffire si jamais la brigade des stupéfiants décidait d'enquêter sur lui... Ce qui n'arriverait que s'il tentait d'écouler de trop grosses quantités... Enfin, tout cela n'est clairement pas à l'ordre du jour ! Les chaînes, c'est tout ce à quoi il pense, tout ce dont il a besoin en cet instant. Et ça tombe bien, le Jimushi a entendu parler d'un cirque itinérant ! Avec un peu de chance, il pourra peut-être y piquer de quoi faire son bonheur...

Mais une fois sur place, c'est la désillusion. À première vue, pas d'animaux. Enfin, c'était un peu con d'avoir espéré voir des fauves ou des éléphants, certes... Mais... Ouais, Koshiro peut être con à ce point, nourrissant ainsi des espoirs irréalistes. Et cela va plus loin même, puisqu'il continue à fouiller les environs alors qu'il parait évident qu'il n'y se trouve pas d'animaux. Comme si derrière ces cracheurs de feu – peuh ! amateurs ! – qu'il voyait là, il pourrait tomber sur un pachyderme, soudainement... Légèrement irrité par sa recherche foireuse, il n'hésite pas à réagir à l'expression d'ennui d'un des badauds.

J't'accorde que c'est naze, mais qu'est-ce tu branles là alors ? Allez, reste pas dans l'chemin, Boucles d'or !

N'empêche, il a une sensation bizarre dans les tripes, vis-à-vis de ce type qui adoptait un style vestimentaire vraiment particulier... Une sensation qu'il pourrait reconnaître si seulement il prenait attention à ce genre de choses. La même chose s'était passée lorsqu'il avait rencontré les possesseurs de pouvoir de Karakura, mais il ne l'avait alors pas réalisé. Et même ici après cette courte expérience amassée durant ces trois rencontres, il ne parvient toujours pas à identifier d'où ça peut lui venir... Alors qu'il n'avait pas cessé son pas, il se stoppe et se retourne soudainement sur le blondinet.

Dis-moi... on se s'rait pas d'jà vu quelque part ?

Comme si cela ne pouvait être qu'une simple impression de déjà-vu...

Ces humains étaient réellement fascinants. Voilà qu’un nouvel individu était capable de le voir et de l’entendre, prenant même le parti de lui répondre alors que l’Empereur ne s’était évidemment jamais adressé à lui. Boucle d’or ? Voilà une expression peu courante qui amusait le Fraccion. La légende qui concernait Karakura semblait en tout cas véridique : il s’agissait d’un véritable aimant pour ce genre de personnes, ceux possédant une puissance spirituelle plus développée que la normale. En d’autres circonstances, nul doute qu’il aurait pris plaisir à châtier le malheureux qui s’était ainsi adressé à lui. Mais voilà, en venant sur Terre, Borick savait qu’il ne pouvait se permettre d’attirer trop l’attention sur lui. Être repéré trop rapidement par le Gotei l’obligerait à quitter séance tenante la ville et ce n’est pas ce qu’il souhaitait.

De toute façon, l’homme venait de s’arrêter pour s’adresser de nouveau à lui. Lui adressant un petit sourire, Borick entreprit de faire plusieurs pas dans sa direction, non sans remettre en place l’une de ses mèches blondes qui lui tombaient devant les yeux. S’arrêtant tout de même à distance raisonnable, il posa sa main sur le manche de son Zanpakutô. Il ne s’agissait en rien d’une menace toutefois, seulement d’une habitude qu’il avait et qui lui donnait un port plus noble. Les apparences étaient si importantes pour lui qu’il agissait ainsi par réflexe maintenant.

- J’en doute, humain. Il n’est pas donné à tout le monde de rencontrer l’Empereur du Hueco Mundo après tout. Mais je vais y remédier. Je suis Borick « El Emperador ». Je suppose que tu as un nom également ?

Qu’un insecte puisse parler à El Emperador, voilà un privilège qu’il n’accordait pas à tous. Mais que cet homme se présente était la moindre des choses pour lui. Le respect de l’étiquette étant trop important selon ses propres critères, il paraissait logique qu’il se nomme dans les règles de l’art. Bien sûr, le blondinet comprendrait que l’humain ne le fasse pas. Ils étaient si présomptueux et arrogants. Si « humains » en quelque sorte. Mais en un sens, c’était aussi cette liberté de pensée qui lui plaisait.

- Pourquoi crois-tu m’avoir déjà rencontré ?

Une question directe mais qui permettrait à Borick de mieux cerner le personnage. Soit il avait déjà rencontré un Arrancar, soit il ne comprenait pas ce qu’il percevait. L’un dans l’autre, la réponse pourrait être intéressante.

Ouais ! Moi, c'est Koshiro !

Dit-il en pointant le pouce vers son torse, comme si tout ce qui avait pu être dit avant n'avait pas la moindre importance. Ou juste qu'il n'a pas encore tout bien réalisé... Et puis finalement, la pièce tombe. Un déclic. Déjà, le type se trimbale avec un sabre, ce qui est loin d'être commun. Et puis, il vient de le désigner sous le nom « d'humain ». Hé, mais c'est lui qui insulte ces êtres inutiles de « simples humains » d'habitude ! Enfin soit, pas la peine de faire un scandale sur ce point, il sent qu'il y a un point bien plus important sur lequel percuter là. Et tout doucement, les pièces s'assemblent. Un sabre. Les fringues chelous. Le fait qu'on le regarde bizarre, comme s'il parlait tout seul. Le Hueco-machin... Mais c'est bien sûr !

Oh mais j'y suis ! Y m'semblait bien qu'j'avais déjà entendu parler d'ça, la nana m'en a causé d'ton Hueco Mucho là ! Alors comme ça, t'es un croque-mitaine Bourrique ?

Dans sa vision très simpliste des choses, les Hollows qui venaient se nourrir des humains n'étaient pas autre chose que des « monstres dans le placard ». Il avait vu Imari en buter une petite panoplie avec une certaine aisance, et il avait même pu quant à lui en capturer un sans trop de mal. Raison pour laquelle il a d'ailleurs présentement besoin de chaînes, histoire de s'éviter des ennuis lorsqu'il finirait par sortir de sa chrysalide. Enfin soit. Celui qu'il avait devant lui avait une apparence humaine. D'après la gonzesse, ça veut dire qu'il est fort, car seuls les Arrancars et les Vasto trucs se présentent sous cette forme. Voilà un point qu'il a au moins essayé de retenir.

Il tire alors quelques bouffées sur son cigare, tout en pesant quelque peu la situation. Le combat est à exclure, du moins en cet endroit. Beaucoup trop de témoins à liquider... D'autant qu'il serait le seul des deux opposants à pouvoir être vu. Et puis, difficile de faire croire que c'est juste le spectacle de cracheurs de feu qui a mal tourné... Koshiro peut parfois être bien stupide, mais même la connerie humaine peut avoir ses limites. Enfin, la sienne du moins. C'est la poisse... Et dire qu'il a capturé un Hollow juste pour le forcer à se transformer dans le but d'affronter un Arrancar, voilà qu'il en a un juste devant les yeux et qu'il ne peut même pas s'y confronter. Il fourre ses mains dans ses poches et les y laisse. Sa dextre enferme son briquet à essence. Il préfère ne pas y avoir recours ici, mais il n'en aura peut-être pas le choix. Il sourit un instant avant de répondre en baissant le ton, comme si parler moins fort allait éviter que les passants ne lui accordent de regards en coin...

Juste une impression. Un truc dans l'bide, t'vois l'genre. Mais j'dois m'planter, ouais... Jamais croisé d'Emp'reur moi. Oh, j'ai bien déjà croisé le Roi des cons, mais il en est mort ! Dis-moi, Boris, c't'une bonne situation ça, Emp'reur ?

La moquerie va peut-être un peu trop loin... Mais l'incendiaire a bien trop de mal à se fermer sa grande gueule que pour être capable de se retenir... Déjà il a réussi à faire l'impasse sur le « ouais, j'croyais t'avoir déjà vu, juste avant d'tirer la chasse ! » mais là c'était sûr que le carnage n'aurait plus pu être évité... Espérons que le type ne manque lui non plus pas d'humour.

Le Hueco Mundo semblait être au cœur de bien des discussions en vérité et cela n'était pas réellement une bonne nouvelle aux yeux du Fraccion de Fou-Lu. Car il était bien évident qu'on ne parlait pas du monde des Hollows pour en vanter le climat. Contrairement à la terre, les décors étaient peu diversifiés et surtout, les Arrancars et autres créatures de ce style n'étaient pas réputés pour être de grands amis de la paix. Ainsi, la suspicion régnait en maître lorsque le blondinet rencontrait les autochtones de ce monde. Et ces fous avaient généralement tendance à voir le mal dans tout ce qu'il pouvait dire. Au final, il ne s'en formalisait pas réellement. Mais il se demandait ce que cet homme avait pu entendre. Et surtout, qui était donc la femme dont il parlait et qui semblait l'avoir briefé sur le "Hueco Mucho", comme il le disait si bien. Ne même pas être capable de retenir un nom qu'il venait d'entendre, voilà qui était généralement synonyme de débilité profonde.

Enfin... Ce n'était qu'un détail aux yeux du blondinet qui de toute façon n'avait pas grand-chose à faire d'autres que de s'entretenir avec l'animal qui se trouvait face à lui. Rustre, il l'était. Mais généralement, c'était ce qui pimentait les discussions. Même si El Emperador n'était pas un fan absolu des discours qui dégénéraient, surtout lorsque la répartie adverse approchait du néant. Quant aux sensations qu'il décrivait, il devinait aisément de quoi il s'agissait. La perception des autres prenait bien des formes mais cette sensation restait commune à tous. Surtout au début.

- Prête attention à ce que je te dis, humain ! Je suis Borick... Véritable dirigeant de Las Noches, bien que j'aime ne rien montrer de ma condition réelle.

Comme dirait son cher frère, Dark, essayer d'expliquer quelque chose à cette brute, c'était comme de pisser dans un violon. Une expression très humaine s'il en est et qui faisait sourire El Emperador. Mais dans le cas présent, c'était plus de l'agacement que du plaisir qu'il ressentait. La notion de respect était quelque chose de si importante à ses yeux qu'il punissait d'ordinaire ceux ne montrant aucune déférence à son égard. Mais dans le cas présent, il sentait bien qu'il n'obtiendrait pas ce respect le plus élémentaire.

- Et pour te répondre, il s'agit en effet d'une excellente situation.

Tout en parlant, il venait de replacer ses mèches en place, découvrant un court instant la partie de masque brisée qui se trouvait sur son visage, au niveau de sa tempe droite. Très peu visible, il avait tendance à cacher ce qu'il considérait comme une monstruosité, un rappel permanent de sa condition primitive. Une condition qu'il avait toujours cherché à fuir, faisant de lui l'homme qu'il était devenu. Sûr de lui, impérieux, parfois même arrogant. Mais un Empereur ne pouvait se satisfaire du strict minimum. Et la larve qui se trouvait face à lui ne pourrait certainement jamais comprendre ce fait.

- Tu sembles connaître mon monde sans réellement comprendre ce que je suis... Tu es un humain bien étrange. Crois-tu que chuchoter ainsi empêchera ces insectes de te prendre pour un fou ?

Spoiler:

Oh mais c'est qu'il est susceptible celui-ci... Bourrique, Boris, Borick... tout ça, c'était du pareil au même, non ? Il n'a qu'à pas avoir un nom aussi bizarre aussi ! Quelle idée de s'appeler Borick, très franchement ? Un Empereur avait quand même lui droit de choisir le nom sous lequel il serait connu... Alors pourquoi garder... un truc pareil ? Koshiro lui ne fait que froncer les sourcils, marquant son incompréhension de vouloir à tout prix rectifier un nom comme celui-ci... Se frottant l'arrière du crâne de la main droite, prenant un air faussement gêné, il risposte.

Ok Ok, y a pas d'offense Bo... J'peux t'appeler Bobo ? Comme ça au moins, j'suis sûr de pas m'planter, ouais ! Ahah ! T'inquiète, je pige que tu préfères passer incognito, les photographes, les journalistes, tout l'bordel... Ça doit pas être simple d'ach'ter son pain tranquille quand on fait partie du Gotha, hein ?

Sur cette tirade son volume sonore en est revenu à ce qu'il est habituellement : fort, de sa voix grave et grinçante de nicotine. Mais il se reprend sur la suite, adoptant derechef la voix basse.

'scuse... j'suis pas discret, j'sais... Au fait, c'est quoi Last Nochesse ? On dirait un groupe de manouches... J'y suis, c'ta couverture, c'est ça ? Mais d'où c'que t'as planqué ta guitare ?! Ah-Ahah !

Pas sûr que ça peut désormais détendre l'atmosphère, mais il n'a pas mieux en registre de toute manière. Un reste de masque perceptible un instant sur son front alors qu'il tente de discipliner une mèche rebelle. Ainsi, plus de doute, c'est bien un de ces trucs dont Imari lui a parlé. Quelle poisse d'être ainsi entouré, ne pouvant alors pas tester sa puissance. Mais ce qui le choque plus encore, c'est la réponse suivante... Ah mais c'est qu'il avait pas tort le type ! Le Jimushi jette un regard aux alentours, remarquant que quelques passants ont le regard braqué sur lui, que certains chuchotent même sur son compte. « Teuh ! Teuh ! » crie-t-il dans leur direction en tapant du pied sur le sol, comme on le ferait pour effrayer n'importe quel quadrupède domestique. Peu convaincant...

On n'a qu'à aller dans un coin plus tranquille...

Poursuit-il en chuchotant.

J'sais où on peut trouver de quoi se calciner la tronche, j'suis sûr que ça t'plaira !

Fait-il référence à un alcool quelconque ? Pas si sûr... Sans attendre son consentement, l'incendiaire tourne les talons et s'en va, comme s'il avait oublié même la raison de sa venue première ici... Mais avant de s'éclipser totalement, il ne manque pas de se retourner vers les cracheurs de feu bon marché...

Amateuuuuuuurs ! Touriiiiiiiistes ! Saloperies d'blanc-beeeeecs !

Aaaah, ça fait du bien !

Bobo ? Là, il dépassait clairement les bornes. Aux yeux du blondinet, il n'existait rien de pire que l'irrespect. Et cette brute manquait vraiment d'éducation. Généralement, El Emperador ne laissait pas passer ce genre de comportement et ce n'était pas aujourd'hui qu'il changerait les habitudes qui étaient les siennes. Le visage angélique de Borick s'était peu à peu fermé alors que l'autre gorille continuait de l'ouvrir. Il risquait très prochainement de l'aider à la fermer à ce rythme. Quant à sa remarque concernant des manouches, le Fraccion devait admettre ne pas saisir le sens réel de la comparaison. Le monde des humains et ses particularités lui étaient encore trop étrangers pour qu'il parvienne à remettre toutes les expressions dans leur contexte.

Gardant le silence pour le moment, il écoutait l'animal parler et s'amuser avec ses congénères. Les Arrancars de Las Noches avaient beau dire, il n'y avait rien de mieux que d'étudier la faune sauvage dans son milieu naturel. Et pour une fois, il avait face à lui un spécimen plutôt impressionnant. Alors que ce dernier s'éclipsait enfin, l'invitant à le rejoindre, Borick ne se fit pas prier. Cette fois avec une idée très précise derrière la tête. Les humains étaient tous des enfants qu'il fallait éduquer. Et s'il comptait le faire lorsqu'il prendrait le pouvoir par ici, il pouvait bien s'accorder un peu d'avance avec lui.

En quelques instants, il arrivait à l'endroit mentionné par Koshiro. Observer le terrain en lui-même n'était même pas la priorité de l'Empereur, tant et si bien qu'il restait seulement fixé sur ce tas de muscles. Son sourire mesquin était toutefois revenu sur son visage. Maintenant, il allait pouvoir s'amuser un peu. Sûr de lui, il ne sortit qu'une main de sa poche, la droite, et claqua une fois des doigts en murmurant le nom de sa technique.

- Servidor !

La pression spirituelle de Borick se fit enfin sentir, lui qui avait tendance à camoufler sa présence en permanence. Cette fois, puisqu'il comptait partir rapidement à Las Noches, il n'avait plus aucune raison de ne pas aider Koshiro à se rappeler de son nom. Même si c'était très certainement une perte de temps. Un animal ne retenait d'ordinaire que son propre prénom. Ce qui était déjà un exploit. Quoi qu'il en soit, l'effet de sa technique se faisait déjà ressentir. Le ciel semblait se déchirer, ouvrant un passage entre les deux mondes et laissant apparaître une créature gigantesque, plus communément appelé Menos Grande. Le cri caractéristique du Gillian résonnait déjà au travers de la ville tandis qu'il ouvrait ce qui lui servait de bouche. Un bonjour très spécial en réalité. Car la sphère brunâtre qui apparut était très clairement un Cero. Cero qui se précipitait déjà sur l'humain.

Et pendant ce temps, El Emperador ne faisait qu'observer. Un véritable dirigeant ne se mêlait pas de combats qu'il jugeait indigne de sa personne. Que cet être s'amuse avec ses serviteurs était déjà un cadeau.

Spoiler:

Voilà~ ! On y est Bobo !

Ses bras sont écartés comme pour faire état du côté « génial » du coin. L'on ne peut pas réellement dire que ce soit le cas. Un terrain vague à l'écart de la ville. Rien de bien fantastique, en dehors du fait qu'il ne s'agit clairement pas d'une zone de passage. Pas le moment que des péquenauds viennent se foutre dans leurs pattes. Ici au moins, on arrêterait de le regarder de travers comme s'il était juste cinglé. Bon, de fait, il l'est, mais quand même... Pas encore au point de se faire la conversation tout seul !

On s'ra déjà plus tranquilles ! Surtout si j'veux voir c'que t'as dans l-

Le blondinet lève un main et claque des doigts, l'interrompant comme s'il désire attirer son attention. Koshiro se rend rapidement compte qu'il ne s'agit pas que de cela... Ce qu'il dit, il y pige pas grand chose dans un premier temps – se disant même que c'est peut-être là le nom de l'une de ses chansons – avant de pouvoir constater de ses yeux qu'il est bien loin de la vérité. Un trou noir bien plus haut que ce qu'il a pu voir lorsqu'il n'en voyait que de simples Hollows sortir. Là, c'est plus comme si l'horizon n'est plus qu'un rideau se pliant pour laisser apparaître... ça ! Ce truc là. Ah ça, la gonzesse ne lui en a pas parlé, il s'en souviendrait sinon ! Un truc de cette taille, c'est certain, il n'y en a pas eu une seule mention. De la taille d'un gratte-ciel, ce machin ouvre la bouche, en laissant sortir un cri grave et allongé. Mais pas seulement... En voyant l'orbe d'énergie s'y accumuler, le Jimushi prend pour réflexe de faire tomber sa lourde veste d'un mouvement d'épaules, alors qu'elle n'y était que posée. Une grosse bouffée sur son cigare – peut-être la dernière, qui sait ? Il veut voir de quoi ce truc est fait ! Si c'est aussi balèze que ça en a l'air. L'incendiaire est toujours désireux de se tester, pas pour rien qu'il a emmené Bobo à l'écart. Il n'esquivera pas... Un rayon carmin qui se lance à sa rencontre. Lui ne fait que se préparer à frapper... Un lourd revers du poing droit qui l'envoie alors valser une vingtaine de mètres plus loin dans une explosion notable. Son poing est légèrement fumant, mais il n'y a là finalement rien pour l'impression. Son sourire – qui ne l'a pas réellement quitté jusque là même si quelque peu rétréci – s'allonge derechef. Finalement, pas de quoi s'inquiéter, pas vrai ?

Jusque là, ça m'plait, ouais ! Et maint'nant voyons voir...

Highway...

D'un Bringer Light très rapide il se retrouve devant le masque grotesque, ses deux bras se tendant soudainement droits devant lui pour frapper.

...to Hell !

Un coup sans doute démesuré, mais comment peut-il le savoir avant même d'avoir essayé ? Le masque explose, la bestiole disparaît alors rapidement en poussière. Moqueur, sa voix grinçante se fait alors de nouveau entendre.

Bye bye Pinocchio ! Huahahaha !

Et mec, t'en as d'autres des comme ça ? J'suis pas sûr d'avoir eu l'temps d'bien m'échauffer là !

Cette dernière phrase a bien entendu été décochée à Borick tandis que son regard s'est lancé vers l'Empereur resté au sol. Évidemment, son sourire est aussi large qu'il peut l'être, fier de sa démonstration qu'il est...

D'abord étonné, Borick n'en montrait toutefois aucun signe, restant aussi calme qu'il pouvait l'être d'ordinaire. Il est vrai que les Menos n'étaient pas les créatures les plus puissantes du Hueco Mundo, pourtant elles possédaient suffisamment de force pour résister aux attaques de Shinigamis entraînés. Alors quelle surprise de voir un simple mortel - une brute sans cervelle qui plus est - en détruire un sous ses yeux sans même réellement forcer. Quant au Cero envoyé précédemment, il avait été simplement repoussé d'un coup de poing. Voilà qui n'était pas courant. El Emperador ne l'avait pas pris très au sérieux jusque-là mais maintenant, il se devait de reconsidérer son point de vue. En bon analyste qu'il était, le blondinet savait que la puissance du coup de Koshiro aurait brisé plus qu'un simple Gillian. Garder ses distances devenait désormais primordiale.

Ce qui ne l'empêchait pas de répondre aux provocations de l'humain avec un petit sourire. Il est vrai qu'il pouvait être fier de son petit exploit mais pensait-il réellement pouvoir tenir cette cadence encore longtemps ? Une petite expérience s'imposait de fait.

- D'autres ? Mais très certainement, humain. Je n'en manque pas dans l'armée qui est la mienne. Mais ne présume pas trop de tes forces... Ce simple Cero n'était rien.

Et sur ce point, Borick n'exagérait absolument pas. Ses talents dans ce domaine très précis surpassait même la totalité des autres Espada, ou peu s'en faut. Lui qui négligeait totalement l'apport offensif qu'apportait la libération de la Resureccion, il avait trouvé un substitut parfait. Le reiatsu de l'Empereur formait de nouveau le passage indispensable à l'apparition de ces Menos. Deux nouvelles portes se formaient dans le ciel, l'une à côté de l'autre, tandis que deux Gillians en sortaient. Koshiro avait appelé la précédente créature "Pinocchio"... Un terme parfaitement inconnu pour celui qui se voulait si curieux de la terre.

Mais cette fois, même si sa position n'avait toujours pas bougé, Borick était plus attentif que jamais. Car si l'apparition d'un Menos pouvait déjà attirer l'attention de bien des âmes à pouvoirs dans le coin, ces deux-là ne laissaient aucun doute à l'Arrancar. Très rapidement, des Shinigamis risquaient de débouler par ici et il ne pouvait se permettre de perdre du temps avec eux. Le retour à Las Noches n'avait déjà que trop tardé.

- Servidor : Duplicado Cero !!

Deux nouvelles sphères rougeâtres se formaient... Mais cette fois, ces deux Cero se mêleraient l'un à l'autre pour rendre l'attaque plus redoutable encore que jamais. Si le Jimushi s'attendait à un assaut de la même ampleur que la précédente, il risquait d'être surprit. L'attaque fut lancée en simultanée. Toujours sous le regard attentif d'El Emperador.

Oh que oui il en a d'autres ! Ah ça, c'est sûr, Bobo ne perd pas de temps pour lui en faire la preuve. Une petite mise en garde tout d'abord, à laquelle Koshiro ne prête pas grande importance. Est-ce que le prochain coup serait réellement bien plus redoutable que ce qu'il venait de voir ? Bah, il suffit d'attendre encore un peu pour pouvoir réellement s'en rendre compte. En effet, deux portails similaires au précédent s'ouvrent pour laisser voir autant de nouvelles créatures. Jusque là, rien de bien inquiétant, il a pu constater qu'il dispose des capacités pour en venir à bout. Sauf que... Chacun d'entre eux concentra son énergie en ce que l'Arrancar venait d'appeler un Cero. S'il a pu en détourner un avec facilité, la tâche ne sera certainement pas la même ici alors qu'il allait avoir affaire à deux de ces traits d'énergie. C'est là qu'il fait erreur... Car si chacun d'eux tire en effet un Cero, à l'arrivée c'est un seul et unique tir concentré dont il doit se défaire. La même technique allait-elle pouvoir fonctionner ? Ce ne serait certainement pas aussi simple.

Ainsi, flottant toujours dans les airs, il va pouvoir se mesurer à cette offensive. Il joint ses paumes, entrelace ses doigts. Il élève le tout au dessus de sa tête comme s'il s'agissait d'une masse. Concentre son énergie spirituelle dans ses bras comme pour toute frappe de puissance, tentant de s'élever là au niveau de son Highway to Hell. Prendre cela à la rigolade ne pourrait que lui causer de lourds ennuis... Mais il tente tout de même le coup, n'ayant pas une once de pressentiment. « Advienne que pourra », n'est-ce pas ? Puis sa frappe finalement lorsque le tir d'énergie est à portée. Comme précédemment, celui-ci est dévié, envoyé vers le sol où il s'écrase dans une lourde explosion. Le choc est si important que lui-même est projeté en sens inverse. Il ne s'en est pas sorti indemne. Ses bras et son torse sont fumants. Il pourrait même en entendre grésiller la peau de ses mains si seulement le bruit de l'explosion ne lui avait pas provoqué un acouphène. C'est douloureux, mais il survivra. Cela ne s'est pas joué à grand chose qu'il ne parvienne pas à dévier une telle puissance. Borick l'avait dit et cela se confirmait : cela n'avait rien à voir avec la première tentative...

Il doit cependant toujours s'occuper de ces créatures qu'il a lui-même réclamées. Aussi fonce-t-il sur le premier sans attendre. Mieux valait ne pas leur laisser l'occasion de réitérer. Alors, il se pose sur le sommet du masque du premier et commence à l'enchaîner lourdement. Des frappes simples mais terriblement puissantes. Le masque au nez allongé se fissure peu à peu, mais avant que la créature ne s'affaisse, une lueur inquiétante attire son attention. Un nouveau Cero, de la part du second monstre. D'un Bringer Light il se déplace alors sans avoir lui-même terminé le travail. Ce tir d'énergie allait parfaitement remplir la mission à sa place. Pour le second... Une lourde frappe des deux poings, comme il l'avait fait pour détourner le tir un peu plus tôt. Il est obligé de serrer les dents lorsque la douleur se ravive avec fulgurance. Mais là, il a le temps de l'achever, même si désormais il est essoufflé. Il ne va plus autant fanfaronner à présent... Il préfère éviter d'en avoir d'autres comme ça sur le dos.

Le Jimushi ne se retourne alors même pas vers Borick, ne cherche pas à le dépister du regard. En vérité, il pourrait ne plus être là que Koshiro ne l'aurait même pas remarqué...

Sont pas mal tes larbins... mais qu'est-ce tu vaux toi ? Vaudrait mieux qu'on en finisse et vite... Avec le boxon qu'tu viens d'foutre, m'étonnerait pas qu'la brigade tarde pas à débarquer...

En parlant de la brigade, il fait bien entendu référence à l'organisation dont il a pu entendre parler. Car même s'ils s'étaient retirés hors de la ville, le grabuge causé ici ne pourrait sans doute que se faire remarquer... S'ils devaient s'affronter, c'était maintenant, avant que d'autres ne viennent y fourrer leur nez dans leurs affaires...

Comment il allait s'en tirer, Borick ne pouvait pas réellement le deviner. Toutefois, vu ce que l'autre avait déjà démontré, il ne doutait pas un seul instant qu'il puisse survivre à cette petite confrontation, même si ce double Cero ne serait pas aussi facilement contournable que le premier. Mais c'était précisément là-dessus que l'Empereur comptait pour surprendre l’humain. Sans doute que ce dernier souhaiterait se confronter à lui une fois les deux Menos explosés mais le blondinet ne comptait pas lui donner satisfaction aujourd'hui. Il ne s'agissait ici que d'un petit test, afin de faire comprendre à Koshiro que l’on ne se moquait pas impunément de lui.

C'est pourquoi, alors que le souffle de l'explosion balayait tout sur son passage, Borick se détournait de lui pour ouvrir un nouveau passage. Le Gargantua était indispensable maintenant, surtout après avoir invoqué ici trois Menos Grande. Il s'était finalement laissé un peu aller avec eux mais on ne changeait pas le caractère impétueux d'un souverain. Il regrettait toutefois une petite chose : ne pas pouvoir lui enseigner le savoir-vivre en personne. Mais il y a des moments où il faut savoir partir. Et Borick était précisément dans ce cas de figure.

Le passage ouvert, il l'empruntait sans même se retourner. Koshiro... Voilà un nom qu'il n'oublierait pas de sitôt. Et il espérait - sans grande conviction toutefois- qu'il en soit ainsi pour l'humain également. Car la prochaine fois qu'il le croiserait, ce serait terminé pour sa misérable vie.